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Avigdor Lieberman, la honte d’Israël

lundi 30 mars 2009 - 06h:22

Neve Gordon
Counterpunch

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La politique étant ce qu’elle est, la plupart des dirigeants occidentaux adopteront sans aucun doute une position conciliante envers Lieberman et accepteront de le rencontrer et de discuter avec lui des questions relatives à la politique étrangère.

Rencontrer le ministre des Affaires étrangères de Netanyahu ?

Grâce à l’ambition démesurée de Binyamin Netanyahu, Israël s’est mis sur les bras un ministre des Affaires étrangères qui est une honte nationale.

Imaginez un pays qui désigne comme ministre des Affaires étrangères quelqu’un qui a été reconnu coupable de coups sur un garçon de 12 ans. Ce quelqu’un en question fait aussi l’objet d’enquête pour blanchiment d’argent, de fraude et d’abus de confiance ; de plus, il fut un membre conscient d’un parti raciste déclaré illégal et il dirige actuellement un parti politique qui défend les idées fascistes. Et par-dessus tout cela, il ne réside même pas dans le pays qu’il est chargé de représenter.

Un tel portrait peut vous sembler complètement farfelu, mais il correspond à la lettre au nouveau ministre des Affaires étrangères d’Israël, Avigdor Lieberman.

En 2001, avec son propre aveu, Lieberman est jugé coupable d’avoir frappé un garçon de 12 ans. Dans le cadre d’une transaction, Lieberman a été condamné à une amende de 17 500 shekels et il a dû promettre de ne plus jamais frapper un petit enfant.

En 2004, Michal, la fille de Lieberman, âgée de 21 ans, crée une firme conseil, laquelle a reçu 11 millions de shekels d’une source anonyme à l’étranger. Lieberman, selon la police, a reçu plus de 2 millions cent mille shekels de salaire de cette entreprise en deux ans d’emploi. En plus, selon une enquête de Ha’aretz, il aurait reçu des indemnités de rupture - de centaines de milliers de shekels - en 2006 et en 2007, alors qu’il était ministre des Affaires stratégiques et Vice-Premier ministre. Selon la loi israélienne, c’est illégal.

Lieberman est un ex-membre du parti de Meir Kahane, le Kach, déclaré illégal à cause de sa plate-forme ouvertement raciste. En outre, ses opinions envers les Arabes n’ont apparemment pas changé au fil des années. En 2003, réagissant à l’engagement du Premier ministre d’alors, Ariel Sharon, d’amnistier environ 350 prisonniers palestiniens, Lieberman a déclaré que, en tant ministre des Transports, il lui serait plus agréable de fournir des cars pour emmener les prisonniers à la mer et les y noyer.

En janvier 2009, durant la guerre d’Israël contre Gaza, Lieberman a fait valoir qu’Israël « devait continuer de combattre contre le Hamas, de la même manière que les Etats-Unis l’ont fait contre les Japonais durant le seconde guerre mondiale. Après, l’occupation du pays n’a plus été nécessaire. » Il faisait référence aux deux bombes atomiques larguées sur Nagasaki et Hiroshima.

Lieberman ne vit pas en Israël selon ses frontières internationalement reconnues, mais dans une colonie illégale appelée Nokdim. Juridiquement parlant, ce serait comme si la secrétaire d’Etat US, Hillary Clinton, résidait au Mexique et le secrétaire des Affaires étrangères du Royaume-Uni, David Miliban, habitait les îles Canaries.

Et pourtant, malgré ces transgressions flagrantes, le Premier ministre nouvellement élu, Binyamin Netanyahu, n’a eu aucun scrupule à désigner Lieberman pour représenter Israël dans l’arène internationale. La soif de pouvoir de Netanahu l’a conduit à choisir un homme qui fait peser une grave menace sur Israël. Le message et le style de Lieberman ne sont pas que violents, ce sont clairement des éléments proto fascistes ; et, comme des commentateurs israéliens l’ont déjà laissé entendre, cet homme est extrêmement dangereux.

La politique étant ce qu’elle est, la plupart des dirigeants occidentaux adopteront sans aucun doute une position conciliante envers Lieberman et accepteront de le rencontrer et de discuter avec lui des questions relatives à la politique étrangère.

Une telle position peut, certes, se justifier si on considère que Lieberman a été élu démocratiquement ; et bien que beaucoup pourraient ne pas apprécier ses opinions, il est maintenant le représentant du peuple israélien. Ceux qui décideront de le rencontrer pourront aussi soutenir que la diplomatie doit continuer, que le dialogue conduit à l’internalisation des normes internationales et donc à la modération de l’extrémisme.

Ces justifications pourraient peser mais il faudra aussi que les dirigeants occidentaux tiennent compte du fait que la décision de rencontrer Lieberman sera aussitôt associée à l’interdiction de parler au Hamas, au moins par les peuples du Moyen-Orient. En janvier 2006, le Hamas a remporté une victoire écrasante à des élections qui n’étaient pas moins démocratiques que les dernières élections en Israël. Si le Hamas est, à bien des égards, un parti politique extrémiste qui prône la violence, ses dirigeants politiques sont représentatifs du peuple palestinien et sont considérés comme luttant pour sa libération et son autodétermination.

Si les dirigeants occidentaux veulent être crédibles, ils doivent changer leur politique et rencontrer le Hamas également. Autrement, leur décision de rencontrer Lieberman sera à juste titre perçue comme hypocrite et fourbe, et la perception qui est ancrée dans la région - que les Etats-Unis et l’Europe ont un parti pris en faveur d’Israël - en sera renforcée.


Neve Gordon est président du département Politique et Gouvernement à l’université de Ben-Gurion du Néguev et auteur de L’occupation d’Israël (Presse Université de Californie - 2008).

Du même auteur :

- Que va apprendre la guerre aux enfants de Gaza et d’Israël ? (avec Ygal Bronner)
- La conduite des médias par Israël n’est pas seulement impressionnante, elle est terrifiante
- Cible : l’Université islamique (avec Jeff Halper)
- Obama peut mettre fin au conflit israélo-palestinien, mais relèvera-t-il le défi ? (avec Yinon Cohen)
- L’épreuve d’une refuznik, Sahar Vardi (Neve Gordon)

26 mars 2009 - CounterPunch - traduction : JPP


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