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Trois ans après la chute des bombes

mardi 14 février 2012 - 06h:50

Ahmed Barqawi - The Palestine Chronicle

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Voila exactement trois années que 1417 Palestiniens innocents ont perdu la vie à Gaza tandis que le monde entier demeurait silencieux. Et il y a exactement trois années que l’humanité et tout ce qui s’y réfère a été rendu invisible.

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Près de 1500 tués, dont des centaines d’enfants, des milliers de blessées et des milliers de maison détruites... La cruauté et la violence israéliennes se sont totalement données libre cours contre la population sans défense de la bande de Gaza, pendant plusieurs semaines de l’hiver 2008-2009. La complicité des puissances occidentales a été totale.

Voilà exactement trois années que la bande surpeuplée a été verrouillée par les militaires israéliens aussi hermétiquement que la « communauté internationale » a fermé ses yeux et tourné le dos au massacre horrible qui s’y déroulait. Et voila trois ans que nous avons épuisé le peu de quota de sympathie et de compassion qui nous restait pour les Palestiniens et notre apathie collective a atteint un nouveau niveau.

Trois années après la « cessation unilatérale des opérations militaires » le 18 janvier 2009, l’appareil militaire de massacres et d’anéantissement rugit toujours aux frontières, prêt à être déclenché à tout moment. Les Forces Israéliennes d’Occupation [FIO] se pourlèchent littéralement les babines, salivant à la possibilité d’un autre massacre odieux, leur zèle animal pour plus de bains de sang aussi vigoureux aujourd’hui qu’il l’était il y a trois ans - sinon plus - tous les responsables politiques, diplomatiques et militaires israéliens semblent ne manquer aucune occasion de faire rouler les tambours de guerre - et ils le font sans même y réfléchir.

La journée commence et se termine dans le climat morose d’une guerre imminente qui menaçe Gaza. Lle 27 décembre 2011 (troisième anniversaire de la guerre de Gaza), le chef d’état major des armées, le lieutenant général Benny Gantz, a affirmé qu’une autre attaque de la bande est « inévitable » tandis que le journal Haaretz cite les paroles de Tal Hermoni, général de brigade du Sud, disant qu’une autre « campagne militaire variée et différente » est en préparation. Bien sûr ceci ne tient pas compte du fait que les massacres ciblés, les raids aériens nocturnes et les incursions terrestres régulières sont déjà devenus d’horribles réalités quotidiennes dans la bande.

Aujourd’hui, toute la population de Gaza est l’otage de conditions de vie désastreuses et de l’étau mortel de l’Etat sioniste. La politique cruelle d’Israël consistant à calculer et à déterminer méticuleusement le minimum nécessaire en calories pour les habitants de Gaza est toujours à l’ordre du jour. Des étudiants sont privés de la poursuite de leurs études à cause des restrictions arbitraires de voyage, les patients se voient refuser leur droit aux soins de santé et le mépris érigé en système pour tout ce qui ressemble à des droits de l’Homme scontinue au même rythme.

Trois années après la chute des bombes, et les Palestiniens à Gaza - avec le mauvais sort qui s’acharne sur eux - essaient de rassembler les fragments brisés de leur vie et des familles entières vivent avec les photos usées de leur proches, ceux qui ont perdu la vie durant l’opération « plomb durci » d’Israël et le silence coupable du reste du monde.

Trois années après la chute des bombes, de nouvelles injustices s’accumulent sur celles qui existaient déjà. Le cri perçant des sirènes, les voix gémissantes des familles en deuil dans les ruines du territoire assiégé continuent de se faire entendre aujourd’hui dans la petite enclave côtière. Trois années après la chute des bombes, la seule justice que la communauté internationale a accordé à la population de Gaza fut un modeste rapport ensuite désavoué par son auteur.

Trois années après que le ciel de Gaza ait été envahi par toutes sortes de munitions au phosphore blanc, le sol de la bande est toujours jonché d’obus et de bombes non explosées en attente d’une second chance de réclamer encore plus de vie d’enfants palestiniens. Trois ans après la chute des bombes, vivre une enfance normale est toujours un exploit rare pour les enfants de Gaza, tandis que le poids de la vie sous les termes draconiens d’Israël éprouve lourdement leurs âmes fragiles ; les couleurs noires de la dernière guerre obscurcissent toujours leurs mémoires et les salles de classes de fortune leur rappellent quotidiennement les horreurs qu’ils ont endurées durant l’hiver 2008/2009.

Trois années après que des « spectateurs » israéliens des villes avoisinantes du Sud soient aller grimper en groupe sur les collines pour voir le ciel déverser mort et destructions sur des Palestiniens sans défense, gloussant, riant, se passant les jumelles l’un à l’autre tandis qu’ils applaudissaient avec enthousiasme la « force » des FIO, comme si le carnage qui se déroulait sous leurs yeux était un simple évènement sportif... tuer reste toujours un sport spectacle pour les autorités israéliennes, de jeunes garde-frontières israéliens à la gâchette facile se délectent toujours en tirant à balles réelles sur les fermiers palestiniens tentant de récolter leurs récoltes près de la « zone tampon » tandis que traiter comme du gibier les Palestiniens dans leur tunnels près de la frontière de Gaza avec des drones constitue toujours la « procédure standard ».

Trois années après la chute des bombes - quasi un an après l’élimination de la dictature de Hosni Moubarak - le poids écrasant du blocus d’Israël continue à étouffer la poitrine des habitants de Gaza. Le siège inhumain de Gaza - qui a, depuis longtemps cessé d’être théoriquement utile, si jamais il l’avait été - s’est graduellement transformé en cette politique internationale inacceptable que le monde applique, trop confortable pour être abandonnée. Cette passivité chronique a malheureusement poussé des Palestiniens de Gaza dans une vie de blocus sans fin et de punition collective, une vie qui ne leur laisse aucun choix si ce n’est de littéralement creuser un tunnel de sortie.

Aujourd’hui « l’opération plomb durci » reste une plaie ouverte et une tache sombre sur la conscience du monde dont la morale et le sens de la justice s’étiolent rapidement, alors que la valeur de la vie humaine est traitée selon deux standards. Les victimes palestiniennes ne méritent-t-elles pas des veillées à la bougie en honneur à leur mémoire ? Auront-t-elles un jour quelqu’un pour réciter tous leurs noms sur leur propre « terre sacrée » ? Les images du massacre de 22 jours à Gaza sont trop fortes pour être oubliées : des pères éplorés déterrant les restes de leurs proches enterrés sous les décombres de ce qui fut leur maison, des blessés amenés dans des salles d’urgence débordées sur des chaises de bureau, des corps non identifiés d’enfants morts avec le mot « anonyme » gribouillé au marqueur noir sur leurs petits ventres à la morgue de l’hôpital Adwan, et des médecins à l’hôpital Al Shifa effectuant désespérément des aides respiratoires sur des enfants, sans résultats.

Malheureusement les médias sont toujours aveugles quand il s’agit de Gaza. Les cris de protestation de Tunis, Le Caire, Benghazi et Sana’a ont étouffé les appels incessants pour lever le blocus. Bien sûr de nombreux exploits peuvent aujourd’hui être tirés du printemps arabe, où - fort malheureusement - règnent encore en maître l’opportunisme et la politique de bas étage.

Trois années après la chute des bombes, il semble que Gaza restera à l’arrière-plan pour un certain temps encore, largement absente de nos postes de télévision et exclue des nouvelles quotidiennes, peut être jusqu’à Plomb Durci II.

Ahmad Barqawi est chroniqueur et écrivain freelance vivant à Amman en Jordanie. Il a réalisé diverses études, analyses statistiques et recherches sur le développement économique et social jordanien.

12 janvier 2012 - The Palestine Chronicle - Vous pouvez consulter cet article à :
http://palestinechronicle.com/view_...
Traduction : Info-Palestine.net - Lisette Camaerts


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