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L’attentat amène un répit

lundi 24 mars 2008 - 07h:20

Khaled Amayreh

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A l’heure où Al-Ahram Weekly mettait sous presse, un cessez-le-feu tacite entre Israël et le Hamas continuait à tenir pour la cinquième journée consécutive.

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Merkaz harav
Exemples de psychopathes produits par les écoles religieuses sionistes

Ramallah. Le calme officieux met fin à une orgie d’assassinats perpétrés par l’armée israélienne qui a tué en quinze jours plus de 120 Palestiniens, dont de nombreux enfants et de nourrissons. Après ce massacre, un combattant palestinien, agissant seul, a mené une attaque audacieuse à Jérusalem-Ouest contre le Merkaz Harav, siège du sionisme religieux, tuant huit étudiants-colons et en blessant plusieurs autres.

Les scènes choquantes des morts et des blessés de Gaza la semaine dernière - outre l’absence tout aussi choquante de toute condamnation internationale significative d’Israël - semble avoir convaincu le Hamas et d’autre factions de la résistance palestiniennes qu’il était illogique de demander à la communauté mondiale d’arrêter l’agression mortelle contre les Gazaouis sans arrêter les attaques de roquettes en provenance de Gaza sur les colonies israéliennes proches, spécialement Sederot et Ashkelon.

Ces attaques au moyen de roquettes primitives et artisanales n’ont tué et blessé qu’un petit nombre d’Israéliens et infligé des dommages mineurs, voire négligeables.

Toutefois, par le recours à sa puissante machine de propagande s’étendant de Sydney à la Californie, Israël les a pleinement exploitées donnant à tort l’impression qu’il était la victime dans sa guerre contre les Gazaouis et que, c’étaient les Palestiniens - totalement vulnérables, hermétiquement enfermés et pratiquement décimés - qui étaient les agresseurs.

De même, l’attaque contre Merkaz Harav - considéré comme le système nerveux central du mouvement des colonies juives - a choqué le gouvernement israélien, spécialement les échelons supérieurs de l’establishment politico-militaire. Après tout, Merkaz Harav représente l’âme du sionisme, le symbole du grand Israël et du nationalisme messianique juif.

Lancée par un jeune Palestinien de Jérusalem-Est dont la filiation politique reste un mystère, cet attentat a montré qu’Israël ne peut pas ouvrir la chasse aux Palestiniens de Gaza tout en restant à l’abri de mortelles représailles. Il a aussi montré que les seuls moyens militaires ne peuvent pas trancher le conflit entre Israël et les Palestiniens.

L’attaque contre Merkaz Harav était pourtant significative en ce qu’elle était un avertissement de la onzième heure au Premier ministre israélien Ehud Olmert : la poursuite de l’agression contre Gaza, associée aux menaces faites par certains ministres de son cabinet promettant un holocauste aux Palestiniens, devait nécessairement se retourner contre lui et peut-être entraîner l’effondrement de son gouvernement.

Olmert semble avoir escompté que si le public israélien de plus en plus chauvin a résisté à une attaque, il pourrait ne pas résister à la suivante et risquerait de descendre dans la rue pour réclamer de nouvelles élections générales dans lesquelles Benyamin Netanyahu, dirigeant extrémiste du parti Likoud, pourrait bien triompher.

Il est donc tout à fait possible qu’Olmert ait compté que, même tacite ou non déclaré, un cessez-le-feu avec le Hamas est vital pour la survie politique de son gouvernement de plus en plus fragilisé.

En outre, d’après des sources dignes de foi à Ramallah, la Secrétaire d’Etat Condoleezza Rice a demandé à Israël de se garder de mener des « représailles » contre le Hamas, comme si le meurtre de 120 Palestiniens en une semaine ne suffisait pas. Rice aurait dit que la poursuite des attaques israéliennes contre Gaza susciterait inévitablement de nouvelles représailles palestiniennes qui pourraient très bien entraîner l’effondrement du gouvernement Olmert et par conséquent celui de tous les efforts déployés par les Américains pour arriver à un règlement politique final du conflit israélo-palestinien avant la fin de 2008.

Il est intéressant de relever que ni Israël, ni le Hamas n’ont reconnu la réalité du cessez-le-feu, que ce soit tacitement ou autrement. Toutefois, les deux côtés ont prudemment déclaré qu’ils se garderaient de lancer de nouvelles hostilités si l’autre côté faisait durer l’accalmie. Les deux camps semblent enclins à observer une période de calme dont la durée dépendra entièrement des circonstances. Le terme utilisé par les observateurs pour décrire ce qui se passe est tahdia qui, en arabe, signifie calme et prudence.

Le Ministre israélien de la défense Barak, qui a été accusé d’avoir dirigé la dernière escalade pour des raisons politiques, à savoir pour accroître ses chances de devenir Premier Ministre, a dit : « les combats sont permanents ; ils se poursuivront et parfois ils s’intensifieront ou ils diminueront ».

Il a ajouté : « A ce stade, il n’y a aucun accord. Mais si aujourd’hui on peut aller à l’école à Ashkelon sans qu’il y ait de roquettes, je ne me plaindrai pas d’avoir une journée calme ; toutefois, si nous devons agir n’importe quand, nous le ferons ». Un haut responsable du gouvernement a répété : « si les tirs de roquettes s’arrêtent complètement, les opérations des FID s’arrêteront de même. »

En ce qui concerne le Hamas, son porte-parole, Sami Abu Zhuri, a signalé : « aucun cessez-le-feu global n’a été convenu ». Il a pourtant ajouté que les dirigeants du Hamas favorisaient les efforts déployés par les Egyptiens pour obtenir une trêve.

Le Hamas considère déjà l’accalmie comme une victoire politique et morale ; il prétend qu’un équilibre de terreur a été établi entre Israël, superpuissance nucléaire, et le Hamas, petite organisation comptant quelques milliers de soldats irréguliers équipés pour la plupart d’armes légères.

Le Hamas croit aussi que l’acceptation tacite d’un cessez-le-feu de facto, tout incertain et bref soit-il, montre qu’Israël abandonne ses anciens projets de le renverser en lançant une guerre totale contre la Bande de Gaza. « Israël s’est rendu compte que le Hamas est un dur à cuire que l’on ne peut pas ignorer et je crois que les Américains et les Européens arrivent à la même conclusion » a dit le porte-parole du Hamas, Mushir Al-Masri.

Pour sa part, bien que se félicitant publiquement du cessez-le-feu tacite, le leadership de l’Autorité palestinienne à Ramallah est assez consterné d’avoir été marginalisé lors de ces derniers événements.

Le Président de l’AP, Mahmoud Abbas, se serait dit certain qu’un accord avec le Hamas attribuable à la médiation de l’Egypte, prévoit que le Hamas arrêterait ses tirs de roquettes contre Israël si celui-ci cessait de prendre ses dirigeants politiques pour cibles.

Le Hamas s’est moqué de ces « insinuations » et de ces « ragots », rappelant à Abbas que les dirigeants du Hamas et leurs fils ont toujours été à l’avant-plan de la lutte contre l’occupation israélienne.

Les commentateurs politiques palestiniens croient généralement que la tahdia à Gaza - associée au fait que les Américains ont manifestement échoué dans leur tentative de transformer l’Autorité palestinienne en administration civile en Cisjordanie - augure bien de l’unité nationale palestinienne et des perspectives de rapprochement sérieux entre le Fatah et le Hamas.

Le commentateur politique palestinien, Hani Al-Masri, a dit : « Le leadership de l’AP découvre qu’il sera futile de compter que l’administration Bush fasse pression sur Israël pour mettre fin à l’occupation commencée en 1967 ».

Il a déclaré au Weekly que le leadership palestinien s’aperçoit à présent qu’il y a un vaste écart entre les réalités qu’Israël veut imposer par la coercition sur le terrain et les aspirations palestiniennes, à savoir, la fin de l’occupation et la création d’un Etat viable sur l’ensemble des territoires occupés.

« De toute évidence, le maximum qu’Israël est disposé à donner en échange de la paix n’est pas acceptable, même pour le dirigeant palestinien le plus modéré. Abbas et le Fatah reconsidèrent donc leurs anciennes prévisions. Ils ne peuvent simplement pas accorder aux États-Unis le bénéfice du doute, mais ils ne le diront pas en public ».

Ce n’est un secret pour personne qu’Abbas sent qu’il perd l’appui populaire. Les Palestiniens se sont en effet rendu compte que, plus que jamais, le seul langage qu’Israël comprenne est la force brutale et que sans l’attaque de Jérusalem de jeudi dernier, Israël aurait continué son agression mortelle contre la Bande de Gaza.

Chose plus importante toutefois, le cercle proche d’Abbas constate de plus en plus que, pas plus que le processus de paix, Israël ne le prend au sérieux et que les entretiens de paix sous les auspices étasuniens sont futiles.

Cette semaine, Israël a annoncé le nouveau projet de construction de 1150 logements pour des colons dans la partie arabe de Jérusalem-Est. En outre, Israël a commencé à accorder des titres de propriété à des juifs à Jérusalem-Est pour des biens immobiliers appartenant au Waqf islamique et aux Palestiniens absents. Les dirigeants palestiniens de Jérusalem et de Ramallah ont qualifié cette mesure de « fraude effrontée » et de « légalisation du vol ». « Ils confisquent des terres unilatéralement, accordent des droits fonciers aux juifs unilatéralement et tracent leurs frontières unilatéralement, et puis, ils prétendent qu’ils veulent la paix ! » a dit l’officiel de l’OLP, Yasser Abd Rabbo.

L’AP en a déjà appelé à la communauté internationale, spécialement aux États-Unis et à l’Europe, pour qu’ils forcent Israël à arrêter l’expansion de ses colonies en Cisjordanie. Certaines capitales occidentales ont bien sûr critiqué l’expansion. Pourtant, il est douteux que ces critiques forcent Israël à annuler voire à suspendre ses projets. Le repli du Premier Ministre israélien, Ehud Olmert sur une question aussi vitale risquerait de dissoudre sa fragile coalition.

Shas, le parti religieux ultra-orthodoxe qui représente les juifs du Moyen-Orient, a déjà menacé de se retirer de la coalition si Olmert cédait à la pression extérieure.

Le dilemme d’Abbas est encore plus épineux. S’il renoue les entretiens avec Olmert, sans un accord prévoyant l’annulation ou au moins le gel de la dernière poussée d’expansion, il perdra non seulement la face, mais aussi le peu de popularité qui lui reste auprès des siens.

Du même auteur :

- Le mirage d’Annapolis
- Abbas doit maintenant démissionner
- A quelles compromissions Abbas est-il prêt ?
- Une OLP parallèle ?

23 mars 2008 - Vous pouvez consulter la version originale de cet article ici :
http://weekly.ahram.org.eg/2008/888...
Traduction de l’anglais : amg


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