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Oui, commandant professeur

jeudi 4 janvier 2007 - 22h:11

Hanna Aviram et Adina Aviram - Ynet

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Quand l’école ouvre ses portes à ceux qui portent arme et uniforme, et que l’enseignement leur est confié, la crainte augmente que la société se militarise.

Pour une meilleure compréhension de cette analyse, nous recommandons la lecture préalable de : « ’Gadna’ : davantage de combativité et de patriotisme », par Or Kashti .

Cette semaine, de nouveau, la nouvelle nous est parvenue d’une collaboration étroite entre le département Société et Jeunesse du Ministère de l’Enseignement et le département Sécurité-Société du Ministère de la Défense.

Régulièrement, en particulier quand sont publiés les chiffres toujours en baisse des jeunes qui croient encore que la clé d’une bonne citoyenneté réside dans la carrière des armes, ou quand l’armée a essuyé un échec à la guerre, la collaboration entre les deux départements produit un nouveau programme de préparation à l’armée. Chacun de ces programmes tente de s’attaquer au « problème de la motivation » - si ce n’est pas la carotte (octroi de crédits à celui qui participera au programme), alors le bâton (les directeurs d’école seront tenus pour directement responsables du nombre de participants).

Un examen des points qui apparaissent dans le nouveau programme, comme dans les programmes antérieurs, révèle la vision du monde militariste qui guide ses auteurs et apparemment aussi ceux qui les délèguent.

En Israël, l’enseignement militariste commence dès le jardin d’enfant. Les contenus transmis par le système d’enseignement façonnent une conscience qui voit dans l’option de la guerre une ligne politique logique et raisonnable. Ils alimentent une admiration pour la force, une glorification de la nation juive, une dévalorisation de la vie des membres des nations arabes, en même temps que la hantise d’un autre génocide.

Combinées, la vénération de la force, la dévotion nationaliste et la peur toujours attisée conduisent à la perpétuation d’une situation de guerre et d’inégalité établie entre divers groupes de citoyens dans le pays. Dans le présent programme, est explicitement relevée aussi la différence entre les femmes et les hommes dans le cadre de la société religieuse : le fils à l’armée et la fille au service national. Si bien que d’emblée, les femmes se voient réserver une place secondaire et marginale dans l’ensemble de la société.

Les programmes prétendent aussi enseigner des valeurs de participation sociale et notamment la reconnaissance que « l’activité de l’armée israélienne est l’expression concrète de la mise en ?uvre de décisions du gouvernement dans un régime démocratique ».

La crainte que la société israélienne ne se transforme en une société militaire devient de plus en plus tangible. Une des caractéristiques d’une société militaire apparaît lorsque le système scolaire s’ouvre à ceux qui portent arme et uniforme, et que l’enseignement des valeurs leur est confié.

Dans son poème contre la guerre « Connais-tu le pays où les canons fleurissent ? » [1928], Erich Kästner écrivait notamment : « Là-bas, on ne naît pas comme civil... Là-bas, chez un homme sur deux, se cache un petit enfant qui veut jouer avec des soldats de plomb. » Il serait hasardeux de placer Israël parmi les principales démocraties dans le monde et, bien sûr, comme le seul Etat démocratique du Proche-Orient, quand en réalité nous élevons nos enfants, dès la plus tendre enfance, à être des soldats combattants dont la loyauté envers l’Etat se mesure à leur empressement à partir à l’assaut de tous ceux que l’Etat qualifie d’ennemis.

De là vient que « être un combattant, c’est ce qu’il y a de mieux », pas seulement dans l’armée quand on apprend les légendes et l’héroïsation de l’image du soldat. L’armée est en train de faire partie de la routine de notre vie dans l’enseignement, la culture, la publicité, et la guerre devient, dans le peuple, un facteur unificateur.

En même temps, une éducation au patriotisme militariste fait sauter les freins que la morale nous impose en tant que société, fournit une légitimité à l’insensibilité et à l’indifférence devant la souffrance de l’autre.

Une société où la place accordée à l’apprentissage de la citoyenneté et aux études humanistes ne cesse de se réduire, où, en même temps, le cadre scolaire s’ouvre de plus en plus aux porteurs d’uniforme et d’armes, et où ce sont ces derniers eux-mêmes qui enseignent les valeurs, devient une société militaire. Peut-être inculqueront-ils la bravoure sur le champ de bataille, mais le courage du citoyen s’effritera et le regard critique auquel il convient de former les enfants dans une société vivante s’affaiblira et disparaîtra.

La collaboration entre le département du Ministère de l’Enseignement et celui du Ministère de la Défense présente aussi un aspect économique avec encore des postes et des salaires pour la direction d’un département ministériel, pour des secrétaires, des employées, des chefs de bureau, et le tout sur le compte du contribuable qui recherche le bien-être, la santé, des possibilités de développement, un gagne-pain.

Est-ce là la société dans laquelle nous, parents, voulons vivre ? Est-ce là une société dans laquelle des parents ont envie d’élever leurs enfants ? C’est aux parents qu’il revient de dire : « ça suffit ». Aux parents de se lever et de demander un changement en profondeur du système d’enseignement en Israël, d’exiger sa transformation en un système qui délivre un enseignement civil, démocratique, une éducation pratique à la paix et à la résolution des conflits par des voies politiques, au lieu d’une éducation portant à s’enrôler dans l’armée et à faire la paix par la guerre.

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Adina Aviram









Adina Aviram et Hanna Aviram militent au sein de « New Profile », mouvement féministe pour la civil-isation de la société israélienne.

Adina Aviram et Hanna Aviram - Yediot Aharonot, le 3 janvier 2007
Traduit de l’hébreu par Michel Ghys


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