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Israël accentue son emprise sur Jérusalem-Est

jeudi 18 juin 2009 - 06h:06

Jerrold Kessel et Pierrer Klonchendler - IPS

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L’avenir de Jérusalem sera l’une des questions fondamentales posées sur la table des négociations que Mitchell essaie de mettre en place.

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Les Israéliens essaient de couper complètement les Palestiniens,
et de la vieille ville et de ses lieux saints.




Wadi Qadoum, Jérusalem-Est, 13 juin - « Que faites-vous ici ? » nous interroge le conducteur d’une vieille Volvo blanche qui s’arrête près de nous, à côté d’une carriole pleine de détritus. Les résidents de ce quartier pauvre palestinien de Jérusalem-Est occupée étaient en train de brûler des ordures qui s’amoncelaient parce que non ramassées.

«  Nous écrivons un article sur la situation difficile d’ici, » lui répond-on. « Il est temps que quelqu’un s’en occupe, j’ai fait je ne sais combien de réclamations auprès de la municipalité à propos du manque d’entretien qui nous frappe ici. Après tout, nous payons tous nos impôts, comme les Israéliens dans Jérusalem. Et pourtant, ils ne font rien pour nous, » dit-il en relançant son moteur.

Mais l’allumage fait défaut. « Je dois être en panne d’essence, » dit Salim (il ne veut pas donner son nom de famille). « Non, c’est la batterie, » ajoute-t-il, un peu embarrassé. « Ma voiture fait partie de cette triste situation. » Il appelle un ami pour le pousser, mais il commence par ouvrir le capot, tire sur quelques fils et, miracle, le moteur se met à tousser.

Cette rencontre fortuite sur les routes mal entretenues de Wadi Qadoum se déroule en contrebas d’immeubles construits pêle-mêle qui bordent les deux côtés de la vallée dans sa partie appelée le Saint Bassin. La zone s’étend de la vieille ville fortifiée de Jérusalem en descendant vers le désert de Judée au sud-est et contient la plupart des lieux saints des trois grandes religions monothéistes : judaïsme, christianisme et islam. Elle fait partie de Jérusalem-Est qui abrite un quart de million de Palestiniens, une zone annexée par Israël après qu’il s’en soit emparée durant la guerre israélo-arabe de 1967.

Salim aurait pu se sortir assez facilement de cette situation. Mais ce matin, il n’y a pas de délivrance à l’horizon pour les Palestiniens qui espèrent réduire la désespérante pénurie de logements. Pas plus tard qu’hier, les employés de la municipalité israélienne de Jérusalem ont remis des ordres de démolition de leur maison à trois familles d’Al-Bustan, un quartier de Silwan qui borde Wadi Qadoum et jouxte les murs de la vieille ville. Il est prévu que toutes les maisons d’Al-Bustan - 90 au total - seront démolies, malgré les négociations en cours entre les habitants et l’hôtel de ville.

Les Palestiniens ont même d’autres raisons de s’inquiéter avec les intentions israéliennes. Eli Yishai, ministre de l’Intérieur du gouvernement de droite du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, aurait chargé ses agents de mettre leur veto à un nouveau plan directeur pour la ville, au motif qu’il allouerait plus de terrains pour la construction de maisons palestiniennes.

Ce plan, sur lequel des dizaines d’architectes et d’urbanistes israéliens ont travaillé pendant plusieurs années, devait donner le cadre du développement de la ville pour les prochaines décennies et pallier la situation d’une Jérusalem qui, depuis 1959, s’est développée sans aucun programme d’ensemble.

Les Palestiniens ont depuis longtemps des difficultés pour obtenir des permis de construire, même sur leurs propres terrains. Le plan, s’il était appliqué, permettrait d’agrandir des immeubles dans la partie Est de la ville, notamment 13 500 logements supplémentaires pour les Palestiniens de la ville.

Les grandes lignes du plan ont été récemment soumises au ministre de l’Intérieur pour approbation, mais les édiles de la ville ont découvert cette semaine qu’Yishai avait ordonné de le mettre en attente. A la place, il a jeté son dévolu sur un autre programme, conçu en 2000, qui réduit considérablement les terrains pour de nouvelles constructions palestiniennes.

D’après les urbanistes palestiniens, même si elle relativement plus avantageuse, la politique de logement préconisée par le plan directeur mis en veille est très problématique. Sami Arshid, avocat palestinien, indique aux journalistes, « Les Israéliens essaient de couper complètement les Palestiniens, et de la vieille ville et de ses lieux saints, par la réduction de leur nombre dans le centre de Jérusalem. La seule construction palestinienne qu’ils auraient autorisée dans le cadre de ce plan directeur se trouve en périphérie nord et sud de la partie occupée de la ville. »

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Colonie Ma’ale Adumim, à l’est de Jérusalem, en Cisjordanie occupée.

Cette semaine, Yishai a donné comme instruction à son ministère de faciliter l’expansion des colonies juives en Cisjordanie en injectant plus de financement dans les colonies. Il a également déclaré qu’il cherchait à définir les limites de Jérusalem aussi librement que possible pour pouvoir prétendre que ces constructions sont situées sur Jérusalem-Est et non en Cisjordanie. Ainsi, espère-t-il, elles ne tomberont pas sous l’interdiction globale attendue des USA de constructions dans les colonies.

Les USA ont pris une position catégorique exigeant le gel total de la colonisation, y compris pour les blocs de colonies qui entourent Jérusalem en Cisjordanie. Les Etats-Unis ont également blâmé Israël en termes très clairs pour sa politique de démolitions dans Jérusalem-Est. De plus, les USA ont mis en garde Israël de ne pas poursuivre son projet d’un nouvel hôtel dans la zone de Wadi Joz, près de la vieille ville. Sachant que la municipalité a autorisé la destruction d’un marché de gros palestinien qui vient de s’ouvrir sur ce même site.

Ce qui n’est pas clair cependant, c’est si l’exigence de l’administration Obama pour le gel de la colonisation s’étend aussi aux quartiers israéliens/juifs installés à Jérusalem-Est après la guerre de 1967. Ils abritent environ 200 000 Israéliens et les Palestiniens les définissent comme « colonies » alors que les Israéliens les voient comme des quartiers normaux faisant partie de leur « capitale unifiée ».

Pendant ce temps, dans le quartier Silwan, une sombre organisation connue sous le nom d’Elad et comme une façade pour le mouvement colonial qui vise à implanter autant de juifs possible à Jérusalem-Est, cette organisation se vante d’avoir discrètement fait l’acquisition de vingtaines de propriétés palestiniennes afin d’augmenter la présence juive dans la Saint Bassin. Ici, le nombre de colons est estimé déjà à 2 000 ou plus.

Et des articles israéliens récents dignes de foi indiquent qu’Elad a contribué de façon déterminante au financement du projet de plan directeur, manifestement dans l’espoir que cela conduira plus de Palestiniens à quitter la zone convoitée.

Après ses rencontres de cette semaine avec l’envoyé spécial du président US, le sénateur George Mitchell, le chef négociateur de l’Autorité palestinienne, Saeb Erekat, a déclaré aux deux journalistes, «  pour la première fois dans notre histoire, les Palestiniens sont en position de force vis-à-vis d’Israël.  » Les Palestiniens espèrent que la position ferme adoptée par le président Barack Obama sur la colonisation va enfin permettre au processus de paix d’aller de l’avant avec des conditions favorables pour eux.

L’avenir de Jérusalem sera l’une des questions fondamentales posées sur la table des négociations que Mitchell essaie de mettre en place. Mais ce n’est pas seulement la souveraineté sur la ville qui préoccupe sa population palestinienne, c’est aussi d’avoir de quoi se loger, pour une communauté qui a été oubliée pendant plus de 40 ans.

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Wadi Qadoum, Jérusalem-Est, 13 juin 209 - IPS - traduction : JPP


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