Pour éviter un autre Strasbourg, les Nations-Unies et leur Conseil de sécurité doivent revenir sur leurs décennies d’erreurs et corriger leur complaisance à l’égard du sionisme.

Des Palestiniens font un état des lieux après l’incendie provoqué par des colons juifs dans la mosquée de Yasouf.

Alors que des juifs extrémistes dans les Territoires palestiniens attaquent une mosquée, brûlent des livres sacrés musulmans et des tapis pour la prière, cela n’est pas sans rappeler la crémation autrefois des juifs de Strasbourg. Seulement cette fois, c’est de la crémation des Palestiniens de Gaza et Cisjordanie qu’il s’agit, et elle y mêle leur rêve d’un Etat indépendant et d’autodétermination. Plusieurs jours auparavant, des extrémistes avaient incendié aussi des maisons et des véhicules de Palestiniens, et brûlé des oliveraies dans un village près de Bethléhem.

En 1349, il y a six cent soixante ans de cela, raconte Jacob von Konigshofen, plus de 2 000 juifs ont été brûlés sur une estrade en bois dans leur cimetière. Ils étaient accusés de toutes les horreurs de la Peste noire. Les Européens cherchaient quelles étaient les causes de cette Peste noire quand des rumeurs se sont propagées disant que c’étaient les juifs qui avaient empoisonné l’eau des puits. C’était à Strasbourg, sur le Rhin. Les juifs ont été raflés, détenus et brûlés. Après avoir tué les juifs, le Conseil de Strasbourg a fait saisir leur argent et leurs biens. Toutes les dettes de ceux qui avaient été brûlés furent effacées.

Pendant des années et des années, les juifs de Strasbourg avaient été déshumanisés, leurs synagogues attaquées et leurs reliques religieuses brûlées. La profanation des biens d’un peuple et d’une religion se révèle généralement comme les prémices de ce qui va justifier leur élimination. Aujourd’hui, Israël démolit les maisons et les fermes palestiniennes, il mène des opérations nocturnes et des incursions militaires. Il lance des représailles avec des blocus punitifs, des arrestations massives et des emprisonnements (y compris de mineurs). Israël coupe l’eau et l’électricité et isole les Palestiniens du reste du monde. Ces actes conduisent tragiquement à une crémation « rampante » des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie.

En hébreu : « Préparez-vous à payer le prix » et « Nous allons tous vous brûler ».

(AFP)

Des organisations qui remettent des produits alimentaires et des médicaments, ou qui veulent se rendre à Gaza, comme récemment ces représentants de ce parlement européen qui a appelé une nouvelle fois à un Etat palestinien et à ce que Jérusalem soit une capitale commune, de telles organisations se sont vu refuser l’entrée dans Gaza. L’expansion des colonies, telle que Gilo dans Jérusalem-Est, et la judaïsation de Jérusalem qui a dépouillé près de 5 000 Palestiniens de leur statut de résident et les a brutalement expulsés, relèvent d’une destruction systématique de la culture palestinienne. La construction du Mur en Cisjordanie et la déshumanisation permanente des Palestiniens, annoncent-elles une crémation à venir et généralisée ?

Pour éviter un autre Strasbourg, les Nations-Unies et leur Conseil de sécurité doivent revenir sur leurs décennies d’erreurs et corriger leur complaisance à l’égard du sionisme. Le Rapport de la minorité de 1947, que l’Inde, l’Iran et l’ancienne Yougoslavie avaient proposé, pourrait être une bonne base de départ. Le rapport recommande « un Etat fédéral indépendant », avec Jérusalem comme capitale, qui serait composé de deux entités politiques autonomes (Arabes-palestiniens et juifs) réunies par un gouvernement central qui comprendrait des représentants des Arabes-palestiniens et des représentants des juifs. (1)

Il faudrait également traiter de l’hypocrisie du Rapport de la majorité qui recommande deux Etats indépendants alors qu’un seul n’était assuré. Peut-être que les Nations-Unies pourraient commencer par élaborer un plan ambitieux qui dissoudrait leurs missions de maintien de la paix et comprendrait une coalition de musulmans, juifs et chrétiens. Un enseignement mettant l’accent sur la tolérance et le respect de ceux qui ont d’autres croyances, parallèlement à une histoire commune et partagée, devrait être introduit dans les écoles israéliennes et palestiniennes. Cela pourrait rencontrer d’abord quelque résistance, mais il est préférable d’avoir une génération de conflit plutôt qu’une violence générationnelle et perpétuelle.

Les Etats-Unis doivent faire pression sur Israël pour qu’il reconnaisse les Palestiniens et leurs diverses traditions, confessions et réalisations culturelles. N’est-elle pas exacte cette déclaration de Noam Chomsky quand il dit qu’Israël est une base militaire US pour lancer des guerres et positionner des armements en d’autres nations du Moyen-Orient ? Il revient au Président Barack Obama, qui autrefois était favorable à un Etat palestinien, de regagner la confiance des Palestiniens et de revenir à son engagement initial pour un Etat palestinien indépendant.

Que ce soit une épidémie ou une guerre mondiale qui tue des millions d’êtres humains et crée de nouvelles frontières artificielles, aucun groupe humain ne doit être accusé à tort d’un acte qu’il n’a jamais commis. Ni servir de bouc émissaire politique, ni donc être sacrifié. Le Premier ministre d’Israël, Benjamin Netanyahu, a eu raison de condamner la profanation de la mosquée en Territoire palestinien. Quand, lui et le gouvernement israélien, vont-ils condamner les autres crémations « rampantes » ?

Le monde doit trouver, d’une façon ou d’une autre, le courage de réfléchir à l’avenir et d’empêcher un autre Strasbourg à Gaza et en Cisjordanie.

(1) : "Congressionnal Quarterly" (publication ayant principalement trait au Congrès des Etats-Unis), 9ème édition, Washington D.C., 2000, p. 26.

(Ndt : sur cette question, on peut lire aussi : "ONU 1947 : un dialogue de sourds" d’Ilan Pappe, La Revue nouvelle).

Dallas Darling est correspondant pour WorldNews.com. Il a écrit cet article pour PalestineChronicle.com.

15 décembre 209 - The Palestine Chronicle - traduction : JPP