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Les activistes israéliens et le choix de partir d’Israël

vendredi 20 avril 2007 - 08h:19

Michel Warschawski - AIC

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Les activistes israéliens et le choix de partir d’Israël : usage et mésusage de ce que ce choix représente.

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Michel Warschawski


Agir en Israël pour une paix juste entre les Palestiniens et les Israéliens n’est pas une tâche facile, c’est le moins qu’on puisse dire.

Les activistes israéliens sont plongés dans le ventre de la bête et en permanence soumis à des pressions énormes : sous la pression du consensus national, sous la pression de la répression sociale (et quelquefois) politique, sous la pression du désespoir et du découragement, et sous la pression de la perte de l’espoir et du départ.

C’est pourquoi, toutes ces six dernières décennies, tant de bons activistes ont quitté le pays. Qui peut les en blâmer ? Qui sait quel prix chacune et chacun de ces activistes a dû payer pour son militantisme ? Un prix pour lui-même, un prix pour sa famille, un prix professionnel. Nager à contre-courant est extrêmement épuisant et consommateur d’énergie et chacun a le droit absolu de décider de se sortir des eaux houleuses et boueuses. Certains de mes meilleurs amis, et même des formateurs politiques, ont décidé de quitter le pays dès les premières années de l’occupation de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza, sentant qu’il était trop difficile de s’opposer au consensus de la société toute entière, y compris la gauche libérale, à seulement quelques dizaines d’individus.

Mais d’autres ont décidé de rester et de combattre. Au début dans un état d’isolement complet puis, petit à petit, avec quelques centaines de plus, et puis des milliers, et puis des dizaines de milliers. Jusqu’à ce que nous nous retrouvions - d’abord en 1982 puis en 1998 - dans un mouvement plus vaste de centaines de milliers, exprimant une opinion majoritaire en Israël. Pour ceux qui avaient décidé de ne pas quitter le pays, c’était vraiment valorisant et gratifiant.

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Ilan Pappe

Cependant, la situation politique s’est détériorée une fois encore, en 2000, et après le fiasco de Camp David, un nouveau consensus est né autour du gros mensonge d’Ehud Barak. Le « camp de la paix » s’est réduit, une nouvelle fois, à ce qu’Uri Avneri appelle la « petite roue » [d’engrenage - ndt], c’est-à-dire à l’aile la plus radicale, sans la « grande roue » représentée par la Paix Maintenant et d’autres pacifistes pragmatiques. Sans la grande roue qui pousse, la petite, toute seule, n’a qu’une tâche limitée : protester et exprimer sa solidarité avec les victime des guerres et de l’occupation israéliennes.

Néanmoins, cette petite roue n’a pas déserté le terrain du combat, s’opposant à l’occupation et la colonisation ou, en juillet 2006, à la nouvelle agression contre le Liban. Entre 5 000 et 10 000 Israéliens ont manifesté régulièrement dans les rues de Tel Aviv pour dire « Non à l’occupation ! », « Non à la guerre ! ». Ils ont fait le choix de rester et de continuer à être actifs, dans leur pays, dans le ventre de la bête. Ils doivent être respectés pour cela.

Se saisir du cas d’anciens activistes israéliens qui ont décidé de partir du pays par désespoir ou par considérations personnelles comme « L »’exemple de ce qu’il faut faire est inacceptable. En effet, il s’agit d’« UN » choix légitime, mais pas davantage.

Je ne pense pas que ce soit par accident qu’une majorité de ceux qui saluent la décision d’Ilan Pappe et de la défunte Tanya Reinhart de quitter le pays, et qui présentent ces décisions comme la « seule véritable façon révolutionnaire de résister », appartiennent au courant radical anti-israélien du mouvement international, souvent proche de collaborer ou collaborant avec les groupes antijuifs et négationnistes (du génocide des Juifs). Ils se servent de la décision d’Ilan - évidemment sans son consentement - pour prouver que le peuple israélien est à 100 % mauvais et corrompu, et qu’il ne mérite même pas d’exister sur la face de la terre.

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Tanya Reinhart

Une telle attitude est fondamentalement en opposition avec celle soutenue par la plupart des activistes du mouvement de libération nationale palestinien lesquels, inlassablement, rappellent combien il est important pour les Palestiniens d’avoir des partenaires israéliens même si, à certaines époques, ceux-ci ne sont que des partenaires symboliques. Ils savent qu’ils seront les premiers perdants si le Mur se referme hermétiquement entre les Arabes et les Juifs et si le cauchemar du « clash des civilisations » devient réalité. La présence de Juifs combattant aux côtés des Musulmans, d’Israéliens joignant leurs forces à celles des Palestiniens, est une trouée - même si dans ces moments difficiles elle n’est que symbolique - dans la barrière que nos ennemis sont en train de construire autour du peuple palestinien, une brèche dans le Mur destiné à diviser l’humanité en deux, la civilisation judéo-chrétienne et la barbarie musulmane.

En ce sens, leur position n’est pas simplement une position antisémite, elle est aussi gravement antipalestinienne.

16 avril 2007 - Alternative Information Center - AIC - traduction : JPP

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