La démoralisation du peuple palestinien est un préalable à la liquidation de ses droits
vendredi 16 novembre 2007 - 06h:59
Adel Samara
Entretien avec Adel Samara, réalisé par Pauline Salingue
Adel Samara est un économiste et écrivain palestinien. Il vit à
Ramallah. Il est journaliste au quotidien AlarabOnline et directeur du
Centre oriental pour les études culturelles. Il dirige également la
revue palestinienne trimestrielle Kana’an. Il a publié de nombreux
livres traitant de la question palestinienne, malheureusement pas
traduits en Français à ce jour. En novembre 1999, il fut l’un des 20
signataires d’un appel dénonçant la corruption, le manque de démocratie
et les trahisons de l’Autorité Palestinienne. Cela lui a valu d’être
arrêté par la police palestinienne à l’époque.
Pauline Salingue est militante politique, co-réalisatrice du film "
SAMIDOUN, nos racines sont toujours vivantes " (samidoun194@ yahoo.fr),
actuellement présente en Palestine depuis 6 semaines
- Mahmoud Abbas, au centre sur la photo.
1/ Quelle est ton analyse de la prochaine conférence d’Annapolis ?
Je pense que la prochaine réunion au sommet à Annapolis est davantage
une initiative de relation publique qu’une initiative politique pour
prendre des décisions ou pour mener des négociations sérieuses entre
Israéliens et Palestiniens. En dépit de cela, les Israéliens font tout
pour annuler ou pour dépouiller le plus possible les Palestiniens.
Les Palestiniens ne retireront rien de cette rencontre parce qu’ils sont
divisés et aux prises avec un affrontement interne.
Le front arabe est en piteux état et la plupart des régimes arabes sont
favorables à la normalisation des relations avec le régime sioniste.
Il en est de même au niveau international et il est clair que cette
politique sera maintenue.
Maintenant la France s’aligne sur la Grande Bretagne dans le soutien au
gouvernement des Etats Unis et même pour la Russie, dont la politique ne
semble pas encore clairement fixée, nous ne savons pas ce que sera son
attitude.
Je pense qu’Israël retirera quelque chose de cette rencontre, tout au
moins un nouveau groupe de régimes arabes normalisera les relations avec
Israël et le reconnaîtra.
C’est le dénouement cherché par Israël, étape par étape : développer et
renforcer ses relations avec les classes dirigeantes arabes et limiter
son obligation de donner quoi que ce soit aux Palestiniens. Israël a
toujours rêvé de pouvoir négocier avec les régimes arabes sans rien
donner aux Palestiniens.
Comme chacun le sait maintenant, les Américains vont être confrontés à
un désastre en Irak.
Aussi veulent-ils faire quelque chose pour gagner le soutien d’autres
régimes arabes à leur politique en Irak.
Tous les Etats qui participeront à cette conférence vont montrer, ou
vont prétendre, que les USA veulent donner quelque chose aux
Palestiniens et qu’il faut donc soutenir l’occupation américaine de l’Irak.
Peut-être qu’après cela il y aura un début de retrait des Américains
d’Irak, remplacés par des troupes arabes ou de pays islamiques pour
poursuivre la division et la partition de l’Irak.
Je pense vraiment que cette conférence n’apportera que des choses très
négatives.
Ce n’est pas parce que l’Autorité palestinienne est faible qu’elle est
prête à discuter et à se soumettre. C’est parce que ce groupe de
personnes et le gouvernement actuel représentent le plus grand danger
pour les Palestiniens depuis Oslo.
Depuis les accords d’Oslo, jusqu’aux deux dernières années, c’est le
Fatah qui exerçait le rôle d’Autorité d’autonomie, dans les conditions
fixées par Israël, en Cisjordanie et à Gaza.
Aujourd’hui ce n’est pas le Fatah qui dirige en Cisjordanie. Peut-être
que c’est le Hamas à Gaza, mais en Cisjordanie ce n’est pas le Fatah.
Ceux qui dirigent en Cisjordanie, ce sont les capitalistes palestiniens.
Le gouvernement constitue un courant dans la vie politique
palestinienne. Le Premier ministre, Salam Fayyad, est à la fois
palestinien et l’homme du FMI. Certains, qui appartenaient à la Gauche,
sont devenus tout bonnement des traîtres.
D’autres viennent des ONG. Tous ces gens sont les capitalistes réels de
Cisjordanie.
C’est une nouvelle alliance. Les USA voulaient donner le pouvoir à ces
gens depuis Oslo.
Mais ce groupe n’a jamais réussi à conquérir une base populaire forte.
[1] Ils n’ont pas de parti, ils n’ont jamais participé à la lutte armée,
ce sont des politiciens qui n’ont aucun enracinement populaire.
Aujourd’hui ils chevauchent le Fatah car ce parti est actuellement
l’instrument qui porte le nouveau régime, le nouveau gouvernement.
Un autre aspect du problème est le suivant : qui maîtrise les ressources
financières ?
Ce régime a la possibilité de dire : regardez, nous avons l’argent, si
vous êtes contre nous, il n’y aura pas de salaires !
C’est pour ça que je crois que ce gouvernement est le plus dangereux
depuis Oslo, parce qu’il repose sur le secteur privé, les gens du FMI,
certaines ONG etc.
2/ Des militants du FPLP m’ont expliqué qu’ils étaient certes contre
cette conférence mais qu’en définitive ce n’était pas grave, car ce
serait un échec.
D’abord, quand des gens disent que la conférence ne réussira pas,
qu’elle ne sera pas un succès, quel est le sens de cette idée ?
C’est ça la vraie question : qu’est-ce qui serait un succès pour les
Palestiniens ?
Que les Israéliens acceptent le droit au retour des réfugiés ? Qu’ils se
retirent de Cisjordanie ?
La chose la plus importante, c’est que la conférence va être une
victoire pour les Israéliens et un échec pour les Palestiniens.
Quand des gens du FPLP disent " nous sommes contre cette conférence
parce qu’elle ne va rien donner " le problème est que, ce faisant, le
FPLP soutient Abbas, Fayyad, les capitalistes palestiniens, les
partisans de la normalisation des relations avec Israël et du compromis
qui se servent du FPLP.
Certains nouveaux jeunes dirigeants sympathiques disent " nous sommes
contre ! "
OK ! Mais ça n’a pas de sens, ça ne vaut rien ! Parce que si vous êtes
contre, vous devez exercer une pression sur vos dirigeants pour qu’ils
ne se lient pas à ce régime.
Mahlouh [2], qui est ici le dirigeant du FPLP, ne laisse pas passer un
jour sans écrire quelque chose contre le Hamas, pour appuyer Abbas et
pour soutenir les négociations.
Donc, qui est le FPLP ? Ce sont les jeunes cadres qui dans tel ou tel
village pleurent ou hurlent ? Ou les dirigeants qui livrent leur
organisation à la droite et aux traîtres ? Ils ne sont même plus
nationalistes !
C’est pour ça qu’il faut que le FPLP réponde à une question très
importante : Qui êtes vous et qui vous représente et énonce votre
orientation politique ?
Aujourd’hui beaucoup des militants du FPLP de l’extérieur proclament
qu’ils sont en faveur d’un seul Etat pour les deux peuples etc.
Qui est le FPLP ? Ceux qui ici soutiennent Abbas ou ceux qui déclament à
Paris ou à Londres ?
3/ D’autres m’ont dit que le vrai problème aujourd’hui, c’était le Hamas...
Le vrai problème, c’est que le Hamas s’est retrouvé sous la pression des
normalisateurs qui voulaient le chasser du pouvoir.
C’est pour ça que le Hamas était sur la défensive et qu’il a agi de la
manière qu’on sait, parce que c’était une confrontation armée entre
deux partis : le Hamas et le Fatah.
Il ne fait pas de doute qu’à terme l’un des deux gagnera, mais l’heure
n’est pas encore venue.
Mais si le Hamas est " le principal problème ", qu’en est-il de
l’occupation ? Et que dire de l’Etat d’Israël ??
4/ Que penses tu de la répression dont sont victimes les militants du
Hamas en Cisjordanie ?
C’est une répression double. Les deux partis se répriment mutuellement.
Ce que le Hamas fait à Gaza est connu du public parce que, que ce soit
au niveau local, en Israël, dans les régimes arabes ou au niveau
international, les médias soutiennent l’Autorité Palestinienne.
Mais la même chose se produit en Cisjordanie.
Au moins 800 militants du Hamas sont emprisonnés et torturés dans les
prisons de l’Autorité.
D’autres sont hospitalisés et il n’est même pas possible de leur rendre
visite.
C’est la même chose. Les deux partis ont un comportement fasciste et
s’affrontent pour le pouvoir, pour l’argent etc.
L’Autorité n’agit pas seulement contre le Hamas. Personne n’a le droit
de critiquer l’Autorité, et pas seulement les gens du Hamas.Même les
journaux indépendants, ou plutôt les journaux qui appartiennent au
secteur privé, attaquent le Hamas, publient des informations fausses,
encore plus mensongères que ce qu’on trouve dans les organes de
l’Autorité ! Les gens ne se sentent pas autorisés à prendre une position
de neutralité. Et la répression contre le Hamas est vraiment sévère.
J’ai un ami avocat. Il m’a parlé de 8 officiers de police de l’Autorité
qui se sont enfuis de Gaza après l’effondrement de l’Autorité dirigée
par le Fatah. Ce ne sont pas des officiers de rang supérieur et
maintenant l’Autorité veut les sanctionner, ils vont passer en procès.
L’Autorité veut les condamner parce qu’ils ont failli à leur devoir,
parce qu’ils n’ont pas résisté.
Lors d’un entretien ils ont dit qu’ils avaient apporté la preuve qu’ils
étaient restés jusqu’au dernier moment en tenant leurs positions mais
que les responsables politiques et militaires de haut rang s’étaient
enfuis deux ou trois jours avant la fin. Et ils demandent pourquoi on ne
demande rien à ces gens qui ont fui la bataille !
5/ Des militants du FPLP m’ont parlé d’un projet de fonder un nouveau
parti. Quelle est ton opinion ?
Encore et encore ! Cette histoire a commencé il y a une dizaine
d’années. D’un point de vue de gauche, marxiste ou nationaliste ou
progressiste...c’est une imposture.
Ils soutiennent l’Autorité et l’OLP, ils ne font pas autre chose que ce
que fait le Fatah.
Ils ne sont rien d’autre qu’une ramification du Fatah, ils émargent
directement au budget du Fatah.
Ce sont des menteurs. Vraiment je pense que ça suffit ! Ça suffit !
A l’extérieur ils manipulent les gens et leur mentent.
Maintenant les choses sont claires. Ceci n’a rien apporté à la lutte, rien.
Tous ceux qui se proclament les forces démocratiques, le Front
Démocratique, le Front Populaire et d’autres petits groupes ici ou là,
travaillent en réalité à protéger le Fatah.
Ce dont nous avons besoin aujourd’hui, c’est d’une autre organisation,
une nouvelle OLP, pour remplacer maintenant l’OLP.Nous avons besoin
d’une nouvelle direction qui déclare la faillite de la direction
actuelle de l’OLP et qui affirme la volonté d’être une nouvelle OLP.
Tous ceux qui travaillent aujourd’hui dans le giron de l’OLP sont des
menteurs.
Il y en a assez ! J’étais invité à aller à la conférence de Damas [3],
mais je n’irai pas.
Nous avons besoin d’un nouveau régime arabe, prêt à dire son opposition
à la reconnaissance d’Israël, opposé à la négociation actuelle, exigeant
que le premier point de toute négociation soit le droit au retour des
réfugiés.
Et nous avons aussi besoin d’une organisation palestinienne prête à dire
" nous sommes la nouvelle OLP et les Abbas, Abed Rabbo et tous les
autres sont des traîtres ".
Mais ceux qui préparent la rencontre de Damas veulent avant tout "
démocratiser " l’OLP. Je n’y crois pas du tout, c’est tout simplement
impossible !
6/ Il semble que le Jihad islamique soit désormais une des seules
organisations qui continue à résister. Que peut on attendre et espérer
d’eux ?
Ils sont réellement différents du Hamas sur beaucoup d’aspects. L’un
d’entre eux est qu’ils ne cherchent pas une place au pouvoir ou dans
l’Autorité Palestinienne, contrairement au Hamas. Ils croient réellement
que leur rôle est de libérer la Palestine et pas d’en contrôler un
canton. C’est pour cette raison qu’ils n’ont pas participé aux
élections. On peut ajouter qu’ils ne sont pas intéressés à intervenir
dans la vie quotidienne des Palestiniens car ils pensent que, tant que
la Palestine sera sous occupation coloniale, leur rôle est de lutter
contre cette occupation et pas pour le pouvoir, pas pour essayer de
contrôler le régime d’autorité.
Ils sont également moins fondamentalistes que le Hamas au niveau social.
C est pourquoi ils sont plus modérés sur les relations au sein de la
société, la question des genres, etc. Mais ils restent religieux, c’est
pourquoi je ne peux pas dire qu ils défendent l’égalité entre hommes et
femmes par exemple, c’est trop tôt pour ça. C’est là la principale
différence au niveau politique et social et je pense qu’à cause de ça
ils sont une minorité, un petit groupe, mais bien organisé, bien
implanté et qui reste fidèle à son but. Mais ils n’écrivent pas
beaucoup. Je ne sais pas si on peut espérer quelque chose d’eux, je ne
pense pas qu’ils soient l’avenir de la Palestine... Mais, s’il y avait
un mouvement socialiste authentique, ils seraient moins en
contradiction avec lui que le Hamas et le Fatah. Comment vont ils
évoluer ? Comment vont ils se développer ? Cela dépend de l’évolution de
la situation sociale, de la situation locale. Mais de là à dire qu ils
sont l’espoir, je ne le pense pas !
7/ Beaucoup de gens du peuple semblent démoralisés. Ils ne croient pas
à la conférence, mais on perçoit parfois un peu d’espoir quand même...
Le problème c’est qu’il y a une politique de démoralisation du peuple.
Cette politique donne vraiment la chair de poule.
Comme les dirigeants font de plus en plus de compromis, ils accentuent
la pression et répriment.
Mais je pense que la principale raison de la démoralisation, c’est
l’absence d’une vraie direction politique. Avec une telle direction, les
gens changeraient.
Mais si le peuple constate que la direction fait de plus en plus de
compromis et est de plus en plus corrompue, alors même les militants
vont privilégier la dimension de leur vie quotidienne et notamment la
situation de leur famille.
Ici comme dans n’importe quelle autre société, si vous avez une vraie
direction, un parti capable de sentir les évolutions de la situation et
les attentes de la population et qui essaye de faire quelque chose, il
est certain que les gens vont changer d’attitude.
Il n’existe pas de société dans le monde où le peuple soit capable de
lutter sans interruption. Donc, tout dépend de la situation. Maintenant,
comme la direction trahit, les gens pensent : qu’est-ce que je peux
faire ? C’est ça le problème essentiel.
Tout le monde n’en est pas rendu là, évidemment. Mon analyse de
l’évolution de la société palestinienne m’amène à dire qu’il y a une
possibilité de fonder un courant politique avec des militants valables
...Mais cela prendra du temps.
Il y a un vrai problème, c’est qu’à l’époque où tout devient marchandise
dans le monde, même pour construire un parti politique il faut de
l’argent.
C’est ça la globalisation capitaliste, vous pouvez me croire !
Même les partis politiques sont soumis à cette globalisation. Pour
trouver sa place, pour avoir un journal d’informations, pour trouver une
radio...il faut de l’argent. Et les gens honnêtes n’ont pas de relations
avec les sources de financement !
Souvent, quand on se rencontre entre militants qui essayent de faire
quelque chose, à la fin, nous constatons que si l’un de nous devait être
arrêté, nous n’aurions même pas de quoi soutenir sa famille !
C’est ça le problème principal. Je pense que c’est pour ça que des gens
comme Abbas, comme le FPLP et comme tous ceux qui veulent le compromis
ne s’inquiètent pas, parce qu’ils savent que la situation n’est pas en
faveur de ceux qui critiquent.
8/ Penses tu que le mouvement international de solidarité porte des
responsabilités dans le désastre actuel ?
Je suis désolé de le dire comme ça, mais je pense que le principal
problème des campagnes de soutien à la cause palestinienne, c’est que
les gens qui menaient ces actions ne connaissaient qu’un aspect des
choses : celui des corrompus et des normalisateurs avec Israël.
Dès lors, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi le soutien aux
Palestiniens est en baisse.
Au fond, de quelle solidarité avons-nous besoin ? Je pense que tous
ceux, tous les groupes qui veulent affirmer leur solidarité avec les
Palestiniens, mais qui préconisent la solution des deux Etats, acceptent
la politique israélienne et font une sorte de charité, ce n’est pas de
la solidarité.
La solidarité doit considérer qu’Israël occupe toute la Palestine et que
le Peuple palestinien a le droit au retour.
Si on veut être politiquement solidaire et aider le Peuple palestinien,
c’est la seule approche possible. Toute autre approche est inutile et,
en définitive, n’est qu’un soutien masqué à Israël
ou un soutien à l’Autorité palestinienne, les deux étant contre les
intérêts du Peuple palestinien.
Les Palestiniens radicaux doivent dire aux militants de la solidarité :
écoutez, le conflit ne sera jamais résolu tant qu’il n’y aura pas un
Etat pour les deux peuples et Israël devra s’y résoudre.
Peut-être que ça prendra 10 ans, 12 ans, 20 ans ou 50 ans...De toute
manière, Israël ne nous donnera rien, même si nous patientons encore 100
ans ! Alors on peut attendre. Pour construire des solutions historiques
durables, il faut du temps.
Je veux aussi évoquer ceux qui parlent aujourd’hui d’un " état laïque
et démocratique ".
C’est quoi, la démocratie ? Peut-être bien que c’est une ânerie ?
Si cet Etat n’est pas un Etat socialiste, ça ne tiendra pas, parce que
l’égalité sous un régime capitaliste, un régime capitaliste israélien et
palestinien, ce sera l’égalité dans une prison, l’égalité sous la
répression.
Ce ne sera pas l’égalité dans la vie réelle, parce que dans un " Etat
démocratique ", qui possèdera la terre ? Les Israéliens. Qui dirigera
l’armée ? Les Israéliens. Qui maîtrisera les bases économiques du
développement ? Les Israéliens. A quoi les Palestiniens pourront-ils
prétendre ?
C’est pour ça que je pense que beaucoup de militants israéliens de
gauche, ou de la 4ème internationale ou du courant communiste soviétique
traditionnel etc. quand ils parlent d’un Etat démocratique, ils
perpétuent, directement ou indirectement, l’idée de négociations et de
relations avec l’Etat d’Israël.
Nous devons ouvrir grands les yeux. Ce qu’il faut, c’est nationaliser
l’ensemble des choses. La terre qui appartenait avant aux Palestiniens
est désormais propriété des Israéliens. Et bien, mettons la à
disposition de tous en la nationalisant. Ce sera un compromis de la part
des Palestiniens !
C’est ainsi que nous devons présenter la solution socialiste.
Ces dernières semaines j’étais en discussion avec des Palestiniens, ici
et en Syrie.
J’ai entendu dire que le socialisme n’était pas accepté dans la région,
que c’était prématuré.
Pourquoi c’est envisageable en Amérique latine et pas ici ? Sommes-nous
des ânes ?
De toute manière ce n’est pas satisfaisant pour ceux qui agissent en
solidarité et qui mettent leur énergie et parfois leur argent entre les
mains de gens qui ne font rien ici ou qui soutiennent la normalisation
avec Israël. Il faut y mettre un terme !
9/ Que penses-tu de la situation en Egypte ?
Le rôle de l’Egypte sera décisif pour tout changement de la situation
dans la région. Ce n’est pas d’ici que ça partira principalement, mais
d’Egypte.
Ce qui se passe aujourd’hui en Egypte, même si ça semble avancer
lentement, est très important.
Pour la défense de ses droits, la classe ouvrière égyptienne a engagé
maintenant une lutte contre le régime de Moubarak.
Toute ma vie j’ai pensé que les avancées positives nécessitaient du
temps, mais là c’est vraiment un bon début !
On ne doit pas croire pour autant que le régime est fini et qu’il va
s’effondrer rapidement.
Pour les Etats Unis, l’Egypte est un maillon décisif, plus important
qu’Israël peut-être.
Parce que si l’Egypte bascule, c’est tout l’équilibre entre Israël et
les Etats arabes qui change.
Les critiques américaines du manque de démocratie de Moubarak sont une
plaisanterie, l’Egypte est en réalité une pièce maîtresse pour les USA.
Notes :
[1] La liste dirigée par S Fayyad, nommé 1er Ministre par Abbas, avait
obtenu 2% aux élections de janvier 2006.
[2] Numéro 2 du FPLP, opportunément libéré par les Israéliens en juillet
2007.
[3] Conférence qui devait regrouper les opposants palestiniens et arabes
à la rencontre d’Annapolis. Sa tenue est aujourd’hui remise en cause,
suite aux pressions exercées sur les dirigeants syriens et sur certaines
des factions politiques qui étaient à l’initiative...
- Adel Samara
Du même auteur :
Palestine, mondialisation et résistance
Et aussi :
Des intellectuels palestiniens prévoient une très mauvaise issue à la confrontation Hamas-Fatah
Abbas joue gros
Adel Samara et Pauline Salingue, le 10 novembre 2007.
Transmis par Marie-Ange Patrizio