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A bord du beau vaisseau Cablegate

mardi 7 décembre 2010 - 06h:34

Israel Shamir - Counterpunch

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Assange dans les entrailles de l’Empire.

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Julian Assange

Notre Neo dans la vraie vie a recommencé ! Dans son nouvel épisode de Wiki-Matrix, l’intrépide Julian Assange attaque l’Empire tout en étant pourchassé par des généraux voraces du Pentagone, des agents secrets de la CIA et des féministes suédoises enragées.

Pardonnez-moi si ça a l’air d’une bande dessinée pour teenager, mais cette histoire a tellement de détours et de rebondissements que ça me fait tourner la tête. La dernière fois que j’ai ressenti ça, c’est quand j’ai commencé à publier des textes anti-sionistes, seul et traqué. Un jour un vénérable Hassidique s’est approché de moi ; je me suis instinctivement recroquevillé, m’attendant à une scène terrible. Au lieu de me condamner, il m’a submergé de bienveillance et au même moment un orchestre s’est mis à jouer une veille mélodie de noces dans la maison voisine. Cet ancien chant de bénédiction a eu pour effet de m’envoyer loin, très loin du culte de la force brutale des nationalistes modernes, tout là-bas, dans un lieu où les vieilles traditions avaient encore de la valeur et du sens. Ou bien est-ce que je devais cela aussi à Clark Kent (Identité secrète de Superman NdT) ?

La génération digitale préfère le Neo de Matrix à Superman, mais la dynamique est la même. En se baladant dans le vaisseau de Moebius , Neo tombe sur un groupe de gamins adorables, impétueux et pragmatiques qui se sont consacrés à la destruction de Matrix. Durs comme du fer et cependant très humains, ces jeunes gens jouissent des relations privilégiées d’une troupe d’élite en attendant le signal de l’attaque. Ils suivent leur leader simplement parce qu’il est le meilleur et le plus intelligent. J’ai ressenti le même esprit de corps lors d’une récente visite dans une des lieux d’hébergement ultra-secrets et ultra-protégés de Wikileaks quelque part en Europe. Tous ces pirates informatiques et ces journalistes étaient réunis pour se préparer à
lancer une opération qui sera connue dans l’histoire par le nom de Cablegate ou peut-être Megaleaks.

Il y avait là Malena du Brésil, Joseph de Suède, Sara de Nouvelle Zélande, James de Grande Bretagne, et des quantités d’autres personnes pas moins importantes ni précieuses, toutes bien installées sur des matelas ou des sofas avec leurs ordinateurs portables sur les genoux et leurs regards droit au coeur de Matrix. Un quart de millions de dépêches secrètes et confidentielles de la diplomatie américaine attendaient, comme autant de guêpes digitales, d’être lâchées dans
l’espace cybernétique. Elles attaqueront le tendre bas-ventre de l’Empire, les illusions flatteuses qu’il entretient sur lui-même et qui sont le ciment des armées impériales. Cela pourrait peut-être suffire à faire tourner la marée et nous rendre un peu de notre
liberté qui va s’évaporant.

Les sordides petits messages jettent une lumière crue sur les stratégies douteuses de l’Empire Américain et sur sa manière de se procurer des renseignements, de donner des ordres, de circonvenir les politiciens et de déposséder les pays. Mais évitons de tomber dans un anti-américanisme confortable et sans nuances, en nous rappelant que ces révélations, qui sont parmi les plus importantes révélations de méfaits criminels dans l’histoire, n’ont été rendues possibles que par le courage et l’honnêteté d’Etasuniens prêts à risquer leur vie pour
faire éclater la vérité.

La tension monte quand vous osez vous opposer au terrible pouvoir de Matrix. Ces cyber-guerriers jeunes et intelligents, acceptent de mettre leur vie en jeu pour nous. Vont-ils survivre à l’opération ou les clones malfaisants vont-ils les attaquer et les détruire ? Quoiqu’il en soit, l’enthousiasme est grand et le temps est propice à cette entreprise audacieuse : un magnifique ciel dégagé, un soleil éclatant et des étoiles scintillantes pour nous guider à travers les nuits sans sommeil. Quoiqu’il advienne je serai toujours reconnaissant d’avoir vécu cela, d’avoir bénéficié de la compagnie de ces charmants jeunes gens ainsi que de l’inspiration de leur leader charismatique. Il est impossible de ne pas admirer Julian Assange. Il est toujours aimable, calme, gentil et même doux ; comme le Tao, il guide sans guider, il dirige sans commander. Il n’élève jamais la voix ; il dit un mot et tout devient clair. Notre Neo est guidé par l’idéal de la transparence sociale. La lumière vive est la meilleure arme contre les
conspirations.

A bord du vaisseau Megaleaks, je feuillette les derniers nouvelles du front. Les médias semblent développer trois thèmes principaux qui tous les trois ont pour centre notre courageux héro Julian Assange. Il y a le thème du "traître" (qui permet à un empire mondialiste de revêtir des couleurs patriotiques), le thème du "violeur" (dans lequel une amante délaissée se venge de notre héro qui ne lui a pas fourni de moyen contraceptif au moment critique) et enfin le thème du "complot sioniste" (qui bizarrement est en lien avec le thème du viol puisqu’une de ses accusatrices s’est enfuie en Israël). Comme dans toute campagne de désinformation qui se respecte il y en a pour tout le monde : Les conservateurs peuvent rejoindre la meute en enfourchant le thème du traître, les libéraux adorent le thème du viol, et les fous peuvent s’exciter sur un complot sioniste de plus. Faisons de notre mieux pour libérer le nom de "Sion" phagocyté par cet Etat d’Apartheid et ramenons-le chez lui : sur le beau vaisseau Megaleaks et sous les projecteurs de la vérité. C’est un trop beau nom pour le laisser aux sionistes.

Le contenu de Megaleaks

La collection complète comprend 251 288 documents qui vont de décembre 1966 au 28 février 2010 en provenance de 274 ambassades. Chacun de ces documents est soit un télégramme diplomatique secret qui a été envoyé aux USA, soit un communiqué des Secrétaire d’Etat à des bases étasuniennes. Ils révèlent les ordres qui sont donnés partout dans le monde, les renseignements que veut obtenir le gouvernement des USA et les informations à répercuter ; ce que les diplomates découvrent dans les endroits où ils travaillent, des notes détaillées de réunions avec des membres d’autres gouvernements et les opinions de celui qui envoie la dépêche sur ceux qu’il a rencontrés. Les 261 276 536 mots qui constituent ces dépêches rempliraient 3 000 livres si on les imprimait. Ces dépêches illustrent le réseau de tentacules de contrôle et de commandement que les USA ont déployé sur le monde entier.

Les analyses préliminaires font apparaître de bonnes et de mauvaises nouvelles. Les mauvaises nouvelles : Les USA sont insidieux. Les fichiers montrent que les USA ont infiltré quasiment tous les pays du globe, même des états supposément neutres comme la Suède et la Suisse. Les ambassades étasuniennes surveillent de près leurs hôtes. Ils ont infiltré les médias, le commerce des armes, le pétrole, les services secrets et ils intriguent pour placer leurs entreprises à la première place. Les dépêches montrent que les USA règnent déjà sur un empire global.

Et maintenant les bonnes nouvelles : Ils ne sont pas tout puissants. Les dépêches prouvent qu’ils rencontrent de la résistance à tous les niveaux. Ils font tout ce qu’ils peuvent pour s’imposer mais ils n’y arrivent pas toujours. La Russie est relativement libre, et l’Iran et la Turquie aussi ; même les états européens les plus dociles ne se soumettent pas toujours servilement. Les dépêches confirment notre connaissance personnelle de la résistance de la base en Angleterre et aux USA ; des magazines comme Counterpunch sont des phares dans une mer de brouillard.

Les fichiers révèlent quelques cas d’ingérence flagrante. Beaucoup des plus récents ont un rapport avec l’Iran qui est devenu une obsession chez les dirigeants étasuniens. Par exemple, juste avant le discours du Président Ahmadinejad à l’Assemblée Générale de l’ONU, le Département d’Etat a ordonné aux européens de quitter la salle à un moment précis. Et en effet les pouvoirs européens ont obéi au coup de sifflet étasunien tout comme les satellites obéissants de l’Union Soviétique dansaient sur l’air que jouait Staline. Il n’y a qu’un pays qui n’a pas obéi aux ordres, la Suède. Son représentant terrifié avait laissé passer le moment crucial par inadvertance et il a envoyé de frénétiques signaux de détresse aux Etasuniens pour savoir ce qu’il devait faire.

Voyez le pauvre petit état du Tadjikistan qui n’a fait que changer de maître. Il a supposément "accédé à l’indépendance" en 1991 mais que s’est-il réellement passé ? Ils obéissent désormais aux ordres des USA comme ils obéissaient aux ordres des soviétiques. Une dépêche d’un ambassadeur dit brutalement : "Les USA ont demandé au président Rahmonov de renvoyer [le responsable de la drogue] Mirzoev et il l’a fait." Qui sauvera les pauvre petit Tadjikistan des griffes de Matrix ? L’ambassadeur nous donne un élément de réponse : "Nous pensons que la
Russie exerce une forte pression régulière sur le Tadjikistan pour réduire le rôle et la présence des USA et de l’Occident. Les pressions de Moscou commencent à avoir de l’effet."

Ou voyez l’Azerbaïdjan, où l’influence étasunienne a diminué et le pouvoir d’Israël a augmenté dans une telle mesure qu’une dépêche de l’ambassade de Bakou compare les relations entre Israël et l’Azerbaïdjan à un iceberg dont on ne voit que les neuf dixièmes.

Il semble que le pouvoir des USA ait atteint son apogée dans les années 1990 et qu’il commence maintenant à décliner lentement. Megaleaks n’est pas tant la cause que le symptôme de son déclin. Avec un peu de chance les gens de bonne volonté de par le monde vont s’unir pour détériorer avec élégance la machine de domination étrangère. Le peuple étasunien a bénéficié encore moins que les autres de la violence et de l’ingérence des stratégies politiques mondialistes. Des personnages héroïques comme Julian Assange nous guide vers un honnête système de contrôle décentralisé et loin de ces réseaux de conspirations qui nous rappellent Matrix.

On peut joindre Israel Shamir à : adam@israelshamir.net

29 novembre 2010 - Counterpunch - Pour consulter l’original :
http://www.counterpunch.org/shamir1...
Traduction : D. Muselet


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