16 septembre 2017 - CONNECTEZ-VOUS sur notre nouveau site : CHRONIQUE DE PALESTINE

Kufr Qaddoum, ou l’histoire d’une lutte soutenue contre l’occupation

samedi 4 mai 2013 - 07h:27

John Space

Imprimer Imprimer la page

Bookmark and Share


En dépit des lourdes épreuves que vivent quotidiennement les habitants du village de Kufr Qaddoum et dont les colons et les forces de l’occupation israélienne sont les auteurs, le village demeure inébranlable dans sa détermination à résister à l’occupation.

JPEG - 101.2 ko
Photo : John Space

Depuis le début des manifestations hebdomadaires à Kufr Qaddoum le 1er juillet 2011, le village a enregistré plus de 120 arrestations, assorties de plus de 100.000 shekels d’amendes. Lors de ces manifestations, environ 2000 personnes ont souffert à la suite de l’inhalation des gaz lacrymogènes. Un adolescent a été grièvement blessé à la tête après avoir reçu une bombe lacrymogène ; il a eu le crâne fracassé et par voie de conséquence un trouble permanent de la parole.

Mourad Shtaiwi, le coordonnateur des marches pacifiques qui ont lieu chaque vendredi à Kufr Qaddoum indique que l’objectif majeur des manifestations est la réouverture de la route principale de Kufr Qaddoum qui relie le village à la ville de Naplouse et qui a été fermée par les forces de l’occupation en 2003. Ces manifestations, ajoute Shtaiwi, se poursuivront et ne cesseront que lorsque cessera l’occupation.

« Dans le village de Bil’in, les gens ont réussi à déplacer le mur et à libérer quelques-unes de leurs terres. Néanmoins, l’occupation en elle-même se poursuit, » a-t-il précisé en ajoutant « Donc, si nous parvenons à ouvrir la route, serait-ce la fin de l’occupation ? Non. C’est pourquoi, la lutte continuera jusqu’au jour où l’occupation disparaîtra. »

JPEG - 145.9 ko
Photo : John Space

En effet, la route principale dont il est question se trouve à la sortie de Kufr Qaddoum. Elle a été fermée pour qu’elle soit exclusivement utilisée par les colons de Kedumim, une colonie illégale voisine du village. A ce titre, Shtaiwi précise que la fermeture de la route a occasionné de nombreux ennuis dont une extrême augmentation du temps de voyage et déplacement vers les villages voisins, à l’instar de Jit, le plus proche de Kufr Qaddoum.

Par ailleurs, Shtaiwi explique qu’avant « la fermeture de la route, la distance entre les deux villages était à peu près de 1.5 km. Aujourd’hui, pour partir de Kufr Qaddoum à jit, il vous faut parcourir 15 km. Nous en souffrons terriblement »

Outre les trajets qui s’allongent, la fermeture de la route affecte l’évacuation des malades vers les hôpitaux, sachant qu’ils sont, pour la plupart du temps, transférés sur des routes difficiles et rocailleuses destinées aux animaux et non pas aux humains.

« Nous avons malheureusement perdu deux personnes, mortes sur le chemin à cause de l’état de la route. Pourquoi, parce qu’on nous a interdit d’évacuer les malades via la route principale, » déplore Shtaiwi.

JPEG - 95 ko
Un jeune manifestant blessé - Photo : John Space

Les manifestants à Kufr Qaddoum sont souvent placés dans le collimateur de l’armée israélienne qui use de tous les moyens pour les réprimer, comme lors de l’incident survenu en mars 2012 où un chien-policier a été lâché sur la foule. Les soldats israéliens sont restés là à regarder le chien qui, pendant 15 minutes, s’est attaqué avec brutalité à Ahmed, le neveu de Shtaiwi.

« En voyant ce qui se passait, j’ai couru pour secourir mon neveu tout en criant après les soldats et les officiers qui regardaient la scène. Trois d’entre eux sont venus vers moi, m’ont sauté dessus et m’ont pulvérisé avec un vaporisateur à gaz poivré, suite à quoi je suis tombé inconscient. Ce jour là, j’ai été arrêté avec mon neveu, » se souvient Shtaiwi qui ajoute : « Mais le plus drôle dans l’histoire est qu’après cet accrochage, les soldats ont fait venir une ambulance afin d’apporter les premiers soins au chien policier, alors que c’est Ahmed qui saignait. »

Un autre incident est survenu durant la manifestation hebdomadaire. Le 27 avril 2012, le jeune Wasim Burhum âgé de 19 ans, a été touché à la tête par une bombe lacrymogène. Shtaiwi souligne que le jeune Burhum souffre de troubles de la parole suite à une blessure de la tête provoquée par la bombe lacrymogène.

Shtaiwi explique : « Nous connaissons les pratiques de la police israélienne. Lorsqu’elle veut utiliser les bombes lacrymogènes, elle ne les tire pas directement, mais à partir des armes à feu, comme un tir à l’arc. S’ils utilisent les bombes lacrymogènes aujourd’hui, vous verrez comment ils tirent. Ils cibleront directement les personnes qui prennent part à cette marche pacifique afin de leur faire le plus de mal possible. »

JPEG - 137.1 ko
Photo : John Space

Outre la fermeture de la route principale, les soldats israéliens installent souvent des « checkpoints volants » au niveau de l’unique entrée de Kufr Qaddoum en interdisant aux gens d’entrer ou de sortir du village de 8h jusqu’à 20h. Shtaiwi a indiqué que les habitants de Kufr Qaddoum sont régulièrement interpellés au niveau des différents checkpoints plantés partout en Cisjordanie puis arrêtés et détenus seulement à cause de leur village d’origine.

D’autre part, quelques militants ont vivement critiqué le comité populaire de Kufr Qaddoum qui refuse d’autoriser la participation des femmes du village dans les manifestations, alors que des femmes israéliennes et étrangères sont invitées à rejoindre ces marches pacifiques.

« Les femmes ne participent pas directement aux manifestations, mais nous pensons que leur rôle serait plus significatif à partir des toits des maisons où elles auront à surveiller les mouvements des soldats. Il est très important qu’elles nous suivent sans qu’elles n’y prennent part. En effet, les femmes sont parfois vulnérables c’est pourquoi, nous préférons qu’elles ne marchent pas à nos côtés. Imaginez un instant qu’elles inhalent le gaz lacrymogène, nous serons sans doute confrontés à beaucoup de problèmes. »

Bien que la plupart juge cette attitude envers les femmes répulsive, il est incontestable que les villageois de Kufr Qaddoum luttent quotidiennement contre l’occupation pour survivre et que c’est leur droit le plus absolu de poursuivre leurs marches pacifiques.
Des marches qui sont réprimées et les habitants de Kufr Qaddoum opprimés par les soldats israéliens d’une part, et par les colons, d’autre part.

« Les problèmes les plus épineux auxquels nous sommes confrontés ont lieu durant le mois d’octobre à l’occasion de la récolte d’olives. En fait, à chaque fois que les agriculteurs finissent la récolte et la ramassent dans des sacs, des colons viennent et volent le fruit d’une dure journée de labeur. Au pire, ils endommagent les oliviers. Lors de la dernière récolte, nous avons enregistré trois incidents de vol et de massacre des arbres. Mais je dois dire que personne n’a attaqué Kufr Qaddoum car ils savent pertinemment que les habitants du village ne resteront pas les bras croisés et passifs face aux attaques des colons, » précise Shtaiwi.

JPEG - 112.5 ko
Photo : John Space

Le coordonnateur a par ailleurs ajouté que des militants viennent souvent demander comment une manifestation peut-elle être non violente alors que des jeunes lancent des pierres sur les soldats « Pourquoi vous jetez des pierres et vous dites que votre marche est pacifique ? »

Ce à quoi il répond : « Nos jeunes ne lancent pas des pierres à Tel Aviv, par exemple. Nous les jetons sur nos terres, sur le sol qui a été piétiné par l’armée israélienne qui a causé et continue de causer beaucoup de peine et de souffrances au peuple Palestinien. Nous leur avons dit [à l’armée israélienne] que nous étions venus avec nos torses nus et nos voix pour leur transmettre nos messages. »

Shtaiwi indique que les gens de Kufr Qaddoum font preuve d’un courage extraordinaire en continuant, malgré la violence subie durant les manifestations, de résister à des forces de l’occupation armées jusqu’aux dents.

JPEG - 133.2 ko
Photo : John Space

« Nous savons bien évidemment qu’ils peuvent facilement nous tuer, et que nos n’avons pas la possibilité de nous heurter à eux ; nous ne possédons pas d’armes, mais des pierres. Mais pensez-vous que les pierres puissent endommager un char ou tuer un soldat ? Non. Cependant, nous avons la capacité de continuer notre lutte et nous avons le droit de la continuer car nous sommes les propriétaires de cette terre. »

27 avril 2013 – Palestine Monitor – Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.palestinemonitor.org/det...
Traduction : Info-Palestine.eu - Niha


Les articles publiés ne reflètent pas obligatoirement les opinions du groupe de publication, qui dénie toute responsabilité dans leurs contenus, lesquels n'engagent que leurs auteurs ou leurs traducteurs. Nous sommes attentifs à toute proposition d'ajouts ou de corrections.
Le contenu de ce site peut être librement diffusé aux seules conditions suivantes, impératives : mentionner clairement l'origine des articles, le nom du site www.info-palestine.net, ainsi que celui des traducteurs.