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« Le Hamas remportera les prochaines élections palestiniennes »

lundi 9 juin 2008 - 23h:08

Adam Makary - Al Jazeera.net

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Selon Mahmoud Zahar, le Hamas a conservé l’appui du peuple palestinien, en dépit du blocus israélien contre Gaza et du boycott international.

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Mahmoud Al Zahar, un des fondateurs du mouvement Hamas

« Si les élections devaient avoir lieu demain, nous gagnerions, » a déclaré devant des journalistes Mahmoud Zahar, un des fondateurs de Hamas, le plus grand mouvement palestinien de résistance islamique.

« Le soutien à l’égard du Hamas est beaucoup plus grand que la plupart des gens ne le pensent. »

Mahmoud Zahar a fait ses commentaires à la suite de d’informations parues dans les médias israéliens indiquant que la popularité du groupe s’affaiblissait parmi les Palestiniens.

Ehud Barak, le ministre israélien de la défense, a indiqué récemment que Israël aurait reconnu des « signes de détresse » venant du Hamas, a rapporté le journal Haaretz. Barak s’est vanté du fait que près de 70 combattants du Hamas avaient été assassinés durant les deux derniers mois, et que plus de 300 résistants avaient été tués les six derniers mois.

Election « choc » pour les Etats-Unis

Zahar, parlant à l’occasion d’une visite à Doha, la capitale du Qatar, a expliqué que les Palestiniens, et particulièrement ceux de Gaza, ne se retourneraient pas contre le Hamas.

« Les Palestiniens connaissent la douleur de voir leur terre confisquée, et ils soutiendront n’importe quelle force qui garantira leur droit au retour dans une patrie palestinienne. »

Pour Zahar et le Hamas, 2006 a marqué une rupture puisque les Palestiniens de Cisjordanie, Gaza et Jérusalem ont tenu des élections présidentielles et parlementaires décrites comme « justes et libres » par les observateurs internationaux.

Mais les résultats ont laissé Israël et l’administration Bush en état de choc. Les Etats-Unis ont réagi en stigmatisant le Hamas comme « organisation terroriste » et en incitant au boycott international contre cette organisation.

Mahmoud Abbas, le président palestinien, avait un moment formé un gouvernement unitaire, mais son cabinet a ensuite été écarté après le conflit entre factions — impliquant son parti le Fatah — et qui a poussé le Hamas à prendre le contrôle de Gaza.

On dénombrait en juin 2007 des centaines de Palestiniens qui avaient été tués les mois précédents dans des combats de rues.

« C’était la première fois que les Palestiniens se trouvaient impliqués dans des affrontements de guerre civile, » a dit Zahar en parlant des batailles de rue. Il critique le Fatah pour avoir permis aux Etats-Unis de prendre le contrôle de la Cisjordanie.

En avril 2008, le journal Vanity Fair a publié un article qui, en se basant sur des documents et des entrevues avec des acteurs clé dans l’administration Bush,
révélait un complot américain pour renverser le gouvernement palestinien élu.

Se penchant en avant sur sa chaise, Zahar nous dit : « Ce qui sort de l’article de Vanity Fair c’est un exemple parfait du point jusqu’où le Fatah a dégénéré, allant jusqu’à affaiblir la cause palestinienne. »

« Ainsi, nous ne sommes pas prêts à rencontrer le Fatah parce que de telles réunions devraient être fructueuses et constructives pour le peuple palestinien. »

« Des innocents ont été tués »

Zahar explique que les actes d’agression perpétrés par le Fatah dans les villes palestiniennes telles que Ramallah sont allés jusqu’à « massacrer des personnes innocentes... ou tirer sur des étudiants à l’université ».

« Ainsi, je peux constater comment les Palestiniens en Cisjordanie ne voteront pas pour le Fatah en raison de sa coopération avec Israël ».

Zahar est également contre la normalisation avec Israël car il estime que les israéliens s’attaquent à l’intégrité du monde arabe.

« Normalement, après un processus de paix, la paix est effective. Deux exemples remarquables : la Jordanie et Egypte étaient les plus empressés à faire la paix avec Israël. »

« Mais personne en Egypte n’est prêt pour une normalisation avec Israël en raison de son agression envers le peuple palestinien. »

« Nous n’y sommes pas prêts parce que cela n’a rien à voir avec le service de la cause palestinienne. »

Ayant grandi sous l’occupation israélienne, Zahar a été nourri d’une culture de résistance où l’autodéfense vient en premier.

En avril 2003 son fils Khaled âgé de 25 ans a été assassiné lorsque les forces israéliennes ont détruit la maison familiale à Gaza. Son autre fils Hussam, a été tué en janvier de cette année par une attaque aérienne israélienne qui a lui a coûté la vie.

Sionisme « criminel »

Zahar exposa à une large audience dans le cadre des « Débats de Doha », un forum public pour le dialogue et la liberté d’expression au Qatar : « Vous ne savez pas comme ce qu’est que de regarder dans la poitrine de votre fils et de vous apercevoir qu’elle est vide. »

Sa douleur n’est pas uniquement celle éprouvée par un père mais vient également d’un fort sentiment de dépossession remontant à « Al-Nakba » - la catastrophe - la création d’Israël en 1948 et l’expulsion de centaines de milliers de Palestiniens de leur patrie.

Zahar ajoute : « Je n’ai pas de ressentiment pour les juifs en tant que tels ou pour la foi juive. »

« On doit différencier le judaïsme du sionisme, et quant aux sionistes ce sont des criminels. »

Avant qu’il soit devenu un des dirigeants du Hamas durant l’Intifada de 1987, le soulèvement des masses palestiniennes, Zahar s’est impliqué dans la lutte palestinienne alors qu’il était encore jeune.

Il était parmi les plus de 400 Palestiniens qui ont été de expulsés de force au sud-en 1992, où il a passé plus qu’une année en exil. Durant cette période, il est apparu comme un des premiers porte-parole pour le mouvement Hamas récemment formé.

Après la victoire du Hamas aux élections de janvier 2006, il est devenu ministre des affaires étrangères dans un cabinet boycotté par l’occident, qui exigeait du Hamas l’acceptation des accords d’Oslo de 1991, lesquels engageaient l’Autorité Palestinienne [AP] sous une stricte surveillance palestinienne.

Zahar argumente en disant que dès le début [de l’application de ces accords] l’AP n’a eu aucun vrai pouvoir sur la terre palestinienne qui s’est trouvée fragmentée en trois secteurs permettant à Israël d’avoir un contrôle sur toute la région.

Incursions militaires

Sous le régime des accords d’Oslo, l’armée israélienne a maintenu un droit d’entrer dans tous les secteurs censés dépendre de l’Autorité Palestinienne si Israël considérait une telle intervention comme nécessaire pour des raisons de « sécurité ».

En conséquence, la Cisjordanie et Gaza sont restés des cibles pour des attaques et incursions militaires israéliennes.

Zahar argumente aussi en disant qu’un tel accord avait soumis les Palestiniens « à des agressions israéliennes » répétées, incitant le Hamas pour à se défendre « à bombarder les villes israéliennes à proximité ».

Israël rend ces attaques menées par le Hamas et d’autres factions palestiniennes et qualifiées de « terroristes », responsables de l’échec des négociations de paix qui avaient débuté en 1993.

Cependant, Zahar repousse les affimations israéliennes comme étant des prétextes pour bloquer n’importe quelle possibilité de paix.

« Ceci est devenu un modèle répétitif. C’est encore la politique d’Israël aujourd’hui, et en attendant, ce sont les vies palestiniennes qui sont touchées, » indique Zahar.

Comme beaucoup de Palestiniens, Zahar n’accorde aucune crédibilité à tout engagement israélien d’établir un état palestinien à côté d’Israël.

« Ruse » israélienne

S’adressant aux dirigeants arabes lors d’une rencontre récente au Qatar, Tipsivi Livni, la ministre israélienne des affaires étrangères, a prétendu qu’Israël était disposé à une solution à deux états. Mais Zahar est persuadé que la « solution » d’Israël n’est qu’une ruse.

« Livni pense que nous sommes prêts à accepter deux états, mais où sont les frontières ? Qui en seront les citoyens ? Nous ne faisons aucune confiance aux déclarations des responsables israéliens, » dit-il encore.

« J’ai traversé le tunnel des Accords d’Oslo, les négociations de paix de Madrid, les conférences de Paris, Sharm El Sheikh, Taba, et tous les endroits imaginables. De quelle solution à deux états parle-t-elle ? »

Le Hamas a engagé des négociations indirectes avec Israël au Caire un peu plus tôt cette année afin d’essayer de parvenir à une trêve et obtenir la levée du siège de Gaza, et il a été rejoint dans son initiative par d’autres groupes palestiniens.

« Notre accord est basé sur deux points. En premier la libération des prisonniers, puis ensuite un cessez-le-feu, » indique Zahar.

Zahar explique aussi que 11550 Palestiniens sont en prison et qu’un quart des Palestiniens ont été emprisonnés à un moment dans leur vie. Israël exige l’arrêt des tirs de fusée sur les villes israéliennes et la libération de Gilad Shalit, le soldat israélien capturé à Gaza lors d’une incursion frontalière [menée par le résistance palestinienne] en juin 2006.

« Jeux » israéliens

Zahar ajoute : « Israël a promis de libérer 1 000 prisonniers. Tout d’abord, 450 Palestiniens seraient libérés et alors nous rendrions Gilad Shalit. »

« Mais finalement nous avons compris que les Israéliens ne font que jouer avec nous. »

« Cessez-le-feu pour cessez-le-feu, accord après accord, et en attendant, ils parlent de libérer des prisonniers dans un délai d’un mois « [puis], deux mois. Puis deux ans passent. Et maintenant ? Où sont les prisonniers ? »

Le Hamas insiste qu’il n’y aura aucune trêve à moins qu’Israël ne lève le blocus contre Gaza. Zahar est mis en colère par la version israélienne et occidentale de l’histoire palestinienne et parle sur un ton qui exige que cette version soit mise à jour.

Pour Zahar, l’histoire des Palestiniens ne devrait pas être définie par la conquête israélienne, mais par la lutte historique et permanente des Palestiniens pour conquérir leurs droits.

« Au cours des années, tout ce qui a changé dans la signification du mot Nakba est que nous sommes plus proches d’atteindre notre but après 60 ans de lutte. Nous-mêmes avons échoué, mais nos fils n’échoueront pas. »

29 mai 2008 - Al Jazeera.net - Vous pouvez consulter cet article à :
http://english.aljazeera.net/NR/exe...
Traduction : Claude Zurbach


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