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Jeff Halper à Gaza :
“Nous sommes l’oppresseur”

samedi 6 septembre 2008 - 07h:31

Interview par Rami Almeghari

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Entretien avec Jeff Halper, à Gaza, quelques heures avant qu’il ne rentre à Jérusalem par le passage d’Erez où il fut arrêté.

Lors d’un entretien avec The Electronic Intifada, Jeff Halper, directeur israélien/américain de l’ICAHD, Comité israélien contre la démolition des maisons, s’est exprimé à propos du siège israélien de la bande de Gaza et sur le mouvement Free Gaza. Halper est l’un des 46 membres du mouvement qui ont participé à l’action du MFG, défiant un siège israélien de 14 mois sur Gaza.

Son entretien avait lieu sur tous ces points avec le correspondant d’EI, Rami Almeghari, dans la bande de Gaza occupée, quelques heures juste avant qu’il ne rentre en Israël par le passage d’Erez où il fut interpellé et placé en détention par l’armée israélienne.

The Electronic Intifada : Maintenant que vous êtes à Gaza, pouvez-vous s’il vous plaît nous parler du siège israélien et de l’embargo international sur la bande de Gaza ?

Jeff Halper : La communauté internationale, par l’intermédiaire des Nations unies, a imposé des sanctions économiques à Gaza, ce qui constitue un acte illégal en vertu du droit international, et montre la pauvreté et l’échec du système international. C’est pourquoi, si vous [voulez] la justice, si vous devez mettre fin à ce siège, fin à l’occupation, fin aux sanctions, alors il faut que les peuples agissent car les gouvernements ne le feront pas et l’ONU ne le fera pas non plus car elle est sous contrôle des gouvernements.

Par conséquent, c’est le peuple qui doit se soulever, et c’est ce que nous avons fait ; 46 personnes sont venues ici, de 17 pays différents, et nous avons brisé le siège. Nous sommes venus à Gaza par bateau, et cela montre la capacité des gens à vaincre des armées, mais dans le même temps, nous n’aurions pas dû avoir à le faire, car c’était aux gouvernements d’agir.

EI : Maintenant, vous allez rentrez à Jérusalem, par Erez. Quel message adressez-vous par votre arrivée à Erez ?

JH : Je suis un israélien ici à Gaza, et en tant qu’Israéliens, nous devons enfin prendre la responsabilité de ce que nous faisons. Pour les Israéliens, il n’existe pas d’occupation, ce n’est que du terrorisme selon leur point de vue. Ce que j’essaie de vous dire, c’est que ce n’est pas vrai, nous occupons, nous sanctionnons, nous faisons des bouclages et par conséquent, nous somme la partie qui possède la force, nous sommes l’oppresseur, ce ne sont pas les Palestiniens qui occupent Tel-Aviv. Par conséquent, il est de notre responsabilité de mettre fin à l’occupation et d’apporter un terme au conflit.

En tant qu’Israéliens, nous devons en assumer la responsabilité. C’est pourquoi je suis ici : pour représenter les Israéliens qui veulent dire aux Palestiniens, nous sommes responsables de la situation épouvantable qui existe ici et nous sommes prêts à en assumer la responsabilité.

EI : Comment voyez-vous le régime d’apartheid israélien en Palestine ?

JH : Eh bien, c’est le problème. Israël essaie de mettre en place adroitement un régime d’apartheid sous couvert d’une solution à deux Etats et c’est contre cela que nous, nous essayons de mettre en garde. Israël veut deux Etats, il veut un Etat palestinien parce il est responsable de 4 millions de Palestiniens (dans les Territoires occupés) dont il ne veut pas justement assumer la responsabilité, et il veut un Etat juif. Mais dans le même temps, il veut la terre, il veut les colonies et il veut contrôler, etc. Aussi, la question pour Israël, c’est de savoir comment nous allons faire avaler un bantoustan comme en Afrique du Sud, un bantoustan palestinien dans une situation d’apartheid sous couvert de deux Etats. C’est là-dessus que nous devons être très vigilants et c’est cela que nous devons empêcher de réussir.

EI : Israël a toujours revendiqué son droit à être un Etat juif, exigeant que les Palestiniens reconnaissent son identité juive. Quelle est votre opinion ?

JH : Je pense qu’il est impossible d’avoir un Etat juif. Je pense que nous devons d’abord parler d’Israël et non d’un Etat juif. Soit il y a une solution à deux Etats, un Etat d’Israël pour tous ses citoyens - y compris les Israéliens palestiniens - et un Etat palestinien, soit il y a une solution à un Etat unique où nous vivrons tous ensemble dans un pays démocratique. Telles sont les options. Mais l’option de l’apartheid vers lequel pousse Israël doit être considérée comme inacceptable par nous tous. Mais pourquoi Israël force-t-il en faveur d’un Etat juif ? Parce que c’est la logique d’un Etat qui est fondé sur le privilège d’un groupe spécifique.

Une fois, il y a des juifs, ou des Européens en Afrique du Sud, ou un groupe particulier qui ont dit, ceci est notre pays exclusif, nous avons plus de droits que les autres peuples, c’est cela qui vous conduit à un apartheid. Alors, la seule voie pour sortir de l’apartheid est de réconcilier le pays tout entier, en un pays qui appartient à tous.

EI : Comment envisagez-vous l’avenir d’un processus de paix palestinien/israélien, avec les USA ayant un rôle de premier plan dans un tel processus ?

JH : Eh bien, ce que l’on appelle le processus d’Annapolis n’est qu’une supercherie... [la secrétaire d’Etat] Condoleezza Rice se trouve aujourd’hui à Jérusalem. Je crois que c’est sa 17è ou 18è visite ici... de mon point de vue, c’est ridicule, il n’y a aucun véritable processus de paix, il n’y aucune véritable négociation... car le processus d’Annapolis ne fait que tenter d’imposer ce régime d’apartheid.

EI : Enfin, vous attendez-vous à ce que d’autres actions pour briser le siège de Gaza, comme avec les bateaux sur lesquels vous êtes venus, aient lieu après votre arrivée réussie à Gaza ?

JH : Il le faut, c’est toute la question, on ne peut s’en tenir à une seule fois. La seule façon que nous avons de briser le siège c’est par des mouvements permanents, sans arrêt, de bateaux petits et gros. Les Palestiniens doivent inviter les gens à venir et il faut une mobilisation internationale (*). Nous devons obtenir un tel mouvement ici. Autrement ça reviendra comme avant, de sorte qu’il est important de poursuivre ce qui a été engagé.

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Jeff Halper devant le tribunal d’Ashkelon.
(Oren Ziv/ActiveStills)




Voir aussi : Fin d’une odyssée , les premières réflexions de Jeff Halper après son retour (site de l’ICAHD).

Rami Munir Almeghari est actuellement le collaborateur de plusieurs agences d’informations, dont Palestine Chronicle, IMEMC, The Electronic Intifada et Free Speech Radio News. Il est aussi l’ancien traducteur anglais et l’éditeur en chef de l’international press center du Service d’Information Palestinien basé à Gaza. Vous pouvez le contacter à : rami_almeghari@hotmail.com.

Jeff Halper at an Israeli court in Ashkelon. (Oren Ziv/ActiveStills)

Du même auteur :

- Défier le siège depuis Rafah jusqu’à Chypre
- Les étudiants de Gaza attendent toujours et perdent espoir
- Une intervention chirurgicale sous blocus
- Le blocus aggrave la malnutrition dans Gaza
- S’abriter du blocus
- Gaza devient « verte » par nécessité



(*) : Pour information (ndt) :

Des députés et des activistes écossais décident de briser le blocus à travers deux tournées

02/09/2008

Bruxelles - CPI

Des activistes écossais pour le soutien des droits de l’homme ont déclaré qu’ils ont décidé de briser le blocus imposé injustement contre la bande de Gaza, à l’aide d’une tentative maritime et d’une autre terrestre, avec la participation de députés écossais.

"Les acteurs de la campagne ont décidé d’organiser, mi-novembre, une tournée terrestre à partir de l’Ecosse vers le passage de Rafah, avec la participation de 6 députés écossais et de plus de 34 activistes", a affirmé le vice-président du parti national écossais, lors d’une conférence de presse commune avec l’activiste des droits de l’homme Janet Ligite, dans le siège du syndicat professionnel à Amman.

"Les participants à cette campagne contre le blocus israélien ont traversé 12 pays pour accomplir leur première initiative qui envisage de présenter les premières étapes réelles pour la levée totale du blocus imposé arbitrairement contre la bande de Gaza", a souligné Janet Ligite.

Elle a ajouté que les activistes vont entamer, le premier novembre, une tournée dans les pays du Golfe pour obtenir un soutien à cette campagne pour lever le blocus et diffuser les souffrances des habitants de Gaza à cause de la fermeture du passage de Rafah.

Pour sa part, l’activiste internationale Ligite a insisté sur la nécessité de déployer tous les efforts pour mettre fin à la tragédie des Palestiniens et mettre un terme décisif à la fermeture du passage de Rafah.

"Il est très étrange de punir des enfants innocents à cause de la fermeture du passage de Rafah", a-t-elle ajouté.

CPI

1er septembre 2008 - The Electronic Intifada - traduction : JPP


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