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Sur la question Palin/Israël

mercredi 17 septembre 2008 - 07h:24

Nadia Awad - Miftah

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Palin a fait plus que soulever quelques inquiétudes chez les Palestiniens sur la façon dont elle pourrait affronter une crise internationale et plus précisément, sur ce que serait sa position vis-à-vis d’Israël, de la Palestine et des négociations à venir pour la paix.

La candidate républicaine à la vice-présidence, Sarah Palin, a donné sa première grande interview aux USA jeudi dernier, exposant sa connaissance (souvent complètement absente) de la politique étrangère et internationale des Etats-Unis. Malheureusement, à part quelques phrases bien choisies, elle n’a rien apporté d’autre de plus substantiel pour permettre de comprendre sa logique politique. Néanmoins, à mon idée, elle a fait plus que soulever quelques inquiétudes chez les Palestiniens sur la façon dont elle pourrait affronter une crise internationale et plus précisément, sur ce que serait sa position vis-à-vis d’Israël, de la Palestine et des négociations à venir pour la paix. Elle a répété avec insistance que les USA ne devraient pas « anticiper » les actions d’Israël pour sa défense, laissant ainsi penser que elle et John McCain pourraient incliner la politique étrangère américaine plus en faveur d’Israël qu’elle ne l’est déjà. Notre attention a également été attirée lors d’une émission appelée alaskapodshow.com par le fait que Palin a mis un petit drapeau israélien dans son bureau de Juneau (capitale de l’Etat de l’Alaska), laissant entendre à nouveau ses tendances pro-israéliennes. Cependant, malgré ces indications, le dossier Palin sur Israël, quoique amical, est aussi mince qu’on peut s’y attendre de la part d’un gouverneur de l’Alaska à son premier mandat. Par conséquent, comment arriver à se faire mieux une idée sur ses décisions politiques si elle doit devenir un jour vice-présidente, voire présidente ?

Nous, les Palestiniens, ne sommes pas les seuls à nous demander comment elle va agir politiquement. Bien que la Coalition juive républicaine ait salué le choix de McCain pour Palin comme partenaire pour la vice-présidence, la disant « forte pour Israël » et amie fidèle pour la communauté juive, le Conseil démocratique national juif n’en a pas moins été réservé dans sa réaction, affirmant que Palin ne s’était jamais exprimée publiquement à propos d’Israël et qu’elle se positionnait à la droite de la plupart des opinions des juifs américains. Il a également exprimé sa préoccupation de la voir fortement soutenue par la Coalition chrétienne d’Amérique, un groupe très conservateur avec lequel les juifs américains n’ont pas toujours partagé les mêmes points de vue.

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Palin fait feu de tout bois (photo/AgoraVox)

Les liens de Palin avec le Christianisme conservateur sont nombreux et anciens. Baptisée dans une Assemblée de l’église de Dieu à Wasilla, elle a fréquenté les églises évangéliques conservatrices et leurs assemblées la plus grande partie de sa vie. Si elle est tout à fait en droit de pratiquer la foi de son choix, je ne peux pas cependant ne pas noter comment elle a souvent confondu foi et politique. Dans une récente intervention à l’église, avec quelle facilité Palin a clairement parlé de foi et de gouvernement. Elle a encouragé un groupe de jeunes dirigeants de l’église, leur demandant de prier pour que « la volonté de Dieu soit faite » même si à l’époque, elle intervenait en faveur de la construction d’un gazoduc en Alaska. Parlant de son fils Track, qui vient juste d’être envoyé en Iraq, elle dit qu’il faut prier pour « nos dirigeants nationaux qui les envoient [les soldats] pour un travail qui vient de Dieu, c’est pour cela que nous devons nous assurer de prier, qu’il y ait un plan et que ce plan soit un plan de Dieu ».

Indépendamment du nuage de confusion générale que son manque d’expérience a provoqué, il est très possible que ces croyances évangéliques dont elle est enveloppée pourraient influencer son jugement s’agissant d’Israël. Pire encore, elle pourrait sérieusement choisir de laisser ses croyances guider et former ses jugements. Si tel était le cas, nous, autant que le peuple américain, ne pourrions nous attendre de sa part à un retour à des pensées dénuées de préjugés, ouvertes aux autres, ni à une politique et des décisions plus libérales. Elle semble déjà avoir fait sienne une partie de la rhétorique coutumière de Bush à propos du combat contre le terrorisme/extrémisme musulman - verrouillage, capital et baril -, l’utilisant au moins six fois comme une réponse commode dans son interview à ABC.

Toutefois, avant de continuer avec cette super analyse de ce que Palin a dit ou fait (ou n’a pas dit ou pas fait), nous devons avoir en mémoire que si ce partenariat réussit en novembre, McCain sera le président ; il aura le pouvoir ultime de décision. Et personne ne s’attend à ce que la victoire McCain/Palin ne conduise soudainement les USA à abandonner leur conviction dans une solution à deux Etats pour Israël et Palestine, ni à déclarer aussitôt la guerre à l’Iran. En réalité, nous savons à quoi nous attendre si le ticket républicain arrive à la Maison-Blanche : c’est reparti pour un tour comme ces huit dernières années. Ils vont probablement continuer à soutenir la Feuille de route, à adresser de faibles critiques à Israël pour l’augmentation de l’activité coloniale, lesquelles n’auront aucun impact réel sur les décisions d’Israël et ses actions qui en résultent. Des millions de dollars de subventions américaines vont continuer aussi de prendre la direction d’Israël. Pendant ce temps, nous continuerons, nous, d’être harcelés de critiques à propos du Hamas, de la corruption et des roquettes artisanales, alors qu’ils ignoreront superbement les saisies de terre par Israël, les check-points, les démolitions de maisons et la dégradation économique auxquels nous essayons tout à la fois de faire face. McCain a proclamé son soutien à Israël dans le passé, il a prononcé des mots durs à propos de la menace de l’Iran et des attaques de roquettes depuis Gaza. Il ne risque pas de changer cette position et Palin pourrait bien renforcer ces opinions. En bref, s’ils gagnent, nous pouvons nous attendre à la même chose, et peut-être même, à pire.

Mais ce qui m’effraie vraiment le plus avec la victoire McCain/Pallin, c’est de penser à un Israël plus que jamais enhardi, plus audacieux encore dans l’usage de sa force militaire contre les Palestiniens, sans parler d’une plus grande multiplication des constructions de colonies, des vols de la terre par le biais du mur de séparation, et des violations des droits humains en général. Après tout, Israël voit toutes ces actions comme une défense de l’Etat, nécessaires pour le préserver. A supposer que McCain prenne en compte les conseils de Palin pour ne pas anticiper Israël, cela veut-il dire que les deux vont fermer les yeux sur ces actions, en dépit du fait qu’elles violent les accords de paix précédents autant que le droit international ? Le temps nous le dira. Mais pour l’instant, en tant que femme à droite de McCain, la longue association de plusieurs décennies de Palin avec les églises évangéliques - qui considèrent la préservation de l’Etat d’Israël comme un « impératif biblique » - peut nous laisser, à nous Palestiniens, de quoi réfléchir, et nous inquiéter.

15 septembre 2008 - MIFTAH - illustration par la publication - traduction : JPP


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