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L’après-Olmert se prépare déjà

jeudi 5 juin 2008 - 06h:25

Maha Al-Cherbini - Al-Ahram/hebdo

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L’étau se resserre autour du premier ministre, Ehud Olmert, suite au scandale politico-financier. Le scénario d’une élection anticipée se confirme de plus en plus.

Les spéculations sur l’avenir politique du Premier ministre israélien, Ehud Olmert, mis en cause dans une affaire de corruption qui pourrait bien provoquer sa démission, battaient cette semaine leur plein en Israël, l’éventualité d’une élection anticipée se profilant à l’horizon.

Fragilisé par l’audition, devant un tribunal de Jérusalem, de l’homme d’affaires israélo-américain Morris Talansky, qui a indiqué avoir versé, en quinze ans, près de 150 000 dollars à M. Olmert pour financer notamment ses campagnes électorales, le Premier ministre israélien a pourtant affirmé cette semaine qu’il n’avait pas l’intention de jeter l’éponge, démentant les malversations précitées. « Je vais continuer à exercer mes fonctions. Certains pensent que chaque fois qu’une enquête est lancée, il faudrait donner sa démission. Mais je ne suis pas de cet avis et je ne renoncerai pas à diriger le pays », a déclaré le premier ministre.

Selon les experts, M. Olmert n’est pas entièrement le maître de son destin. Son sort est entre les mains du procureur général, Menahem Mazouz, qui doit décider d’une éventuelle inculpation. Dans ce cas, le premier ministre a annoncé qu’il démissionnerait.

Pour éviter un tel scénario, M. Olmert est décidé à mener la bataille sur le front juridique. Un de ses proches, le ministre de l’Habitat Zeev Boïm, a relevé de nombreuses « contradictions et incohérences » dans le témoignage de cet homme d’affaires. Ce dernier doit subir un contre-interrogatoire de la part des défenseurs de M. Olmert à la mi-juillet, et d’ici là, M. Olmert veut exercer ses fonctions comme « si rien n’était » bien qu’un sondage publié récemment indique que 70 % des Israéliens sont favorables à la démission de M. Olmert.

Bafouant tous les appels à sa démission, le Premier ministre envisage de se rendre comme prévu la semaine prochaine aux Etats-Unis pour y rencontrer le président George W. Bush.

Dans cette atmosphère de fin de règne pour Olmert, les partis politiques se préparaient, samedi, à des élections anticipées prévues initialement en novembre 2008. Au sein de son propre parti, le Kadima (centriste), la bataille pour la succession s’est déjà engagée. Parmi les prétendants les mieux placés à la succession de M. Olmert au sein du Kadima figurent Tzipi Livni, la ministre des Affaires étrangères, Shaul Mofaz (Transports) et Avi Dichter (Sécurité intérieure). « Kadima devrait commencer à se préparer pour tout éventuel scénario, y compris des élections anticipées. Je suis une grande partisane des primaires », a affirmé pour sa part le numéro deux du cabinet israélien, Tzipi Livni.

Analysant l’attitude des membres du Kadima qui veulent se distancer de leur chef, le Dr Hicham Ahmad, professeur à la faculté d’économie et des sciences politiques, à l’Université du Caire, estime : « Les membres du Kadima tentent de se sauver du scandale qui resserre l’étau autour de leur chef car une telle inculpation, une fois confirmée, pourrait conduire à la perte de leur parti lors des élections anticipées au profit des Travaillistes. S’ils défendent Olmert, ils seront décrédibilisés avec lui. Aussi, tentent-ils de se disculper pour garder leur popularité et leur crédibilité aux yeux de l’opinion publique. N’oublions pas aussi que c’est une occasion pour certains membres, comme Tzipi Livni, de prendre la place d’Olmert ». Tzipi Livni, qui presse son premier ministre Ehud Olmert de prendre la porte, est perçue en Israël comme une femme intègre et modérée, mais qui ne fait pas l’unanimité dans les rangs de son parti.

Outre les contestations au sein de son propre parti, les partenaires travaillistes du premier ministre lui ont, eux aussi, tourné le dos cette semaine, le chef du Parti travailliste, Ehud Barak, l’appelant à quitter le pouvoir dans « l’intérêt de l’Etat », faute de quoi son parti (17 députés) pourrait provoquer une dissolution du Parlement et des élections anticipées dans deux mois. Sans le soutien des 17 députés travaillistes, M. Olmert n’aurait plus de majorité au Parlement.

Quant au parti du Likoud (droite), il a estimé pour sa part que « quelqu’un qui reçoit des enveloppes ne peut négocier l’avenir du plateau du Golan avec la Syrie ». En effet, cette crise survient une semaine après l’annonce de la reprise des négociations indirectes entre l’Etat hébreu et la Syrie, qui portent sur un retrait israélien du Golan dans le cadre d’un accord de paix. Dès l’annonce de ces négociations, après 8 ans d’impasse, M. Olmert s’est vu accuser par ses détracteurs de les relancer pour détourner l’attention de l’enquête qui le vise.

Les scénarios éventuels

Selon les analystes, l’inculpation d’Olmert, une fois confirmée, pourrait bien le pousser à ne pas aller jusqu’au bout de son mandat qui doit prendre fin en 2010. « Olmert ne pourra sortir de cette crise que par manque de preuves. Mais, je pense que ce scandale pourrait bien conduire à son départ du pouvoir car ce qu’il a fait est une sorte de malversation et de corruption impardonnable. L’unique châtiment à ces actions illicites sera son retrait de la vie politique », explique le Dr Hicham Ahmad.

Au cas où l’élection anticipée deviendrait l’unique issue, trois noms semblent être les grands favoris du scrutin, Livni, Barak et Netanyahu. Selon les pronostics, la favorite est le numéro deux du Kadima, Tzipi Livni, à condition toutefois qu’elle réussisse à prouver qu’elle n’est pas impliquée avec Olmert car ce scandale a déjà atteint tout le parti et aucun membre ne pourrait s’en sortir indemne. « Le peuple ne se dirigera vers le Kadima que s’il témoigne d’une certaine détente politique avec ses voisins syriens et palestiniens, c’est-à-dire si les négociations israélo-syriennes par exemple apportent des fruits tangibles. Une hypothèse difficile à réaliser à l’heure actuelle, car Olmert est déjà fragilisé et il lui est très difficile de signer un accord de telle ampleur sous de telles conditions », analyse le Dr Ahmad.

Selon les experts, l’unique facteur qui orientera le choix du peuple sera les circonstances régionales. Autant que la crise se compliquerait, le peuple opterait pour Barak car il est un homme militaire apte à garantir la sécurité et la paix au peuple. Et puis, les Travaillistes ont prouvé qu’ils sont plus pragmatiques avec les Palestiniens. Leur idéologie dans la gestion de la crise palestinienne était toujours réaliste.

Enfin, un dernier scénario semble toujours possible, à savoir l’élection de Benyamin Netanyahu (Likoud, droite). « Les Israéliens ne choisiront cet extrémiste qu’au cas où la crise s’annoncerait grave, insoluble et explosive. Déjà, la plupart des Israéliens sont sceptiques sur les chances d’aboutissement des négociations avec les Palestiniens et les Syriens, et tout piétinement pourrait faire peur aux Israéliens et donner raison au discours extrémiste de Netanyahu qui a toujours été contre tout dialogue avec les Palestiniens », pronostique le Dr Ahmad.

Les jours à venir ne décideront pas seulement de l’avenir du Premier ministre israélien et de tout l’Etat hébreu, mais aussi de l’avenir de la crise palestinienne qui pourrait être gravement affectée par ces changements de direction en Israël.

Al-Ahram/hebdo - Semaine du 4 au 10 juin 2008, numéro 717 (Monde)


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