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Territoires palestiniens : Bush poursuit le ?désengagement’

lundi 23 juillet 2007 - 05h:53

Aluf Benn - Ha’aretz

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Dans le discours sur le Proche-Orient prononcé lundi de cette semaine (16 juillet) par le président George Bush, se cachait une phrase lourde de signification pour l’avenir des relations entre Israël et les Palestiniens. Bush y désignaient la Jordanie et l’Egypte comme les « portes naturelles des exportations palestiniennes », appelant à ce que celles-ci s’ouvrent au commerce avec les voisins de Cisjordanie et de la Bande de Gaza. Dans le cabinet du Premier ministre, à Jérusalem, on s’est félicité de ce commentaire et on a même rappelé que le père de cette idée était Ariel Sharon dans son « discours du désengagement » de la fin 2003.

A une lecture superficielle, les propos de Bush sur l’opportunité économique offerte aux Palestiniens apparaissent comme relevant de la vision régionale de Shimon Peres : frontières ouvertes, mouvements et prospérité. Mais leur signification est beaucoup plus profonde : Bush exonère encore Israël d’une part de sa responsabilité à l’égard des Territoires.

Le modèle économique qui accompagnait le désengagement de Gaza appuyait l’économie de la Bande de Gaza sur le port d’Ashdod et le passage de Karni pour étendre le trafic des camions allant des champs de Gaza aux étals de légumes en Israël et le marchés des fleurs en Europe. Sharon fut contraint d’accepter « l’accord sur le trafic et les voies d’accès » qui promettait l’extension de l’activité au passage de Karni et l’inauguration de convois entre Gaz et la Cisjordanie.

L’accord a été rompu quasiment dès le premier jour. La fermeture des points de passage a fait partie de la pression exercée par Israël sur les Palestiniens, et elle a été présentée comme une punition pour les tirs de roquettes Qassam et comme un instrument pour isoler le Hamas. L’administration américaine a continué d’insister sur le maintien de l’accord, jusqu’à ce que le Hamas prenne le contrôle de Gaza.

Maintenant, Bush a adopté la position d’Israël selon laquelle les Arabes doivent se préoccuper de leurs frères et le commerce des Territoires doit passer par le terminal de Rafah et le pont Allenby. Il y a là un signal à Tony Blair, afin qu’il ne se laisse pas aller aux illusions de son prédécesseur, James Wolfensohn, sur une collaboration économique entre les deux côtés de la Ligne Verte. Israël n’a déjà plus à se soucier des exportations palestiniennes, après s’être débarrassé avec succès des travailleurs qui venaient des Territoires.

S’il y a une cohérence dans la politique des gouvernements israéliens successifs, elle est dans l’effort visant à mettre les Palestiniens hors de vue. Depuis qu’Yitzhak Rabin, lors de la campagne de 1992, a appelé à « retirer Gaza de Tel Aviv », tous les gouvernements se sont attachés à cet objectif. Les moyens furent divers : bouclage général des Territoires, accord d’Oslo et création de l’Autorité Palestinienne, construction de routes d’évitement en Cisjordanie, empêchement mis au passage entre Gaza et la Cisjordanie, clôture enfermant la Bande de Gaza, érection d’une clôture de séparation en Cisjordanie, installations de barrages, désengagement et aussi nouvelle loi de citoyenneté. Les Palestiniens qui ont poursuivi dans la voie du terrorisme, ont toujours fourni le prétexte à la mesure suivante qui était prise contre eux.

Le résultat cumulé de toutes ces mesures, c’est que la majorité des Israéliens ne voient de Palestiniens qu’à la télévision. Seuls les colons vivant au-delà de la clôture, les soldats en service dans les Territoires et les rares à visiter Jérusalem-Est se frottent au peuple voisin. Même ceux qui empruntent la route 443 Tel Aviv - Jérusalem et qui aperçoivent les maisons et les oliviers au long de la route, peuvent imaginer qu’ils sont en Toscane ou en Grèce et pas dans un territoire occupé, avec une population hostile. Les médias israéliens gardent pour la plupart le silence sur ce qui se passe dans les Territoires.

Plus important : Israël s’est créé une bulle économique, reliée au monde développé et coupée d’avec ses voisins. Le marché ne repose déjà plus sur l’industrie traditionnelle qui s’est construite dans le passé sur la main d’ ?uvre palestinienne. Israël peut ainsi célébrer un boum économique à quelques kilomètres d’un tiers-monde pauvre et menaçant.

Du point de vue des Palestiniens, le prix de la politique israélienne d’isolement a été une catastrophe économique, un chômage et une misère sévères. On peut discuter pour savoir qui est coupable et qui a commencé, mais c’est sans importance.

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Aluf Benn

Regardant en avant, Bush voit Israël intégré à l’économie occidentale et la Palestine au marché interarabe. Peut-être les deux Etats vivront-ils côte à côte dans la paix et la sécurité, conformément à la vision eschatologique de Bush, mais ce sera derrière de hauts remparts assurant isolement et aliénation.


Du même auteur :

- Une déclaration d’Olmert : "Ce que je dirais surprendra le roi saoudien"

Aluf Benn - Haaretz, le 19 juillet 2007
Version anglaise : Keeping the Palestinians out of sight
Traduit de l’hébreu par Michel Ghys


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