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Assassinat du prédicateur : « la tonte du gazon » au Yémen
dimanche 16 octobre 2011 - Éric Walberg
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Anwar Al-Awlaki

Ses prônes ont attiré de grandes foules, d’abord à Denver et ensuite à San Diego où il a obtenu un Master en éducation.

Bien qu’il fût fiché par le FBI dès 1999, il est devenu une star des médias après le 11 septembre à l’occasion de son interview avec le National Geographic et le New York Times selon lesquels il était un musulman américain modéré et éloquent. Il a condamné l’attaque du 11 septembre en ces termes : « il est impossible que ceux qui ont fait cela puissent être musulmans et s’ils prétendent l’être, ils ont dénaturé leur religion ». Sur le site IslamOnline.net, six jours après les attaques du 11 septembre, il a laissé entendre que c’était un coup monté par des agents secrets israéliens et que le FBI « après avoir consulté la liste des passagers des avions, et avait désigné comme pirates par défaut tous ceux qui avaient un nom musulman ou arabe ».

Le ministre US de la défense souhaitait entendre un musulman modéré dans le cadre d’un effort de communication ; c’est ainsi qu’un employé du Pentagone a invité Al-Awlaki à déjeuner chez l’avocat général. Il est devenu le premier imam à conduire la prière au Capitole en 2002 pour l’association des employés musulmans du Congrès et les officiels du conseil des relations americano-islamiques.

Toutefois, harcelé par le FBI, il a été poussé à partir en Angleterre en 2002 où il a continué à prêcher. Il s’est installé au Yémen en 2004 ; il a été arrêté en 2006, accusé d’enlèvement et de terrorisme, mis en prison (et sans aucun doute torturé) mais on l’a relâché en décembre 2007. Ses sermons sur l’éthique islamique et la vie des prophètes enregistrés sur CD sont devenus des best-sellers tandis que sur Youtube, il y avait 1910 vidéos de ses conférences, qui ont toutes été effacées depuis, et ses CD ne sont plus en vente. Ce n’est qu’après son passage en prison qu’il a ouvertement réclamé le Jihad contre les USA.

Les preuves les plus fortes contre lui sont le fait que Nidal Hasan, accusé d’avoir tué 13 personnes à Fort Hood en 2009, était en contact avec lui et que Faisal Shahzad, impliqué dans la tentative d’explosion d’une voiture piégée à Time Square à New York, l’avait pris comme modèle. Obama, reprenant son annonce de l’assassinat d’Ousama Bin Laden au Pakistan, s’est vanté qu’ Al-Awlaki avait été tué par un drone dans la province septentrionale yéménite du Mareb, fief du clan Al-Awlaki, en même temps que son protégé pakistano-américain de 25 ans, Samir Khan.

Les dirigeants de la tribu de Al-Awlaki affirment que le cadavre n’est pas celui d’Anwar et ils ont exigé une analyse ADN. Toutefois à supposer que Al-Awlaki et Khan soient morts, c’est la première fois que le gouvernement US aura tué délibérément des citoyens américains dont le seul crime était d’avoir lancé des appels à la guerre sur Internet, contre l’empire US.

Cette nouvelle politique a choqué même les politiciens traditionnels, tels que le candidat républicain à la présidence, Ron Paul, et elle donne au « dangereux message d’Al-Awlaki une vie et une puissance autonomes » selon l’imam US Yasir Qahdi, dans un article du New York Times. Il n’a jamais été prouvé qu’ Al-Awlaki était un dirigeant d’Al Qaïda ou qu’il avait participé directement à une action terroriste. Son assassinat était de toute évidence une autre plume à la coiffure de guerre d’Obama dans ce début de campagne pour sa réélection cet automne.

Les critiques de la majorité appellent l’assassinat « un acte futile » , et insistent sur le fait que la victime ne faisait même pas partie de Al Qaïda. Pratiquement inconnu au Yémen, Al-Awlaki deviendra simplement un autre martyr de la lutte de libération menée au Yémen contre l’hégémonie américaine. Il en reste d’autres qui ont beaucoup plus d’expertise qu’Al-Awlaki selon le US Military Academy’s Combating Terrorism Centre ( centre de lutte contre le terrorisme de l’académie militaire US).

La vraie raison pour laquelle Al-Awlaki et Khan ont été ciblés tient au charisme de leur message sur l’Islam pour les dissident occidentaux. À mesure que les jeunes étasuniens et européens désespérés se radicalisent du fait des conflits de la période post septembre 2001 et de la crise économique interminable, ils se tourneront toujours davantage vers des personnes comme Al-Awlaki qui fournissent une solution simple, mais mortelle, pour des jeunes gens qui n’ont rien à perdre.

Les talibans trouvent tous les jours de nouvelles recrues à mesure que les USA tuent des résistants afghans par dizaines, et il s’ensuit que les USA devront tuer de plus en plus de personnes au Yémen, et Dieu sait où, dans une campagne interminable que les troupes US en Afghanistan appellent « la tonte du gazon ». Les victimes seront de plus en plus souvent des étasuniens, dégoûtés de leur propre gouvernement auquel ils attribuent la cause principale des problèmes actuels dans le monde.

* Eric Walberg écrit actuellement pour l’hebdomadaire Al-Ahram au Caire.

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10/05/2011 - PalestineChronicle - Cet article peut être consulté ici :
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Traduction : Anne-Marie Goossens