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Abbas joue gros !

dimanche 19 août 2007 - 12h:46

Khalid Amayreh - Al Ahram weekly

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Abbas a tout misé sur la collaboration avec Israël et les Etats-Unis et joue sa survie politique.

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Le monde des enfants de Gaza : faim endémique, violence des incursions israéliennes, blocus israélien et occidental ... - Photo : AFP

Dans un contexte de guerre de lutte d’influence pernicieuse empoisonnant le climat politique général dans les Territoires Palestiniens Occupés, avec le Président de l’Autorité Palestinienne (AP) Mahmoud Abbas s’escrimant à renforcer une « autorité » sans aucune véritable autorité, les différends entre le Hamas et le Fatah évoluent vers un point de non-retour.

L’hostilité grandissante entre les deux côtés, constamment alimentée par Israël et les Etats-Unis, a un effet franchement dépressif sur beaucoup de Palestiniens et peut entraîner des dommages irréparables pour leur cause nationale au moins dans un avenir rapproché.

En effet, le Hamas et le Fatah exploitent presque toute leur énergie et leurs maigres moyens les uns contre les autres, abandonnant leur cause nationale à la merci d’Israël selon la formule utilisée par un analyste politique palestinien.

Indépendamment des accusations lancées au grand jour, les gouvernements de Ramallah et de Gaza, chacun considérant l’autre comme illégitime, persécutent et arrêtent des partisans de l’autre bord, toujours « au nom de la loi » comme continuent à le dire leurs porte-parole respectifs.
Même les plus petites choses sont utilisées et manipulées par chaque bord contre l’autre, contre « l’ennemi ».

Dans la plupart des cas, les citoyens ordinaires, particulièrement dans la bande de Gaza, sont ceux qui ont le plus à perdre et le plus à en souffrir. Par exemple les milliers d’étudiants nouvellement diplômés des lycées et universités dans la bande de Gaza sont à deux doigts de tout perdre suite à une décision du ministère de l’éducation basé à Ramallah de ne pas reconnaître leurs diplômes lesquels ont été approuvés par le ministre de l’éducation basé à Gaza.

En Cisjordanie les miliciens masqués du Fatah, apparemment en accord avec le gouvernement de l’AP, continuent à piller les mosquées et les maisons, arrêtant les partisans du Hamas. Plusieurs échanges de coups de feu ont éclaté, visant la plupart du temps des partisans du Hamas, alors que le système judiciaire de l’AP est incapable ou peu disposé à intervenir.

Beaucoup de Palestiniens considèrent ces différends entre les deux gouvernements comme imbéciles et stupides étant donné le fait que les deux gouvernements et les deux autorités n’exercent aucune véritable souveraineté, toutes les deux étouffant sous une sinistre occupation militaire israélienne.

Le gouvernement de l’AP dans Ramallah, que Moshe Arens, l’ancien ministre israélien de la défense, a présenté comme « une création israélienne artificielle », dépend évidemment totalement d’Israêl même pour sa simple survie et combat le Hamas avec le soutien de l’occupant israélien.

De même, le gouvernement du Hamas dans Gaza et les 1,5 million de Gazaouites vivant dans les tourments de façon chronique, perpétuellement affamés, languissent sous un blocus hermétique qui les maintient à peine en vie. Le blocus tolère uniquement quelques expéditions de nourriture et il y a très peu de choses que le gouvernement du Hamas puisse faire si ce n’est d’espérer et de prier pour que la communauté internationale se radoucisse avant que Gaza ne devienne une autre Somalie.

Par conséquent les différends entre le Hamas et le Fatah devraient être considérés comme une épreuve de force entre des prisonniers qui sont en permanence tués, mutilés et traqués par le gardien de prison nommé Israël.

Il est vrai que le Hamas a constamment invité le régime basé à Ramallah à mener immédiatement des entretiens sérieux pour surmonter la crise qui épuise la santé mentale des Palestiniens. Cependant, Abbas, encouragé par le soutien occidental et israélien, a rejeté toutes les tentatives de réconciliation, particulièrement celles en provenance d’Egypte, d’Arabie Saoudite, du Yémen et même de la Russie, choisissant à la place de placer tous ses oeufs dans le panier américano-israélien.

Abbas, comme l’ont suggéré quelques conseillers, en est apparemment arrivé à considérer le divorce avec le Hamas comme l’occasion attendue depuis longtemps pour rétablir le moribond processus de paix et obtenir d’Israêl un état palestinien viable en Cisjordanie.

Ceci explique son rejet entêté d’un rapprochement avec le Hamas et l’incantation permanente : aucune réconciliation avec le Hamas tant que « les acteurs sanglants du coup de force » n’acceptent de défaire ce « coup » dans Gaza, et « ne reviennent à la situation qui était celle de Gaza avant les événements de mi-juin ».

Mais le chef palestinien n’est pas même disposé à dire à ces gens-là comment ces demandes condescendantes et insolentes pouvaient être satisfaites sans s’asseoir avec le Hamas.

Adel Samara est un intellectuel et un économiste de gauche connu en Cisjordanie, sans l’affiliation idéologique ou politique avec le Hamas ou le Fatah. Dans une entrevue exclusive avec Ahram al-Weekly, il met en avant le fait qu’il ne faut pas s’attendre à ce qu’Abbas discute avec le Hamas car le président palestinien « a abandonné son libre arbitre » aux mains des Américains et des Israéliens.

« Il est tout à fait clair que l’Autorité Palestinienne agit sous influence israélienne et américaine et qu’elle a perdu sa capacité d’agir de façon indépendante. »

« En fait, Abbas se trouve dans une situation où sa survie politique dépend beaucoup de sa capacité à apaiser Israël et l’administration Bush, tandis que discuter avec le Hamas, sans parler de la remise en place du gouvernement national d’unité, pourrait signifier pour lui le suicide politique. »

Soulignant la naïveté d’Abbas, Samara explique que l’administration Bush emploie le chef de Fatah uniquement comme force d’appoint pour la réalisation des buts stratégiques des Etats-Unis au Moyen-Orient. « Israel et les Etats-Unis l’emploient seulement pour affaiblir globalement la cause nationale palestinienne. Je m’inquiète du fait qu’avant qu’il ne reprenne ses esprits, la cause palestinienne aura été sérieusement affaiblie. »

Pense-t-il qu’Abbas compte trop sur la conférence régionale de paix convoquée par les Américains et prévue en novembre ? Selon Samara « Abbas est floué et dupé par Olmert. »

« Si vous voulez savoir la véritable pensée des israéliens, ne prêtez pas l’attention à ce que dit Olmert, mais prêtez attention à ce que dit Ehud Barak (ministre israélien de la défense). Et il dit ne pas beaucoup compter sur Abbas. »

Samara explique encore que la crise palestinienne actuelle est susceptible de durer encore quelques temps à moins que les états du monde Arabe, particulièrement l’Egypte et l’Arabie Saoudite, ne se hâtent d’exercer une vraie pression sur les deux bords et particulièrement sur Abbas afin de rétablir l’unité palestinienne.

Samara indique qu’Abbas faisait le pari d’une reddition du Hamas principalement en raison de l’impitoyable blocus israélien et occidental. « Je crois que le Hamas ne se rendra pas. Au contraire, le Hamas semble être déterminé a ne pas bouger et lui-même parie sur la désintégration du régime d’Abbas, principalement en raison de l’impossibilité prévisible d’Abbas d’obtenir des concessions politiques signicatives de la part d’Israël. »

Nasserudin Al-Sha’er, ancien premier ministre adjoint palestinien qui a été récemment libéré d’une prison israélienne après avoir été arrêté pour affiliation avec un parti politique illégal (le Hamas), est d’accord avec le pronostic de Samara. Al-Sha’er a indiqué à Al Ahram Weekly que la profonde méfiance réciproque entre le Fatah et le Hamas provient principalement de la conviction de chacun des deux bords que l’autre n’attend que de pouvoir l’écraser.

« A Gaza, le Hamas croit que le Fatah regroupe ses hommes afin de lancer une insurrection pour renverser le Hamas, et en Cisjordanie l’AP est persudée que le Hamas tente de faire la même chose. Dans les deux cas, des actes honteux sont commis, comme arrêter et persécuter des individus pour la seule raison de leur affiliation avec l’autre faction. »

Tout en reconnaissant le rôle de l’influence israélienne sur le gouvernement basé à Ramallah, Al-Sha’er estime que le réel problème empêchant l’unité nationale palestinienne a beaucoup à voir avec des facteurs internes aux Palestiniens. « Je comprends le facteur israélien, il est réel et je n’essaye pas de réduire son importance ; cependant, il est également vrai qu’il y a des facteurs spécifiquement palestiniens qui ont à voir avec l’aspect retardataire de notre politique et de notre idéologique qui sont à la base de notre culture politique. »

L’ancien professeur d’université déclare encore être certain que les Saoudiens et les Egyptiens feront plus d’efforts pour résoudre la situation palestinienne. « Je crois que l’Egypte et l’Arabie Saoudite se rendent compte de l’immense importance de trouver une solution à la situation palestinienne. Cela fait partie de leurs objectifs de sécurité nationale. »

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Khalid Amayreh

Du même auteur :

- Le manque de crédibilité de Bush
- Le précaire gouvernement Fayyad
- Faux-fuyants à Ramallah

17 août 2007 - Al Ahram weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2007/858...
[Traduction : IAO - Info-Palestine.net]


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