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Qu’est-ce qui a mal tourné avec Azmi Bishara ?

lundi 23 avril 2007 - 05h:07

Riad Ali

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Notre ajoutée par la publication

Azmi Bishara a confirmé ce jeudi 12 avril son intention de démissionner de son poste de député au parlement israélien. Il a quitté Israël depuis plusieurs semaines, et les spéculations quant à son retour ou non vont bon train.

Qu’il décide ou non de retourner en Israël, Azmi Bishara se définit lui-même comme un chef politique en exil. Même ses rivaux politiques admettent qu’il est un homme avec lequel il faut compter et un penseur important qui a réussi à forger sa personnalité politique en Israël, chez les arabes israéliens et dans le monde arabe dans son en-semble.

Bishara a commencé sa carrière politique à l’ombre du parti marxiste, Hadash, qui a défendu le slogan : « deux états pour deux peuples (Israël et la Palestine). », mais le principe d’un Etat pour les juifs et d’un Etat pour les palestiniens n’avait pas satisfait Bishara. Il voulait plus, peut-être à juste titre, et il est venu ainsi à créer ce qui était censé se résumer dans sa formule magique : « un Etat pour l’ensemble de ses citoyens », un genre d’exercice intellectuel pour sortir du piège de 1948, du piège de la Nakba ( c’est le terme pour dire « catastrophe » que les pa-lestiniens utilisent pour décrire ce qui est arrivé après 1948).

Mais quelque chose est allé de travers sur le chemin d’« un état de l’ensemble de ses citoyens. » La prétention fondamentale était que les partenaires des Arabes israéliens dans le dialogue sont l’Etat d’Israël et le peuple juif qui selon Bishara, était censé renoncer au caractère juif de l’Etat. En pratique cependant, aucun dialogue n’a eu lieu, et Bishara parlait aux Arabes israéliens alors que son regard se fixait au delà de la frontière. Son interlocuteur était et reste la nation arabe. Les voyages de Bishara en Syrie ne sont qu’un exemple de cette demarche.

Les supporteurs de Bishara pendant les manifestations politiques ont toujours fait attention pour faire une distinction entre eux-mêmes et d’autres, en faisant onduler le drapeau palestinien. Pendant les dernières élections de la Knesset, dans une tentative désespérée de persuader les électeurs arabes de ne pas voter pour les partis sionistes, Bishara a inventé un slogan qui a accru sa notoriété : « Si vous votez pour un sioniste, alors qui êtes-vous ? » mais personne n’a pris la peine de lui de-mander « si vous, Bishara, vous êtes un membre de la Knesset en Israël sioniste, alors qui êtes vous ? »

Il y a déjà quelques années que Bishara et son parti Balad ont abandonné le rêve d’une citoyenneté égalitaire pour le troquer contre le panarabisme du défunt, Gamal abdel Nasser, président de l’Egypte. Ils ont activement préconisé une identité arabe palestinienne forte et pleinenement détachée émotionnellement et intellectuellement d’Israël, une identité qui n’a plus rien à voir avec l’ « Etat de l’ensemble des citoyens » pour laquelle, Bishara a été élu à l’origine à la Knesset.

L’explication de ce décalage par le parti Balad est que seul un citoyen arabe conscient de son identité, est capable de se battre pour ses droits nationaux et civi-ques. C’est la base de la guerre de Balad contre l’« israélisation » qui menacerait selon eux, les Arabes en Israel.

Une génération entière d’Arabes israéliens s’est formée dans cette école de pensée du panarabisme. Des dizaines de milliers de jeunes ont été amenés à renforcer les bases de leur identité arabe, tout en rêvant de - ou en combattant pour - la naissance d’un Etat différent et abstrait de l’Israël actuel, mais sans contour bien défini ; un Israël où l’on peut vivre tout en ayant le sentiment d’être dans une Palestine ; un Israël où l’on peut chanter l’hymne national palestinien en hébreu (pour accepter un compromis) avec le drapeau palestinien au fond du décor.

Que Bichara revienne ou ne revienne pas en Israël, cela est déjà une question marginale. Ce qui est important, c’est son héritage : des dizaines de milliers de jeunes qui doivent porter en eux un rêve irréalisable ; une génération qui vit dans l’aliénation et le désespoir alors qu’Israël, le monde arabe et le reste du monde s’accordent de plus en plus sur une formule de paix fondée sur la reconnaissance de l’existence d’Israël non comme « Etat de l’ensemble de ses citoyens » mais comme un Etat du peuple juif.

Il est évident pour cette jeunesse qu’Israël et le peuple juif n’abandonneront pas le caractère juif de l’Etat quelque soit le prix. Et il est évident pour eux comme pour Bishara, que la signification pratique du compromis historique entre les peuples arabes et Israël est la renonciation à leur vision d’indépendance politique. Il n’y aura pas de grande palestine. Il n’y aura aucun droit de retour. Il n’y a aucun « Etat de l’ensemble de ses citoyens ».


Riad Ali un journaliste pour la Chaîne 1 de la télévision israélienne.



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Azmi Bishara

Azmi Bishara est issu d’une famille chrétienne palestinienne, cependant son positionnement politique est laïc. Il devient membre de la Knesset en 1996, et est l’un des membres fondateurs du parti Balad. Il défend l’option d’un « État de tous les citoyens » par opposition au concept d’« État juif », et critique dans cette optique l’idéologie sioniste d’Israël.

Azmi Bishara publie également des ouvrages en langues arabe, anglaise, germanique et hébraïque, sur les sujets de la démocratie et de la société civile, sur les droits des minorités nationales en Israël, sur l’islam et la démocratie et sur la question palestinienne, au sein de la société israélienne, dans les Territoires occupés et dans les autres États (Source : Wikipedia).

Riad Ali - Ha’aretz, le 12 avril 2007 : What went wrong with Azmi Bishara ?
Traduit de l’anglais par D. Hachilif

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