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Faux-fuyants à Ramallah

mardi 10 juillet 2007 - 10h:37

Khalid Amayreh

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Le « gouvernement d’urgence » palestinien basé à Ramallah refuse obstinément tout rapprochement avec le mouvement Hamas en dépit des appels de plus en plus pressants à cet égard, principalement en provenance d’un certain nombre de pays arabes et musulmans et d’intellectuels palestiniens.

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Mahmoud Abbas - l’engrenage de la collaboration ?

Au lieu de cela, le gouvernement soutenu par les Etats-Unis et Israël affirme son autorité (bien que ceci ne signifie pas grand’chose étant donnée la réalité omniprésente de l ?occupation israélienne), son objectif étant apparemment d’organiser des élections anticipées avec ou sans le mouvement de la résistance islamique [Hamas].

Nabil Amr, un conseiller du Président palestinien Mahmoud Abbas, a été cité cette semaine comme ayant dit qu’il était probable que le gouvernement de Fayyad soit maintenu indéfiniment en dépit « de ses insuffisances sur le plan légal ».

Amr a suggéré que l’incapacité du Conseil législatif palestinien à se réunir pourrait obliger l’Autorité Palestrinienne dominée par le Fatah à prendre des décisions « en-dehors du cadre légal » ou même « illégales » pour faire durer sans limite de temps le gouvernement de Ramallah.

Près de 50 députés palestiniens, la plupart du temps affiliés au Hamas, sont détenus comme de réels otages dans les geôles israéliennes et doivent servir comme moyen de marchandage afin de forcer les groupes de la résistance palestinienne à libérer un soldat israélien prisonnier dans la bande de Gaza.

Le régime Abbas-Fayyad, s’appuyant sur la « légitimité du fait accompli », de l’appui occidental et de l’accord israélien, a adopté plusieurs mesures supposées permettre par la suite au camp d’Abbas-Dahlan d’inverser « légalement » et « en conformité avec la loi » les résultats des élections législatives de 2006 que le Hamas avait gagnées. Inutile de dire que l’exclusion du Hamas de n’importe quelle direction politique palestinienne a été une demande récurrente d’Israël et de l’administration Bush.

En plus de la continuelle délégitimisation du parlement dominé par le Hamas, et qui pourrait dans un court délai se conclure par sa dissolution, le régime Abbas-Fayyad utilise toutes les tactiques possibles, économiques et propagandistes pour marginaliser le Hamas. C’est dans le but de provoquer de nouvelles élections qu’ils espèrent gagner.

Pour rendre cette stratégie effective, l’Autorité Palestinienne [AP] en coordination avec les brigades des Martyres Al-Aqsa liées au Fatah (qui ironiquement sont actuellement pourchassées par l’armée israélienne en dépit des flatteries bassement obséquieuses d’Abbas devant le gouvernement d’Olmert) traque et emprisonne des militants et responsables du Hamas en Cisjordanie.

Cette semaine, l’AP a arrêté 10 partisans du Hamas avec parmi eux le député de Naplouse Ahmed Al-Haj Ali. Ali a été arrêté peu après qu’il ait participé à « des discussions pour la réconciliation » avec des officiels locaux des services de sécurité.

On ne sait pas si le député lié au Hamas a été arrêté par un service de sécurité différent ou sur les ordres des personnes mêmes avec qui il venait de se réunir.

L’AP prétend que la répression appliquée contre les partisans du Hamas en Cisjordanie doit de façon préventive empêcher le Hamas de prendre le contrôle de la Cisjordanie.
« Ils ont une chaîne organisée de commandement ainsi que des armes. Ils ont même été entraînés à divers endroits. Nous travaillons actuellement à démanteler l’infrastructure du Hamas en Cisjordanie, » a déclaré un fonctionnaire de sécurité de l’AP selon une citation du journal israélien Haaretz.

Le responsable dont le nom n’est pas cité a ajouté que les forces de sécurité d’Abbas tentent d’empêcher la mise en place d’un réseau du Hamas dans la région. Cependant, cette prétention semble tout à fait hypocrite ne serait-ce que parce qu’Israël contrôle étroitement chaque mètre carré des territoires occupés, ce qui rendrait difficile un armement à grande échelle du Hamas et encore moins une prise de contrôle [de la Cisjordanie] par ce groupe.

Il est intéressant de noter que les arrestations de partisans du Hamas par l’AP se produisent souvent simultanément avec les opérations militaires israéliennes arrêtant ou recherchant les mêmes personnes.

Israël enlève une moyenne de 15 à 20 partisans du Hamas par nuit, beaucoup de ces captifs étant ensuite incarcérés, sans accusation ni jugement, dans le camp de détention bien connu de Kitziot au coeur du désert du Neguev.

Inutile de dire que cette connivence réelle ou supposée entre l’AP et l’armée israélienne contre le Hamas va sérieusement nuire à l’image de l’AP et du Fatah à court et à long terme.

Dans un effort pour éviter cela le gouvernement de Ramallah utilise ses nouvelles ressources financières.
Cette semaine, le gouvernement d’Olmert a décidé de restituer 118 millions de dollars de recettes douanières palestiniennes qu’il avait bloquées ; ce versement va permettre au gouvernement de Ramallah de verser un plein de traitement à ses employés et fonctionnaires pour la première fois depuis 18 mois.

Aucun salaire ne sera cependant versé aux fonctionnaires ou employés « déloyaux », une référence aux milliers de travailleurs dans Gaza qui prennent leurs ordres et instructions du gouvernement de Haniyeh.

Ce gouvernement, qui prélève des impôts dans Gaza, peut vraisemblablement payer les salaires à ces personnes dont les membres de la Force Exécutive du Hamas qui le mois dernier a complètement évincé de la bande de Gaza les forces fidèles à l’ancien homme fort Mohamed Dahlan. En réalité, la mesure aura peu d’effet sur le gouvernement de Gaza.

La décision israélienne de restituer une partie des recettes fiscales palestiniennes si désespérément nécessaires est assortie de certaines conditions.
Olmert a indiqué au cabinet israélien cette semaine qu’Israël cesserait de transférer l’argent au gouvernement d’Abbas et boycotterait celui-ci au moment où il accepterait de renouer des contacts avec le Hamas.
Olmert a indiqué que le transfert du reste de l’argent confisqué se ferait sur six mois afin de tester la docilité d’Abbas.

Ceci signifie qu’Israël va maintenir Abbas le couteau sous la gorge, le rendant lui et son équipe redevables vis-à-vis d’Israël.

En allant plus loin, Israël ne semble pas intéressé à « renforcer » Abbas plus que nécessaire pour entretenir aussi longtemps que possible la division entre Palestiniens qui fournit à Israël un prétexte pour refuser de s’engager dans un vrai processus de paix.

En plus de maintenir autant que possible la rupture actuelle entre Abbas et le Hamas, Israël espère également qu’en rendant Abbas et son équipe dépendants, au moins financièrement, le régime de Ramallah acceptera par la suite d’abandonner ses revendications sur Jérusalem-est occupée et particulièrement sur la question primordiale du Droit au Retour pour les millions de réfugiés Palestiniens expulsés de leur patrie au moment de la création d’Israël en 1948.

Ainsi, le jeu est maintenant d’exploiter l’argent palestinien pour contraindre le gouvernement palestinien à compromettre les intérêts nationaux palestiniens, lesquels sont considérés comme sacrés de longue date par pratiquement tous les Palestiniens et représentent l’ultime « ligne rouge ».

Inutile de dire que cette approche à courte vue est aussi tout à fait stupide. En Palestine, n’importe quel responsable acceptant un compromis sur ces questions fondamentales sera considéré comme un Juda qui ne perdrait pas seulement sa carrière politique et sa réputation mais aussi sa vie.

En fait Israël montre des signes désespérés quant à la façon d’aider Abbas.

Les médias israéliens ont rapporté ce mardi qu’Israël « faisait pression » sur le roi du Maroc pour qu’il visite Ramallah afin de « renforcer » la légitimité d’Abbas.
De plus, Israël a également exprimé « son mécontentement » vis-à-vis de l’Egypte, du Qatar et de l’Arabie Saoudite pour avoir préconisé une reprise du dialogue entre le Fatah et le Hamas.

Le roi Abdullah d’Arabie Saoudite a refusé la semaine dernière de rencontrer Abbas dans la capitale jordanienne, Amman, vraisemblablement parce que Riyadh estime qu’Abbas a joué un rôle prépondérant dans le sabotage de l’accord négocié à la Mecque le 8 février dernier.

De même, les dirigeants égyptiens et qataris demandent que soit trouvée une solution aux divergences entre le Fatah et le Hamas, un langage qu’Abbas et ses partisans ne sont absolument pas d’humeur à écouter.

Il est difficile de comprendre pourquoi Abbas et Fayyad se placent dans le sillage israélien, si ce n’est pour tenter d’apaiser les israéliens.

La semaine dernière, Fayyad a rassemblé presque 800 prédicateurs et imams islamiques à Ramallah où il les a prévenu de toute « subversion ». Fayyad a expliqué aux responsables du Waqf pro-Hamas que le nouveau gouvernement chercherait à rétablir la loi et l’ordre dans l’ensemble de la Cisjordanie.

Un des participants a indiqué à ’Al-Ahram Weekly qu’Abbas se comportait comme s’il était à la tête d’un gouvernement souverain dans un état souverain.

« Comment une personne instruite comme Fayyad a-t-elle pu tomber dans ce piège ? » s’est demandé le jeune imam qui venait d’Hébron.



Du même auteur :

- Cauchemar au poste frontière de Rafah
- Le nouveau président israélien : un criminel de guerre par excellence
- Israël ne veut pas de partenaire, mais tout simplement dominer

6 juillet 2007 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2007/852...
[Traduction : Claude Zurbach - Info-palestine.net]


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