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Vies sous occupation : la santé mentale

mercredi 18 avril 2012 - 07h:06

PCHR Gaza

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Parmi les crises humanitaires qui consument la population de la Bande de Gaza, il existe un trouble peu connu et qu’on n’évoque presque jamais. Il s’agit de la santé mentale des habitants.

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Husam El Nounou

En effet, Gaza est le théâtre de l’isolement et de la violence incessante depuis l’établissement en 2006 par Israël d’un blocus illégal et accablant, sans oublier l’offensive de 2008-2009. Tous ces évènements ont plongé plus de 1,7 million de civils gazaouis dans un gouffre où vulnérabilité, désespoir, emprisonnement et perte de contrôle se mélangent.

C’est pourquoi, il devient évident, voire prévisible que les conséquences des troubles mentaux aillent de mal en pis au cours des dernières longues années. A ce titre, Médecins Sans Frontières avait, en 2010, déclaré que plus de la moitié des enfants gazaouis en-dessous de 12 ans nécessitaient une prise en charge en matière de santé mentale, et que le tiers de ces cas sont graves.
Par ailleurs, le Directeur des Relations Publiques au sein du Programme Communautaire de Santé Mentale (PCGSM), Husam El Nounou, a expliqué que les raisons accablantes de cette détérioration résultent du contexte politique et des conditions des droits humains qui marquent le quotidien de la population de Gaza, caractérisés particulièrement par le blocus imposé par Israël et ses attaques ininterrompues.

Ainsi, le blocus illégal qui enferme Gaza, imposé initialement en 1991, puis amplement renforcé en 2006 signifie que le mouvement des biens et des personnes à l’intérieur comme à l’extérieur de Gaza est désormais rendu très limité.

Pour Husam, ces mesures ont développé chez la population gazaouie un sentiment de désespoir et d’étouffement puisqu’ils se voient refuser des éléments de base comme visiter des parents installés à l’étranger ou voyager pour étudier, pour travailler ou tout simplement pour se soigner. Toujours selon Husam : « La détresse est beaucoup plus ressentie chez la catégorie de personnes soucieuses de voyager dans le but d’étudier, les malades pour suivre un traitement qui n’est pas disponible à Gaza et les personnes dont le travail nécessite un déplacement à l’étranger ou un commerce en import/export ».

Pour sa part, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) confirme que la relation entre la santé physique et la santé mentale est bien établie. Dans cette optique, Hussam explique que « Le blocus a occasionné des pénuries de denrées alimentaires qui ont provoqué de piètres résultats nutritionnels et une dégradation des conditions physiques, le tout aggravant les problèmes mentaux »
Tous ces problèmes sont accentués par des conditions d’hygiène très médiocres ayant été la cible des forces israéliennes d’une part, et le blocus et le refus d’importer le matériel nécessaire à la réparation des installations sanitaires, d’autre part.

Par ailleurs, Husam s’appuie sur une étude menée par le Programme Communautaire gazaoui de Santé Mentale à la suite du durcissement du blocus en 2006. Le rapport fait état d’une détérioration tragique de la santé mentale et relève, dans les 6 mois qui ont suivi le renforcement du blocus, une hausse de 17.7% de cas de dépression, tandis que 95% des personnes interrogées déclarent se sentir « emprisonnées ».

La situation n’est pas près de se régler. En effet, l’offensive israélienne de 2008-2009 et les attaques militaires en cours ont eu raison de la santé mentale des gazaouis, notamment chez les enfants. Dans ce cadre, Husam cite un rapport du PCGSM sur « les Conséquences Psychologiques de la Guerre Israélienne sur Gaza » qui démontre que 82.1% des enfants gazaouis étaient persuadés qu’ils étaient en danger lors de l’offensive, 67,6% d’entre eux appréhendent une nouvelle guerre et 40,9% ont exprimé un désir ardent de vengeance.

Ces résultats ont également été soutenus par une autre étude conduite par Dr Jameel Tahrawi de l’Université Islamique de Gaza, qui, à travers les dessins des enfants, a réussi à analyser l’impact de l’assaut sur leur psyché. Ainsi, il a été relevé que 82.3% des dessins examinés étaient en rapport avec l’offensive. D’autre part, dans une analyse de l’ONU sur les retombées de la guerre sur la société gazaouie, environ les deux tiers des personnes interrogées affirment que depuis l’offensive, ils ont été confrontés aux pires moments en matière de dégradation de la santé, en général, et du mental, en particulier.

Aussi, Husam explique que « La société gazaouie est comme toute société arabe qui, d’un point de vue traditionnel, estime qu’être atteint de troubles mentaux signifie être possédé par des esprits maléfiques » Cette opinion entraîne la stigmatisation des malades qui, en conséquent, tend à isoler les victimes et à aggraver leurs conditions.

Husam précise également que ce sont les femmes qui cherchent le plus à dissimuler leurs troubles de peur de voir leurs chances de mariage baisser. Quant aux hommes, leurs comportements sont le plus souvent traduits par un penchant vers la violence et la prise de risque exercés sur les femmes, les enfants et les membres de la famille.

Pour ce qui est des enfants, le comportement violent et le manque de concentration et d’attention, notamment dans les classes mènent à des résultats scolaires et éducatifs médiocres, le tout influera négativement sur les opportunités futures que peut leur offrir la vie. Ces personnes développeront en conséquent le sentiment d’être pris au piège.

Le Programme Communautaire Gazaoui de Santé Mentale déplore le manque de spécialistes hautement qualifiés en matière de santé mentale à Gaza. Toutefois, il reconnaît que cette situation découle des restrictions imposées sur les voyages d’études ou de formations. C’est pourquoi, le PCGSM a mis en route un cours postdoctoral en matière de véritable prise en charge et soutien aux personnes souffrant de troubles mentaux par les conseillers professionnels et médicaux à Gaza.

Les cours s’étaleront sur deux ans, à plein temps, et porteront sur les interventions relatives à la santé mentale qui reste un point délicat par rapport au regard traditionnel que portent les Gazaouis sur ce point.

Cependant, Husam pense que l’état général de la santé mentale à Gaza restera critique tant que la situation des droits humains ne s’améliore pas. Pour ce faire, il faudra lever le blocus qui paralyse le mouvement des citoyens et de la marchandise et ce, dans le seul but d’atténuer les sentiments d’emprisonnement et de désespoir. Aussi, il est impératif de lever toute restriction sur la nourriture, les médicaments et les matériaux d’assainissement afin d’améliorer les conditions physiques qui auront un impact positif sur la santé mentale. A tout cela doit s’ajouter l’arrêt immédiat des bombardements incessants des forces israéliennes qui nourrissent le sentiment d’insécurité et d’impuissance ainsi que l’exposition continue aux violences extrêmes.

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9 février 2012 - PCHR Gaza - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.pchrgaza.org/portal/en/i...
Traduction : Info-Palestine.net - Niha


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