Point de passage Sofa : les chauffeurs attendent en espérant
dimanche 22 juin 2008 - 06h:52
- PCHR Gaza
Siège de Gaza : témoignage Gaza 16.
La « Tahdiya » ou accalmie entre le Hamas et Israël a débutée ce matin à 6 heures.
- Bahjat, un des chauffeurs routiers en attente à Sofa, en espérant que la "Tahdiya" puisse durer
Jeudi 11 juin, 11 heures du matin. La « Tahdiya » ou accalmie entre le Hamas et Israël a débutée ce matin à 6 heures. Au point de passage Sofa, situé au sud-est de la Bande de Gaza, tout semble normal pour les chauffeurs de Gaza qui attendent patiemment leurs cargaisons afin de commencer à les distribuer dans toute la Bande de Gaza.
« C’est trop tôt pour dire ce qui va se passer » dit Wael. « Mais nous espérons que la Tahdiya va bien se dérouler. J’attends habituellement ici pendant 24 heures afin de recueillir 5 tonnes de fruits. J’espère seulement que les frontières de Gaza vont s’ouvrir et que nous pourrons alors travailler correctement ...et vivre ».
Wael est l’un 70 conducteurs de camions qui attendent ce matin à Sofa : il est arrivé ici hier à 16 heures et cela fait presque 20 heures qu’il se trouve à Sofa. Tant que Sofa reste ouvert aujourd’hui, lui et les autres chauffeurs auront éventuellement le droit d’entrer dans le côté palestinien du point de passage et de prendre leurs cargaisons. Dans son cas il s’agit de 5 tonnes de fruits frais. Gaza avait l’habitude d’exporter des agrumes, fraises, légumes et fleurs dans le monde entier mais aujourd’hui, suite au siège et au bouclage de la Bande de Gaza par Israël qui empêchent les exportations et détruisent son économie, les habitants de Gaza ne produisent qu’une fraction des produits d’avant et maintenant, ironie suprême, les commerçants importent les fruits et les légumes d’Israël.
« Nous passons beaucoup de temps à attendre pour pouvoir traverser le point de passage » dit Wael « Le temps qu’on passe à attendre, les marchandises sont parfois abimées ». Lui et son ami Bahjat, également chauffeur, avaient tous deux l’habitude de récupérer leurs marchandises au point de passage Karni situé dans le nord de la Bande de Gaza. « Karni a été construit comme point de passage commercial et il y avait tout les équipements nécessaires au remorquage et au stockage. » raconte Bahjat. « Mais Sofa n’a pas été construit en tant que passage commercial alors, tandis que nous attendons ici, nos marchandises s’abiment car il n’y a aucune facilité de stockage. C’est l’été et il fait de plus en plus chaud. Que pensez-vous qu’il se passe sous cette chaleur avec les fruits, les produits laitiers et la viande congelée laissée dehors sous le soleil ? »
Les six points d’entrée dans la Bande de Gaza ont été hermétiquement fermés par les forces d’occupation israéliennes depuis plus de 2 ans, privant 1.5 million habitants de Gaza de leur liberté de mouvement et de leurs droits économiques et sociaux. Depuis mi-juin 2007, le point de passage de Karni qui était le principal passage commercial pour Gaza a été totalement fermé pendant environ 297 jours. Le point de passage frontalier international de Rafah, la seule frontière de Gaza vers le monde extérieur en passant par un pays autre qu’Israël, n’a été ouvert que sporadiquement durant ces 2 années et chaque fois seulement pendant quelques heures. Le siège et le bouclage de 2 ans de la Bande de Gaza a obligé toute une population à vivre de rations alimentaires et de combustibles rationnés tandis que la Bande de Gaza a été totalement coupée du monde extérieur et s’est cruellement appauvrie. Tous les camions qui attendent à Sofa sont vides, symboles de la mort des exportations de Gaza, un pays qui vendaient auparavant ses fruits (surtout ses fraises) dans le monde entier mais qui, aujourd’hui, est devenu l’une des communautés dans le monde les plus dépendantes de l’aide. La Tahdiya offre un espoir de paix dont les habitants de Gaza ont désespérément besoin afin de répondre à leurs droits humains fondamentaux. Les pourparlers autour de la réouverture du point de passage frontalier de Rafah vers l’Egypte devraient commencer entre Israël, le Hamas, l’Autorité Palestinienne et l’Union Européenne dans 2 semaines, à condition que la Tahdiya tienne.
Ce matin, les chauffeurs au point de passage Sofa virent entre l’espoir que la paix arrive enfin à Gaza et l’idée que rien ne va vraiment changer tant que la Palestine continuera à être occupée par Israël. Le régime à Sofa met en lumière la mainmise qu’Israël continue à exercer sur la Bande de Gaza. Wael et Bahjat expliquent que les camions israéliens déchargent leurs marchandises dans le côté israélien de Sofa. Toutes les marchandises doivent alors passer par une vérification sécuritaire avant d’être rechargées, emmenées du côté palestinien pour être à nouveau déchargées. Les marchandises qui comprennent une grande quantité de viandes surgelées et de produits laitiers sont laissées sous le soleil brûlant jusqu’à 15 heures, moment où les chauffeurs palestiniens ont la permission de commencer à les collecter, un camion à la fois. Les marchandises ont toutes les chances d’être endommagées ou abimées car les installations sont totalement inadéquates et que le système est lent et pesant. « J’ai attendu hier 24 heures avant de pouvoir collecter 5 tonnes de prunes » dit Wael. « Mais j’ai été obligé d’en jeter près de la moitié car elles étaient restées dehors et étaient complètement abîmées. Ma société doit quand même payer ces marchandises même quand elles sont complètement détériorées. Nous avons besoin que Karni rouvre dès que possible ».
La rangée de camions au point de passage Sofa s’est allongée depuis 45 minutes et elle serpente maintenant le long de la route poussiéreuse, les carrosseries luisantes sous le soleil brûlant. Alors que nous marchons vers notre taxi, un chauffeur plus âgé nous fait signe. Son nom est Mohammed. « Je suis chauffeur de camion depuis des années » dit-il. « « Je subviens aux besoins de 15 personnes à la maison mais cela devient de plus en plus difficile à cause du bouclage et surtout de l’augmentation du prix du carburant. Je remplis un plein camion de marchandises tous les 3 jours et gagne 400 shekels, [environ 77 euros] mais maintenant je dépense presque 300 shekels [environ 58 euros] juste pour le carburant ».
Lisez les autres témoignages :
20 juin 2008 - Palestinian Centre for Human Rights [PCHR] - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.pchrgaza.org/files/campa...
Traduction de l’anglais : Ana Cléja