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Khader Adnan dit aux grévistes de la faim : « Persévérez jusqu’à la victoire ! »

samedi 28 avril 2012 - 09h:58

Fadi Abu Saada - Al-Akhbar

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Ramallah - Khader Adnan a défié l’occupation, ses prisons, et ses geôliers. Il a tenu tête aux interrogateurs et aux informateurs et n’a cédé ni à l’intimidation, ni à l’humiliation. Il a mis sa vie en jeu en refusant de manger pendant 66 jours jusqu’à ce que l’occupation soit obligée de céder. Adnan a relaté à Al-Akhbar son historique grève de la faim.

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Khader Adnan, ancien prisonnier palestinien en Israël et gréviste de la faim, est accueilli le 18 avril 2012 par les habitants de son village de Arraba près de Jénine, en Cisjordanie occupé - Photo : AFP/Saif Dahlah

Fadi Abu Saada : Pourquoi avez-vous décidé de vous mettre en grève de la faim le jour de votre arrestation ?

Khader Adnan : Je l’ai décidé pour quatre raisons principales. La première concerne la période qui a précédé ma détention. On a essayé plusieurs fois de m’arrêter sous couvert de convocations par les services secrets. Mais j’ai refusé de m’y rendre. Je n’ai aucune envie d’être humilié et d’être obligé de regarder Israël faire étalage de sa force.

Le seconde raison est que j’ai été maltraité pendant mon arrestation, y compris physiquement attaqué par les gardiens de la prison.

La troisième raison est le type et les méthodes d’interrogatoire.

La quatrième et dernière raison est que j’ai été plusieurs fois mis en détention administrative sans raison. Ma rejection de la détention administrative est le complément direct de ma réjection de l’occupation elle-même et de ma quête pour retrouver la dignité qui nous a été volée par les Israéliens.

FAS : Qu’est-ce qu’on appelle détention administrative ?

KA : Je crois que c’est l’Angleterre qui est à l’origine de cette forme de détention. Elle a été instituée pendant le Mandat Britannique sur la Palestine, Ils appelaient cela des "lois d’urgence".

Cela commence par une lettre du responsable des services secrets d’une région donnée au commandant militaire de cette région pour lui demander d’arrêter une personne donnée sur la base "d’informations secrètes" qui ne peuvent être divulguées. Cela signifie en clair que "ces informations viennent d’un collaborateur de l’occupation."

La détention peut être prolongée plusieurs fois. Dans le cas des frères Mohammad Jaradat, Usama Barham, et du martyre Ayman Daraghmeh, elle a duré 5 ou 6 ans. Le prolongement de la détention est une épée de Damoclès suspendue au dessus de chaque détenu et de sa famille. C’est une torture psychologique sans équivalent et le pire est que le détenu et sa famille savent qu’il est impossible de savoir quand le détenu sera libéré.

FAS : A quoi passiez-vous vos journées pendant votre grève de la faim ?

KA : Je n’ai pas seulement arrêté de manger, j’ai aussi fait voeu de silence pendant plus de 20 jours et je n’ai pas pris de douche pendant 65 jours.

J’ai beaucoup prié et lu le Coran quand je pouvais en avoir un exemplaire. Je n’ai jamais dormi pendant la journée. les gens trouvaient cela étrange mais je préférais dormir la nuit et me réveiller pour la prière du matin.

La fouille quotidienne a toujours été "amusante" parce que j’avais l’habitude de confronter les gardiens de prison qui la faisaient.

FAS : Comment ont-ils fait pression sur vous pour vous forcer à arrêter la grève de la faim ?

KA : Essentiellement en me transportant d’un hôpital israélien à l’autre pour des examens. D’abord ils m’ont emmené à l’hôpital de Ramleh plus à "Tal al-Rabi" à Tel Aviv, puis à Jérusalem occupée puis à Safed, puis à nouveau à Ramleh en isolement. C’était épuisant.

Puis ils ont transformé les hôpitaux où ils m’emmenaient en tribunal pour me juger.

La principale méthode qu’ils utilisaient contre moi, c’était de m’isoler du monde extérieur et de mettre trois ou quatre gardiens dans ma cellule pour faire pression sur moi.

Ils ont attaché une de mes mains et un de mes pieds pendant des heures et refusaient de me détacher pour aller aux toilettes. Ils disaient que c’était pour que je ne puisse pas m’échapper alors qu’il n’y avait pas de fenêtre ni de sortie nulle part.

Les soldats d’occupation ont essayé de me provoquer en transformant ma cellule en "restaurant" plein de toutes sortes de nourritures appétissantes.

Ils ont essayé de briser ma volonté mais j’ai résisté, grâce à Dieu.

FAS : Ont-ils menacé votre famille et vos amis ?

KA : Oui, un officier des services secrets est venu me dire : "Dites bonjour à votre père". Il m’avait dit la même chose quand ils étaient venus m’arrêter une fois précédente. Ils m’ont menacé d’arrêter toute ma famille et mes amis et ils ont d’ailleurs arrêté quatre de mes amis dans ma ville, Arrabeh, quelques jours avant de me libérer.

Mais cela ne suffit pas aux soldats de l’occupation. Ils criminalisent tous ceux qui parlent de moi et de mon expérience.

le meilleur exemple est ce qui vient d’arriver au Mufti de Jérusalem, Mohammed Hussein, parce qu’il avait parlé de moi dans son sermon à la mosquée al-Aqsa.

Le gouvernement israélien l’a accusé de trahison comme si c’était un crime de simplement parler de moi.

FAS : Que pouvez-vous dire aux 2000 prisonniers qui ont suivi votre exemple et qui sont maintenant dans leur seconde semaine de grève de la faim ?

KA : Je leur dis, persévérez et avec la grâce de Dieu vous vaincrez. Vous appelez votre combat "la lutte pour la dignité" alors ne laissez pas tomber vos familles et les autres prisonniers. Continuez jusqu’à ce qu’on vous accorde ce que vous avez demandé.

Une grève de la faim est de la plus haute importance, il s’agit de notre destin. Nous supplions Dieu de nous accorder la victoire.

Je conclus mon message en disant, ne lâchez pas la bannière des huit chevaliers, surtout Bilal Diab et Thaer Halahla. Cela fait 58 jours qu’ils ne mangent pas et qu’ils continuent la lutte de Sheikh Khader, Hana Shalabi et des autres.

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25 avril 2012 - Al-Akhbar - Vous pouvez consulter cet article à :
http://english.al-akhbar.com/conten...
Traduction : Info-Palestine.net - Dominique Muselet


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