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Reconstruire la Palestine

jeudi 22 février 2007 - 06h:42

Johara Baker

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Avec l’espoir de voir naître un vrai gouvernement palestinien d’unité nationale, après l’accord de la Mecque entre le Fatah et le Hamas la semaine dernière, des voix prudentes mais qui se veulent optimistes, commencent à être entendues pour réclamer la reconstruction d’une Palestine actuellement mise en lambeaux.

Pendant des années, les dispositions israéliennes militaires contre la population et les conflits internes palestiniens, qui ont ravagé la Cisjordanie et Gaza, ont fait que les investisseurs potentiels et les hommes d’affaires ont été forcés de mettre de côté leurs projets en attendant que les conditions soient favorables pour reconstruire la nation palestinienne. Aujourd’hui, avec l’espoir de voir naître un gouvernement palestinien viable et unifié, ces projets reviennent dans les titres des journaux y compris le projet d’une nouvelle ville palestinienne entre Ramallah et Jéricho pour un coût de 33 millions de dollars.

Selon Abdel Malik Jaber, directeur général du groupe Paltel, la ville projetée comprendrait 7.000 unités d’habitation pour loger près de 50.000 personnes avec des écoles, des centres de santé et des emplois pour des milliers de Palestiniens au chômage.

Le plan est pour le moins ambitieux et dépend d’une multitude de facteurs et de conditions. Tous les Palestiniens savent trop bien comment est fragile le moindre investissement dans les territoires palestiniens tant la situation politique est instable. Ils savent également que n’importe quelle somme d’argent entrant dans les territoires pourrait littéralement partir en fumée en un clin d’ ?il.

Ces leçons sont apprises depuis longtemps après la signature des accords d’oslo en 1993. Le défunt Président Yasser Arafat a fait, en 1994, une victoire de ce retour dans les territoires palestiniens après des années d’exil, apportant avec lui les espoirs de la liberté et du rêve tant attendu : une Palestine libre et indépendante.
Pendant les six années qui ont suivi, les perspectives pour une paix durable semblaient à première vue plus proches que jamais mais n’importe quelle personne qui aurait regardé à deux fois se serait rendue compte que les Palestiniens comme les Israéliens et la communauté internationale ne faisaient que créer une façade, qui ne tarderait pas à se briser autour de nous.

Alors que les Palestinien exilés commençaient à revenir dans leur mère patrie, que les investisseurs locaux et étrangers et les organismes internationaux d’aide commençaient à investir de l’argent dans ces territoires sans vie sans stabilité et sans prospérité économique, Israël créait ses propres faits accomplis sur le terrain. Sous le prétexte fallacieux que l’on était au « dernier quart d’heure » avant la libération, Israël érigeait plus de points de contrôle, élaborant soigneusement ses plans pour les jours qui arrivaient, plans qui évidemment ne tenaient pas compte de la création d’un état palestinien viable.

C’étaient les temps où les affaires florissaient et où les immeubles s’élevaient dans toute la Cisjordanie et Gaza. Des hôtels extravagants se construisaient, des restaurants ouvraient leurs portes et les projets américains et japonais se lançaient pour construire des écoles, pour paver les routes, et dans chaque recoin des territoires palestiniens, on trouvait des projets de décollage économique.

Cela a donné alors au peuple palestinien, un faux sentiment de sécurité. Des emplois ont été créés et des centaines de milliers d’autres ouvriers ont été autorisés à entrer en Israël pour travailler. Dans tout cela, les Palestiniens ont écouté leurs chefs croyant qu’ils étaient unis et pensant qu’ils étaient à l’abri d’un John Hancock.
Il a fallu un incident pour dissiper cette illusion. Le 28 septembre 2000, le Chef du Likud, Ariel Sharon, et ses 3.000 agents de sécurité marchèrent sur l’esplanade des mosquées et cela mit fin aux illusions des Palestiniens en ce qui concerne les vraies intentions israéliennes.

Alors que l’Intifada prenait racine et que la violence israélienne contre la population palestinienne montait à des niveaux sans précédent, les taux d’investissements chutaient rapidement. Toutes les perspectives d’investissements viables furent anéanties non seulement par les bombardements et les démolitions des nouvelles constructions mais surtout par les check-points, les barrages routiers et le sinistre mur de séparation.
Actuellement, soit six ans et demi après ces évènements, la Cisjordanie et Gaza sont plus ou moins dans le désordre.

Quelques investisseurs qui ont prospéré pendant les années d’Oslo luttent maintenant pour maintenir leurs têtes hors de l’eau. Beaucoup d’autres entreprises sont parties tandis que certaines luttent toujours pour sortir du rouge. Ce vandalisme est résumé par l’état de désolation du quartier général de Arafat, à Ramallah. De symbole de force et gloire, ce quartier général a été réduit à un état de désolation fait de déblais et de ferraille pulvérisés qui entoure le seul bâtiment gauche resté intact où les dirigeants palestiniens se rencontrent. Pendant deux années, Israël a séquestré Arafat, lui interdisant de quitter les lieux. La sortie finale du défunt président hors de son quartier général a été pour Paris où il devait suivre un traitement médical alors qu’Israël était presque sûr de ne pas le revoir vivant.
Après la mort d’Arafat, on a donné aux Palestiniens un minuscule espoir, cette fois sous la forme de nouvelles élections présidentielles et législatives. Le Président Abbas a comme convenu prêté serment en tant que successeur d’Arafat et l’année dernière, les élections législatives ont été remportées par le Hamas qui a formé un gouverment aussitôt suivi de pagaille.

Si Israël n’avait pas réussi complètement à noircir l’avenir, les combats amers entre le Hamas et le Fatah, l’ont certainemement rendu plus sombre. Les membres du Hamas comme ceux du Fatah ont assassiné, procédé à des kidnappings, diffusé la calomnie et toute personne qui songeait à revenir en Palestine ou à investir dans son économie a tôt fait de changer d’avis.

Et maintenant, avec la possibilité d’un gouvernement d’unité nationale à l’horizon et peut-être la paix interne entre Palestiniens (les perspectives de paix avec Israël restent toujours plus mornes que jamais), on peut dire que la Reconstruction est de nouveau à l’ordre du jour.
C’est à la fois bon et bien. Les Palestiniens ont souffert sous le joug de l’occupation depuis for longtemps et les déviations sociales se sont multipliées sous la généralisation du chômage et de la pauvreté. Tout projet qui pourrait soulager de ces graves problèmes est le bienvenu.

Cependant, nous devons tous être mis en garde. Si les conditions politiques ne favorisent pas la stabilité économique à long terme c’est-à-dire un état palestinien viable, souverain et indépendant, alors aucun investissement, aucun projet de ville à bâtir, aucun projet financé sur le plan international ne pourra tenir longtemps. L’expérience d’Oslo a été une dure leçon pour nous tous et il faut souligner que tant qu’Israël maintiendra son contrôle quelque soit son niveau sur les Palestiniens, aucun espoir de stabilité durable n’est possible.

Si la Palestine doit être reconstruite, sa construction, comme pour n’importe quelle autre structure, doit tenir sur des fondations solides. Dans notre cas, ceci signifie qu’une solution juste et durable doit être trouvée au conflit Israélo-palestinien pour que nous soyons libres de vivre selon nos propres règles et maîtriser notre propre destinée. Autrement, si nous essayons de construire sur des bases précaires, juste comme un bâtiment défectueux, notre « nouvell e » Palestine s’effondrera dans un tas de poussière et de fumée.

Joharah Baker écrit pour le Media and Information Programme à « l’initiative palestinienne pour la promotion d’un dialogue global et de la démocratie (MIFTAH) ».
Elle peut être contactée à mip@miftah.org

15 février 2007 - MIFTAH - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.miftah.org/Display.cfm?D...
Traduction par D. Hachilif


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