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Iran : qui menace qui ?

jeudi 26 juin 2008 - 06h:22

Rasah Saad - Al Ahram weekly

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Alors que l’Iran semble peu disposé à geler ses activités nucléaires en échange d’avantages technologiques et économiques, les pouvoirs occidentaux préparent une quatrième série de sanctions, écrit Rasah Saad.

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Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad

Dans une première réponse à l’ensemble de propositions de l’Union européenne, l’Iran a indiqué mardi qu’il poursuivrait l’enrichissement d’uranium. La réaction iranienne défie les tentatives des puissances importantes de faire pression sur Téhéran pour l’obliger à cesser cette activité qui selon l’occident permettrait la construction d’une bombe nucléaire.

« Nous avons à plusieurs reprises dit que l’enrichissement est notre ligne rouge et nous devons bénéficier de cette technologie. Le travail sera poursuivi, » a déclaré mardi [17 juin] devant les journalistes, Sheikhattar d’Alireza, adjoint au ministre des affaires étrangères.

Le représentant de l’UE, Javier Solana, a présenté à Téhéran ce samedi un ensemble d’avantages économiques devant inciter l’Iran à limiter ses activités dans le nucléaire, et a dit également que l’enrichissement devrait cesser pendant les négociations sur cet ensemble de propositions.

Selon les rapports, l’offre consiste en discussions sur un ensemble d’incitations technologiques et économiques, à condition que Téhéran suspende ses activités d’enrichissement de l’uranium, l’occident craignant que la république islamique ne puissent l’employer pour réaliser une bombe atomique.

« Le droit de l’Iran de développer la recherche, la production et l’utilisation de l’énergie nucléaire à des fins pacifiques » serait reconnu et l’offre comprendrait une assistance à la construction de réacteurs à eau légère, la fourniture de carburant nucléaire et la normalisation des liens économiques avec l’ouest.
Cet ensemble de propositions, endossé par les Etats-Unis, la Russie, la Chine, la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne le mois dernier et présenté par Solana est une version révisée d’une autre proposition déjà rejetée par l’Iran en 2006.

Les pouvoirs occidentaux ont déjà averti l’Iran qu’il fera face à de nouvelles sanctions s’il rejettait l’offre. L’Iran, cependant, n’a montré aucun signe qu’il changerait sa position, et a laissé entendre qu’il n’était pas pressé de répondre à l’offre en disant qu’il la passait en revue.
« Nous donnerons notre réponse aussi vite que possible. Mais nous ne savons pas exactement quand, », a fait savoir Sheikhattar.

En fait, l’Iran conditionne sa réponse au paquet de propositions de l’UE à la façon dont l’ouest aura répondu aux propres propositions de Téhéran. Selon ces informations, Solana a obtenu cette réponse de la part de Téhéran au cours de ses réunions la semaine dernière avec le ministre iranien des affaires étrangères Manouchehr Mottaki et de délégué supérieur au nucléaire Saïd Jalili.

L’Iran a le mois dernier présenté un ensemble d’initiatives qu’il a décrit comme une tentative de résoudre les problèmes du monde, dont la crise autour du nucléaire. Il suggère la mise en place de consortiums pour enrichir l’uranium et dont ferait partie l’Iran.

Téhéran, en tant que signataire du Traité de non-prolifération, insiste sur son droit d’enrichir l’uranium pour fabriquer le carburant nécessaire à ses futures centrales et le Conseil de sécurité des Nations Unies a voté trois ensembles de sanctions contre Téhéran à cause de son attitude de défi.

Mais les pouvoirs occidentaux préparent encore un autre ensemble de sanctions contre l’Iran. Le premier ministre britannique Gordon Brown a indiqué lundi que l’Europe déciderait d’autres mesures de rétorsion à l’encontre de l’Iran.

Essayant d’atténuer les menaces occidentales, Solana a indiqué après une réunion des ministres des affaires étrangères de l’Union européenne au Luxembourg ce lundi [16 juin] que l’UE n’a pas encore décidé d’un nouveau lot de sanctions.

Les alliés européens de Washington ont été depuis longtemps plus prudents sur la question de faire pression sur l’Iran en raison de leurs liens importants dans le domaine des affaires et de l’énergie. Mais les sanctions prévues sur le pétrole et le gaz - et qui ne sont pas encore complètement décidées — frapperaient directement la base économique de l’Iran et ses projets d’augmenter ses exportations de pétrole vers l’Europe dans une période où les prix grimpent fortement.

Brown a prévenu que les pays européens mettront en oeuvre les sanctions concernant le pétrole et de gaz si l’Iran continue à refuser de stopper l’enrichissement d’uranium. « L’action [européenne] débuteraaujourd’hui avec une nouvelle phase des sanctions sur le pétrole et gaz, » a-t-il dit.

Mais la portée des sanctions européennes attendues est encore peu claire. Les diplomates européens disent que quelques divisions subsistent parmi le bloc des 27 gouvernements sur la façon de s’attaquer au secteur de l’énergie en Iran. Un souci est celui d’un prix du pétrole encore plus élevé. Phil Flynn, analyste à Alaron Trading Corporation Chicago, a expliqué que les sanctions pourraient certainement pousser des prix à la hausse suite aux craintes que l’Iran puisse exercer des représailles en retirant du pétrole des marchés mondiaux mondiaux ou en essayant de bloquer le détroit d’Hormuz. « Les marché deviennent nerveux. Ils s’inquiètent de la façon dont l’Iran va répliquer, » indique-t-il.

Brown a aussi déclaré que la Grande-Bretagne gèlera les capitaux extérieurs de la plus grande banque iranienne, la banque Melli — une mesure à part contre la nation de Moyen-Orient et en grande partie symbolique. Il a ajouté que l’UE s’associerait au gel. Dans une mesure de précaution, l’Iran aurait retiré environ 75 milliards de dollars d’Europe pour empêcher que les capitaux ne soient bloqués après les menaces occidentales, a indiqué un hebdomadaire iranien. « Une partie des capitaux iraniens dans les banques européennes ont été converties en or et en actions et une autre partie a été transférées dans des banques asiatiques, » a déclaré Mohsen Talaie, ministre adjoint des Affaires Etrangères et responsable des affaires économiques.

Mais s’en prendre à la vaste industrie iranienne du pétrole et du gaz de l’Iran serait un coup beaucoup plus significatif que d’appliquer des sanctions contre le secteur bancaire. L’économie instable de l’Iran — affaiblie par une inflation et un chômage chroniques — a désespérément besoin de devises étrangères à travers ses exportations de pétrole, qui sont encore très orientées vers les marchés occidentaux en dépit des efforts réalisés pour répondre à une demande asiatique en augmentation.

En même temps, l’Iran s’appuie sur l’investissement et la technologie venant de l’extérieur pour exploiter ses gisements de pétrole et de gaz. Plus de 80% des revenus de l’Iran viennent des exportations de pétrole, et le pays dispose de la deuxième plus grande réserve de gaz au monde.

« Les sanctions vont représenter une forte pression et coût important en Iran, mais je ne suis pas sûr qu’à ce point ils abandonneront l’enrichissement de l’uranium, » a estimé Mehrzad Bouroujerdi, un expert des affaires iraniennes à l’université de Syracuse [New York].

Tandis que l’Europe s’oriente vers une réduction ses liens commerciaux avec l’Iran, Téhéran reste un partenaire commercial privilégié. Rien que l’Allemagne a réalisé l’année dernière un chiffre d’affaires d’environ 5 milliards de dollars [avec Téhéran] et plus de 1000 sociétés vendent leurs produits ou services à l’Iran, certaines en étant subventionnées par leur gouvernement.

De plus, la dépendance de l’Europe à l’égard des énergies venant de l’extérieur rend problématique toute tentative de frapper durement le secteur iranien de l’énergie. L’Europe est l’un des principaux marchés à l’exportation pour l’Iran pour le pétrole brut, par l’intermédiaire de sociétés telles que TotalFinaElf, ENI et Statoil qui sont en concurrence acquérir pour des droits d’exploitation des gisements pétroliers iraniens.

Il est ironique de constater aussi que les nations européennes souhaitent construire une canalisation [pipeline] de la région de la mer Caspienne jusqu’en Europe afin de réduire la dépendance européenne à l’égard du gaz naturel russe. Ils devront d’abord décider qu’est-ce qui représente selon eux la plus grande menace.

19 juin 2008 - Al Ahram Weekly - Vous pouvez consulter cet article à :
http://weekly.ahram.org.eg/2008/902...
Traduction de l’anglais : Nazim


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