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Le Fatah toujours dans l’impasse

mardi 23 juin 2009 - 06h:08

Khalid Amayreh - Al-Ahram Weekly

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La direction du Fatah demeure dans la confusion, ses paris avec Israël ayant échoué, sans aucun atout pour restaurer l’unité palestinienne, écrit Khalid Amayreh depuis la Cisjordanie.

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Abbas est apparemment content de lui ... Photo : 20 juin 2009/AP

Malgré ses efforts pour donner bonne figure à sa dernière réunion à Amman, le Comité Exécutif du Fatah, la plus haute instance décisionnaire du mouvement, le désaccord entre le leader du Fatah et Président de l’Autorité Palestinienne (AP), Mahmoud Abbas, et les opposants à ce dernier reste non résolu.

Les deux camps sont profondément divisés sur le processus politique avec Israël, largement moribond, les relations avec le Hamas, ainsi que les réformes politiques et organisationnelles au sein du Fatah. Et les deux camps continuent d’être divisés à propos de la tenue du Sixième Congrès, retardé depuis longtemps. Le dernier congrès du Fatah s’est tenu à Alger en 1989.

Cette semaine, le Comité Exécutif du Fatah a consenti de nouveaux efforts pour restaurer l’unité, en direction de l’Organisation de Libération de la Palestine, la faction principale, et pour aplanir les difficultés à s’accorder sur ce congrès crucial au cours duquel devrait être élue une nouvelle direction du Fatah.

Toutefois, au lieu de voir l’harmonie l’emporter sur la discorde, la réunion a vu un vif échange de mots entre Abbas et Mohamed Jihad, membre influent du comité et opposant-clé du modus vivendi de l’AP avec Israël. L’âpreté passionnée des débats a conduit à la suspension de la réunion, laissant les principaux problèmes du contentieux non résolus.

Certains dirigeants du Fatah, comme Abbas Zaki et Nabil Shaath, ont cherché à donner une aura positive à la réunion d’Amman, prétendant que les hauts responsables étaient parvenus à une entente générale concernant la date et le lieu du Sixième Congrès.

Selon Zaki, le Comité Exécutif a accepté à l’unanimité de tenir le Congrès soit en Cisjordanie (Bethléem) soit dans la Bande de Gaza, le 4 août - dans le cas où Fath et Hamas se sont réconciliés d’ici là. La date proposée coïncide avec l’anniversaire de Yasser Arafat.

Cependant les remarques de Zaki à la presse ont laissé sans réponse de nombreux points d’interrogation, par exemple : qui peut garantir qu’Israël autoriserait des dirigeants non-conformistes tels que Farouk Kadoumi et Mohamed Jihad à entrer en Cisjordanie, et qu’arriverait-il si Fatah et Hamas ne se sont pas réconciliés d’ici là ?

Plus précisément, au cours d’un entretien télévisé, Jihad a nié qu’il y ait un accord concret sur les principaux sujets de contentieux, qualifiant de « fausse rumeur » les allégations de Zaki sur l’accord obtenu.

Jihad s’était confronté à Abbas sur cette question et sur d’autres. Abbas aurait entrepris d’obtenir d’Israël l’autorisation à des « leaders de l’opposition » du Fatah d’entrer en Cisjordanie et de participer tranquillement à la conférence, disant qu’il garantirait personnellement leur sûreté et leur sécurité.

Mais Jihad a critiqué Abbas, disant : « Comment pouvez-vous faire confiance à ces assassins qui ont tué Yasser Arafat et Abou Ali Mustafa (l’ancien dirigeant du Front Populaire de Libération de la Palestine). Nous ne leur faisons pas confiance. D’ailleurs, à quoi ressemble une conférence qui se tiendrait sous l’ombre de l’occupation israélienne ? Avons-nous perdu notre capacité de penser rationnellement ? Avons-nous perdu notre dignité ? »

Toutefois ces paroles n’ont pas réussi à influencer Abbas, qui a insisté sur le fait que le congrès devait se tenir « dans le pays d’origine », ajoutant : « soit la conférence se tient [là], soit, pas du tout ».

En fin de compte, des différences marquées ont prévalu, et les trois jours de réunion à Amman se sont terminées, ou plutôt, on leur a mis fin sans déclaration finale formelle, hormis les quelques remarques à la presse formulées par Zaki et Shaath.

Les porte-parole du Fatah ont décrit les divergences internes au mouvement comme étant « de nature personnelle ». Néanmoins il est clair que le principal contentieux entre Abbas et l’opposition, qui est essentiellement basée à l’étranger et menée par des gens comme Kadoumi, a davantage trait à la stratégie de l’AP pour faire cesser l’occupation israélienne qu’à des problèmes de procédure concernant la date et lieu de ce congrès sans cesse postposé.

Abbas croit que la seule voie pour sauver « ce qui peut être sauvé » réside dans des pourparlers à échéance ouverte avec Israël, sous la tutelle étatsunienne, européenne et arabe. Cette approche, dit Abbas en privé, requiert la cessation de toute forme de résistance palestinienne à l’occupation israélienne. En effet, Abbas a concrétisé cette approche dans les faits sur le terrain, puisque les forces de sécurité, qui opèrent en étroite coordination avec Israël, ont effectivement dissous le groupe de guérilla du Fatah connu comme Brigades des Martyrs d’al-Aqsa, dans toute la Cisjordanie.

De plus, les forces de sécurité entraînées par les Etats-Unis ont traqué et tué des activistes de la résistance du Hamas, comme récemment à Kalkilya dans le nord de la Cisjordanie. Ces mesures draconiennes sont prises pendant que l’appareil de la sécurité de l’AP continue d’arrêter et de torturer des centaines de sympathisants et de militants du Hamas dans l’espoir qu’Israël cèdera davantage de contrôle à l’AP.

Cette semaine, le personnel de sécurité de l’AP a torturé à mort Haitham Amr, 28 ans, supporter du Hamas dans les environs d’Hébron. Amr est le cinquième sympathisant du Hamas à mourir sous la torture en cours de détention par l’AP. Habituellement, l’AP recourt à des récits mensongers concoctés pour couvrir les circonstances entourant la mort de telles victimes.

Kadoumi et ses alliés, quant à eux, sont convaincus que l’AP et le Fatah peuvent bien s’abaisser tant et plus devant Israël, et se comporter servilement vis-à-vis de son armée, Israël les traitera toujours avec mépris et refusera de leur accorder en retour la moindre concession substantielle. En effet, le discours rejectionniste du Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahou dimanche dernier semblait justifier les vues de Kadoumi et de ses alliés tout en affaiblissant la stature d’Abbas.

Ce facteur particulier, à savoir l’intransigeance d’Israël et les refus catégoriques d’assumer les droits fondamentaux des Palestiniens sur des questions centrales telles que Jérusalem, les réfugiés et les colonies juives, sont frustrants et embarrassants pour la direction basée à Ramallah, qui misent tout sur le processus de paix avec Israël.

Certains croient que c’est pour cela qu’Abbas insiste pour que le Sixième Congrès se tienne dans les territoires occupés, sachant qu’Israël bloquera l’entrée à des forces d’opposition extérieures, car organiser le congrès plénier du Fatah dans les circonstances politiques actuelles mettrait en question sa survie politique.

En outre, Abbas craint que Marwan Barghouti, figure populaire mais emprisonnée du Fatah, ne puisse être élu dirigeant du mouvement si les « circonstances frustrantes » actuelles liées à la paralysie du processus de paix avec Israël et le différend avec le Hamas se poursuivent. Sans progrès en vue sur aucun des deux fronts, les malheurs politiques d’Abbas semblent ne faire que croître.

Du même auteur :

- Le Fatah en pleine crise - 12 juin 2009
- Une femme parle des « horribles » conditions de détention dans les prisons israéliennes - 4 juin 2009
- Une visite qui tourne à l’aigre - 28 avril 2009
- Sur le long terme... - 16 avril 2009
- Une feuille de vigne pour Netanyahou - 4 avril 2009
- Creuser sa propre tombe - 23 mars 2009

18 juin 2009 - Al-Ahram Weekly - Cet article peut être consulté ici :
http://weekly.ahram.org.eg/2009/952...
Traduction de l’anglais : Marie Meert


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