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Ceux qui se rendent coupables de crimes de guerre devront rendre des comptes

jeudi 15 janvier 2009 - 07h:40

Adri Nieuwhof and Daniel Machover, The Electronic Intifada

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Israël ne respecte pas les définitions de « combattants » et de « civils », ou ne distingue pas un objectif militaire d’un objectif civil.

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Tout est une cible pour les avions et tanks israéliens : la population comme les infrastructures... Une véritable politique de terreur... Photo : Hatem Omar/MaanImages

Les actions militaires israéliennes à Ghaza ne peuvent pas être justifiées par l’argument de légitime-défense. L’offensive israélienne à Ghaza est perpétrée, avec un mépris sans précédent pour la vie humaine, en violation avec les principes fondamentaux du droit international humanitaire.

Le nombre effroyablement élevé de civils tués, blessés et les importants dégâts aux bâtiments civils reflètent l’illégitimité de l’utilisation d’une force armée excessive, aveugle et disproportionnée par Israël

Deux semaines après l’offensive d’Israël, de nombreux juristes internationaux élèvent leurs voix pour condamner les actions israéliennes de tout point de vue, récusant les déclarations selon lesquelles Israël agirait légalement en état de « légitime défense ».

Avant même d’avoir examiné la manière illégale dont Israël a déployé sa puissance militaire, les juristes internationaux relèvent que les arguments de légitime-défense prônés par Israël sont aussi creux que les cratères réalisés sur le sol de Ghaza : les actions menées par Israël n’ont pas été prises en dernier recours, comme une réponse nécessaire aux attaques.

Or un état ne peut utiliser la force en « légitime défense » uniquement qu’en réponse à une attaque armée, après n’avoir trouvé aucune autre méthode efficace de recours ou de résistance.

En d’autres termes, l’utilisation de la force n’est légitime que si les tentatives pacifiques pour repousser les attaques armées n’ont pas fonctionnées ou seraient manifestement inefficaces.

La justification avancée par Israël selon laquelle leur objectif est de « stopper les tirs de roquettes depuis Ghaza » et « d’asséner au Hamas un coup sévère nécessitant l’utilisation massive de la force militaire » est sans fondement légal.

Aucun recours à la force n’aurait été nécessaire si Israël avait accepté, le 19 décembre 2008, d’ouvrir tous les points de contrôle de Ghaza la libérant ainsi de son siège illégitime.

Le Hamas a scrupuleusement observé le cessez-le-feu comme convenu jusqu’au 4 novembre, date à laquelle Israël a déclenché une attaque non provoquée dans la bande de Ghaza, tuant sur le coup six personnes.

Ainsi, le moyen le plus facile pour Israël d’empêcher les tirs de roquettes aurait été de continuer à respecter, et de renouveler la trêve, alors qu’il la violait le 4 Novembre.

Mais la menace, représentée par les roquettes tirées sur Israël, ne peut en aucun cas justifier les actions militaires en cours depuis le 27 décembre.

Les chiffres publiés par L’organisation des droits de l’homme Al Haq, le 8 Janvier 2009 indiquent que 80% des 671 morts palestiniens recensés jusque là étaient des civils (547), dont 155 enfants. Le matin du 9 janvier, Al Jazeera rapporte un total des morts Palestiniens à Ghaza de 769, incluant plus de 200 enfants. Plus de 3121 personnes ont aussi été bléssées. Comment a-t-on pu en arriver là ?

Malgré les revendications d’Israël de se conformer aux lois de la guerre, la scandaleuse attaque israélienne sur la bande de Ghaza s’inscrit dans une approche assez différente de la guerre.

Dans le cadre de la « Doctrine Dahiyah », (nommée d’après une région de Beyrouth, bombardée par Israël en 2006), dévoilée début Octobre 2008 par le général Eisenkot, (ancien secrétaire en titre de l’armée israélienne sous le mandat du Premier ministre, Ehud Barak) : « l’armée ... va exercer un pouvoir disproportionné contre chaque village à partir duquel des coups sont tirés sur Israël, et provoquer d’immenses dégâts et destructions. De notre point de vue ce sont des bases militaires. Ce n’est pas une suggestion. Il s’agit d’un plan qui a déjà été légitimé ».

Dans un rapport de l’Université de Tel Aviv de l’Institut pour la sécurité nationale, le colonel Gabriel Siboni a soutenu ces déclarations de Eisenkot. La réponse, à ce que Israël qualifie de menace « les roquettes et les missiles provenant de la Syrie, du Liban et de la bande de Gaza », estime-t-il, est : « de frapper de manière disproportionnée au coeur des points faibles de l’ennemi, et de manière à ce que les efforts pour lancer des attaques en fonction des capacités militaires rencontrées soit secondaire. »

Il est évident que la « doctrine Dihiyah » basée sur l’utilisation disproportionnée de la force armée en réponse à des attaques de roquettes et de missiles, viole les principes fondamentaux du droit international humanitaire. Il n’est pas surprenant, dès lors, de constater qu’Israël ne respecte pas les définitions de « combattants » et de « civils » ou ne distingue pas un objectif militaire de la population civile.

L’une des premières attaques d’Israël contre Ghaza le 27 décembre, fut lors d’une cérémonie de remise de diplômes d’officiers de police employés par le gouvernement du Hamas.

Les commissariats de police sont des bâtiments civils, et les officiers de police et agents de la force publique sont considérés, en vertu du droit international, comme des civils. Les prendre pour cible, alors qu’ils ne sont pas engagés dans des actions militaires, est illégitime. Israël n’a pas fourni de preuves que tous les officiers de police allant être diplômés étaient prêts à lancer des roquettes durant ou après la cérémonie de remise des diplômes ; ils étaient donc des civils et semblent être les victimes d’un crime de guerre prémédité.

Israël rebaptise constamment les bâtiments civils comme étant des « cibles militaires légitimes », ce qu’assurément aucun autre gouvernement sur terre ne décrirait comme tel. Les commissariats de police, les mosquées, les universités, les hôpitaux et bâtiments médicaux de stockage, les institutions gouvernementales, les fermes et les écoles ne peuvent pas devenir des « cibles militaires » en étant simplement rebaptisées « infrastructure du Hamas ».

Dès le premier jour des opérations militaires, scrupuleusement préméditées dans la bande de Ghaza, le Rapporteur spécial des Nations Unies aux droits de l’homme dans les territoires occupés, Richard Falk, a publié une déclaration soulignant des violations graves et massives du droit international humanitaire, tel que défini dans les Conventions de Genève, mentionnant : une punition collective, prenant pour cible des civils et faisant preuve d’une réponse militaire disproportionnée.

Il a noté : « Certes, les attaques à la roquette contre des cibles civiles en Israël sont illégales. Mais cette illégalité ne donne pas le droit à Israël, ni en tant que force d’occupation, ni en tant qu’État souverain, de violer le droit international et de commettre des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité dans sa réponse. »

Falk a rappelé à tous les Etats membres de l’Organisation des Nations Unies, que l’ONU est tenue à son obligation de protéger la population civile face à des violations massives du droit international humanitaire.

Il apparaît également une utilisation d’armes illégales, notamment des rapports et des photos montrant " des obus au phosphore blanc ...provoquant la diffusion de tentacules d’une épaisse fumée blanche, pour couvrir l’avancée des troupes."

Un expert en sécurité israélien a expliqué : "Ces explosions sont magnifiques à observer, et produisent une grande quantité de fumée qui aveugle l’ennemi, afin que nos forces puissent se déplacer à l’intérieur". Le Phosphore en brûlant dans l’air provoque de graves blessures à quiconque pris au piège en dessous. Israël a admis l’utilisation d’obus au phosphore blanc lors de son attaque sur le Liban 2006.

Le Traité de Genève de 1980 interdit l’utilisation d’obus au phosphore blanc comme arme de guerre dans des zones civiles, mais il n’y a pas de texte en vertu du droit international interdisant son utilisation comme un écran de fumée ou d’éclairage. Toutefois, Charles Heyman, un expert militaire et ancien « major » de l’armée britannique, cité par le Times, le 5 Janvier 2009, affirme : « Si un obus au phosphore blanc avait été délibérément tiré sur une foule de personnes, le responsable serait conduit au tribunal de La Haye. Le Phosphore blanc est aussi une arme de terreur. La traînée de fumée de phosphore qui retombe au sol brûle au contact de la peau. »

En tant que directeur des opérations dans la bande de Ghaza pour l’agence des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA), John Ging a déclaré à la BBC, le 6 Janvier, que la situation à Ghaza est terrifiante, car une grande opération militaire est menée dans une zone densément peuplée. La population est terrifiée, il n’y a pas lieu d’être en sécurité dans la bande de Gaza. Un million de personnes n’ont pas d’électricité, 750.000 n’ont pas d’eau et tout le monde est à court de nourriture. Les camions n’arrivent qu’au coup par coup avec de la nourriture, à l’Office des centres de distribution, car ils sont sérieusement entravés par l’opération militaire israélienne. Les parents doivent quitter leurs foyers pour recueillir des denrées alimentaires dans les centres, prenant le risque d’être pris dans les lignes de mire. Une récente attaque contre un convoi d’aide humanitaire des Nations Unies à un point de passage de Ghaza a fait des victimes. Tous les convois, au principal point de passage utilisé pour amener de l ?aide humanitaire dans la bande de Ghaza, ont été suspendus après l’incident.

John Ging a également rappelé à la communauté internationale sa responsabilité de protéger la population civile. Et si elle ne le fait pas, elle devrait être tenue responsable. Tous les États ont une obligation de protéger la population civile face à des violations massives du droit international humanitaire. Les membres du Conseil de sécurité des Nations unies, qui font également partie des signataires des Conventions de Genève, ont manqué à ce devoir en n’adoptant pas une résolution en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations unies, dès le 27 Décembre, en demandant à Israël de cesser toutes les opérations militaires à l’intérieur de la bande de Gaza. Depuis lors, chaque jour qui passe, sans qu’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies ne soit adoptée et avec les assassinats prémédités et la destruction massive qui augmentent inexorablement, les États-Unis et le Royaume-Uni se rendent officiellement complices des crimes de guerre israéliens. En effet, ces Etats titulaires du droit de veto ne sont pas prêts à l’utiliser pour mettre un terme à la violence.

Le Conseil de sécurité de l’ONU n’a pas attendu l’Iraq pour convenir d’une résolution en août 1990, lorsque celle-ci a agi avec un mépris évident du droit international en envahissant le Koweït. Qu’est-ce que le Conseil de sécurité des Nations unies attend depuis le 27 Décembre ? Aucun accord israélien, en termes de résolution ou de cessez-le-feu, n’est ou n’était nécessaire pour qu’une résolution de l’ONU soit adoptée. Celle-ci aurait eu l’effet juridique d’obliger Israël à titre de membre de l’ONU à mettre fin à la violence. Le Conseil de sécurité a pris près de 14 jours pour passer une résolution qui souligne l’urgence de la « demande » [note de l’auteur : non pas une exigence] pour un cessez-le-feu immédiat, durable et pleinement respecté, entraînant le retrait complet des forces israéliennes de Ghaza.

Les États-Unis ont soutenu leur allié et se sont abstenus. Une série d’explosions a secoué la bande de Ghaza, malgré la décision par le Conseil de sécurité des Nations unies d’adopter une résolution appelant à un "cessez-le-feu immédiat" sur place. Toute attaque, après l’appel pour un cessez-le-feu, peut être considérée comme une violation du droit international.

Viser les zones de population, avec le type de force utilisée par Israël , même si, certains des objectifs ont été, en principe, des cibles militaires légitimes, ne peut en aucun cas être en adéquation avec une compréhension habituelle des lois de la guerre.

Les actes d’Israël sont donc des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.

Les avocats du barreau palestinien pour les droits de l’homme au Royaume-Uni et dans d’autres pays se sont engagés à traduire les auteurs de ces crimes de guerre et crimes contre l’humanité devant la justice, ainsi que les tiers qui ont été complices de crimes de guerre.

* Adri Nieuwhof est consultante et défenseur des droits de l’Homme, basée en Suisse, et Daniel Machover est un avocat palestinien et co-fondateur d’Avocats pour les droits de l’Homme basé en Grande-Bretagne.

10 janvier 2009 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction de l’anglais : Loubna


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