L’Université Al-Aqsa tient tête aux islamistes
jeudi 30 juillet 2009 - 10h:11
Frédéric Koller - Le Temps
De passage à Genève, le professeur palestinien Ziad Medoukh défend la mixité.
Ziad Medoukh, professeur de français à l’Université Al-Aqsa de la ville de Gaza a quitté il y a trois mois la bande de terre, ses 1,5 million d’habitants et son blocus imposé par Israël pour un séjour en France. De passage à Genève cette semaine, il témoigne de l’emprise grandissante du Hamas sur la société gazaouie. « Ils essayent de contrôler toutes les institutions : université, tribunaux, etc. » Le mouvement islamiste a voulu imposer récemment de nouveaux responsables à la tête de son université - soutenue par l’Autorité palestinienne - et mettre un terme à la mixité des étudiants au sein du département de français qu’il dirige (la seule matière où garçons et filles partagent les mêmes bancs). En vain. « La résistance des étudiants et des professeurs a été forte. Cette solidarité l’a emporté face à la volonté du Hamas. Les responsables de l’université sont restés en place. »
Les modérés et les autres
Ziad Medoukh a créé, il y a trois ans, un Centre de la paix au sein de l’Université Al-Aqsa. Il est ouvert à tous et propose des débats sur la démocratie, la non-violence et les droits de l’homme. Le professeur prend soin de distinguer entre les différentes tendances au sein du Hamas. Il y a les modérés et les autres. Mais suite à l’« agression israélienne » du début de l’année, le mouvement islamiste, loin d’avoir été anéanti par les bombes de Tsahal, « se sent plus fort que jamais et donc légitimé à imposer sa politique et son point de vue à la population ».
Il est de plus en plus dangereux de critiquer le Hamas, au risque d’être jeté en prison par ses forces de l’ordre. Cela dit, explique Ziad Medoukh, les Palestiniens estiment que la responsabilité première de la situation actuelle incombe à l’« occupant israélien ». « Le but de l’intervention à Gaza n’était pas de casser le Hamas mais de briser la volonté populaire de résistance à l’occupation. Le Hamas a été préservé. Israël joue sur les divisions entre Palestiniens pour maintenir son emprise. C’était une démonstration de force. »
Ziad Medoukh pense que le projet de lutte armée du Hamas et le processus de paix du Fatah ont échoué. Il en appelle à des élections immédiates. Le problème, c’est qu’il n’y a pas d’alternative à ces deux partis. Mais, aujourd’hui, les Palestiniens « voteraient davantage pour des personnalités que pour l’un ou l’autre camp ».
30 juillet 2009 - Le Temps