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Affrontements sur la frontière Lilban/Israël

mercredi 4 août 2010 - 08h:26

Stéphane Bussard - Le Temps

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Quatre Libanais, dont trois soldats et un officier israélien, ont été tués mardi lors d’affrontement à la frontière entre Israël et le Liban. Les spécialistes craignent un dérapage

La trêve entre Beyrouth et Tel-Aviv a-t-elle vécu ? Au cours de graves affrontements, deux soldats et un journaliste libanais ainsi qu’un lieutenant-colonel israélien ont été tués mardi matin à la frontière entre Israël et le Liban. Près du village d’Aadaissé, une patrouille israélienne aurait tenté d’arracher un arbre sur territoire libanais. La Force des Nations unies pour le Liban (Finul) a essayé de s’interposer. En vain. Des échanges de tirs entre armées libanaise et israélienne s’ensuivirent. Ces incidents, les plus sérieux depuis quatre ans, interviennent à un moment de vives tensions entre les deux Etats. Depuis des mois, Israël et le Hezbollah de Hassan Nasrallah ne cessent de se menacer.

Face à la gravité de la situation, le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni hier à huis clos. Au Liban, le secrétaire général du Conseil supérieur de la défense a averti qu’en cas d’attaque israélienne, le pays allait riposter « par tous les moyens disponibles ». De son côté, le président syrien Bachar el-Assad s’est empressé de dénoncer « l’agression » israélienne. Tel-Aviv attribue la « pleine responsabilité » des heurts meurtriers à l’armée libanaise.

Dans un rapport* qu’il vient de publier, l’International Crisis Group (ICG) souligne la dangerosité croissante du statu quo. Le groupe de réflexion bruxellois relève qu’un nouveau conflit entre le Liban et Israël « serait beaucoup plus dévastateur » que la guerre du Liban de l’été 2006, qui avait coûté la vie à plus de 1 200 Libanais, dont une majorité de civils et 160 Israéliens, avant tout des militaires. L’Etat hébreu pourrait chercher à éviter à tout prix ce scénario : une guerre longue qui n’a pas débouché sur une vraie victoire militaire et qui a valu à Israël la réprobation de la communauté internationale pour un usage disproportionné de la force. Selon les stratèges israéliens, il importe de « réduire la période de combat au minimum et de créer un vrai effet de dissuasion » d’autant que Tsahal, l’armée israélienne, doit rétablir sa réputation « d’invincibilité » battue en brèche lors des hostilités avec le Hezbollah.

Le contexte libanais actuel est toutefois très différent. Israël n’est plus à même de mettre en pratique sa « doctrine Dahiya », du nom du quartier du sud de Beyrouth abritant le siège du Hezbollah. L’Etat hébreu était par le passé prêt à attaquer de façon « disproportionnée » le quartier de Dahiya et la zone du sud du Liban. Mais il épargnait le reste du pays. Ce scénario est obsolète. Même si le Parti de Dieu conserve une forte présence au sud du Liban où il stockerait de grandes quantités d’armes toujours plus sophistiquées, cette zone, occupée par près de 10 000 soldats de la Finul, n’est pas son seul sanctuaire. Le Hezbollah a établi une seconde ligne de défense dans l’est de la vallée de la Bekaa. Pour anéantir les milices de Nasrallah, Israël devrait mener une opération militaire de plus grande envergure.

Depuis quatre ans, un autre facteur a fondamentalement changé : à l’issue des élections du 7 juin 2009, le Hezbollah a, après des mois d’âpres négociations, obtenu une minorité de blocage au sein du gouvernement libanais. Il est dès lors difficile pour Tel-Aviv de distinguer le Hezbollah de l’Etat libanais.

L’International Crisis Group relève que ce qui apparaissait jusqu’ici comme un simple « axe de résistance » à Israël pourrait devenir une alliance militaire de fait. La Syrie et l’Iran (qui soutiennent le Parti de Dieu en lui fournissant aides et armes) ainsi que le Hezbollah et le Hamas palestinien coopèrent de façon toujours plus étroite dans le domaine sécuritaire : livraisons d’armes, renseignement et entraînements militaires.

Du côté syrien cependant, une confrontation directe avec Israël romprait avec des décennies de prudence. Damas serait surtout vulnérable à une attaque massive israélienne. Quant à l’Iran, il n’a pas intérêt, relève ICG, à mettre en péril la position stratégique renforcée du Hezbollah, son allié libanais, sur le flanc de l’Etat hébreu. Téhéran a intérêt à garder la carte du Hezbollah en cas d’attaque israélienne d’un site nucléaire iranien.

Les affrontements d’hier peuvent difficilement être considérés comme une surprise, tant le statu quo en place depuis 2006 était fragile. Le processus de paix dans la région est en panne. Aucune sortie de crise n’est perceptible. La résolution 1701 du Conseil de sécurité a certes permis une trêve de quatre ans et la création d’une zone tampon entre Israël et le Liban surveillée par la Finul. Mais la résolution n’empêche pas l’Etat hébreu de violer l’espace aérien libanais et le Hezbollah de se réarmer, alors qu’elle lui imposait de désarmer au profit de l’armée libanaise. L’ICG ne voit qu’une solution : relancer des pourparlers entre Israël, la Syrie et le Liban.

* « Drums of war, Israel and the "Axis of Resistance" ».


Voir carte du lieu de l’affrontement

4 août 2010 - Le Temps


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