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La Palestine est un os en travers de la gorge d’Obama

mardi 18 novembre 2008 - 07h:04

Jeff Halper

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Même avant que le vote n’ait commencé, les politiciens et les pontifiants israéliens se demandaient : Est-ce qu’une administration Obama sera bonne pour Israël ?

« Être bon pour l’Israël » est notre nom de code pour « les USA nous permettront-ils de garder nos colonies et de continuer à tout faire pour que des négociations avec les Palestiniens ne puissent jamais porter leurs fruits ? ». Pour les Américains la question devrait être : l’administration Obama comprendra-t-elle qu’elle ne pourra pas s’extirper de ses plus grands imbroglios au Moyen-Orient, rejoindre la communauté des nations et sauver son économie, sans satisfaire les demandes des Palestiniens ?

Le conflit israélo-palestinien devrait être le premier souci des Américains, en tête de l’ordre du jour de la nouvelle administration. Ce ne peut-être pas le conflit le plus sanglant au monde — il est moins sanglant que celui en Irak — mais il est emblématique, pour les musulmans et tous les peuples le monde, de l’hostilité et de la violence américaines. Le conflit israélo-palestinien n’est pas simplement limité entre deux groupes qui s’affrontent. Il se trouve à l’épicentre de l’instabilité mondiale. Allez où vous voulez dans le monde et vous rencontrerez le même phénomène : le sentiment que la souffrance infligée aux Palestiniens est emblématique tout ce qui est mauvais dans un monde dominé par les Etats-Unis.

Quand Obama prendra son poste, il trouvera une réalité mondiale bien différente de celle qui prévalait huit ans auparavant : un monde multilatéral dans lequel les Etats-Unis affaiblis et isolés devront trouver leur place. Il découvrira qu’une grande partie de l’isolement des Etats-Unis vient de l’opinion selon laquelle l’occupation des territoires palestiniens est en fait une occupation américaino-israélienne. Si la remise sur pied d’une économie américaine affaiblie dépend de la capacité à réparer les relations avec le reste du monde, Obama apprendra que sans résoudre le conflit israélo-palestinien il ne pourra pas établir les conditions nécessaires pour que les Etats-Unis soient à nouveau acceptés dans la communauté internationale.

Pour être plus précis, le conflit israélo-palestinien affecte directement les Américains d’au moins cinq façons :

- il isole les États-Unis des grands marchés mondiaux, les forçant à se lancer dans des comportements agressifs pour s’assurer ces marchés au lieu de procéder de façon pacifique ;

- ce faisant, il détourne l’économie américaine vers des productions socialement inutiles (pas de routes mais des tanks), ce qui dépend d’un déficit budgétaire qui ne fait qu’accroître la dépendance à l’égard des financements étrangers tout en gaspillant des ressources dans les forces militaires plutôt que dans l’éducation, la santé et l’investissement ;

- dans le soutien à l’armée israélienne aux frais des contribuables américains pour plus de 3 milliards de dollars par an à un moment où s’approfondit la récession et où s’effondre l’infrastructure nationale ;

- il conduit à un engagement américain dans le monde qui est essentiellement militaire, engendrant ainsi l’hostilité et la résistance qui sont à l’origine les menaces à la sécurité des Américains

- il finit par menacer les libertés civiques américaine en encourageant une législation comme le Patriot Act, et par l’introduction dans la police américaine des tactiques israéliennes de « contre-insurrection » et des armes mises au point en Cisjordanie et à Gaza.

Pour de nombreux peuples dans le monde, les Palestiniens représentent le sort de la majorité d’entre eux. Ils sont les petits grains de sable qui résistent à ce que la plupart des Américains et privilégiés de l’Occident ne voient pas. Ils constituent un peuple qui se voient refuser le droit le plus fondamental : celui d’avoir son propre Etat, même sur uniquement les 22% de la Palestine historique qu’Israël occupe depuis 1967.

Pour la majorité de l’humanité qui vit dans des conditions économiques et politiques inimaginables à l’Ouest, les souffrances causées par l’occupation israélienne — une pauvreté absolue, et un total déni de liberté qui ne peut exister que grâce à un soutien total de la part des Etats-Unis — sont emblématiques de leurs propres souffrances.

L’oppression des Palestiniens par Israël avec le soutien actif des États-Unis montre de façon évidente l’existence d’un système mondial de domination occidentale qui interdit aux autres peuples de donner vie à leurs propres rêves de bien-être politique et économique.

Comme un os en travers de la gorge, la question de l’occupation israélienne ne peut être ni ignorée ni contournée. Pour rendre les choses encore plus difficiles, il est douteux qu’une solution à deux États soit encore possible étant donné que les activités israéliennes de colonisation ont largement éliminé cette option.

Quelle que soit la solution, si le plus déstabilisant des conflits n’est pas résolu, les États-Unis — même avec Obama — resteront enlisés dans des conflits avec les peuples musulmans et avec tous les peuples à la recherche d’une véritable liberté. Ni les États-Unis ni Israël ne trouveront la sécurité qu’ils affirment rechercher. Nous vivons dans une réalité qui est mondiale, et non pas une Pax Americana.

La logique de l’administration Bush a suivi son cours. Les États-Unis ne peuvent plus jeter tout leur poids dans une guerre contre le « terrorisme ». Et leur engagement ne peut plus être purement militaire. La nouvelle logique qui devra accompagner Obama peut se résumer en un seul mot : le compromis. Et les États-Unis ne réaliseront pas le moindre pas en avant jusqu’à ce qu’ils s’accomodent du monde musulman, c’est-à-dire qu’ils mettent fin à l’occupation israélienne.

Ce que subissent les Palestiniens revêt une importance mondiale. Dégager l’os dans la gorge — c’est-à-dire en terminer avec l’occupation israélienne et permettre aux Palestiniens d’avoir un Etat et un avenir dont ils décident — doit être une priorité pour la prochaine administration américaine. En effet, le rétablissement de la position de l’Amérique dans le monde en dépend. Il apparaît donc que dans la réalité mondiale dans laquelle nous vivons, le sort des Américains et le sort des Palestiniens sont étroitement imbriqués.

* Jeff Halper dirige le Comité israélien contre les démolitions de maisons (ICAHD). Il peut être joint à : jeff@icahd.org

Du même auteur :

- Palestiniens : le stockage d’un "peuple en trop" - 16 septembre 2008
- Jeff Halper à Gaza : “Nous sommes l’oppresseur” - 6 septembre 2008
- Fin d’une odyssée - 5 septembre 2008
- Garder le cap sur l’apartheid - 2 juillet 2007
- Il ne s’agit pas seulement de territoire, mais de viabilité - 25 août 2007

13 novembre 2008 - Ma’an News Agency - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.maannews.net/en/index.ph...
Traduction de l’anglais : Claude Zurbach


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