L’Autorité de Ramallah est-elle un protectorat israélien ?
mardi 10 juillet 2012 - 06h:31
Khaled Amayreh
Comme presque toujours, le comportement de l’Autorité palestinienne (AP) est visiblement pathétique. Malheureusement, il n’y a pas d’autre moyen de se rapporter à ce comportement.
- 1e juillet 2012, à Ramallah. Les flics d’Abbas à l’oeuvre - Photo : Lazar Simeonov
Selon des informations récentes, Israël a cherché à obtenir un prêt d’un milliard de dollars US du Fonds monétaire international (FMI) au nom de l’Autorité palestinienne. Toutefois, l’organisme international a rejeté la demande israélienne, faisant valoir qu’il ne voulait pas créer un précédent avec un État contractant un prêt pour une entité non-étatique.
On pouvait s’y attendre, les officiels de l’AP, plutôt embarrassés, ont refusé de confirmer ces informations, insistant sur le fait qu’ils n’avaient pas connaissance de l’affaire. Le ministre de l’économie palestinienne, Jawas Naji a été cité par l’agence de nouvelles Maan disant qu’il en a seulement entendu parler dans les médias. De même, Nabil Qissis, ministre des finances de l’AP, a refusé de répondre aux appels téléphoniques demandant des explications sur la question.
Il est vraiment difficile de croire les dénégations de l’AP à cet égard. En dernière analyse, nous pouvons invoquer le proverbe arabe : « S’ils savaient, ce serait une calamité, et s’ils ne le savaient pas, ce serait encore pire. » Dans le cas très probable qu’ils étaient informés et qu’ils auraient dissimulé cette information aux Palestiniens, ils auraient alors trompé leur confiance en leur cachant des informations vitales. Et au cas où ils n’en savaient rien, cela signifierait qu’ils n’ont pas honnêtement assumé leur responsabilité en permettant « à des agents anonymes » d’agir dans leur dos.
Ce n’est pas vraiment difficile de déterminer l’identité de ces agents. Selon les médias israéliens (vous voyez les Palestiniens ont toujours à apprendre sur leur gouvernement en consultant les médias israéliens !), c’est le Premier ministre Salam Fayyad qui a demandé au gouverneur de la Banque d’Israël, Stanley Fischer, de rechercher un prêt au nom de l’AP afin de sauver cette dernière de l’insolvabilité et de la faillite.
Si c’est le cas, M. Fayyad doit être tenu pour responsable de ce comportement avilissant qui donne l’impression qu’Israël et l’Autorité palestinienne sont des complices et non pas des ennemis. Mais qu’est-il advenu du fait qu’Israël est l’occupant de notre patrie, le voleur de notre terre, l’assassin de notre peuple, l’assassin de nos enfants, et un usurpateur de nos droits ? Est-ce que tout cela été balayé sous le tapis comme si les faits se rapportant à la cruelle occupation israélienne de notre pays et à l’implacable répression contre notre peuple étaient d’une nature secondaire et sans importance ?
Bien sûr, la question ici n’est pas le prêt lui-même, mais plutôt le fait de ramper aux pieds d’Israël, blessant ainsi tout ce qui reste de notre dignité nationale. L’AP aurait pu demander à un tiers de demander le prêt. Cependant, la relation ombilicale entre le Judenrat palestinien et les maîtres israéliens doit toujours être rappelée, même si les officiels de l’AP font de leur mieux pour tromper et induire en erreur le peuple même qu’ils prétendent servir.
Les ramifications de cette monstrueuse initiative, même si elle n’est pas directement dangereuse, ne peuvent pas être limitées à la sphère morale ou éthique. La signification politique de demander à Israël de l’aide sur l’arène internationale est écrasante. Cela montre que l’Autorité palestinienne n’est pas plus qu’un protectorat israélien, totalement soumis à la puissance occupante.
D’ailleurs, comment pouvons-nous en tant que Palestiniens convaincre le monde que l’occupation doit cesser et qu’un État palestinien viable doit être établi au plus tôt, alors que notre autorité supposée autonome, qui est inférieur à un État, ne peut survivre sans la bonne volonté et le soutien d’Israël ?
En effet, lorsque la survie d’un peuple et sa prospérité dépendent de la bonne volonté de son ennemi, cela signifie que le chemin vers la liberté et l’indépendance va être long et ardu.
Personne ne peut nier que l’AP connait crise sur crise. Il est vrai aussi qu’Israël est la cause profonde de la plupart sinon de tous ces problèmes. Toutefois, l’Autorité palestinienne ne peut être absous de toute responsabilité.
L’AP était censée être la première étape vers la réalisation d’un État palestinien. Mais il semble maintenant que le plus grand obstacle vers un État palestinien est l’Autorité palestinienne elle-même, et on ne sait si l’entité recherchée est un « canton » ou un « bantoustan » ou un Judenrat asservi à Israël.
L’AP prétend plutôt avec raison qu’elle n’est pas libre de bâtir une économie prospère en raison de l’occupation israélienne qui contrôle tous les coins et recoins dans les territoires occupés. Eh bien, si c’est le cas, l’Autorité palestinienne est effectivement en train de permettre à Israël de manger le gâteau de l’occupation et de conserver tous les atouts pour lui-même, alors que tous les passifs vont aux Palestiniens par l’intermédiaire de l’Autorité palestinienne.
En clair, l’Autorité palestinienne doit soit se saborder - car sa survie est d’un intérêt primordial pour l’occupation - soit refuser les diktats israéliens.
Nous disons que la survie de l’Autorité palestinienne est dans l’intérêt israélien parce que, au moins en ce qui concerne Israël, rien ne fait plus de tort aux perspectives de création d’un véritable État palestinien digne de ce nom qu’une entité fragile, dépendante et servile. En effet, l’Autorité palestinienne est aujourd’hui confrontée à un véritable dilemme : soit à chercher sa survie en étant au doigt et à l’ ?il d’Israël ; ou se comporter de manière indépendante et risquer un effondrement financier.
Un autre comportement honteux par les agences de sécurité de l’AP est la répression récente brutale d’une manifestation à Ramallah pour protester contre un projet de visite du vice-Premier ministre israélien Shaul Mofaz. Mofaz est un criminel de guerre notoire qui a les mains dégoulinantes de sang palestinien innocent, dont celui de centaines d’enfants.
Beaucoup de jeunes de conscience pensent que c’était inapproprié et humiliant de recevoir ce tueur d’enfants à Ramallah après tout ce qu’il a fait à notre peuple. Par conséquent, une manifestation pacifique a été organisée.
Mais les services de sécurité et la police de l’AP se sont ligués contre les manifestants, les frappant sauvagement, provoquant des réactions de colère et beaucoup de consternation du public.
La direction de l’AP a affirmé que le but de la visite, qui a finalement été annulée sous la pression publique, n’avait rien à voir avec une quelconque reprise des pourparlers de paix moribonds avec État sioniste. Ainsi, Abou Mazen et Mofaz devaient-ils parler de la météo exceptionnellement chaude ou peut-être de la coupe d’Europe 2012 ?
C’est vraiment triste et lamentable de voir la direction palestinienne trahir le peuple palestinien. Les Palestiniens qui ont fait d’énormes sacrifices pour la liberté méritent vraiment de meilleurs dirigeants.
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4 juillet 2012 - Al-Qassam Website - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.qassam.ps/opinion-5876-I...
Traduction : Info-Palestine.net