Vies sous occupation : ça fait plus de cinq ans que je n’ai pas vu mon fils
vendredi 30 novembre 2012 - 05h:00
PCHR Gaza
Ne pas être autorisé à voir un membre de la famille dans les prisons israéliennes est un drame qui s’ajoute aux malheurs de la population de Gaza. Les autorités israéliennes avaient, pour rappel, notifié le refus des visites de 2007 jusqu’en juillet 2012. Toutefois, le lundi 12 novembre 2012, des familles palestiniennes se sont vues refuser les autorisations de visite de leurs proches dans les prisons d’Israël et de la Cisjordanie.
- Mohamed avec une vieille photo de son fils Karim
Chaque famille a un prisonnier et chaque famille a une histoire, comme celle d’Abdel Karim Mohammad Ibrahim Abu-Habel. Agé de 22 ans, Abdel Karim a été arrêté en avril 2004, à l’âge de 14 ans. Son père Mohammad Ibrahim Abu-Habel affirme que depuis l’arrestation de son fils, il y a 8 ans, la famille n’a pu le voir qu’à six reprises. »
Mohammad poursuit : « J’ai déjà perdu un fils lors d’une frappe aérienne israélienne en 2006. A cette douleur s’ajoute la détention d’Abdel Karim que je n’ai pas pu voir depuis très longtemps. Il n’avait que 14 ans le jour de son arrestation. La dernière fois que je l’ai vu remonte à janvier 2007, et encore, pour une demi-heure seulement. Mon épouse n’a pu le visiter que cette année, au mois de juillet. Leur rencontre a duré 15 minutes. »
Retour en arrière. Karim vivait à Jabalia, une région dans le nord de la Bande de Gaza. Le jour de son arrestation par les forces de l’occupation israélienne, Karim jouait avec ses copains dans un terrain découvert près de son domicile. Son père raconte : « Lorsqu’il a été arrêté en avril 2004, personne ne nous a officiellement notifiés ou informés à ce sujet. Nous avons cherché partout comme des fous, mais en vain. Au bout d’un mois, ou un peu plus, des détenus libérés de la prison d’Ashkelon étaient venus nous informer que Karim y était. Nous avons plusieurs fois tenté de confirmer la nouvelle, mais nos démarches échouaient jusqu’au jour où nous avions reçu un appel d’une femme soldat pour nous annoncer la tenue du procès de notre fils qui était accusé d’une série de crimes et qu’il fallait, par voie de conséquence, lui trouver un avocat. Le procès a duré 2 ans et le Tribunal Militaire israélien d’Erez l’a reconnu coupable pour 15 différents chefs d’accusations, et l’a condamné à 9 ans de prison pour avoir fait sauter un char israélien. »
Outré, le père de Karim s’interroge : « Mais qui peut croire de telles accusations ? Comment peut-on concevoir qu’un enfant innocent, âgé d’à peine 14 ans, puisse perpétrer un tel acte ? Le problème c’est que ce n’était pas la première fois que mon fils soit placé derrière les barreaux. Lorsqu’il avait 10 ans, il avait été arrêté sans raison apparente. »
Par ailleurs, Mohamed explique que le plus gros obstacle que la famille rencontre quand elle veut organiser une visite est la localisation de Karim : « Depuis 2004, Karim a été déplacé dans 7 prisons en Israël et en Cisjordanie. Nous n’étions pas informés de ces transferts et ces changements d’établissements pénitentiaires. C’est pourquoi, nous nous sommes approchés de la Croix Rouge dont les services nous ont aidés à le localiser. Au moment de son arrestation, il a été détenu dans la prison d’Ashkelon jusqu’en 2005 où il a été enfermé dans la prison des mineurs à Hasharon jusqu’ en 2006. Lorsqu’il a été condamné à l’emprisonnement, il a d’abord été transféré vers une prison à Adhemun. Depuis, il a fait plusieurs geôles à Ramun, Nafah, Néguev et Ishel. »
La localisation de Karim n’a cependant pas mis fin aux tourments de la famille. Mohamed ajoute : « Dans les six fois où nous étions autorisés à lui rendre visite, il y avait un problème. D’abord, il fallait obtenir une autorisation. Ensuite, les autorités israéliennes font entrer un seul membre de la famille à la fois. Enfin, la durée de visite varie ; elle ne dépasse jamais les 30 minutes et des fois, c’est beaucoup moins. »
Par ailleurs, Mohamed explique que la famille a tenté de communiquer avec Karim en s’envoyant des lettres. La tâche s’est cependant avérée difficile : « C’est la Croix Rouge qui faisait le facteur entre Karim et nous. Des fois, Karim nous envoyait des lettres avec ses codétenus libérés. Sur les 25 à 30 lettres que nous avons reçues, la plupart étaient marquées à l’encre noire et une bonne partie était illisible. »
A présent, la famille Abu-Habel attend la libération de son fils, programmée pour le mois d’avril 2013. Leur seul recours a été la Croix Rouge.
Vers la fin du mois de mai 2012, 234 garçons Palestiniens âgés entre 12 et 17 ans ont été détenus dans les prisons israéliennes pour de présumées violations et menaces à la sécurité, soit une hausse de 73% par rapport au nombre enregistré en décembre 2011.
Pourtant, l’Article 37 (b) de la Convention sur les Droits de l’Enfant et la Règle 2 des Règles des Nations Unies pour la Protection des Mineurs privés de leur Liberté stipulent clairement que « Nul enfant ne doit être privé de liberté de façon illégale ou arbitraire : l’arrestation, la détention ou l’emprisonnement d’un enfant doit être en conformité avec la loi, et ne doit être qu’une mesure de dernier ressort, et être d’une durée aussi brève que possible. » Par ailleurs, le droit de chaque prisonnier aux visites, notamment celles des proches de la famille, à intervalles réguliers et aussi fréquemment que possible est inscrit dans les règles minimales édictées par l’ONU en matière de traitement des prisonniers, dans l’ensemble des Principes pour la protection de toutes les personnes soumises à toute forme de détention ou d’emprisonnement et dans la Quatrième Convention de Genève qui stipule également le droit de communiquer avec les membres de la famille.
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Traduction : Info-Palestine.eu - Niha