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Israël se prémunit contre les plaintes liées à la guerre de Gaza

samedi 31 janvier 2009 - 06h:29

Ulrike Putz - Spiegel Online

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Le comportement impitoyable d’Israël lors de la guerre de Gaza incite les défenseurs des droits de l’homme à porter plainte pour crimes de guerre. A présent le gouvernement [israélien] met en garde ses soldats contre tout voyage dans des pays européens, parce qu’il craint que des plaintes n’y soient déposées - et il promet déjà une assistance juridique.

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Une Palestinienne parmi les tombes de Beit Lahia. Les maisonsen ruines en arrière plan ont été détruites par un raid aérien israélien - Photo : Spiegel

« Wanted » est écrit en gras sur la page Internet : « Recherché pour crime de guerre et crime contre l’humanité », à côté d’une photo du Ministre israélien de la Défense, Ehud Barak.
En trois paragraphes les opérateurs de la page décrivent pourquoi selon eux Barak doit se retrouver devant la Cour Pénale Internationale de La Haye. Il serait responsable des punitions collectives contre le peuple de Gaza : au cours de la guerre de Gaza il a ordonné les attaques aériennes sur des zones densément peuplées dans les bandes côtières. Suit une description malicieuse de l’apparence de Barak, puis l’adresse complète des plaignants aux Pays-Bas. Dans le bas de la page : 14 autres Israéliens dont la place, selon les auteurs, est devant un tribunal.

La page Internet, qui produit un effet officiel grâce à un emblème bien placé de l’ONU, semble avoir été programmée en Israël. L’original est écrit en hébreu et l’adresse indique également une origine israélienne.

Quel que soit l’auteur de cet avis de recherche, il préjuge de beaucoup. Car même si dès la guerre de trois semaines dans la Bande Gaza on soupçonnait que le staff israélien et les soldats aient pu commettre des crimes de guerre, d’ici la clôture des investigations, d’ici le dépôt de plaintes en cas de doute et la publication de vrais avis de recherche, beaucoup de temps risque de s’écouler.

Mais on est nerveux à Jérusalem, comme le montre une loi par laquelle le gouvernement se dresse dès à présent préventivement devant ses forces de combat (IDF). Dimanche dernier, le cabinet décidait de soutenir financièrement et juridiquement ses officiers IDF au cas où ils se retrouveraient un jour devant la justice. « Les commandants et les soldats qui ont été envoyés à Gaza doivent savoir qu’ils n’ont rien à craindre des divers tribunaux » a déclaré le Ministre-Président Ehud Olmert à propos de cette mesure de sécurité.

Avertissement concernant les voyages dans certains pays

La décision gouvernementale s’intitule « Renforcement de la main de l’IDF après l’Opération Plomb Durci ». Tous les soldats dont le nom a été cité intégralement dans les médias en rapport avec l’offensive de trois semaines, devront s’adresser à un conseiller juridique. Celui-ci les tiendra au courant des plaintes éventuelles. On conseille par ailleurs aux soldats concernés de ne pas voyager dans les pays où la situation juridique autorise une plainte individuelle contre des membres de l’armée israélienne. Dans le cas de voyages incontournables, les personnes concernées doivent au préalable s’adresser à l’ambassade israélienne locale - laquelle vérifiera s’il y a eu dépôt de plainte contre elles.

Tant au Ministère de la Défense qu’au Ministère de la Justice, on s’inquiète de plus en plus ces derniers jours que des groupes pour les droits humains ou des états puissent sérieusement mettre à exécution leur menace de faire rendre des comptes aux porteurs de l’uniforme israélien. Les médias israéliens ont contribué à l’insécurité généralisée : ils ont fait appel à des dizaines de juristes pour leur faire analyser les effets possibles de démarches judiciaires. Ces juristes ne sont pas parvenus à une synthèse des points de vue.

Des propos comme ceux de l’avocat Avigdor Feldman au journal « Yedioth Ahronoth » ont exacerbé l’angoisse. Dans le cas d’une déferlante de plaintes, des milliers d’officiers pourraient être concernés. « A tout soldat et officier qui veut voyager en Grande-Bretagne, je conseillerais instamment de changer d’avis » déclarait Feldman au journal.

« L’armée la plus morale au monde »

Le gouvernement israélien a réagi avec indignation à la possibilité d’une campagne. Selon Olmert, des organisations terroristes tenteraient, une fois la guerre terminée, de régler leurs comptes avec Israël devant des tribunaux internationaux. Le Ministre de la Défense Barak a promis à l’armée un soutien plein et entier contre des accusations de l’étranger et contre des auto-prises en otage en Israël même. L’IDF serait selon ses dires « l’armée la plus morale au monde ».

Les groupes internationaux de droits humains reprochent à Israël d’avoir témoigné trop peu d’égards à la population civile pendant l’offensive de Gaza. Au cours de ces trois semaines quelque 1.300 Palestiniens ont été tués selon l’ONU. Même Israël confirme que plus de la moitié des victimes sont des civils. Les critiques d’Israël s’interrogent dès lors sur la proportionnalité des moyens mis en ?uvre pour la guerre. Du côté israélien il y a eu 13 morts, dont 3 civils.

C’est l’utilisation de munitions au phosphore qui est particulièrement contestée. Selon le droit international ce moyen de combat ne peut s’utiliser qu’en terrain découvert. Dans la Bande de Gaza, la fameuse organisation Human Rights Watch (HRW) a entamé sur ces critiques une investigation qui se poursuivra pendant plusieurs semaines.

Dès les premiers jours de leur mission, les experts HRW ont trouvé des indices concordants prouvant que des projectiles contenant du phosphore blanc avaient également été utilisés dans des parties densément peuplées de la ville, déclarait Fred Abrahams, membre de l’organisation. L’artillerie engagée par Israël, de calibre 155 mm, serait également « hautement problématique ». Ses munitions ne seraient pas toujours précises, ses shrapnells seraient potentiellement mortels même dans un rayon allant jusqu’à trois cents mètres.

Des reproches au Hamas également

Abrahams souligne que le Hamas était également critiquable. Le tir de roquettes Kassam contre des civils en Israël constituerait une infraction évidente aux Conventions de Genève.

Même si on ne devait pas arriver à ce qu’un militaire israélien soit jugé devant une cour étrangère, si les groupes d’activistes se décidaient, comme annoncé, à déposer des plaintes, cela pourrait entraîner des conséquences désagréables pour beaucoup de soldats.

C’est ce que montre l’exemple du général-major Doron Almog. Il y a quelques années, un tribunal britannique avait émis contre lui un mandat d’arrêt secret. On reprochait à l’ancien commandant des troupes israéliennes dans la Bande de Gaza d’avoir ordonné en 2002 la destruction de 59 maisons de familles palestiniennes à Gaza. De l’avis de la justice britannique, il pouvait s’agir de crime de guerre.

En septembre 2005 Almog, ignorant tout de la plainte, atterrissait à l’aéroport londonien, où l’attendait déjà une unité spéciale de Scotland Yard. L’attaché militaire de l’ambassade israélienne monta à bord de l’appareil et engagea Almog à descendre, sans quoi il serait arrêté. La police britannique évita de donner l’assaut, craignant une fusillade avec des gardes du corps éventuels du militaire.

Almog reprit un vol pour Israël. Ultérieurement, la plainte contre le général-major fut abandonnée. Le cas semblait oublié, mais Israël doit craindre à présent que des milliers de ses citoyens puissent être victime d’une même procédure que cet officier.

28 janvier 2009 - Spiegel online - Vous pouvez consulter cet article ici :
http://www.spiegel.de/politik/ausla...
Traduction de l’allemand : Marie Meert


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