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Israël : la barque travailliste fait eau de toutes parts

samedi 13 décembre 2008 - 07h:02

Juan Miguel Muñoz - El Païs

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Le parti fondateur de l’Etat hébreu tombe dans les sondages jusqu’à un niveau de 7% à la veille des élections de février.

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Criminel de guerre, raciste, colonialiste, Barak aura eu comme seul mérite de définitivement couler ce qu’il restait de la social-démocratie israélienne - Photo : MaanImages

« Né travailliste, toujours travailliste. » Moshe Dayan avait proclamé sa profession de foi quand son éternel rival, Menahem Begin, lui avait proposé de faire partie de son gouvernement en 1977. Mais cette fidélité sans faille de l’électorat et des dirigeants du parti a constamment diminué au cours des trois dernières décennies. Aujourd’hui, l’organisation qui a construit l’État d’Israël depuis sa fondation, qui a décidé seule la politique étrangère et de défense au cours de la première moitié de ses 60 années d’existence, qui a rarement souffert du froid de l’opposition, est un navire à la dérive.

Des militants, des sympathisants et un chef de file quittent le bateau. S’ils ont aujourd’hui 19 sièges à la Knesset (Parlement), une maigre récolte recueillie aux élections de 2006 ; les sondages prévoient qu’ils n’atteindront pas la dizaine de sièges aux élections législatives du 10 février. Les sondages leur octroient une moyenne de 7% des voix.

Avec Ehud Barak, un chef discrédité, sans bannière électorale, ayant marginalisé les causes sociales, les temps à venir sont cruels pour le travaillisme : il peut devenir le cinquième parti de la Chambre.

Mardi un mauvais présage est tombé pour un mouvement qui prétendait montrer une image de modernité. Les primaires se sont tenues afin que ses 60000 adhérents choisissent la liste électorale par le biais du nouveau système de vote électronique. Le système informatique est tombé en panne et ils doivent recommencer aujourd’hui, avec la triste impression que seuls les 10 premiers candidats ont des chances d’obtenir un siège de député. Au maximum. Un sondage donne des résultats dramatiques : six sièges au Parlement.

Il y a déjà longtemps que le parti travailliste, celui de Ben Gourion, Golda Meir, Yitzhak Rabin, est à la dérive. En Israël, l’étiquette de gauche est plus souvent associée à une volonté de négocier avec les pays arabes voisins et avec les Palestiniens, qu’à des propositions sur l’ordre social et économique. Les différences entre progressistes et conservateurs sont réduites aujourd’hui à des nuances. C’est un long processus qui a estompé les traits distinctifs du parti fondateur de l’État.

Déjà un quart de siècle plus tard, le travaillisme s’était alignée sur le Likoud. Il a soutenu le premier ministre Menahem Begin et son ministre de la défense, Ariel Sharon, dans l’aventure de la première guerre au Liban, seulement trois ans après que Begin ait signé la paix avec l’Égypte. La droite a usurpé le discours (Kadima parle ouvertement d’un Etat palestinien) à une gauche incapable de réagir.

Tout le monde sait que les premiers ministres travaillistes ont impulsé la colonisation des territoires palestiniens, au moins autant que leurs rivaux de droite, et les électeurs savent que c’est Sharon qui a ordonné l’évacuation de la bande de Gaza en 2005. « Le Parti travailliste a rempli sa mission historique. Aujourd’hui, il ne présente aucun projet national et il s’allie à n’importe quelle coalition », a estimé le romancier Amos Oz.

« Capitalisme porcin »

Un autre facteur lié à la personnalité arrogante de Barak s’est ajouté pour précipiter le désastre politique auquel succombe le travaillisme. Le manque de leader fort, (cinq présidents en sept ans), et de propositions pertinentes dans le domaine social (dans un pays où un tiers des enfants sont pauvres et où le fossé de l’inégalité atteint les niveaux les plus élevés dans le monde industrialisé), cela irrite que Brack puisse parler de « capitalisme porcin » depuis sa luxueuse résidence de Tel-Aviv, après avoir amassé une fortune au cours des dernières années.

Les analystes l’ont bien précisé : les travaillistes vont perdre les voix de droite en faveur de Kadima. Et à gauche menace le Meretz, un parti qui a disposé de jusqu’à 12 sièges et qui maintenant se languit avec 5, mais qui s’attend à une remontée due aux critiques de prestigieux intellectuels envers la dérive du travaillisme.

Le président du Meretz, Haim Oromo, s’entretient avec Oz et avec l’écrivain David Grossman, entre autres, pour solliciter leur soutien. Même les conseillers de Barak durant son mandat en tant que chef du gouvernement (1999 - 2001) l’ont laissé tomber et réfléchissent à se joindre à Meretz.

« Le chef Barak ne fonctionne pas. Il n’a pas de charisme. Le travaillisme représentait les classes moyennes et moyennes-hautes qui maintenant votent à droite. Et n’importe quel homme de gauche votera Meretz », dit Mario Znajders, professeur de sciences politiques à l’Université hébraïque de Jérusalem.

« Barak », poursuit-il, « a été une catastrophe. Son gouvernement est tombé en morceaux. Les négociations de Camp David avec les Palestiniens ont échoué en 2000 et la deuxième Intifada a éclaté. Il a ordonné le retrait du sud du Liban ce qui a conduit à la guerre de 2006. Les riches voteront pour le Likoud parce que Benjamin Netanyahu leur promet tout, et les classes les plus défavorisées aussi. Barak n’est pas en mesure de former un gouvernement. Tout le monde le sait. »

Les dirigeants socialistes ne l’ignorent pas non plus. C’est la raison pour laquelle les hommes politiques très proches de Barak lui conseillent une initiative qui ne fait que refléter le désespoir qui est le leur : convaincre Kadima et son chef, Tzipi Livni, d’aller ensemble aux urnes. Une tâche délicate. Barak et Livni, qui est également en baisse dans les sondages, se détestent cordialement. Seule la crainte d’une victoire de Netanyahu est de nature à favoriser ce rapprochement.

Du même auteur :

- Racisme et violence anti-arabes dans Hébron - 7 décembre 2008
- Le nouveau visage de Jénine - 28 novembre 2008
- Le Musée juif de la discorde - 16 novembre 2008
- L’armée israélienne rompt la trêve en assassinant 7 militants dans Gaza - 9 novembre 2008
- Un prix Nobel de la Paix sur un bateau indomptable - 7 novembre 2008
- Pas de gouvernement Livni en Israël - 29 octobre 2008

4 décembre 2008 - El Païs - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.elpais.com/articulo/inte...
Traduction de l’espagnol : Charlotte


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