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Se préparer au pire

mercredi 21 novembre 2007 - 23h:49

Saleh Al-Naami - Al Ahram Weekly

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Selon le Hamas, l’administration américaine, Israël et le gouvernement de Salam Fayyad auraient discuté de l’installation des forces de l’OTAN dans Gaza une fois que l’armée israélienne aurait conclu son offensive.

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Section du mur d’apartheid, village d’A-ram, près de Jérusalem - Photo : AP

L’entrée de la maison s’ouvre sur une modest salle d’attente qui est remplie toute la journée et la majeure partie de la nuit. Habillés en civil ou en tenue militaire, les hommes portent des dossiers et attendent patiemment la permission d’entrer. C’est la maison de Said Siyam, ministre de l’intérieur dans le gouvernement d’Ismail Haniyeh et qui suit les affaires de la bande de Gaza. Siyam dirige le ministère de l’intérieur et ses agences de sécurité depuis un simple bureau orienté au nord du premier étage de sa maison dans le quartier Al-Nasr dans la ville de Gaza.

Il n’est pas le seul ministre à gérer les affaires de son ministère depuis son domicile ; la plupart des ministres prennent en charge l’essentiel de leur travail dans leurs maisons privées. Ceci est vu comme une mesure préventive, dans la crainte que les ministères et les organismes gouvernementaux soient visés par des bombardements israéliens — quelque chose qui s’est déjà produit plus d’une fois. « Nous vivons dans des circonstances anormales, et ainsi nous devons nous organiser de façon non traditionnelle, » explique Siyam. « Nous devons nous adapter à toutes les conditions, être prêts pour tous les scénarios, et prendre des dispositions pour le plus mauvais d’entre eux, » dit-il à ?Al Ahram Weekly’.

Tandis que les employés et le personnel de sécurité travaillent actuellement dans leurs établissements et bureaux, ceci peut changer à tout moment, en particulier si Israël décide de lancer une offensive à grande échelle contre la bande de Gaza suivant les conclusions de la conférence internationale à Annapolis. ?Al Ahram Weekly’ a appris que le gouvernement de Haniyeh a préparé un plan d’évacuation des sièges sociaux et des établissements civils et de sécurité.

Ce plan prévoit de placer le plus petit nombre de personnes possible dans le plus grand nombre possible d’endroits tout en délivrant le plus de services qu’ils pourront au public durant toute attaque contre la bande de Gaza. En complément à ces plans, les préparations et la formation se poursuivent pour faire face à une confrontation militaire avec l’armée israélienne si une campagne militaire est déclenchée contre le territoire. Les combats qui ont eu lieu récemment dans la bande de Gaza entre les soldats de l’occupation et les combattants du Hamas montrent que le Hamas se prépare de façon significative pour s’opposer à de telles attaques.

La dernière édition du dimanche de ?Haaretz’ a rapporté les impressions des soldats de réserve du corps de parachutistes dans l’armée israélienne qui ont récemment servi dans la bande de Gaza. Leurs impressions sont que le Hamas combat comme une armée régulière à tout point de vue. Amos Harael, le correspondant militaire du journal, rapporte d’après les paroles de soldats que « selon toutes les normes nous avons fait face à une armée, pas à des bandes. » Les soldats ont été impressionnés de la performance sur le plan militaire de ces combattants et des moyens modernes qu’ils ont employés, particulièrement leurs systèmes de vision nocturne. Les soldats ajoutent : « Les combattants palestiniens n’ont jamais été ainsi auparavant. Nous devons cesser de les décrire comme des terroristes, et nous plutôt devrions les appeler des guerriers. »

Gideon Lévy, l’auteur et commentateur israélien bien connu, soutient que plus la force de Hamas se développe et plus Israël se rend compte qu’une épreuve de force sera coûteuse ; Israël peut être amené à réfléchir soigneusement avant de décider d’une campagne militaire contre Gaza ou de tenter de l’occuper. Mais la direction du Hamas et de son gouvernement dans Gaza agit selon l’idée que les plus mauvais scénarios possibles se produiront. La chose dont s’inquiète le plus la direction du Hamas est le fait que des plans israéliens pour mener une attaque à grande échelle contre la bande de Gaza ne sont plus liés à des objectifs précis sur le terrain comme faire cesser les tirs de missiles vers des colonies israéliennes ou mettre un terme aux opérations de contrebande faites par les mouvements de résistance selon Israël. Ce serait plutôt le résultat d’un accord entre Israël et l’Autorité Palestinienne (AP) sous les auspices américains pour mettre en application la première étape de la prétendue feuille de route. Cette étape oblige l’AP à briser et désarmer les mouvements de résistance et à faire cesser l’incitation [à la résistance] contre les occupants.

L’AP a commencé à remplir ses engagements liés à la feuille de route en ordonnant aux agences palestiniennes de sécurité en Cisjordanie d’effectuer des campagnes d’arrestation contre les militants du Hamas, et en essayant aussi de persuader plus de militants du Fatah de désarmer en échange d’une promesse israélienne de cesser de les poursuivre. Mais dans Gaza, les agences de sécurité d’Abu Mazen n’ont aucune véritable présence et Israël a décidé de remplir cette mission en envahissant la bande de Gaza et en frappant durement les mouvements de résistance.

Israël visera en particulier le Hamas et cherchera à renverser son gouvernement afin de préparer le retour de Fatah. Yehia Moussa, député représentant le bloc parlementaire du Hamas, insiste sur le fait que le Hamas se prépare à ce scénario et est décidé à le faire échouer.
« Ce sera une guerre par procuration qui cherchera à rétablir certaines conditions qui prévalaient [avant juin dernier], non seulement pour se débarasser du Hamas, mais pour créer un environnement politique approprié qui permettrait à Abu Mazen de faire de nouvelles concessions à Israël afin de parvenir un règlement du conflit qui ne dépasse pas les lignes rouges israéliennes, » a-t-il dit à ?Al Ahram’.

Mais le Hamas s’attend à une situation plus encore plus compliquée que cela et qui va au-delà de l’offensive militaire israélienne. Une source haut placée dans le Hamas a dit à ?Al Ahram’ avoir obtenu une information selon laquelle l’administration américaine, Israël et le gouvernement de Salam Fayyad ont récemment discuté la possibilité de concentrer des forces de l’OTAN dans Gaza une fois que l’armée israélienne aurait conclu ses opérations. L’objectif serait que ces forces maintiennent les nouvelles conditions jusqu’à ce que les agences de la sécurité d’Abu Mazen aient pu reprendre le contrôle de la bande de Gaza. Cette source a indiqué que l’Espagne a annoncé vendredi passé que son gouvernement était prêt à envoyer des forces dans la région si on le lui demandait, et si un accord était conclu entre Palestiniens et Israéliens.

Nous avons également appris que le Hamas a prévenu un certain nombre de gouvernements européens, par le biais d’intermédiaires, qu’ils commettraient une grave erreur s’ils acceptaient d’envoyer leurs forces dans la bande de Gaza.

Tout ceci fait partie des préparatifs du Hamas pour contrer une opération militaire d’envergure et à long terme. Quels sont ces préparatifs pour réagir au siège actuel et aux punitions collectives qui vont devenir encore plus dures ? Nehad Al-Cheik Khalil, un chercheur spécialisé sur les mouvements islamiques, estime que le Hamas parie sur les ressources humaines palestiniennes et leur capacité élevée pour la patience et la résistance. Il note que la direction du Hamas a essayé de changer la façon dont ces ressources sont utilisées en transformant la patience en énergie active face au siège. Al-Cheik Khalil dit que le Hamas discute maintenant de projets pour intensifier la production agricole en dépit des surfaces limitées assignée à la culture.

« Au Hamas, ils considèrent le siège comme une occasion pour reformuler la société palestinienne et établir une économie de résistance basée sur l’évolution de la société palestinienne depuis une société de dépendance vis-à-vis de l’aide étrangère jusqu’à une siciété capable de travailler et à prendre appui sur elle-même, » ajoute-t-il. Al-Cheik Khalil relève qu’en dépit de la pression des intérêts israéliens et américains, la connivence du gouvernement de Fayyad et le silence du monde arabe par rapport au siège, les Palestiniens sont capables d’étonner tout le monde et de briser le siège. Il dit aussi qu’il n’est pas impossible que des centaines de milliers de Palestiniens marchent aux frontières et essayent de les traverser, étant peu disposés à mourir sous la pression du blocus.

Certains au Hamas estiment que leur direction devrait montrer plus de flexibilité afin de convaincre le président palestinien de dialoguer avec elle, arguant du fait que la réussite du dialogue peut mener à la fin du siège. Al- Nassereddin Al-Shair, ancien ministre de l’éducation et un des responsables Hamas en Cisjordanie, soutient que la seule sortie de cette tragique situation se situe dans le dialogue national, et qu’un consensus doit être trouvé pour une autorité légitime unique. « Quand la direction du Hamas dit qu’elle est préparée à dialoguer avec Abu Mazen, mais sans conditions, c’est un problème, parce que de cette manière il n’y a aucune possibilité d’avancer vers le dialogue, » dit-il à ?Al Ahram’.

Al-Shair soutient qu’en fait, le Hamas a posé ses propres conditions en demandant que les agences de sécurité soient réorganisées. Pourtant il soutient également que l’insistance d’Abu Mazen à rétablir les conditions existantes avant les actions militaires [de juin dernier] ne pose pas de problèmes moins sérieux. « Il y a les conditions auxquelles on peut retourner, et celles auxquelles vous ne pouvez pas, » dit-il encore. Il est clair que ce n’est pas tout le monde dans le Hamas qui est d’accord avec Al-Shair. Certains pensent que le Hamas a fait tout ce qu’il pouvait pour convaincre Abu Mazen d’accepter de s’engager dans un dialogue.

De toute façon, la direction du Hamas agit sur la base des plus mauvais scénarios possibles et considère que même si le dialogue était repris, le siège peut perdurer. Plusieurs dirigeants du Hamas pensent même que la mise en oeuvre de l’accord de la Mecque et la formation d’un gouvernement national d’unité n’entraîneraient pas une levée du siège imposé aux Palestiniens.

Quelles que soient les conditions, il est clair que le Hamas est déterminé à durer en usant de tous ses mécanismes d’adaptation. Il se prépare au pire en termes de sécurité et de conditions économiques et fait tous ses efforts pour empêcher un retour aux conditions qui existaient avant sa prise de contrôle de la bande de Gaza.


Du même auteur :

- Le vrai visage de Tony Blair
- Traitement médical contre trahison
- Dure réalité pour le Fatah
- Troisième Intifada

15 novembre 2007 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2007/871...
[Traduction : APR - Info-Palestine.net]


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