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Kadhafi sonne la charge contre le projet UPM - Une mer de doutes ?

mercredi 11 juin 2008 - 08h:19

Kharroubi Habib - M. Saâdoune - Le Quotidien d’Oran

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A quelques semaines du sommet de Paris... il n’est plus certain que la rencontre fera le plein de chefs d’Etat escompté par le président français Nicolas Sarkozy...

Kadhafi sonne la charge contre le projet UPM

par Kharroubi Habib

A quelques semaines du sommet de Paris devant en principe donner naissance à l’Union pour la Méditerranée, il n’est plus certain que la rencontre fera le plein de chefs d’Etat escompté par le président français Nicolas Sarkozy, son hôte et son promoteur.

Deux défections ont déjà été annoncées : celles du roi du Maroc et du Guide de la Jamahiriya libyenne. Bouteflika et d’autres font planer le doute sur leur participation, en s’abritant pour cela derrière des demandes de clarification que les partenaires européens refusent de fournir avec netteté, ou du moins avec la précision voulue par ceux de la rive Sud.

Longtemps silencieux sur le projet d’Union pour la Méditerranée, Mouammar Kadhafi s’est finalement manifesté en réunissant autour de lui à Tripoli les chefs d’Etat riverains de la Méditerranée membres de la Ligue arabe, à l’exception de l’Egyptien Hosni Moubarak et du Marocain Mohammed VI, qui s’est fait représenter par son Premier ministre.

D’entrée, le Guide libyen a fait connaître son rejet irrévocable du projet en le qualifiant de manoeuvre orchestrée pour casser la Ligue arabe et l’Union africaine auxquelles les Etats de la rive Sud appartiennent. Non sans pertinence, il a considéré que si l’Union européenne voulait coopérer avec le Sud, elle peut le faire avec ces ensembles existants que sont la Ligue arabe et l’Union africaine. En cela, il exprime franchement et tout haut les « inquiétudes » que d’autres de ses pairs du Maghreb ou du monde arabe ont diplomatiquement exprimées. Pour Kadhafi, le projet de l’Union pour la Méditerranée a été conçu en vue de dissoudre la solidarité des Etats arabes sur la question de la Palestine et du conflit global israélo-arabe, et en même temps distendre celle existant entre le monde arabe et le continent africain.

Il n’est pas certain qu’il soit parvenu à convaincre ses invités d’hier à adopter sa position radicalement opposée au projet. Il n’empêche que leur empressement à faire le déplacement à Tripoli montre qu’ils cultivent de sérieuses préventions quant aux intentions inavouées à l’origine de ce projet. Ce que craignent ces dirigeants, c’est qu’en allant en ordre dispersé face à l’Union européenne, ils ne puissent se faire entendre et faire prendre en compte leurs points de vue sur l’union projetée.

Mais pour autant qu’ils soient conscients de cela, il n’est pas acquis qu’ils surmontent leurs propres divergences de vue et leurs égoïsmes nationaux. La défection de Hosni Moubarak le démontre. Le raïs égyptien a manifestement choisi de faire cavalier seul en considérant très certainement que son attitude vaudra à son pays la reconnaissance de l’Union européenne sous la forme de l’octroi de la coprésidence de l’Union. Calcul hasardeux, car les pays de la rive Sud qui se « cherchent » encore sur cette union pourraient alors conditionner leur participation à une autre forme de partage des responsabilités qui pénaliserait l’Egypte.

Le Quotidien d’Oran - Analyse

Une mer de doutes ?

par M. Saâdoune

Dans sa configuration drastiquement redimensionnée par l’Allemagne, l’Union pour la Méditerranée est-elle un marché de dupes, un « affront », pour reprendre le propos de Mouammar Kadhafi ?

Pour certains économistes algériens qui ne partagent pas forcément les convictions du leader libyen, cela ne fait guère de doute. En effet, nombre de ces experts s’interrogent sur la dimension économique d’une union réduite à n’être qu’une subdivision du processus de Barcelone.

La Commission européenne, dont la compétence ne saurait être subrogée par un Etat aussi influent soit-il, a clairement établi que l’UPM, chère au président Sarkozy, devrait impérativement s’insérer dans la logique de ce processus au budget plutôt réduit et aux ambitions très cadrées.

Pour mémoire, ces économistes rappellent que la démarche multilatérale inaugurée dans la ville catalane en 1995, déjà peu probante, a été dépassée par la politique de voisinage (PEV), dont l’Algérie n’a pas accepté les termes, et le renforcement des stratégies de coopération bilatérale.

Compte tenu de l’hétérogénéité qui caractérise les pays riverains de la Méditerranée, ces spécialistes ont du mal à discerner les éléments premiers d’une dynamique de coopération susceptible d’impliquer conjointement des économies aux orientations divergentes et aux structures très différenciées.

Si elles présentent des caractéristiques très distinctes, accentuées par l’éloignement géographique, les économies de l’Est et de l’Ouest méditerranéen ont des spécificités au moins aussi importantes que celles qui les différencient de la rive Nord. Ceci sans évoquer les politiques économiques qui sont loin de converger vers un minimum d’identité de conception, à défaut de proximité d’intérêts.

A l’évidence et sans entrer dans le détail des éléments budgétaires, les engagements financiers de l’UPM ne pourront aller au-delà de ceux déjà arrêtés pour le processus de Barcelone. On sait déjà qu’en plus de treize années d’existence, les dépenses au titre des programmes méditerranéens ont péniblement atteint le seuil modeste de neuf milliards d’euros.

De ce point de vue, les perspectives n’inclinent pas à l’optimisme non plus. Le discours enthousiaste de certains think-tanks d’économistes et de businessmen ne repose donc que sur ce que les Anglais appellent « wishful thinking », une façon élégante de dire que prendre ses désirs pour la réalité ne constitue pas forcément un argumentaire convaincant.

Certes, les projets identifiables, que ce soit celui de la dépollution marine ou le problème de l’eau dans certaines régions du pourtour méditerranéen, sont cités comme des objectifs de l’UPM. Mais pour ces experts, l’approche sous-régionale serait de loin plus réaliste et s’avérerait moins lourde pour commencer à traduire certains de ces projets sur le terrain.

Pour ces experts, le volet économique de l’UPM est aussi nébuleux que son volet politique. Une dose de volontarisme est nécessaire pour impulser de grandes idées, encore faut-il qu’une base opérationnelle de conditions soit réunie. Sinon, comme l’a exprimé avec un certain humour un banquier en détournant une parabole populaire, « les funérailles seront certes grandioses mais le défunt ne sera jamais qu’un souriceau ».

Le Quotidien d’Oran - Edito

11 juin 2008 - Le Quotidien d’Oran


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