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Gaza City : « Libérez les femmes et vous libérerez le pays entier »

jeudi 1er février 2007 - 15h:59

Johann Hari

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Gaza. Il y a beaucoup de choses que vous vous attendez à trouver dans le c ?ur de Gaza City troué de cratères et surpeuplé, sauf l’avant-garde de Germaine Greer et de Betty Friedan. Pourtant, je suis assis sous un arbre luxuriant avec un groupe de vieilles dames coriaces au c ?ur du centre féministe qu’elles ont construit ici et où des centaines d’habitantes de Gaza affluent pour trouver la liberté.

En 1989, Um Ahmad, militante des droits de la femme, rentre dans son Gaza natal après avoir travaillé des dizaines d’années pour des groupes de femmes dans le monde entier. « J’étais décidée à agir car la situation des femmes était encore pire ici que dans les autres pays arabes » dit-elle.

Elle constata que les femmes palestiniennes étaient coincées entre l’occupation sauvage israélienne et une société palestinienne patriarcale suffocante. Elle savait qu’il n’y avait qu’un seul moyen de les libérer et c’était en leur obtenant du travail et un vrai moyen de subsistance.

Les autorités israéliennes d’occupation refusèrent sa proposition de créer une organisation pour la fourniture d’emplois aux femmes, mais Mme Ahmad nese laissa pas décourager. Risquant la prison et les interrogatoires, elle poursuivit son projet et mit en place un réseau pour les femmes qui confectionnaient des confitures et des préparations culinaires dans leur maison et vendaient leurs produits. A Gaza l’Institut des femmes était
révolutionnaire et fabriquer des confitures constituait un acte subversif.

Après quatre années, l’organisation de Mme Ahmad est finalement devenue légale. Aujourd’hui, grâce à l’Association d’aide sociale, une des trois associations caritatives financées par le Christmas Appeal du journal
l’Independant, elle a une base permanente.

Um Ahmad est assise avec moi dans la cour et regarde les femmes siroter du café et lire des textes imprimés à partir des terminaux d’internet dont le centre est doté. Si vous oubliez le concert permanent de klaxons - le bruit assourdissant de la masse terrestre la plus encombrée du monde- auquel s’ajoutent les bangs supersoniques des avions israéliens, vous ne trouverez pas d’endroit plus tranquille dans la ville de Gaza.

« Ce sont les femmes qui souffrent le plus de l’occupation et de l’effondrement économique », explique-t-elle. « Quand le mari est sans travail et reste tout le temps à la maison, il commence à s’en prendre à sa femme. Beaucoup d’hommes qui sont sans travail et se font humilier par les Israéliens ont le sentiment d’être encore aux commandes quelque part, d’être les maîtres par rapport à leur femme et leurs enfants, Et cela dégénère souvent en violence.

Mme Ahmad avait pour priorité de donner aux femmes l’occasion de gagner de l’argent et de devenir indépendantes. C’est pour cette raison qu’elle a créé un atelier de couture sans but lucratif constitué uniquement de femmes et aujourd’hui comme je parcours l’établissement avec elle, j’entends les 30 ouvrières échanger les taquineries habituelles de ce lieu de travail.

Toutes racontent comment ce centre a changé leur vie. Leila, 40 ans, est machiniste sur les machines à coudre et elle explique en quittant sa machine qu’auparavant, elle vivait de la nourriture et de l’argent que lui
donnait une ?uvre charitable locale. « J’étais vissée à la maison et je regardais le mur en me demandant ce que je faisais de ma vie ».

« C’est alors, qu’une bénévole me dit que j’étais intelligence et que j’étais capable de produire au lieu recevoir passivement de l’assistance et elle me mit en contact avec cette organisation. A présent, j’entretiens mon
mari et mes sept enfants ». Elle rit avec un mélange de surprise et de joie. « Je suis convaincue que c’est mauvais de rester chez soi à attendre la charité. Sortir, s’épanouir, être indépendante, ça c’est bien. Je veux que toutes les femmes puissent faire la même chose ».

La pétillante Fatima, 18 ans, travaille sur les machines à tricoter. Elle a toujours voulu travailler comme enseignante avec des enfants sourds, mais ses parents ne pouvaient pas se permettre de l’envoyer à l’université et c’est ainsi qu’elle finance ses études en travaillant. « C’est incroyable d’être autonome, d’être indépendante » dit-elle.

L’Association d’aide sociale contribue au salaire de ces femmes qui fabriquent les uniformes scolaires pour des enfants déshérités et font marcher une boulangerie. Selon Mme Ahmad « Ce qui est le plus frappant, c’est qu’en arrivant chez nous, les femmes ne parlent pas beaucoup. Elles gardent le silence comme on le leur a appris. Toutefois, après un certain temps, elles commencent à s’exprimer et très vite elles sortent de leur silence. Elles veulent explorer l’internet, voir le monde extérieur. Elles sont semblables à la personne qui a été enfermée dans une pièce : vous lui ouvrez une fenêtre et elle veut voir toujours davantage.

Mme Ahmad veut ouvrir plus de fenêtres- mais pour ce faire, elle a besoin d’argent. « Quand vous aidez une femme palestinienne, vous aidez tous ses enfants », dit-elle. » Quand vous libérez une femme palestinienne, vous aidez à libérer la Palestine. »

15 décembre 2006 - The Independent - Vous pouvez consulter cet article à :
http://news.independent.co.uk/world...
Traduction : amg


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