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Les Palestiniens sont impatients de savoir qui sera le prochain président égyptien

samedi 2 juin 2012 - 06h:21

Saleh al-Naami - Al Ahram

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Les Gazaouis sont captivés par la course présidentielle en Egypte, se demandant ce que le résultat définitif signifiera pour eux, écrit Saleh Al-Naami.

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Malgré ses imperfections et ses contestations, ce premier véritable scrutin présidentiel en Egypte restera historique. Nous en avons enfin fini avec la propagande malhonnête et mensongère, assénée durant des décennies selon quoi l’Etat sioniste serait la "seule démocratie" au Proche-Orient.

Même si elle est très occupée à réviser ses examens de fin d’année dans sa première année au collège, Israa suit attentivement la course à l’élection présidentielle en Egypte sur les stations satellites égyptiennes, et appuie avec enthousiasme Mohamed Mursi, le candidat du Parti de la Justice et de la Liberté soutenu par les Frères Musulmans. Israa, qui vit à Berket Al-Wez dans le centre de la bande de Gaza, a rapidement influencé ses s ?urs, frères et sa mère pour qu’ils soient aussi des partisans enthousiastes de Mursi. Son père, cependant, préfère Abdel-Moneim Abul-Fotouh (islamiste modéré).

Les discussions et les débats sur la question prennent beaucoup de temps dans la famille. Israa estime qu’une victoire de Mursi ne serait que justice pour un groupe qui a été réprimé par les régimes successifs en Égypte et interdit dans la vie politique. La Fraternité doit avoir sa chance pour mettre son programme à l’épreuve si c’est le choix du peuple égyptien, fait-elle valoir.

« Une victoire du candidat des Frères musulmans serait de très grande valeur, parce que non seulement ce serait l’expression d’une réconciliation de l’Égypte avec elle-même, mais aussi une image de la façon dont les Arabes pratiquent la démocratie en permettant à tout groupe politique - quelle que soit son idéologie - d’arriver au pouvoir, » explique-t-elle à Al-Ahram Weekly. « Tant que c’est une expression de la liberté de choix de l’électeur égyptien. »

Le père d’Israa, de son côté, utilise l’exemple du Hamas qui dirige la bande de Gaza, comme une confirmation que la victoire d’un candidat des Frères musulmans en Égypte donnerait une justification aux ennemis de l’Égypte de boycotter et soumettre ce pays à un état de siège, comme cela s’est produit à Gaza après que le Hamas ait remporté les élections en 2006.

L’intérêt pour la course présidentielle égyptienne parmi les Palestiniens n’est pas l’apanage de cette famille, mais est devenu un véritable phénomène. Les Palestiniens débattent en permanence des répercussions possibles de l’élection : dans les cafés, les universités, les mosquées et dans les transports publics. Bien qu’il n’y ait pas eu de consultation pour connaître l’opinion des Palestiniens sur les candidats à la présidence de l’Égypte, en écoutant ce que disent les gens et en consultant ce qu’affichent les réseaux sociaux, il semble qu’il y ait un soutien majoritaire pour le candidat Abul-Fotouh.

Jamal Hamdi, âgé de 49 ans et membre du Fatah, Ahmed Saad, âgé de 53 ans et membre de la gauche palestinienne et Ibrahim Hajar, un partisan du Hamas, vivent dans la même rue dans la ville de Gaza. Ils diffèrent sur à peu près tout, sauf sur leur soutien à Abul-Fotouh. Les trois pensent que son meilleur atout, c’est que c’est une personnalité « qui rassemble les gens, au lieu de les diviser. »

Les partisans d’Abul-Fotouh estiment qu’il est le seul candidat présidentiel qui ait fait preuve d’un soutien sans réserve pour les Palestiniens et de sa solidarité avec le peuple de Gaza. Il est le seul des candidats qui ait réalisé une visite de solidarité dans la bande de Gaza. En tant que secrétaire général du Syndicat des Médecins arabes, il a organisé des caravanes d’aide humanitaire vers le territoire assiégé, en particulier au moment de la guerre d’Israël contre Gaza à la fin de 2008. Tout le monde dans la bande de Gaza reconnaît que Abul-Fotouh a joué un rôle clé dans le rassemblement des dons en médicaments et en fournitures médicales au plus fort de la guerre, comme après.

Beaucoup de Palestiniens se sont en particulier réjouis de ses déclarations lors du débat avec Amr Moussa, lorsqu’il disait dans ses interviews qu’Israël était un des premiers ennemis de l’Égypte et qu’il ne permettrait pas la poursuite du siège sur la bande de Gaza.

Les sites de réseaux sociaux sont remplis par les opinions des Palestiniens, en particulier les jeunes. Plusieurs pages Facebook ont ​​été créés en appui aux candidats, en particulier Abul-Fotouh et Mursi, tandis que d’autres soutiennent Hamdeen Sabahi. Une enquête sur les conversations sur ces sites montre un vif débat entre les partisans de Mursi et Abul-Fotouh à propos des implications sur la situation palestinienne de l’élection de l’un ou l’autre candidat.

Bien que les organisations palestiniennes gardent le silence sur les candidats à la fonction présidentielle en Égypte - il s’agit officiellement d’une question intérieure égyptienne - de nombreux officiels du Hamas - qui est une branche des Frères musulmans - estiment que l’expérience du Hamas au pouvoir prouve qu’il n’est pas forcément recommandé que quelqu’un considéré comme appartenant à la Fraternité musulmane devienne président de l’Égypte. Ils soutiennent donc ouvertement Abul-Fotouh. « Nous ne devrions pas ignorer l’équilibre actuel du pouvoir sur les scène internationale et régionale, » dit une figure de proue du Hamas qui détient un poste de direction au sein du gouvernement d’Ismaïl Haniyeh. « Le monde et certaines puissances régionales ne vont pas aider un président des Frères musulmans à réussir dans sa mission. »

Les Palestiniens espèrent que les élections égyptiennes marqueront un tournant décisif en faisant disparaître les effets du siège vieux de six ans appliqué sur la bande de Gaza. Majed Abu Samha, professeur à l’Université islamique de Gaza,dit qu’à l’exception de Moussa et Ahmed Shafik, tous les candidats à la présidentielle ne sont pas disposés à tolérer la poursuite du siège de Gaza. Les habitants de Gaza espèrent en particulier que ces élections présidentielles mettront fin à la contrebande par des tunnels qui a entraîné jusqu’à aujourd’hui la mort de 180 jeunes gens qui y travaillaient.

Khalil Al-Shahri, un importateur de produits électriques, espère que le prochain président égyptien légalisera le commerce entre la bande de Gaza et l’Égypte, même si cela augmente le prix des marchandises importés, parce que ce serait une forme de normalisation des relations entre les deux peuples. Les Palestiniens espèrent aussi que le prochain président égyptien enverra des experts dans les domaines médicaux et de l’éducation dans la bande de Gaza.

Contrairement à la plupart des pays du monde, les Égyptiens vivant dans la bande de Gaza ne peuvent pas exercer leur droit de vote à l’élection présidentielle puisque l’Égypte n’y a pas de représentation diplomatique. Le consulat a été fermé en 2007 après l’arrivée du Hamas au pouvoir. Alors que le nombre exact d’Égyptiens à Gaza est mal connu, il est cependant estimé à plusieurs milliers.

Pendant ce temps, des décideurs, des intellectuels, des médias et des centres de recherche israéliens sont également en pleine discussion sur la course à l’élection présidentielle en Égypte. Amnon Abramovich, un commentateur sur la chaîne israélienne Canal 2, décrit les élections présidentielles en Égypte comme un événement historique, et citant des sources dans l’armée et l’appareil de sécurité à Tel-Aviv, il explique que le résultat de l’élection présidentielle pourrait entièrement changer le cours de événements et de l’histoire dans la région.

La radio israélienne a rapporté que le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou [et criminel de guerre - NdT] a émis des ordres stricts aux ministres et aux commandants supérieurs de l’armée de ne pas faire de commentaires sur les candidats à la présidence égyptienne, afin d’éviter que ce soit interprété comme une préférence israélienne sur un candidat plutôt qu’un autre. Mais de nombreux responsables israéliens ont accueilli favorablement les commentaires de Moussa selon quoi il ne considérait pas Israël comme un ennemi de l’Égypte.

Le président israélien [et criminel de guerre - NdT] Shimon Pérès a qualifié les commentaires de Moussa de « rassurants et responsables ». La télévision Channel 1 a rapporté que des centres de décision et des centres de recherche de l’appareil de renseignement militaire israélien et du Mossad préparaient des scénarios possibles pour l’avenir pour les relations avec l’Égypte après les élections présidentielles, en fonction du gagnant.

Channel 10 a rapporté que Netanyahou et son ministre des Affaires étrangères, [le fasciste] Avigdor Lieberman, ont entamé des pourparlers secrets avec de hauts responsables américains au sujet de l’avenir de ces relations, et des répercussions sur la stabilité de la région. Lieberman avait fait les manchettes des journaux quand il avait déclaré que l’Égypte après Moubarak constituait une menace pour « la sécurité nationale » de l’État sioniste. Menace qui selon lui dépasserait de loin celle du programme nucléaire de l’Iran.

Les experts stratégiques et économiques à Tel Aviv estiment que traiter l’Égypte comme un ennemi pèserait très lourd sur l’économie d’Israël parce que cela signifierait une augmentation des dépenses en matière de sécurité au détriment de projets civils. Les commentateurs israéliens conviennent également que la capacité de Tel-Aviv à attaquer les Palestiniens après la révolution égyptienne et l’éviction de Moubarak, a grandement diminué.

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24 mai 2012 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2012/109...
Traduction : Info-Palestine.net - Claude Zurbach


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