Compte à rebours avant l’offensive israélienne sur Gaza
samedi 24 novembre 2007 - 17h:36
Saleh Al-Naami - Al Ahram Weekly
Israël attend cyniquement l’après conférence de paix à Annapolis avant de mettre à exécution sa volonté de destruction de la bande de Gaza, écrit Saleh Al Naami.
- Des enfants palestiniens regardent une voiture détruite après qu’elle ait été visée par une attaque aérienne israélienne dans la bande de Gaza, le 20 août 2007. Un missile israélien a assassiné six combattants du Hamas - Photo : Hatem Omar/MaanImages
Dimanche dernier, une surprise attendait Zaher Al Orr, son fils Ashraf et son ami Mohamed Abu Herbid. Zaher Al Orr avait préparé le petit déjeuner avant de retourner chez lui, après une nuit de travail. Tous trois travaillaient comme gardiens dans une usine de fabrication de salles de bain près du camp de réfugiés de Jabalya dans le nord de Gaza. D’habitude, les trois hommes ne prenaient leur petit déjeuner qu’une fois revenus chez eux mais ce jour-là, c’était une matinée particulière. Un autre travailleur coincé la veille dans l’usine, les avait rejoints pour partager leur repas mais les choses n’allaient pas se dérouler comme Al Orr les avait prévus. Quelques minutes après que les hommes se soient attablés, un obus d’artillerie israélien leur explosa à la figure, les tuant sur le coup, tous les quatre.
Non seulement, les bombardements israéliens sur Gaza sont devenus de plus brutaux mais leurs objectifs ont également changé. Actuellement, l’armée de l’air israélienne bombarde les bureaux, les positions et les patrouilles de la police palestinienne. Cinq policiers ont été tués dans deux bombardements de postes de police. Des dizaines d’autres ont été blessés. Citant des sources de l’état major israélien, la radio israélienne a indiqué que l’intensification des opérations militaires dans la bande de Gaza vise à "punir" les Palestiniens pour les roquettes qu’ils lancent sur les colonies frontalières juives.
Le ministre de la défense israélien, Ehoud Barak affirme qu’une incursion dans la bande de Gaza est "imminente". Le Canal 10 de la Télévision israélienne, a déclaré vendredi dernier que la communauté internationale est de c ?ur avec Israël dans cette affaire. Offer Shelah, présentateur de la "Harvest of the Week" sur le même canal, a noté qu’ "en dépit du nombre de victimes parmi les civils palestiniens, le Monde montre de la sympathie et de la tolérance pour ce que fait Israël. Cela s’explique par le fait qu’Abbas continue de rencontrer Olmert au moment même où l’armée de ce dernier continue de tuer des Palestiniens. Pourquoi alors être plus royaliste que le roi ? "
Amnon Abramovic, présentateur en hébreu de la Télévision israélienne, résume cela en une phrase : "notre armée a tué en 24 heures 10 Palestiniens, dont des enfants, et pourtant on n’a pas entendu une seule personne protester."
La poursuite des bombardements de Palestiniens dans la bande de Gaza n’est pas un substitut à une incursion israélienne. La plupart du temps, il s’agit d’un prélude. Dans son tirage de vendredi dernier, Haaretz cite des sources militaires israéliennes qui montrent que la probabilité de mener une incursion militaire dans la bande de Gaza a augmenté depuis que les militaires ont réalisé que le châtiment collectif qu’Israël impose aux Palestiniens n’était pas efficace pour arrêter le lancement des roquettes palestiniennes artisanales sur les villes frontalières israéliennes.
Selon le canal 2 de la télévision israélienne, un débat houleux s’est instauré au sein de l’Etat Major israélien sur la question du bombardement des postes de police palestiniens. Bien que la police soit une « cible facile », les généraux de l’armée pensent que de telles attaques peuvent compromettre l’ordre et la sécurité à Gaza et provoquer d’autres complications pour Israël. Les généraux veulent que toute incursion dans la bande de Gaza soit différée jusqu’à ce que le sommet d’Annapolis se termine pour ne pas affaiblir la position de négociation israélienne.
Israël a déjà recueilli l’appui international dans le cas d’une opération militaire à Gaza. Dans son tirage de dimanche dernier, Maariv a indiqué que lors de sa récente visite à Washington, M. Barak a obtenu le feu vert américain pour une offensive dans la bande de Gaza. Selon ce journal, Barak était accompagné des services de renseignements israéliens qui auraient rapporté aux Américains que les groupes de résistance palestinienne dans la bande de Gaza stockaient des armes et que le Hamas a désormais une véritable armée.
Selon les rapports des services de renseignement israéliens, le Hamas a intensifié la contrebande d’armes d’une façon sans précédent pour consolider ses capacités militaires. Le mouvement du Jihad islamique aurait aussi doublé son arsenal d’armes et réussi à recruter un grand nombre de responsables de la sécurité à Gaza à la suite de sa prise de contrôle par le Hamas. Pendant ce temps, les Brigades Al Aqsa affiliées au Fatah auraient reçu une aide considérable, en partie du Hezbollah à partir du Liban.
Les généraux retraités de l’Armée Israélienne sont réservés quant à une action d’envergure dans la bande de Gaza. Le général Yaeir Naffe, un ancien commandant des forces d’occupation israéliennes dans la bande de Gaza, estime qu’une incursion militaire serait « sans effet à moins qu’elle ne dure au minimum deux ans." Il avertit qu’à moins que les Israéliens ne restent pendant longtemps dans la bande de Gaza, les tirs de roquettes artisanales devront reprendre rapidement.
S’adressant dimanche dernier à la Radio israélienne émettant en hébreu, Naffe fait valoir que : "contrairement à la situation en Cisjordanie, à Gaza, nous n’avons pas uniquement besoin d’arrêter les tirs de roquettes, mais d’être sûrs que les Palestiniens ne seront plus en mesure d’en fabriquer à l’avenir. Pour lui, " Si les Palestiniens réussissent à lancer " un seul engin à feu après notre retrait, l’ensemble de l’opération militaire devra être considéré comme un échec".
Certains politiciens israéliens pensent que le projet d’incursion militaire à Gaza,ne vise qu’à servir les buts personnels et politiques de Barak. Pour l’Ancien ministre de l’Education israélienne, Shulamit Aloni, Barak veut utiliser Gaza pour accéder au poste de Premier ministre. Dans une interview accordée à Events, journal basé à Nazareth, Aloni Barak décrit Barak comme "l’homme le plus dangereux pour l’Etat et le peuple israélien, à raison de sa nature, d’abord en tant qu’homme de guerre, et ensuite à cause de son arrogance. Barak adopte une position extrêmiste parce qu’il pense qu’en commettant des crimes, il serait en mesure de vaincre Netanyahu dans les prochaines élections. " Aloni Barak appelle à ce que Barak soit jugé comme criminel de guerre à La Haye.
Les Palestiniens prennent au sérieux les menaces d’Israël. Le Premier Ministre palestinien déchu, Ismail Haniyeh a dit dimanche qu’il était conscient du fait que l’administration américaine a donné son feu vert à Israël pour attaquer Gaza mais il a averti que cette dernière serait "un tombeau pour les envahisseurs". Les brigades Ezzeddin Al-Qassem, branche militaire du Hamas, ont demandé à d’autres groupes de résistance dans la bande de Gaza de former une "Etat major militaire" pour faire face à l’escalade israélienne.
Abou Obeida, le porte-parole des brigades Al-Qassem, a déclaré à Al-Ahram Weekly que l’invasion de Gaza par Israël serait une "grande folie ... ils savent qu’ils ont déjà commis une grave erreur en envahissant par le passé la bande de Gaza. Ils disent qu’ils sont en colère à cause de l’enlèvement du soldat Gilad Shalit. Laissez-moi leur assurer que nous enlèverons encore beaucoup plus de leurs soldats si jamais, ils décident d’envahir la bande de Gaza ".
Le Ministère palestinien de l’Intérieur affirme que les attaques israéliennes sur la police palestinienne, ont pour but de créer le "chaos" dans la bande de Gaza. Le porte-parole du Ministère de l’intérieur, Ihab Al Ghosein, a dit au Weekly que le ministère n’a aucun plan d’évacuation de la police face à la poursuite des bombardements, mais il n’a pas exclu une telle démarche à l’avenir.
Abou Ahmed, porte-parole des Brigades Al-Qods, aile militaire du mouvement du Jihad islamique, a promis que les tirs de roquettes contre Israël continueront que ce soit avant ou après toute offensive israélienne. Pour les Palestiniens assiégés à Gaza, une chose est claire : Israël attaquera Gaza juste après le Sommet d’Annapolis.
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10 novembre 2007 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
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Traduit de l’anglais par D. Hachilif