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mercredi 29 octobre 2008 - 17h:29

Hicham Mourad - Al-Ahram/hebdo

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Israël. Le pays doit tenir des élections anticipées après l’échec de la chef du parti au pouvoir, Tzipi Livni, à former une coalition gouvernementale.

La chef du parti au pouvoir en Israël, Tzipi Livni, s’est finalement résignée à la tenue d’élections anticipées au début de 2009 après avoir échoué à constituer une coalition gouvernementale. « Je ne suis pas prête à céder à des chantages politiques et budgétaires. C’est pourquoi nous nous dirigeons vers des élections. Je n’en ai pas peur », a déclaré dimanche la ministre des Affaires étrangères et dirigeante du Kadima (centre), chargée de former une nouvelle coalition. Mme Livni a ainsi tiré la conclusion de plus d’un mois de tractations vaines avec plusieurs partis.

Son sort a été scellé par la défection ces derniers jours des ultra-orthodoxes du Shass (12 députés sur les 120 de la Knesset) et de la Liste unifiée de la Torah (6 députés). Ces deux formations, dont l’appui était indispensable pour dégager une majorité au Parlement, avaient exigé de Mme Livni qu’elle s’engage par écrit à ne mener aucune négociation avec les Palestiniens sur la question ultra-sensible de Jérusalem-est annexé par Israël. Elles avaient réclamé par ailleurs une forte augmentation des allocations familiales, qui avaient été réduites ces dernières années, notamment par des gouvernements de droite. Le député du Kadima Tzahi Hanegbi, chargé de mener les tractations politiques, a justifié l’attitude de la dirigeante de son parti. « Elle a décidé ne pas être prête à payer n’importe quel prix sur le compte de l’Etat pour constituer une coalition de gens qui se livrent à des chantages », a expliqué à la radio le président de la commission de la Défense et des Affaires étrangères. « Si elle avait accepté de céder sur Jérusalem, toute possibilité de négociations avec les Palestiniens et la Syrie aurait été bloquée. Il aurait été irresponsable de laisser des rabbins ayant des positions extrémistes décider pour Israël », a ajouté Tzahi Hanegbi.

Certains commentateurs, dans les médias, ont estimé que le refus de Tzipi Livni de céder aux exigences des partis pourrait lui permettre de renforcer sa popularité et son image de « Madame propre » de la politique israélienne. D’autres ont souligné que Livni, qui d’ores et déjà est accusée par ses adversaires de manquer d’expérience politique, pourrait pâtir de son échec à constituer un gouvernement. Selon les sondages publiés ces derniers mois, le dirigeant de l’opposition de droite, l’ancien premier ministre Benyamin Netanyahu, était le mieux placé pour succéder au premier ministre Ehud Olmert. Mais son avance a eu tendance à se réduire face au Kadima depuis que Mme Livni en a pris la direction, le mois dernier, après le retrait de M. Olmert, englué dans des affaires de corruption. Par ailleurs, les présidentielles américaines pourraient avoir une incidence en Israël, compte tenu des liens privilégiés entre les deux pays.

Aux termes de la procédure électorale, le président Pérès doit mener trois jours de consultations. S’il lui apparaît impossible de former un gouvernement, il doit l’annoncer à la présidente de la Knesset, Dalia Yitzhik. C’est à ce moment que commence un décompte de 90 jours pour la tenue d’élections législatives. Selon les médias, le scrutin devrait se tenir fin janvier ou courant février. Sur le papier, Mme Livni pourrait constituer une équipe minoritaire, se basant notamment sur le soutien des députés de la minorité arabe, mais elle a écarté cette option dans le passé.

Processus de paix en panne

Ce sont les Palestiniens qui devraient pâtir de cette péripétie de la politique israélienne. La poursuite du processus de paix entre Israël et l’Autorité palestinienne, déjà suspendue à la présidentielle américaine, apparaît ainsi plus compromise par la tenue d’élections anticipées en Israël. Si le gouvernement de transition de M. Olmert est toujours en place, il n’est toutefois pas habilité à prendre des décisions cruciales pour l’avenir du pays, car il ne dispose plus de majorité au Parlement. « Ce gouvernement est un cabinet de transition et, selon la loi, il ne peut gérer que les affaires courantes. Il n’a aucune légitimité pour prendre des décisions sur des questions de principe », explique Ari Shavit, un politologue israélien. « Olmert va probablement tenter un coup de la dernière chance, mais s’il parvient à quelque chose, je pense que 80 % des Israéliens estimeront que ce résultat est illégitime  », ajoute-t-il.

Pour les commentateurs, qu’ils soient palestiniens ou israéliens, l’annonce d’élections anticipées marque définitivement la fin du processus entamé par l’administration de George W. Bush à la conférence d’Annapolis qui avait relancé les négociations de paix en novembre 2007. « Annapolis est mort. Olmert et Livni ne pourront pas parvenir à un accord, car il n’y a plus de médiateur américain. Aucun accord ne peut être signé sans la présence d’un intermédiaire américain actif entre les parties israélienne et palestinienne », déclare Menahem Klein, professeur en sciences politiques à l’Université Bar-Ilan de Tel-Aviv. « Une solution (au conflit) devient beaucoup plus compliquée », renchérit Ari Shavit, pour qui les « espoirs d’un accord sont de toute manière infondés vu la faiblesse des dirigeants Ehud Olmert et (du président palestinien) Mahmoud Abbass ».

Côté palestinien, le même pessimisme prévaut. « Le processus de paix est directement lié à cette crise, car elle permet à Israël de ne pas s’engager dans des négociations », dit le politologue Hani Al-Masri. Tous les yeux sont désormais tournés outre-Atlantique ; Israéliens et Palestiniens sont suspendus au résultat de l’élection présidentielle aux Etats-Unis le 4 novembre. « Les changements en Israël et aux Etats-Unis auront des conséquences sur l’avancement des négociations », estime Nabil Abou-Roudeina, le porte-parole de M. Abbass.

« En fin de compte, tout dépend de qui sera le futur président américain, car le scrutin aux Etats-Unis aura des conséquences sur les élections israéliennes qui n’auront pas lieu avant fin janvier, début février », estime Akiva Eldar, éditorialiste au quotidien Haaretz. Une victoire du candidat démocrate Barack Obama, donné favori par les sondages, pourrait remettre le conflit israélo-palestinien au centre des préoccupations de la nouvelle Administration américaine. Mais une cohabitation entre Benyamin Netanyahu, favori lui dans un scrutin israélien, et M. Obama pourrait s’avérer difficile. « Tout le monde sait que les Israéliens n’aiment pas entrer en confrontation avec les Américains », poursuit-il. M. Netanyahu, un faucon, s’est dans le passé catégoriquement opposé à la création d’un Etat palestinien aux côtés d’Israël, a rejeté les accords de 1993 sur l’autonomie palestinienne et refuse toute concession sur Jérusalem, un programme en contradiction avec les plans de paix internationaux.

Al-Ahram/hebdo - Semaine du 29 octobre au 4 novembre 2008, numéro 738 (Monde)


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