Alors que les combat inter-Palestiniens dans Gaza entraient dans leur quatrième jour, un avion israélien a pris pour cible la ville de Rafah avec des missiles, tuant quatre militants du Hamas et blessant au moins 20 personnes ce mercredi [16 mai].
- Massacre commis par l’aviation israélienne à Gaza le dimanche 20 mai - Photo : Al Jazeera
Un accord de cessez-le-feu entre le chef politique du mouvement Hamas, Khaled Meshaal, et le Président Mahmoud Abbas a été conclu le même jour par téléphone. C’est le deuxième accord de cessez-le-feu entre le Fatah et le Hamas en une semaine.
L’accord, que beaucoup estimaient ne pas devoir durer plus de quelques heures, n’a pas empêché le ministre palestinien Azzam Al-Ahmed d’inviter Abbas à déclarer la loi martiale afin d’essayer de contenir la violence. Selon Al-Ahmed, Abbas étudie la proposition.
La loi palestinienne permet au président de déclarer l’état d’urgence pendant une période de 30 jours, une prolongation ne pouvant se faire qu’avec l’approbation du Conseil Législatif dominé par le Hamas.
Après l’explosion de la violence entre factions dans Gaza cette semaine, les chefs politiques palestiniens ont fait appel aux états arabes, en particulier à l’Egypte, pour que de plus grands efforts soient faits afin d’empêcher les combats de se développer à un point tel qu’ils soient hors de tout contrôle.
La confrontation, la plus sanglante depuis la signature de l’accord de la Mecque le 8 février sous la supervision des Saoudiens, a déjà couté la vie à 28 personnes, et on s’attend à ce que le nombre de morts augmente tandis que les combats se poursuivent.
Ahmed Youssef, conseiller politique auprès du premier ministre, a fait part à Al-Ahram Weekly de son espoir que « les pays arabes frères » prennent « des mesures sérieuses et efficaces pour arrêter cette folie ».
Youssef a remercié l’Egypte de « ses efforts importants » pour faire cesser la confrontation, mais il a admis que si la volonté des Palestiniens faisait défaut, tout effort de médiation est destiné à échouer.
Le problème principal est dû, selon lui, à l’incapacité du Fatah et du Hamas « à contrôler leurs hommes dans la rue ».
Alors que Al Ahram-Weekly est sous presse, des hommes armés du Hamas et du Fatah continuaient de tirer les uns sur les autres dans Gaza, forçant la majeure partie de la population de la ville à rester chez elle par crainte pour sa propre sûreté.
Les responsables politiques des deux côtés négociaient un cessez-le-feu tard dans la nuit de mardi, après une active médiation égyptienne. L’accord stipulait le retrait de « tous les éléments armés des rues » et le démantèlement de tous les barrages. Moins de deux heures plus tard le cessez-le-feu s’écroulait quand des hommes armés et masqués - des responsables palestiniens disant qu’il pouvait s’agir d’agents israéliens - reprenaient les tirs.
Plus tôt, le mardi matin, des hommes armés non identifiés avaient ouvert le feu sur un médiateur égyptien pendant qu’il inspectait les rues dans le centre de Gaza, accompagné de Ghazi Hamad, porte-parole de l’Autorité Palestinienne, et et de plusieurs autres officiels. Il soufre de légères blessures à sa main.
À peu près au même moment, les miliciens affiliés au Hamas ont attaqué la maison de Rashid Abu Shbak, responsable en chef de la Sécurité Préventive de Gaza, tuant cinq de ses gardes du corps. Abu Shbak n’était pas à son domicile quand l’attaque a eu lieu.
Les brigades d’Ezzeddin Al-Qassam du Hamas ont accusé Abu Shbak d’avoir commandité l’assassinat de plusieurs militants du Hamas, y compris de son commandant, aussi bien que d’avoir organisé des escadrons de la mort.
L’attaque contre la maison d’Abu Shbak a mis en colère Abdul-Hakim Awad, le porte-parole du Fatah, qui a alors pointé un doigt accusateur vers la direction politique du Hamas. « Tous [au Hamas] sont des tueurs du haut jusqu’en bas, tous sont impliqués, » a-t-il affirmé.
L’accrochage le plus grave dans la dernière série d’affrontements s’est produit mardi matin quand des individus armés non identifiés ont attaqué un véhicule de la garde présidentielle transportant une douzaine d’agents des services de sécurité du Fatah près du passage frontalier de Mintar. Huit personnes ont été tuées. Les soldats israéliens se trouvant à proximité ont ouvert le feu sur deux hommes armés qui quittaient la scène, tuant l’un et blessant le second. Le Hamas a nié avoir la moindre responsabilité dans l’attaque et a accusé l’armée israélienne d’en être responsable. Le Fatah a fait porter la responsabilité de l ?embuscade sur le Hamas.
Des observateurs palestiniens discutant avec Al-Ahram Weekly atttribuent les combats internes à trois facteurs, lesquels ont contraint le ministre de l’intérieur Hani Al-Qawasmeh à démissionner dimanche :
Tout d’abord l’incapacité des dirigeants du Hamas et du Fatah à contrôler leurs ailes militaires respectives, en grande partie composée de jeunes inexpérimentés et indisciplinés à la gâchette facile. L’échec répété des accords de cessez-le-feu convenus entre les deux côtés ces derniers mois renforcent cette opinion.
Ensuite la situation est compliquée par la confusion entre les intérêts de factions et les intérêts claniques. Les clans, dont beaucoup disposent de leur propre milice, commettent souvent des crimes pour raison de vengeance, ce qui entraîne ensuite de nouveaux affrontements entre factions.
Il y a enfin les intérêts israéliens alimentés par des considérations politiques et de propagande pour pousser Gaza dans la guerre civile. La tactique israélienne consiste de plus en plus à exploiter le combat interne palestinien comme écran de fumée pour éluder n’importe quel processus sérieux de paix qui impliquerait pour Israël d’abandonner les conquêtes de la guerre 1967.
Le siège qu’Israël impose à Gaza, impliquant la confiscation de presque 50 pour cent des recettes fiscales palestiniennes, a été facilité et encouragé par le blocus appliqué par Washington contre le gouvernement actuel. Le résultat a été de transformer Gaza en chaudière sous pression au bord de l’explosion, les autorités palestiniennes étant dans l’incapacité de satisfaire les besoins de base de la population, que ce soit en payant aux employés leurs salaires ou en protégeant la population contre les tentatives israéliennes de nettoyage ethnique.
Il existe des propositions pour corriger la situation avant qu’il ne soit trop tard mais elles impliquent de dissoudre toutes les services de sécurité hérités d’Oslo (donc du Fatah), aussi bien que de dissoudre la force exécutive plus récente du Hamas en attendant la création d’une force de sécurité nationale représentant tous les Palestiniens. Une telle proposition parait cependant de plus en plus impraticable car il apparaît de plus en plus clairement que ni le Hamas ni le Fatah ne sont capable de maîtriser leurs ailes militaires.
Le retour au combat fratricide entre le Fatah et le Hamas, qui coïncide avec le cinquante-neuvième anniversaire de la Nakba palestinienne, contribue à rendre de plus en plus sombre la vie quotidienne des Palestiniens.
18 mai 2007 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2007/845...
[Traduction : Claude Zurbach - Info-palestine.net]
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