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Négociations indirectes ? Une perte de temps

samedi 15 mai 2010 - 07h:49

Abdel Bari Atwan

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Le sénateur George Mitchell, l’envoyé des Etats-Unis pour la Paix, démarre une nouvelle série de consultations aujourd’hui avec les représentants palestiniens et israéliens pour préparer des négociations indirectes parrainées par l’administration américaine, avec le support du ainsi-nommé Comité Arabe de Suivi pour l’Initiative de Paix.

e sénateur George Mitchell, l’envoyé des Etats-Unis pour la Paix, démarre une nouvelle série de consultations aujourd’hui avec les représentants palestiniens et israéliens pour préparer des négociations indirectes parrainées par l’administration américaine, avec le support du ainsi-nommé Comité Arabe de Suivi pour l’Initiative de Paix.

Tous ceux qui soutiennent ces négociations comme ceux qui les rejettent ont ouvertement déclaré que les perspectives de succès sont extrêmement limitées, sinon inexistantes. Par conséquent, la question qui se pose par elle-même avec force est : Quelle est l’utilité de s’engager dans ces négociations ?

De toute évidence, l’administration américaine estime que la stagnation actuelle du processus de paix ne doit pas continuer parce que cela conduira à un vide politique qui pourrait être comblé par les forces palestiniennes opposées aux négociations. L’administration américaine estime également que ce vide pourrait créer une situation sur le terrain qui pourrait évoluer en une Intifada qui porterait préjudice à l’AP [Autorité Palestinienne] basée à Ramallah et aux plans de son ersatz, à savoir le Premier ministre Salam Fayyad.

Les officiels arabes qui ont participé aux réunions du Comité de Suivi et ont répondu à la demande des États-Unis d’un feu vert pour des négociations indirectes, ont justifié leur prise de position en disant qu’il y avait venant de l’administration Obama, des signes encourageants qui devaient être reconnus et appuyés, et auxquels il faut donner toutes les chances de succès.

Mais lorsque nous avons tout à fait innocemment demandé quels étaient exactement es signaux, la réponse est venue comme suit : L’administration américaine a donné à la partie arabe des garanties qu’Israël allait arrêter les activités de colonisation dans Jérusalem occupée.

Et quand la question a été reformulée pour demander où sont ces garanties ils nous a été répondu : Elles sont de nature verbale et non écrite. En tout cas, elles sont suffisantes pour nous, et vous devez arrêter de mettre le nez dans des choses qui ne vous regardent pas.

Nous citons ici les propos d’un officiel arabe...

L’expérience avec les Américains dans leurs diverses administrations nous a appris que ces garanties sont toujours un grand « mensonge », surtout si ces garanties sont données aux Arabes. Mais, malheureusement, ces garanties deviennent alors absolument contraignantes et se transforment en un engagement sous la forme d’un contrat si elles sont émises en faveur des Israéliens. Le même principe s’applique lorsque de telles garanties sont émises pour expliquer certaines prises de position des États-Unis, comme ce fut le cas avec la lettre que l’administration de l’ancien président George Bush Junior avait adressée à Ariel Sharon à propos de l’annexion des principales colonies dans Jérusalem occupée.

Si ces garanties américaines sur l’arrêt de l’activité de colonisation dans Jérusalem occupée sont réelles et sérieuses, pourquoi sont-elles alors secrètes ? Pourquoi ne sont-elles pas écrites, comme les garanties qui sont données au côté israélien ? Est-il raisonnable pour les Arabes d’acheter « des poissons dans la mer ? »

Les équipes arabes - des spécialistes pour ce qui est de fournir des justifications - font la promotion ces jours-ci d’une déclaration indiquant que l’administration Obama va annoncer publiquement qui est responsable du blocage des négociations si elles échouent. Ils ajoutent que l’administration du président Obama s’adressera ensuite au Conseil de sécurité afin d’assurer l’adoption d’une résolution condamnant les activités de colonisation israéliennes dans Jérusalem occupée et en Cisjordanie.

Ce sont de belles paroles Mais c’est une sorte d’illusion et d’auto-illusion. La question n’est pas le passage ou non d’une résolution. La question est : Qu’allons-nous retirer d’une telle résolution ? Qu’est-ce qui va se passer après ? Est-ce que les flottes américaines et britanniques iront vers Haïfa et Jaffa pour faire appliquer cette résolution par la force ?

Je me sens insulté quand Amr Moussa, secrétaire général la Ligue arabe, menace de présenter la question palestinienne au Conseil de sécurité, comme si cette question ne l’avait pas été au cours des 60 dernières années. De longs débats ont eu lieu, des discours enflammés ont été tenus (qui se souvient de la branche d’olivier et du fusil ?), et plus de 50 ou 60 résolutions ont été adoptées sur cette question durant cette période.

Les experts pour ce qui est de concocter des formules et fournir des justifications - il y a bien trop dans l’AP [de Ramallah] et à la Ligue arabe - nous disent que des négociations indirectes sont plus importantes que des négociations directes. Lorsque nous nous demandons comment cela se peut-il, ils arborent un sourire narquois et disent comme s’ils avaient trouvé la solution miraculeuse : Regardez le rôle des États-Unis. C’est la première fois que le médiateur américain supervisera ces négociations et transmettra aux deux côtés les idées qui sont en discussion

Cet effort est futile. Ces négociations sont plus comme secouer de l’eau pour en faire du beurre, car les Israéliens ne veulent absolument pas mettre fin à l’activité de colonisation dans Jérusalem occupée et l’Autorité palestinienne [de Ramallah] est bien incapable de faire de nouvelles concessions, car elle n’y a plus rien à concéder.

Les Israéliens veulent la terre. Ils ont saisi la plupart des terres qu’ils voulaient et ils cherchent maintenant les moyens de se débarrasser de la population. Dans un premier temps, les Israéliens pourraient laisser ce peuple de se gouverner sur « leurs terres », qu’ils ont prises, dans le cadre d’une autonomie limitée avec des frontières non définies. Si les Palestiniens veulent appeler cela un état ou même un empire, qu’ils le fassent. Il n’y aura aucun mal à cela.

N’ont-ils [les Palestiniens] adopté la règle de nommer les membres auto-désignés du Conseil des ministres, avec la formule « Son Excellence » précédant le titre ? Et le Conseil législatif n’est-il pas à l’origine un conseil municipal ou un simple conseil auto-géré en vertu des accords d’Oslo ? Le nom a changé, mais les pouvoirs sont restés les mêmes. Le Conseil a ensuite complètement disparu après que son porte-parole et un grand nombre de ses membres aient été arrêtés.

Benyamin Netanyahu va à Charm al-Cheikh et se réunit avec le président Hosni Moubarak lors d’une réunion à huis clos restreinte aux deux hommes. Pourquoi la réunion est-elle bouclée si l’objectif est de discuter d’un processus de paix publique ? Il doit y avoir des questions, des négociations autres que directes et indirectes que nous connaîtrons sans doute plus tard, lorsque les avions israéliens attaqueront le sud du Liban ou lorsque les chars israéliens se déplaceront à nouveau dans la bande de Gaza. Nous ne voulons pas poursuivre plus loin en allant jusqu’à dire quand la Syrie et l’Iran seront attaquées. L’agressivité actuelle dans la région du Golfe et par ses médias contre la Syrie, l’Iran et le Hezbollah nous rappelle la période qui a précédé l’invasion et l’occupation de l’Irak.

Le président palestinien Mahmoud Abbas, qui négocie avec les Israéliens, manque de la légitimité palestinienne constitutionnelle qui l’autoriserait à s’engager dans ces négociations ou trouver n’importe quel accord. Son autorité [l’AP de Ramallah] ne contrôle pas tous les territoires palestiniens, et son mandat a pris fin officiellement en Janvier de l’année dernière [2009]. Même les décrets-lois,qui ont été émis par les juristes de l’AP qui ont estimé que son mandat présidentiel se terminait avec la fin du mandat du Conseil législatif en Janvier de cette année [2010], ne sont maintenant absolument d’aucune utilité pour lui, la période de prolongation étant terminée aussi.

Le président de l’AP, le Conseil législatif, le Conseil national, et le Comité exécutif de l’OLP n’ont plus de légitimité. En conséquence, le gouvernement provisoire de Salam Fayyad, qui s’est transformé en gouvernement permanent, ne jouit non plus d’aucune légitimité. Certaines personnes parlent d’un remaniement de ce gouvernement. Le plus ironique, c’est qu’ils parlent de ministères « clé » en oubliant que lorsque le président Abbas lui-même veut quitter son bureau de Ramallah, il a besoin de la permission d’un caporal israélien du bureau de coordination.

Ce sont de vaines négociations qui ont pour seul but de fournir une couverture pour une administration américaine qui pourrait avoir de bonnes intentions mais qui est incapable de les traduire en action sur le terrain. Peut-être que ce sera un grand désastre lorsque nous constaterons que l’objectif principal et véritable à l’origine de ces négociations est de fournir une « couverture » pour une agression imminente israélienne contre la Syrie et le Liban sous le prétexte de missiles Scud [prétendument fournies par la Syrie au Hezbollah ], qui auraient apparemment modifié l’équilibre du pouvoir dans la région et qui menaceraient l’existence même d’Israël.

Félicitations à tous les Arabes et au Comité de Suivi pour cette grande réalisation de la reprise de négociations indirectes. Les ministres arabes des Affaires étrangères ont montré un courage sans précédent quand ils ont insisté pour que soit fixé délai de 120 jours pour ces négociations. À notre avis, ce délai est suffisant - s’il n’a pas été décidé à l’avance - pour qu’Israël achève ses préparatifs de guerre.

* Abdel Bari Atwan est palestinien et rédacteur en chef du quotidien al-Quds al-Arabi, grands quotidien en langue arabe édité à Londres. Abdel Bari Atwan est considéré comme l’un des analystes les plus pertinents de toute la presse arabe.

Du même auteur :

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4 May 2010 - Al Bari Atwan - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.bariatwan.com/index.asp?...
Traduction de l’anglais : Claude Zurbach


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