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La renaissance du Fatah

jeudi 20 août 2009 - 08h:03

Khaled Amayreh
Al-Ahram/Weekly

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Bien que le Fatah ait réussi à tenir sa première conférence générale sur le sol palestinien, sa réussite dépendra finalement de sa capacité à extirper les droits des Palestiniens des mains avares d’Israël, écrit Khaled Amayreh de Bethléem.

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Le chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas. Photo : AP

La sixième conférence générale du Fatah, tenue pendant une semaine à Bethléem, s’est terminée mardi par l’élection d’un nouveau comité exécutif comportant 14 nouveaux membres sur les 18 élus. Ceux-ci incluent d’anciens chefs des services de sécurité de l’Autorité palestinienne (AP), notamment Mohamed Dahlan, l’ex homme fort controversé, considéré comme l’ennemi juré du Hamas.

Beaucoup d’anciens dirigeants du mouvement tels qu’Ahmed Qureï et Al-Tayeb Abdul - Rahim n’ont pas obtenu de siège au puissant comité.

Avec 1 338 voix, c’est Abu Maher Ghunim, dirigeant chevronné du Fatah, qui a obtenu le plus de suffrages, suivi par le dirigeant emprisonné du Fatah, Marwan Barghouthi, avec 1 063 voix.

Quinze des 18 membres, élus ou réélus, vivent dans les territoires palestiniens occupés ; cela signifie que les quelque 4,5 millions de réfugiés palestiniens vivant dans la diaspora n’auront jamais été aussi sous-représentés dans l’organe le plus important du mouvement.

Le chef de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, qui a été élu à la direction du Fatah pour un deuxième mandat, nommera trois autres membres au comité, y compris une femme, un(e) chrétien(ne) et une troisième personne. Certains pensent qu’Abbas nommera son rival juré, Farouk Kaddoumi, mais il n’est pas certain que celui-ci accepte.

Il y a quelques semaines, Kaddoumi a accusé Abbas et son ancien assistant, Mohamed Dahlan, d’avoir comploté avec Israël pour empoisonner feu le dirigeant palestinien, Yasser Arafat. Abbas a caractérisé ces accusations de « tentatives minables » pour empêcher la convocation de la conférence du Fatah.

Pendant la conférence, Abbas a essayé de tendre la main à Kaddoumi : « ...et à notre frère Abou Lutf (nom de guerre de Kaddoumi) nous disons que nous sommes des êtres humains, que nous péchons et que nous commettons des erreurs, mais que les meilleurs pécheurs sont ceux qui se repentent. De toute manière, tu restes notre frère et nous appartenons tous au coeur chaleureux de ce grand mouvement ».

La controverse au sujet des accusations de Kaddoumi et le refus obstiné du Hamas d’autoriser les délégués du Fatah de Gaza de se rendre en Cisjordanie ont initialement créé beaucoup de confusion au sein de la direction du mouvement.

Abbas a finalement eu raison de s’en tenir malgré tout à la date prévue, puisqu’il a réussi à rassembler plus de 2 200 délégués représentant la base du mouvement en Palestine et dans la diaspora.

La plupart des observateurs en Palestine pensent que la conférence aura probablement permis à Abbas de redorer son blason, tant au sein du Fatah que dans l’ensemble de la communauté palestinienne. Le Fatah devrait également y gagner, du moins en termes de popularité, s’il réussit à se reconstruire et à se renouveler, sous la direction d’un nouveau comité exécutif et d’un conseil révolutionnaire dont la majorité des membres sont issus de la jeune génération.

Mais il est également vrai qu’une bonne partie de l’optimisme exprimé au sujet de la « nouvelle naissance » du Fatah se fonde sur l’hypothèse que le mouvement a tiré les leçons de ses bévues passées, supposition qui n’est pas nécessairement correcte puisque la conférence de Bethléem n’a pratiquement pas touché à la plupart des dossiers concernant la corruption et spécialement la corruption financière.

En fait, certains des dirigeants du Fatah les plus notoirement corrompus ont été élus au comité exécutif ainsi qu’au conseil révolutionnaire, moins important.

Malgré la corruption, l’euphorie post-Bethléem pourrait bien se révéler complètement fallacieuse s’il est impossible de sortir de l’impasse avec Israël comme on le prévoit largement.

À la fin de la conférence, le Fatah a adopté un programme politique qui cherchait à satisfaire tout le monde. Le document de 30 pages réaffirme les « constantes palestiniennes » traditionnelles, notamment le retrait israélien total de tous les territoires palestiniens occupés en 1967 et une juste solution au sort des réfugiés conformément à la résolution 149 des Nations unies.

En outre, le Fatah a réaffirmé dans sa plate-forme son engagement envers la solution à deux Etats avec les frontières du 4 juin 1967 et il a prévenu que les Palestiniens ne reprendraient pas les négociations avec Israël à moins que celui-ci ne gèle toute expansion des colonies. Il a également insisté sur le droit du recours à toutes les formes de résistance pour mettre fin à l’occupation, y compris la lutte armée, qu’Israël considère comme du « terrorisme ».

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Un jeune Palestinien regarde les gravats d’un oeil désapprobateur après une frappe aérienne à la frontière entre l’Egypte et Rafah, dans le sud de Gaza

On estime ici largement que la référence à la lutte armée dans le document final est principalement rhétorique étant donné que le Fatah ne peut pas vraiment mener de lutte armée tout en recevant la bénédiction d’Israël.

En fait, les dirigeants du Fatah se rendent bien compte que c’est Israël qui a autorisé la tenue de la conférence de Bethléem et que sans son consentement, la conférence n’aurait jamais eu lieu.

Quant au différend avec le Hamas, il est possible qu’un Fatah plus sûr de lui pourrait montrer plus de souplesse lors des entretiens de réconciliation avec le mouvement islamique. Hani Al-Masri, journaliste palestinien, dit que la composition du nouveau comité exécutif du Fatah augure bien de l’unité nationale. « Il est vrai qu’Abbas est devenu plus fort, mais le nouveau comité exécutif est également fort et il ne se contentera pas d’approuver ses décisions sans discussion comme c’était le cas auparavant. » a dit Al-Masri.

Le Hamas a commenté sèchement l’issue de la conférence, la caractérisant d’ « affaire interne du Fatah ». Le porte-parole de l’organisation à Gaza, Sami Abu Zuhri, a dit que « la nouvelle direction du Fatah sera jugée sur son engagement à défendre la cause et les intérêts nationaux ».

Il n’y a pas de doute que la conférence de Bethléem a été une étape importante vers la reconstruction et le renouvellement d’un mouvement en proie aux querelles internes, à la corruption et au copinage. Toutefois, il est aussi vrai qu’il ne faudrait pas exagérer ce qu’une conférence peut faire pour résoudre les nombreux problèmes insurmontables que le peuple palestinien et la cause palestinienne doivent confronter.

En définitive, le succès du Fatah, de même que celui des autres groupes palestiniens, dépendra de sa capacité à extirper des mains d’un Israël avare, les droits des Palestiniens.

Il s’ensuit qu’il faut demander logiquement non pas ce que le Fatah et les autres factions palestiniennes feront, mais plutôt ce qu’ils peuvent faire dans un contexte politique très dur.

Les travaux de la conférence générale du Fatah ont eu lieu dans un bâtiment de Bethléem surplombant la colonie israélienne de Har Homa. Ce simple fait a montré aux 2 200 délégués que le chemin vers une liberté véritable est encore très long à parcourir.

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Khaled Amayreh

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Cet article peut être consulté ici :

http://weekly.ahram.org.eg/2009/960...

Traduction de l’anglais : Anne-Marie Goossens


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