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Le véritable miracle israélien...

mercredi 13 février 2008 - 06h:34

Ramzy Baroud

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L’histoire d’Israël est sanguinaire, salie par des occupations illégales, basée sur les violations des droits humains et sur le mépris du droit international.

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Rafles, enlèvements, meurtres, blocus, sont le lot quotidien des Palestiniens sous occupation - Photo : AFP

Israël et ses partisans dépeignent généralement Israël comme un pays de miracles. Rien d’autre ne pourrait expliquer l’étonnante « naissance » de ce pays et sa survie malgré toutes sortes de « menaces existentielles ». Comment Israël aurait-il pu, sans l’intervention d’un miracle, se développer à un rythme aussi phénoménal, faire « fleurir le désert » et obtenir continuellement les meilleures notes parmi les nations développées pour des résultats tout à fait remarquables ?

Par contre, on continue à dépeindre les Palestiniens comme « leurs propres pires ennemis », un peuple qui ne « rate jamais l’occasion de rater une occasion » et qui se tient en dehors des paramètres d’un comportement humain rationnel. On détache souvent Israël, si pas systématiquement, sur la toile de fond régionale « arriérée », « non démocratique » d’Arabes et de musulmans essentiellement violents.

De telles représentations - Israéliens éclairés, civilisés, confrontés à des Arabes arriérés, méchants - sont les éléments constitutifs d’une polémique que diffusent inlassablement les médias américains, occidentaux et israéliens. Le plus souvent, ces assertions ne sont pas contestées et définissent ainsi la manière dont l’Occident perçoit Israël et son « droit » moral « d’exister ».

L’argument est enraciné dans les horreurs de l’holocauste juif ; toutefois, ceux qui tirent les ficelles pour Israël ont réussi à transformer une sympathie méritée pour cette tragédie en une affirmation injustifiée. Ils comparent effectivement en quelque sorte les Palestiniens avec l’Allemagne nazie afin de justifier l’état de guerre permanent au nom de l’auto-défense.

Dans ce contexte spécifique, impossible d’exagérer le pouvoir des medias. Ceux-ci ont défini une réalité fallacieuse sur la base d’un récit faussé. Jamais l’histoire n’a été aussi déformée que celle de la Palestine et d’Israël. Jamais la victime n’a été aussi carrément blâmée de son propre malheur. Ceci n’est pas un contre-récit arrogant opposant les concoctions israéliennes. C’est la vérité manifeste qui continue à être soit ignorée, soit incomprise.

Les « miracles » souvent associés à Israël ne sont pas choisis au hasard ; ce sont des assertions. Le miracle a une connotation religieuse, et se réfère à ce qui est inexplicable et surnaturel. Il ne peut donc être rationnellement remis en question. Cette formule a bien servi les objectifs stratégiques d’Israël.

D’une part, on décrit l’existence d’Israël comme une sorte de résurrection : après avoir été presque annihilé, il a connu une renaissance « miraculeuse ». En effet, étant donné la manière dont l’histoire de la naissance d’Israël est présentée, le récit n’est pas moins impressionnant que les légendes bibliques.

Ce discours a été utilisé avec succès pour attirer un groupe beaucoup plus nombreux que celui qui s’identifie à Israël pour des raisons ethniques ou religieuses. Il a impressionné des dizaines de millions de fondamentalistes chrétiens dans le monde. Aux Etats-Unis, ce sont les sionistes chrétiens qui forment l’armature populaire du camp pro-israélien.

Alors que les juifs américains votent généralement en fonction de leurs intérêts économiques ou politiques, les sionistes chrétiens considèrent leur allégeance à Israël comme un devoir religieux.

De même que tous les miracles religieux, les miracles israéliens sont une « question de foi ». Ils peuvent être soit acceptés en bloc, soit rejetés ; l’essentiel c’est qu’ils échappent à toute discussion, qu’ils n’ont pas besoin d’être attestés.

Ceux qui sont assez bêtes pour déconstruire ce fait - et donc dire qu’Israël est un Etat qui peut être tenu responsable en droit, comme tous les autres Etats - s’attirent les foudres de Dieu (dans le cas du « vrai croyant ») ou les foudres des medias et du lobby sioniste (dans le cas des sceptiques).

Quand un homme politique américain, par exemple, est accusé de ne pas « soutenir entièrement Israël », point n’est besoin de justifier l’accusation. Elle est autonome, comme un commandement biblique qui a survécu à l’épreuve du temps et de la raison : tu soutiendras entièrement Israël. L’homme politique accusé ne peut que défendre son dossier de soutien à Israël ; il ne peut pas demander pourquoi il doit le faire, en premier lieu, ni même reconnaître que l’histoire d’Israël est sanguinaire, salie par des occupations illégales, basée sur les violations des droits humains et sur le mépris du droit international.

A mesure qu’approche le soixantième anniversaire de la prétendue naissance d’Israël, on présentera abondamment une déformation - encore que grotesque- de cette histoire. Les grands pontes des medias et les hommes politiques célébreront le miracle, et omettront la manière dont Israël a été installé sur les ruines de centaines de villes et de villages palestiniens.

Les massacres et le nettoyage ethnique connus sous le nom de la Catastrophe palestinienne - la Nakba - n’ont pas été le fait de séraphins invisibles et miraculeux, mais plutôt l’ ?uvre de bandes sionistes bien entraînées, bien armées et de leurs partisans.

Les Palestiniens n’ont pas non plus perdu la bataille en raison de leur laxisme ou de leur arriération. Leur courage, pour ceux qui prennent la peine de consulter des ouvrages historiques sérieux (comme celui d’Ilan Pappe ou de feu le professeur palestinien Edwar Said), est un titre d’honneur que les Palestiniens porteront pendant les années à venir. Les Palestiniens ont perdu parce que, ainsi que le montrent des expériences historiques parallèles, ni le courage, ni la force d’âme ne permettent de résister à tant de forces puissantes conjuguées travaillant à leur perte.

En outre, ceux qui célèbrent les efforts miraculeux d’Israël pour faire fleurir le désert - sous-entendu : les « Palestiniens nomades » n’avaient pas de rapport avec la terre « négligée » et seul le « retour » des propriétaires légitimes a permis son renouveau ; ceux là, oublieront probablement que c’est le prolétariat palestinien - une main d’ ?uvre bon marché, opprimée et dépossédée - qui travaillait le plus souvent la terre, qui a bâti les maisons et a cultivé les jardins de l’Etat miracle. Pas moins de cent milliards de dollars des contribuables états-uniens ont contribué à la viabilité économique actuelle d’Israël et à son état d’alerte militaire.

Sur tout cela Israël et les « amis d’Israël » dans le monde fermeront probablement les yeux lorsqu’ils célébreront une autre année miraculeuse de survie et d’affluence. Se demanderont-ils pourquoi plus de cinq millions de réfugiés palestiniens sont dépossédés et dispersés de par le monde ? Auront-ils une pensée pour les milliers de Palestiniens brutalement assassinés afin qu’Israël puisse vivre ce fallacieux miracle ? Comprendront-ils jamais la douleur et les larmes des générations successives qui meurent en tenant la clé de leur maison détruite, le titre de propriété de leurs terres volées et les souvenirs de ce qui était un jour une belle réalité à laquelle ils ont été violemment arrachés ?

Si miracle de l’existence d’Israël il y a, il est fondé sur les mensonges qui ont pu se perpétuer pendant si longtemps, en dépit des preuves contraires évidentes. Le miracle effectivement est qu’une injustice aussi grave ait pu régner si longtemps sans être jamais contestée.

(*) Ramzy Baroud est l’auteur de « The Second palestinian Intifada : A Chronicle of a People’s Struggle » et rédacteur en chef de « PalestineChronicle.com »

Site Internet :
www.ramzybaroud.net

Du même auteur :

- Gaza : le pouvoir du peuple
- Elections américaines : une superproduction hollywodienne
- Malgré les « bonnes nouvelles », l’Irak va mal
- Exploiter politiquement la misère qui sévit dans Gaza ?

24 janvier 2008 - Diffusé par l’auteur - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2008/881...
Traduction : amg


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