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Représailles dites du « prix à payer » à Hébron

vendredi 10 septembre 2010 - 06h:37

Joseph Dana

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Les familles palestiniennes qui vivent sur la route n° 60 dans les
collines au sud de Hébron n’ont aucun recours contre les attaques des
colons.

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Yuri Jaber et sa famille ont été attaqués à de nombreuses reprises par
des colons israéliens.

Le territoire est sous contrôle total des Israéliens tant du
point de vue militaire que civil ce qui fait que l’Autorité
Palestinienne basée à Ramallah est relativement impuissante à gérer
les problèmes causés par les colons israéliens. Israël a mis en place
un système qui spolie profondément les droits humains des Palestiniens
au moyen d’un brouillard bureaucratique de lois qui rendent l’accès à
l’eau, à l’électricité et à la construction virtuellement impossibles.

Depuis le meurtre de quatre colons de la colonie de Beit Haggai tout
près de Kiriat Arba, la semaine dernière, les Palestiniens de ce
secteur ont été soumis à ce que les colons appellent des attaques de
représailles du « prix à payer » et à des incursions répétées de l’armée
israélienne. Les colons ont brûlé des champs, détruit des propriétés,
lapidé des maisons palestiniennes et construit de nouveaux
avant-postes coloniaux en réponse à ce meurtre. Comme d’habitude,
l’armée n’a pas rempli sa prétendue mission de s’interposer entre les
Palestiniens et les colons pour réduire les tensions. En fait l’armée
est tout à fait au courant des attaques des colons et cependant elle a
réquisitionné les maisons palestiniennes pour « calmer la situation ».

Le 4 septembre j’ai interviewé trois familles palestiniennes dont les
maisons ont été investies par l’armée israélienne en réponse au
meurtre des colons. L’entretien a eu lieu pendant que des soldats
israéliens occupaient leur maison et dans un certain nombre de cas
plusieurs heures après que des colons aient attaqué leurs propriétés.

La maison de Yusri Jaber se trouve juste en dessous de la colonie de
Har Tzion près de Kiriat Arba. Les Palestiniens appellent cet endroit
la Vallée Baqu tandis que les colons israéliens et l’armée considèrent
qu’il fait partie de la « banlieue » de Kiriat Arba. Les barres posées
aux fenêtres de Jaber attestent que la famille a l’habitude d’être
quotidiennement attaquée à coup de pierres par les colons. Pendant les
dix dernières années Jaber a regardé sa terre diminuer au fur et à
mesure que les colons la lui volaient en toute impunité.

La nuit du meurtre, les colons ont attaqué la maison de Jaber à coups
de pierres. Au bout de quelques heures d’attaque, l’armée israélienne
s’est décidée à installer un barrage devant la maison. On lui a dit
que le barrage était installé « pour sa protection personnelle ». Le
barrage s’ajoute à une base installée par l’armée sur la maison de
Jaber qui a été utilisée périodiquement durant la semaine précédente.
Jaber pense que, au lieu de protéger la famille, l’armée permet aux
colons d’exprimer leur rage sans que cela passe aux nouvelles
internationales. Il a le sentiment de payer un lourd tribut pour une
attaque qu’il n’a pas soutenue et dont il n’est pas responsable. En
dépit de la présence de l’armée, les colons ont arraché les cultures
dans une partie de ses champs quelques heures avant notre arrivée.

La famille Salima habite la zone qui se trouve de l’autre côté de la
route 60 depuis huit générations dans une grande maison de quatre
étages. Le soir du 2 septembre, deux unités de soldats sont entrés
chez lui au milieu de la nuit et ont pris rapidement possession du
troisième étage de la maison et du toit.

La famille a été transférée au premier étage et on leur a dit qu’ils
pourraient monter au troisième une fois par jour mais qu’ils ne
pouvaient pas aller dans les autres parties de leur maison. Quand nous
sommes arrivés, trois jeeps de l’armée et environ 15 soldats
s’entassaient dans l’entrée et la cage d’escalier de la maison.
Mahmoud Salime était silencieux et de toute évidence épuisé quand nous
lui avons parlé. Ses réponses étaient succintes et laconiques comme
s’il se sentait surveillé. En fait il y avait des soldats dans tous
les coins de la maison. Quand j’ai voulu me lever pour photographier
un soldat qui descendait l’escalier, il m’en a tout de suite empêché
en disant : « Je ne veux les embêter. Je ne veux pas leur donner un
prétexte pour me persécuter davantage. Je veux juste qu’ils nous
laissent tranquilles. » Son sentiment reflète celui de toutes les
familles palestiniennes à qui j’ai parlé : Ils veulent juste que
l’armée les laisse tranquilles et qu’elle cesse d’occuper leurs
maisons.

La famille Shabana habite à 50 mètres du site de l’attaque meurtrière.
Le jour qui a suivi le meurtre, au milieu du dîner d’Iftar qui brise
le jeûne du Ramadan, les soldats sont entrés dans la maison de Moaza
Shabana et l’ont arrêté ainsi que son frère. Leurs téléphones ont été
confisqués -et ne leur ont pas été rendus à ce jour- et ils ont été
emmené au poste de police de Gush Etzion et interrogés par des agents
du Shin Bet, l’Agence de Sécurité Israélienne. Moaza et son frère ont
été retenu trois jours sans pouvoir communiquer avec leur avocat ou
leur famille. Finalement ils ont été relâchés sans charges mais avec
des bleus et des marques principalement à cause des menottes qu’on
leur avait laissées pendant toute leur garde.

La maison de la famille
a été investie par l’armée tout de suite après que Moaza et son frère
aient été emmenés par les soldats au poste de police de Gush Etzion.
Les soldats se sont installés au denier étage et sur le toit qu’ils
ont transformé en bas militaire provisoire. Quand nous étions assis
avec la famille un commandant est arrivé et nous a demandé nos cartes
d’identité et la raison de notre présence. Ezra Nawi a répondu au
soldat par une avalanche de reproches. « Imaginez qu’un soldat
palestiniens se trouve dans votre salon de Ramat Gan », a-t-il dit au
soldat, « Vous êtes un soldat d’occupation. Vous n’avez rien à faire
ici. Nous avons été invités par cette famille. Maintenant laissez-nous
tranquilles ! » Le soldat ne savait pas trop ce qui lui arrivait et il a
fait lentement demi-tour, un peu interloqué et il a quitté la maison.
Pendant que nous parlions avec les soldats, Moaza et sa femme
tremblaient de peur. Finalement les soldats nous laissèrent
tranquilles mais la peur de la famille était palpable.

Ce que ces familles ont expérimenté après la meurtres des colons israéliens est un des aspects de l’occupation israélienne. Les Palestiniens de Hébron ne sont que des pions qui subissent l’occupation sans aucun recours possible à une autorité gouvernementale. L’Autorité Palestinienne ne peut pas les aider car leurs maisons se trouvent dans des zones sous contrôle militaire et
civil israélien complet. Le gouvernement israélien n’a aucun désir de protéger ou d’aider ces familles. La nature de l’occupation et le système kafkaïen légal de l’occupation est destiné à leur rendre la
vie si difficile qu’elles seront obligées de partir, libérant ainsi du terrain pour construire des colonies. La semaine d’attaques du « prix à payer » des colons israéliens protégés par l’armée israélienne témoigne
de l’insécurité totale dans laquelle vivent ces familles.

* Joseph Dana, est un écrivain et cinéaste et il vit à Jérusalem. Il
milite dans des groupes comme Taayush et Les Anarchistes contre le
Mur. Son site web est : josephdana.com

6 septembre 2010 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction de l’anglais : Dominique Muselet


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