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Le Fatah peut-il se réinventer ?

mercredi 5 août 2009 - 18h:31

Heather Sharp - BBC News

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Les rutilantes Mercedes, Jaguars et BMW noires sont alignées devant l’église de la Nativité à Bethléem. A grands coups de klaxon, le convoi de Mahmoud Abbas glisse majestueusement le long des rues barrées, emportant le président de l’Autorité palestinienne vers le premier congrès général du Fatah depuis 20 ans.

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Le Fatah n’a plus tenu de congrès depuis 20 ans

Les quelque 2.000 membres réunis vont des exilés palestiniens plus âgés revenant après des décennies à l’étranger, aux anciens commandants militaires des camps de réfugiés de Cisjordanie, jusqu’à M. Abbas et ses contemporains en complet.

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Beaucoup de gens sont irrités par les coûteuses voitures des dirigeants du Fatah

La tâche du congrès, telle que beaucoup la voient, est de sauver le Fatah - fondé par Yasser Arafat il y a cinquante ans pour mener la lutte armée contre l’occupation israélienne - de la désintégration et du déclin.

Les critiques du mouvement le voient comme un organisme clientéliste, corrompu et inefficace dont les dirigeants ont fait beaucoup trop de concessions à Israël et qui n’a pas réussi à maintenir l’unité palestinienne après la mort d’Arafat en 2004.

Aux élections législatives de 2006, quand les électeurs palestiniens ont accordé la victoire à la faction des militants islamiques du Hamas, cela a largement été interprété comme étant autant une sanction contre le Fatah qu’une adhésion au Hamas.

Poursuite de l’occupation

Il y a une quinzaine d’années, le Fatah a jeté tout son poids dans les négociations de paix comme étant la voie vers un Etat palestinien.

Mais à présent, pour beaucoup de Palestiniens, l’occupation semble plus établie que jamais, avec des colonies juives toujours en expansion et un gouvernement israélien de droite traçant une ligne de négociations plus dure que son prédécesseur.

« Le Fatah a beaucoup perdu » dit l’analyste et rédacteur palestinien Khalil Chahine.

Les observateurs internationaux cherchent maintenant à savoir si le mouvement révisera sa charte -qui a toujours pour engagement de « liquider l’entité sioniste » - et passera formellement du mouvement de libération au parti politique.

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« Nous avons essayé le combat armé, ça n’a pas marché. Nous avons essayé la négociation, ça n’a pas marché. Peut-être que des gens nouveaux auront des solutions nouvelles ».

En supposant que le Fatah pourrait tempérer son langage sur la lutte armée, il est cependant peu probable qu’il l’abroge complètement.

Car ce serait « perdre le peuple palestinien » dit M. Chahine, faisant allusion au risque que les électeurs frustrés ne soient poussés vers la résistance « violente » embrassée par le Hamas - un souci en particulier au cas où les pourparlers unitaires menaient à des élections, actuellement prévues en janvier prochain.

Conflits internes

Mais en tout cas, selon lui, la lutte entre personnalités semble éclipser les questions cruciales qui sont en jeu.

Une des tâches essentielles du congrès est de réélire les 21 membres tout-puissants du Comité central de l’organisation, un certain nombre d’entre eux étant morts en fonction au cours des 20 années qui se sont écoulées depuis le dernier congrès.

La ligne de bataille au sein du Fatah a longtemps été caractérisée par une lutte entre les idéologues fondateurs âgés en exil, et les pragmatiques nés au pays qui ont soutenu les négociations de paix.

Mais les membres de la génération plus jeune encore, ceux qui ont grandi pendant les deux Intifadas - ou soulèvements - des décennies récentes, rivalisent également pour s’exprimer.

« Basse, sale et mesquine »

Le sujet du jour est d’apporter du sang neuf, de maîtriser les conflits internes et d’éradiquer la corruption.

Mais on s’inquiète déjà de savoir qui sont les 700 délégués supplémentaires ajoutés à la liste du congrès et à qui leur vote ira.

Et la course préparatoire au congrès a connu d’amers auspices lorsque le président en exil du Fatah âgé de 78 ans, Farouk Kaddoumi, qui s’oppose aux pourparlers de paix et refuse un retour qui fonctionnerait sous occupation israélienne, a accusé M. Abbas d’avoir conspiré avec Israël pour assassiner Yasser Arafat.

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Marwan Barghouti est vu comme quelqu’un pouvant unifier les Palestiniens

« Ils combattent vraiment leurs rivaux d’une manière basse, sale et mesquine » dit la journaliste palestiniennne senior Wafa Amr ; « la nouvelle génération est plus unie ».

Il y a deux personnages plus jeunes qui sont considérés comme de bons candidats à un siège au comité central.

L’un est Marwan Barghouti, le populaire dirigeant actuellement détenu dans une prison israélienne avec cinq peines pour meurtre.

L’autre, Mohammed Dahlan, est l’ancien chef d’une importante force de sécurité à Gaza. Mais c’est un personnage qui divise et est souvent considéré comme corrompu.

Alors que tous deux en tiennent pour la position générale du Fatah soutenant la solution biétatique, avec la résistance armée retenue comme option si les pourparlers échouent, ils divergent sur la ligne à tenir avec le Hamas.

M. Barghouti, un dirigeant militant de la Deuxième Intifada qui se dit opposé aux attaques contre les civils, a longtemps été vu comme la seule figure susceptible de s’approcher de la puissance d’unification qu’avait Arafat.

En 2006, avec des prisonniers d’autres factions, notamment le Hamas, il a préparé un document ébauchant une plateforme de principes unifiée.

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Mohamed Dahlan nie les accusations de corruption

Kaddora Fares, un militant du Fatah proche de M. Barghouti, le décrit comme « le seul document global » existant sur l’unité palestinienne.

« Nous devons être réalistes, pour reconnaître la vérité - à savoir que le Hamas représente une vaste communauté ... Nous devons cesser de croire qu’il sera possible de démanteler un mouvement » dit-il.

M. Dahlan par contre, en tant que chef des forces de sécurité à Gaza pendant les combats de rue avec le Hamas en 2007, est au premier plan de la querelle entre les deux factions.

Ses forces de sécurité étaient soutenues par les USA, justifiant ce qui selon certaines preuves démontre une tentative approuvée par Washington d’éliminer le Hamas du pouvoir.

Et bien auparavant, il avait été honni par le Hamas pour son rôle dans les coups de force portés par l’AP contre des militants islamiques.

« Personne comme Arafat »

Dans les rues animées à l’extérieur du cordon de sécurité, il n’y a guère d’espoir que quiconque puisse unir les Palestiniens divisés.

« Ni Hamas ni Fatah - pas bons » marmonne un homme portant un plateau de verres de thé.

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M. Fares dit que le Fatah devrait tendre la main au Hamas

« Si je souffre du lever au coucher du soleil, qui vais-je élire ? Ces gens qui roulent dans des jeeps qui valent 50.000 shekels israéliens (87.000 ?) ou qui ont des villas à un million de dollars ? Ce sera lui qui me représentera ? » demande l’agent de voyages Khalil Salahat (50), la voix pleine de colère.

Attallah Awwad (17 ans), devrait avoir sa première occasion de voter, l’an prochain.

« Nous avons essayé le combat armé, ça n’a pas marché. Nous avons essayé la négociation, ça n’a pas marché. Peut-être que des gens nouveaux auront des solutions nouvelles ».

Mais qui ? Son regard est vide. « Il n’y a personne comme Arafat ».

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4 août 2009 - BBC NEWS - Vous pouvez consulter cet article ici :
http://news.bbc.co.uk/go/pr/fr/-/2/...
Traduction de l’anglais : Marie Meert


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