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Fin du cessez-le-feu : explications

vendredi 8 août 2014 - 16h:32

Middle east Eye

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Les analystes s’accordent à dire que Gaza a trop souffert pour accepter une simple trêve avec Israël. Mais ils craignent que cela ne marque le début d’une « terrible tragédie » dans laquelle la souffrance des Palestiniens sera décuplée.

Samah Sabawi : Auteur, analyste politique et avocate spécialisée dans les droits de l’homme

Pour l’opinion publique israélienne, un cessez-le signifie qu’ils peuvent revenir à une vie normale et faire semblant que l’occupation et le siège de Gaza n’existent pas. Pour les Palestiniens à Gaza, cela signifie une vie à nouveau suspendue sur fond de misère.

Le temps est une arme de torture pour les Palestiniens dans la bande de Gaza. Avec des centaines de milliers de déplacés, des infrastructures civiles essentielles détruites et l’ensemble de la population de 1,8 million de personnes endurant les souffrances aiguës du manque d’électrique, d’eau et de médicaments, qu’il y ait cessez-le-feu ou non, chaque minute qui passe sous le blocus est un acte de guerre et une agression brutale.

Il existe un large consensus parmi tous les Palestiniens aujourd’hui pour dire que si le siège n’est pas levé, les groupes armés palestiniens avec le soutien de la population retourneront à la résistance armée.

Israël insiste pour démilitariser les organisations palestiniennes. Mais les Palestiniens sont convaincus qu’ils doivent être en mesure de se protéger. Personne n’est intervenu quand Israël pilonnait Gaza avec des chars, des canons et des F16. Les seuls qui se sont levés étaient les groupes armés palestiniens qui ont réussi à repousser la quatrième armée la plus puissante du monde.

Convaincre la résistance palestinienne de rendre leurs armes est non seulement susceptible d’être rejeté par les groupes militants, mais aussi par l’opinion publique palestinienne en général.

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Des parents des réfugiés palestiniens tués dans une frappe israélienne sur une école des Nations Unies à Beit Hanoun, le jeudi 24 juillet 2014, sont en pleurs à l’hôpital Kamal Adwan

Pour aller de l’avant et sortir de l’impasse, il aurait fallu que l’Égypte revienne sur le devant de la scène et ouvre le passage de Rafah et aussi que d’autres acteurs importants exigent qu’Israël respecte ses obligations en vertu du droit humanitaire, sous peine de se voir appliquer des sanctions internationales.

Si les négociateurs palestiniens reviennent du Caire sans avoir imposé au minimum la fin du siège, alors le peuple de Palestine n’aura plus qu’une seule option, et c’est un retour à la résistance armée qui se traduira par une horrible tragédie qui va démultiplier ses souffrances. Nous avons beaucoup entendu dans la bande de Gaza le mois dernier, la répétition de la même phrase : « nous voulons vivre libre ou mourir ici. »


Jonathan Cook, un journaliste britannique basé à Nazareth depuis 2001, est l’auteur de trois livres sur le conflit israélo-palestinien

Ce qui dominera dans l’attaque d’Israël sur Gaza, ce sont les remarquables réalisations militaires du Hamas. Ses combattants ont utilisé un réseau de tunnels afin de tendre des embuscades aux soldats israéliens, tuant plus de 60 d’entre eux - la moitié du nombre de morts infligés à Israël au Liban en 2006 par le Hezbollah, une force beaucoup mieux équipée. Le Hamas a même lancé un raid audacieux sur un poste militaire à l’intérieur d’Israël, tuant cinq soldats.

Il a également continué à tirer des roquettes sur les villes israéliennes durant les combats, réussissant même brièvement faire cesser de fonctionner le seul aéroport international d’Israël. Les dommages causés à l’économie d’Israël sont estimé à 4,5 milliards de dollars à ce jour.

Face à une forte résistance du Hamas, Israël a été effectivement battu par le temps. Les États américains et européens ne peuvent rester trop longtemps aveugles face aux massacres infligés par Israël aux civils de Gaza. Benjamin Netanyahu a également eu peur de lancer une invasion terrestre en profondeur, étant sûr que le coût en vies humaines augmenterait pour les soldats [israéliens].

Le Hamas a trop poussé son avantage et la bande de Gaza a payé un prix trop élevé, pour ne pas exiger l’application d’une demande qui unit tout le monde dans l’enclave : la fin du blocus étouffant d’Israël.

Mais l’humiliation militaire d’Israël signifie qu’il ne peut pas se permettre de laisser le Hamas se regrouper et parfaire ses compétences. Le nouveau mot d’ordre d’Israël pour Gaza est « démilitarisation », privant Gaza de tous les matériaux qui pourraient aider le Hamas dans la prochaine confrontation.

Les négociations actuelles ou futures devront trouver un moyen de sortir de cette impasse. La tentation pour les deux parties sera d’utiliser des armes à longue portée - des roquettes du Hamas, des bombardements et des frappes aériennes pour Israël - intensifiant la pression sur l’autre camp pour un accord, comme nous l’avons vu se produire dès que la trêve a expiré ce matin.

Ironiquement, la solution pour Netanyahu peut être fournie par l’accord récent du Hamas pour une réconciliation avec le Fatah de Mahmoud Abbas. C’était le gouvernement d’unité que Netanyahu a essayé de démanteler avec ses attaques contre le Hamas en Cisjordanie et à Gaza.

Israël peut convenir d’un assouplissement du blocus, donnant ainsi au Hamas une victoire partielle, mais seulement à condition que le Fatah et Abbas reviennent faire la police de Gaza. Puis Netanyahu pourra serrer la vis à Abbas jusqu’à ce que celui-ci démilitarise la bande de Gaza pour le compte d’Israël.


Sam Bahour, un consultant américano-palestinien en développement d’affaires et commentateur politique, basé à Ramallah

L’utilisation même du mot « cessez le feu » est insultante. Elle représente une symétrie artificielle que les Palestiniens auraient imposée, même si la réalité sur le terrain est tout à fait contraire.

Pour une fragile et non représentative délégation de l’unité palestinienne, être engagée dans des négociations »« de cessez-le-feu » avec leur occupant militaire (qu’importe que ce soit directement ou par des intermédiaires) signifie que les Palestiniens repartent pour une période dans le style d’Oslo, où - quoi qu’il ait été convenu - la partie palestinienne abandonnera officiellement des droits dont elle aura été dépouillée auparavant par Israël depuis des décennies.

Ces droits, au premier rang desquels se trouve celui d’être protégé, doivent être garantis par des États tiers en vertu de leurs obligations à l’égard de la quatrième Convention de Genève, sans qu’il soit besoin d’une « résistance » ou de « pourparlers de cessez-le-feu ».

Un « cessez-le-feu » renforce simplement la fausse impression qu’il y a une certaine symétrie entre la Palestine et Israël. Il n’y en a pas ! En outre, la conduite de ces négociations de « cessez-le-feu » dans la capitale d’un pays qui participe au siège de la bande de Gaza, devrait être une source d’embarras pour chaque membre de l’équipe de négociation palestinienne, au premier rang desquels figure le Hamas.


Ramzy Baroud, auteur palestinien et rédacteur en chef de Middle-East Eye

8 août 2014 - Middle East Monitor - Vous pouvez consulter cet article à :
https://www.middleeastmonitor.com/n...
Traduction : Info-Palestine.eu


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