Vies sous occupation : le rêve au-delà de la frontière
vendredi 15 juin 2012 - 06h:36
PCHR Gaza
Âgé de 47 ans, Khamis Zakout vit à Khan Younis en compagnie de son épouse et de leurs neuf enfants. En 1992, alors qu’il travaillait dans un projet de construction en Israël, Khamis a eu une blessure suite à laquelle ses deux jambes ont complètement été paralysées.
- Khamis Zakout et ses nombreuses médailles gagnées tout au long de sa carrière d’athlète en fauteuil roulant
Khamis ne s’est pas laissé décourager par sa nouvelle situation, au contraire, il a tenu à surmonter son handicap et à se convaincre et à prouver que les portes de la réussite n’ont pas été totalement fermées. C’est pourquoi, il a décidé d’entrer dans l’univers du handisport. Depuis, il est devenu un athlète palestinien en fauteuil roulant de niveau olympique et a décroché une place dans l’équipe paralympique pour 2012.
Le 20 mai dernier, sur invitation du Consulat Britannique à Ramallah, Zakout et ses confrères devaient se rendre à Jérusalem et à Ramallah dans le but de célébrer les 100 jours précédant les jeux paralympiques qui commenceront le mois de juillet à Londres et auxquels l’équipe prendra part. A sa grande surprise, Zakout fut le seul athlète empêché de voyager et de participer à cette étape officielle de préparation pour les paralympiques. Au niveau du passage d’Erez, il a été interdit d’entrer en Israël pour de supposés motifs de sécurité.
Ce voyage en Cisjordanie signifiait beaucoup pour Khamis Zakout. Le groupe avait programmé de prier dans la Mosquée d’Al-Aqsa à Jérusalem et de s’entretenir avec les responsables de l’Autorité Palestinienne de Ramallah. L’athlète explique : « Cette visite avait pour objectif le soutien psychologique et la force morale pour préparer les Jeux Olympiques. Pour ma part, je tenais absolument à transmettre un message aux Palestiniens handicapés afin qu’ils s’arment d’espoir et qu’il sachent qu’il est toujours possible de réussir, d’atteindre ses objectifs et de mener une vie saine en dépit du handicap physique. Par ce voyage, j’aspirais à prouver à tout le monde que les Palestiniens sont forts, et qu’ils ont été, sont et seront toujours tenaces et persévérants face aux rudes épreuves de leur quotidien. Le handicap se passe dans la tête, pas dans le physique. Alors, nous ne sommes pas handicapés et impossible n’est pas Palestinien. »
Lors d’un championnat international organisé à Dubaï en décembre 2011, Zakout avait remporté 2 médailles en or au javelot et au lancer du poids. Convaincu qu’il peut faire mieux, il avoue : « Je peux lancer le javelot encore plus loin que ce que j’avais réalisé en décembre. Je voulais cependant ménager mes efforts pour les paralympiques et pour que les autres athlètes ne ressentent pas l’obligation de battre mon record. »
Mais contrairement aux autre athlètes à l’extérieur de la Bande de Gaza, Zakout ne reçoit aucune compensation financière ni assistance pour sa vocation. Il explique : « Je dois moi-même acheter mon uniforme, chaussures et le fauteuil roulant spécial pour le sport. Pour mes entrainements, et en l’absence d’infrastructures adéquates et aménagées, je dois organiser mes propres déplacements vers un jardin public dans la ville de Gaza. Aussi, je ne bénéficie d’aucun conseil professionnel au sujet des techniques de formation particulières, ou bien des régimes appropriés pour ma condition physique. D’autre part, même si je réussis à obtenir tous ces avantages, je préfère nourrir ma famille plutôt que d’avoir les vitamines dont mon corps a besoin. Après tout, je demeure convaincu que le plus important est la force morale, et c’est le meilleur équipement et entrainement au monde. »
C’est pourquoi, l’annulation de son voyage en Cisjordanie l’a profondément découragé.
Par ailleurs, les raisons liées à la sécurité qui ont été avancées par Israël pour interdire l’entrée de Zakout sur son sol semblent sans fondement. En effet, l’athlète n’a jamais été détenu dans une prison israélienne. Il ne parvient même pas à penser à un motif qui le rendrait un facteur à risque pour la tranquillité d’Israël. Il souligne : « Pourquoi nous empêchent-ils d’entrer en Israël sachant que nous sommes handicapés, incapable de tirer sur eux. Nous voulons juste participer aux activités sportives. »
Avant cet incident, l’athlète a voyagé plusieurs fois à l’extérieur de la Bande de Gaza. Il avait pris part à des championnats internationaux et avait même subi une opération en Israël en 2000. Et ce sont justement les autorités israéliennes qui lui avaient envoyé sa chaise électrique en guise de compensation pour l’accident intervenu en Israël.
C’est pourquoi, Zakout livre sa propre lecture sur le refus qui lui a été signifié et affirme : « Ce rejet aspire à briser notre moral car ils n’acceptent pas de concevoir un succès des Palestiniens, même potentiel. »
Encouragé par le souhait de voir Jérusalem avant les Jeux, Zakout a décidé de ne pas baisser les bras et de formuler une nouvelle demande en joignant les invitations de l’Union des athlètes paralympiques et du Consulat Britannique de Ramallah. Quant aux Jeux paralympiques de Londres, il n’y aura fort heureusement aucun problème concernant sa participation car le chef de l’équipe de Palestinien a pris les dispositions nécessaires et officielles. Toutefois, Zakout note qu’avec Israël « les promesses sont rarement tenues. »
Pourtant, L’Article 13 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) stipule que « Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. » De même, l’Article 12 (1-3) du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques énonce que « Quiconque se trouve légalement sur le territoire d’un Etat a le droit d’y circuler librement. »
Quant à l’Article 27 de la DUDH, il est précisé que « Toute personne a le droit de prendre part librement à la vie culturelle de la communauté, de jouir des arts et de participer au progrès scientifique et aux bienfaits qui en résultent »
Enfin, il va sans dire que le blocus imposé à la Bande de Gaza constitue une forme de punition collective contre une population civile vivant sous occupation, laquelle [punition] représente une violation de l’Article 33 de la Quatrième Convention de Genève.
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06 juin 2012 - PCHR Gaza - Vous pouvez consulter cet article à : http://www.pchrgaza.org/portal/en/i...
Traduction : Info-Palestine.net - Niha