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8e anniversaire de la libération du sud-Liban

mardi 3 juin 2008 - 06h:00

Hassan Nasrallah

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Pour commencer nous saluons les âmes pures de nos martyrs, les martyrs de la Résistance, de la patrie, toute la patrie. Au grand martyr de la Résistance islamique notre cher Sayyed Abbas el Moussawi, au cheikh de notre Résistance islamique, Cheikh Ragheb Harb, et à l’âme de notre très cher dont l’absence nous manque aujourd’hui, le martyr, le dirigeant le Hajj Imad Moughniyéh, et à tous les autres martyrs.

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Hassan Nasrallah, secrétaire général du mouvement Hezbollah

Je vous souhaite la bienvenue à l’occasion du 8e anniversaire de la Résistance et de la Libération. Et vous voilà aujourd’hui tous réunis, remplissant les places publiques pour encore une fois montrer votre identité et votre vérité, vous qui êtes les gens les plus honnêtes, les plus purs et les plus généreux.

Chers frères et s ?urs, le 8eme anniversaire de la libération et de la victoire de la Résistance, de la nation, du peuple et de la Oumma coïncide cette année avec la 60eme commémoration de la Nakba, de la perte de la Palestine et de la naissance de l’entité oppressive. C’est également les 30 ans de l’invasion israélienne au Sud-Liban en 1978 et la mise en place de la barrière frontalière qui s’est par la suite étendue. Cette occasion est réellement l’occasion d’observer, de réviser et de tirer des leçons non seulement concernant le Liban mais aussi les mondes arabes et musulman.

Je vais commencer sans préliminaires car aujourd’hui nous devons aborder plusieurs sujets.

Je commencerais avec le Liban :

En ce qui concerne la Résistance : la Résistance a présenté un modèle et une stratégie à un double niveau : une stratégie de libération qui a chassé l’occupant, et une stratégie de défense de la patrie et du peuple face à l’occupation, l’agression et les menaces. Ce message précis est un message commun de tous les résistants du Liban mais aussi de leurs frères résistants en Palestine et ceux résistants en Irak, qui est transmis aujourd’hui à toute la Oumma. Lorsqu’en 1978 Israël a envahi le Liban, occupant une partie du Sud, le conseil de sécurité de l’ONU a voté la résolution 425 et au Liban nous avons attendu son application.

Nous avons compté sur la communauté internationale et il a été question au Liban de la nécessité de mettre en place une stratégie arabe commune pour faire face à l’occupation car le Liban seul n’était pas en mesure de faire face à Israël. Et ça ne s’est pas passé de la sorte. La communauté internationale ne s’est pas mobilisée pour mettre en application la résolution. La communauté arabe non plus ne s’est pas mobilisée pour mettre en place une stratégie de défense car cette communauté officielle avait en effet déjà perdu toute volonté d’affrontement. Mais il y avait un autre pari : l’Imam Moussa Sadr avait jeté les bases pour une autre option, celle de la Résistance libanaise avec l’appui du peuple et des enfants du sud et du peuple libanais dans son ensemble. Quel a été alors le résultat des paris perdants ? Israël a pris le Liban pour un pays faible incapable de lui faire face : l’importante invasion de 1982 avait ainsi pour but de rallier le Liban à Israël et créer une nouvelle Nakba arabe.

Face à l’invasion israélienne, les Libanais étaient divisés comme ça peut être le cas de chaque peuple au monde, comme c’est le cas de chaque peuple au cours de l’histoire et nous Libanais ne sommes pas une exception à la règle. De tout temps, lorsqu’une force envahit un pays et l’occupe, le peuple se divise. Telle était la situation au Liban en 1982, telle était la situation en Palestine et l’est encore dans une certaine mesure, et telle est la situation en Irak.

Face à l’occupation, les gens se divisent traditionnellement en plusieurs catégories : la plus grande partie reste neutre, dans un premier temps ; une autre partie ne se sent pas concernée et ce qui lui importe est de manger, de boire et de se promener le vendredi ou le dimanche - qui détient le pouvoir et la souveraineté et dans quelle position se trouve le pays lui importe peu ; la troisième partie est formée d’agents et de mercenaires, comme l’armée d’Antoine Lahd ; la quatrième partie est formée de personnes dont les intérêts recoupent ceux de l’occupant et par conséquent traite avec l’occupant à cause de ses intérêts ; la cinquième partie, formée généralement de l’élite, est défaitiste et envisage la coopération avec l’occupation pour réduire les pertes nationales ; la sixième partie rejette l’occupation politiquement et médiatiquement mais n’est pas disposée à payer le prix du sang ; la dernière partie, celle de la Résistance, considère qu’il est de son devoir humain, moral, religieux et national de libérer le pays de l’occupation, quel que soit le prix à payer. Cette catégorie est donc celle de la Résistance, celle qui croit en la Résistance et qui résiste vraiment.

Cette division est naturelle, historique et sociale, et n’est pas spécifique au Liban. En l’absence d’unanimité populaire et nationale autour d’un choix particulier, certains diront qu’il n’y avait pas d’unanimité nationale pour résister en 1982. Ou encore, qu’il n’y avait d’unanimité nationale sur la Résistance en Palestine, ni sur la Résistance en Irak. Mais par ailleurs, il n’y pas non plus une unanimité nationale pour collaborer et coopérer ou tout simplement ignorer le fait de l’occupation. Il n’existe donc pas d’adhésion totale à une seule option : chacune des catégories fait le choix qui lui convient et trace son chemin : c’est ce qui s’est passé au Liban. Et je répète encore une fois à tout peuple dont la terre est occupée : la Résistance n’a pas besoin de l’unanimité nationale ou populaire. Elle se doit de prendre les armes et d’aller de l’avant pour accomplir son devoir de libération - libération de la terre, libération de l’homme et des prisonniers - et de recouvrer sa dignité par les armes, le sang et les sacrifices.

La Résistance, partie intégrante du peuple libanais, appartenant à différents partis politiques mais aussi à différentes communautés, tout comme les martyrs viennent de différentes communautés et de partis libanais qu’ils soient islamiques ou nationaux, s’est appuyée sur sa propre volonté, ses efforts et ses actions sur le terrain mais aussi sur le courage de ses jeunes hommes et femmes. Le monde arabe et musulman aurait dû lui apporter son aide, ça n’a pas été le cas. Et seule la Syrie et la République Islamique d’Iran, que je remercie, ainsi qu’une grande force humaine dans le monde arabe ont mené à la victoire de la Résistance, d’abord en 84-85, pour arriver à la victoire historique du 25 mai 2000 ; claire victoire pour le Liban et la Résistance, pour le monde arabe et toute la Oumma et grande défaite d’Israël et du projet de Grand Israël allant du Nil à l’Euphrate. Ce projet a été arrêté au Sud Liban et dans la Bekaa en plus d’un retrait humiliant des sionistes, repartis sans aucun gain politique ni récompenses ni même assurances. C’est là que la stratégie de libération adoptée par la Résistance a réussi.

La stratégie de la négociation depuis Madrid n’a rendu aucune seule parcelle de terre au Liban. En revanche, la stratégie de l’attente n’a fait que renforcer notre ennemi et affaiblir notre pays et ce n’est qu’en 2000 que la stratégie de la libération a porté ses fruits.

La Palestine :

En Palestine, suite à la Nakba de 1948, la Palestine tout comme les Palestiniens s’attendaient à ce que leurs frères arabes adoptent une stratégie arabe commune, mais en vain. Ils ont misé sur une implication de la communauté internationale, mais en vain. Cette affaire aurait tout simplement été oubliée sans le lancement de la lutte armée des fedayins Palestiniens qui dès la première balle tirée ont rappelé au monde entier et en particulier à ceux qui ont occupé la Palestine qu’il existe un peuple palestinien, une terre palestinienne, une cause palestinienne et une demande de justice pour laquelle on porte les armes, on se sacrifie et on paye le prix du sang. Le slogan palestinien - nous retournerons à Jérusalem - a ainsi été lancé et repris par des millions de gens.

Et aujourd’hui chers frères et s ?urs, nous pouvons dire que chacun des acquis a été possible grâce à la Résistance, la persévérance et la lutte armée du peuple palestinien et de toutes les fractions de la Résistance qui ont réussi même face aux changements d’équilibre dans le monde, et alors que la Bande de Gaza est encerclée et coupée du monde, à infliger une nouvelle défaite à l’armée sioniste après la défaite du Liban lors de leur retrait de la Bande de Gaza sans aucun gain politique et sans conditions préalables. Encore une fois c’est la stratégie de la libération par la Résistance qui l’a emporté. Et en contrepartie des petits bouts de terre rendus par les négociations, il été demandé de céder sur ce qu’il est impossible de sacrifier. L’expérience a bien montrée, du Liban à la Palestine, que en tant qu’arabes et en tant que musulmans, la seule issue que nous avons pour en finir avec la Nakba et ses conséquences psychologiques, politiques, armée, sécuritaires et sociales, c’est d’emprunter le chemin de la Résistance, dans sa culture et dans son action.

Sur l’Irak :

Passons maintenant à l’Irak et de façon très brève : il y a une occupation américaine de l’Irak et une domination sur le terrain et sur les choix. Durant ces dernières années, les américains ont joué le jeu de l’occupation et de la démocratie et voilà qu’aujourd’hui on voit clairement le but de la démocratie américaine en Irak Comment ? Après l’occupation américaine, le peuple irakien a été divisé comme tous les autres peuples dont j’ai parlé au début, en deux grandes catégories : ceux qui sont convaincus par le processus politique et ceux qui sont convaincus par la Résistance et notamment la Résistance armée. Il est évident pour nous Hezbollah de prendre position pour la Résistance en Irak et cela aussi bien d’un point de vue croyant, idéologique, politique que d’un point de vue réaliste au regard de notre expérience. Les partisans d’un processus politique ont pris tout leur temps et voila qu’est arrivé le moment de la dure épreuve, celle de l’attitude à avoir face aux conventions et accords que les Etats-Unis veulent imposer à l’Irak et au peuple irakien en demandant au gouvernement et au parlement de les ratifier.

C’est là que les objectifs réels des américains, sous le couvert de la démocratie, apparaissent clairement. Ils sont arrivés et on donné l’occasion à tous les islamistes, les nationalistes, les patriotiques, connaissant très bien qui est l’ami de qui et qui est allié avec qui, d’entrer dans le jeu démocratique. Ainsi il y aura un parlement élu qui formera par la suite un gouvernement lui aussi élu et le monde entier dira qu’il y a en Irak un parlement ainsi qu’un gouvernement élus. Et puis vient le jour où on demande à ce parlement et à ce gouvernement de légitimer l’occupation. On leur demande alors de signer un accord qui donne aux américains une souveraineté sur l’Irak et met entre leurs mains la sécurité, les décisions politiques et le pétrole.

Le jeu est clair désormais et c’est là la dure épreuve devant laquelle se trouvent les partisans du processus politique en Irak, qu’ils soient islamistes, chiites ou sunnites, nationalistes ou patriotiques. Vous dites que vous avez participé au processus politique afin de limiter les dégâts, et vous dites aussi que vous avez participé au processus politique dans le but de dissuader l’occupation. Mais vous voila aujourd’hui face à l’épreuve : allez-vous donner à jamais l’Irak aux américains ? Ou allez-vous adopter la position dictée par votre religion, votre islam, votre arabité, par votre nationalisme, vos valeurs et votre humanité ?

Appel aux Irakiens :

Au nom de tous les participants ici réunis, et au nom de tous les hommes libres du monde arabe et musulman, j’exhorte le peuple irakien - dans ses composantes religieuses et politiques- à adopter la position historique qui empêcherait l’Irak de tomber aux mains de l’occupant. Tout comme la Résistance, aussi bien au Liban qu’en Palestine, a réussi à infliger des défaites, la Résistance irakienne avec toutes ses composantes est elle aussi en mesure d’infliger une défaite après l’autre à l’armée américaine. L’Irak doit adopter la stratégie de libération comme au Liban et en Palestine. C’est la seule stratégie capable de rendre l’Irak à son peuple et à sa nation.

Chers frères et s ?urs et avant de clore sur la Résistance et de passer aux sujets internes au Liban, je tiens à vous dire que nous aussi nous avons présenté un modèle dans la stratégie de défense mais aussi dans la stratégie de libération - la guerre de juillet 2006 a été le modèle ! Comment cela a t-il été possible pour une Résistance populaire ? Comme l’a dit je juge Vinograd : comment a-t-il été possible à quelques milliers de personnes de tenir tête pendant des semaines à l’armée la plus puissante du Moyen-Orient ? Nous ne parlons donc pas d’une stratégie de défense écrite simplement dans les livres ou enseignée dans les universités ; nous parlons bien de stratégie de défense appliquée sur le terrain et qui a conduit à la défaite de l’envahisseur et agresseur, ce qui a été reconnu par sa propre société.

Cette guerre de juillet a changé beaucoup d’équations et a réduit les possibilités de recours à la guerre dans la région. Oui, cher frères et s ?urs, oui : votre Résistance au Liban, que ce soit au prix du sang des martyrs, que se soit par votre courage et votre persévérance, a infligé la défaite « d’Israël » dans sa guerre et ses agressions contre le Liban et a amoindri les risques de guerre dans la région. En ce qui concerne la guerre que les Etats-Unis voulaient déclencher contre l’Iran, elle est devenue moins probable après la leçon donnée au Liban. Et les probabilités d’une guerre israélienne contre la Syrie sont très très très faibles depuis l’expérience qu’ils ont eu au Liban. Et enfin en ce qui concerne l’éventualité d’une guerre israélienne ou américaine contre le Liban, nous leurs disons, nous les gens purs qui avons combattus lors de la guerre de juillet : nous combattrons n’importe quelle guerre à venir.

A la suite de la guerre de juillet 2006, la stratégie de Résistance s’est transposée à Gaza, et dans la bande de Gaza, Israël combat des guérillas qui de leur côté aussi le combatte. Ce n’est certainement pas par ordre moral qu’Israël n’envahit pas la bande de Gaza, ni par peur d’ailleurs d’une opinion publique arabe ou d’une quelconque position arabe ou internationale surtout qu’il dispose du feu vert donné par le « pharaon » de notre temps qu’est Georges Bush, mais bien parce qu’Israël ne peut négliger le courage des combattants - toutes fractions de la Résistance confondues- prêts à résister dans la bande de Gaza. Mais devant cette bande de Gaza encerclée, affamée, Israël se tient là incapable. Donc on peut conclure que cette stratégie de défense a réussi au Liban et à Gaza en dépit du déséquilibre existant au niveau de la force, des moyens économiques et financiers, des armes et du soutien international.

C’est bien pour cette raison, que lorsque le pharaon Georges Bush - qui va bientôt partir avec la volonté de Dieu- s’est rendu en Palestine, négligeant la Nakba de son peuple et apportant son soutien absolu à Israël, a saisi l’occasion pour déverser toute sa colère sur les mouvements de Résistance au Liban, en Palestine et en Irak et sur les pays qui appuient et soutiennent la Résistance. Il a promis au monde et aux israéliens que dans 60 ans Israël fêtera ses 120 ans. Bush sera déçu car cet Israël là va disparaître. Bush a également promis au monde entier la défaite du Hezbollah et de tous les mouvements de Résistance. Je dis à Bush et à Condoleeza Rice qui a parlé de la perte du Hezbollah : tant que le Hezbollah se basera sur la justice et sur l’aide de Dieu, et tant qu’il y aura à ses côtés ces gens si purs, vous serez toujours les perdants !

La stratégie de défense et de la libération :

En ce 8eme anniversaire de la libération, j’invite les peuples arabes à étudier une nouvelle stratégie de libération et de défense en tenant compte des rapports de force dans la région. Ici au Liban nous parlons souvent de la mise en place d’une stratégie de défense nationale, or nous, au Liban, nous avons besoin d’une stratégie pour la libération des fermes de Chebaa et de Kfarchouba. Quant aux prisonniers, nous nous en occupons et très prochainement Samir Kantar et ses camarades seront de retour parmi nous au Liban.

Le 25 mai 2000, la foule était rassemblée à Bint Jbeil, j’étais alors à son service et j’ai prononcé un discours au nom de tous et j’ai eu l’honneur d’annoncer sa victoire et ses sacrifices et la fierté qu’elle a d’avoir donné des martyrs et a offert sa victoire à tout le Liban et à toute la Palestine et à toute la Nation. Lorsque j’ai parlé à Bint Jbeil j’ai dit que nous n’avons fait que notre devoir et que seul Dieu nous en soit reconnaissant, nous ne demandons pas à en être remerciés, ni gratifiés. J’ai également dit que nous ne voulons pas le pouvoir. Cette terre qui a été libérée par le sang des résistants martyrs et de tous les résistants appartient à l’Etat libanais et au pouvoir libanais.

Que l’Etat libanais prenne alors ses responsabilités, sécuritaires, judiciaires, sociales et économiques ! Nous ne voulons être responsables ni de la sécurité ni de l’administration, n’avons-nous pas dit cela ? Avons-nous été à l’encontre de nos dires ? Pas du tout ! Nous n’avions jugé aucun collaborateur, ils ont tous été remis à la justice libanaise. Nous n’avions aucune présence armée sur tout le long de la frontière et nous avons invité l’Etat à y être présent !

Nous avons fait deux demandes à l’Etat : qu’une attention particulière de développement soit donnée aux régions du sud qui ont été la cible des affrontements, et aux régions qui ont combattu et donné des martyrs dans le sud, ce sont les régions déshéritées que nous avons spécifiquement désignées et qui sont Baalbeck, le Hermel, et l’Akkar, alors qu’avez-vous fait ? Cela fait déjà huit ans que nous demandons à l’Etat de les prendre en charge et d’y étendre son autorité. Qui vous a empêché d’aller à la frontière et dans les régions déshéritées afin d’y remplir vos obligations ? Ceci, les libanais le savent mais nos frères arabes ne le savent pas : certaines régions libanaises ne connaissent de l’Etat que sa police et son inspecteur des impôts et ne connaissent ni développement, ni services ni une quelconque assistance.

J’étais là et j’ai également dit que nous n’avons demandé aucun changement dans la structure politique du système en place, nous n’avons demandé aucun amendement aux accords de Taëf. Nous n’avons demandé ni une partie de l’autorité ni une part dans les administrations. Nous n’avons tout simplement rien demandé. A noter aussi que quand ils nous parlent de la Résistance française, la Résistance vietnamienne ou même la Résistance indienne, ils nous disent qu’après la libération les Résistances ont rendu leurs armes. Et moi de mon côté je leur dis que toutes les Résistances qui dans l’histoire ont gagné, ont suite à leur victoire, pris ou demandé le pouvoir. Nous en revanche nous n’avons pas demandé le pouvoir. Nous leur avons dis ; ce pouvoir est à vous mais soyez juste et occupez vous des gens, réglez leurs problèmes sociaux et économiques et préservez leur dignité ! Nous n’avons même pas demandé de participer au pouvoir après la victoire de 2000. Qui peut dire le contraire ?

Encore une fois, aujourd’hui je parle du Hezbollah et redis que nous n’avons jamais réclamé le pouvoir au Liban, nous ne voulons ni contrôler ni gouverner le Liban. Nous ne voulons pas imposer notre point de vue ni notre projet sur le peuple libanais car nous sommes convaincus que le Liban a ses particularités, c’est un pays pluraliste et varié et que ce pays ne vivra qu’avec la participation de tous. Certains, à travers leurs médias ont souvent essayé de défigurer cette réalité. Ils pensent qu’en disant que le Hezbollah fait partie de « Wilayat el Fakih » ils nous humilient ! Aujourd’hui et ce n’est pas la première fois d’ailleurs, j’annonce que je suis fier d’être affilié au parti de wilayat el fakih, le fakih juste, le fakih érudit et sage, le fakih courageux , sincère et honnête. Je leur dis également que wilayat el fakih nous dit que nous sommes son parti et que le Liban est un pays pluraliste et varié que nous devons préserver.

Les derniers événements :

Beaucoup de choses ont été dites durant ces derniers événements. On a même entendu dire que ces événements avaient pour but la domination du Liban. Ils ont même parlé de renversement, de changement de pouvoir allant même jusqu’à parler d’un retour de la Syrie au Liban.... Comme lors de la guerre de juillet 2006, les Etats-Unis disent que c’est au Liban que le Nouveau Moyen-Orient est en train de naître ; ils adoptent alors la guerre et disent que la Résistance combat pour le nucléaire iranien et contre le tribunal international. Mais la Résistance a réussi à prouver le contraire surtout lorsque le gouvernement illégitime est revenu sur ces deux décisions tout aussi illégitimes. Il a également été prouvé à travers les négociations conduites à Doha que la Résistance ne préparait pas un coup d’état ni cherchait à prendre le pouvoir.

Et pourtant, la Résistance n’a changé en rien les conditions qu’elle avait déjà posées avant la survenue de ces événements ! Selon leurs analyses des changements se sont opérés après les événements, mais nous, nous n’avons changé aucune de nos conditions et nous sommes allés à Doha car nous voulions sauver le Liban et le préserver d’événements qui seraient encore plus graves : des combats entre l’armée et la Résistance. Nous voulions sauver le Liban d’une guerre confessionnelle, et lui éviter un été chaud que lui avait promis le pharaon Georges Bush et ses alliés. Nous n’avons pas instrumentalisé ce qui s’est passé, et nous n’avons demandé aucun gain politique, alors qu’on n’a pas cessé de proférer à notre encontre des accusations injustes ... je ne souhaite pas ouvrir ici ce dossier en espérant que cette dernière expérience mettra fin à toutes ces accusations de la part de ceux qui continuent à dire que nous voulons le pouvoir et la domination.

Une réelle coopération :

Chers frères et s ?urs, à l’occasion de ce 8eme anniversaire et comme je l’ai déjà fait dans la banlieue sud et à Bint Jbeil, je réitère l’invitation à établir une réelle coopération nationale entre toutes les composantes de la société libanaise. Une coopération qui n’exclue pas l’autre ni ne l’élimine, une coopération où personne ne l’emporte sur l’autre et n’impose quoi que ce soit à l’autre. C’est l’occasion pour les Libanais de construire un état basé sur la justice, un état qui sera gouverné par les représentants du peuple, des représentants élus honnêtement, des représentants qui construiront des alliances solides et sincères. C’est l’occasion pour les Libanais de travailler ensemble sans se tourner vers l’extérieur.

Il y a quelques jours, le conseil ministériel saoudien a demandé que des amendements constitutionnels aient lieu au Liban afin de garantir que son identité arabe ne soit pas changée. Il est évident que nous n’avons même pas discuté de cela. Moi, membre de wilayet el-fakih, souligne que je suis favorable à des amendements constitutionnels garantissant l’identité arabe du Liban et empêchant toute ingérence dans les affaires du Liban. Ils (les Saoudiens) auraient mieux fait de parler des ingérences américaines et occidentales au Liban. Quant à nos amis (les Iraniens), tout le monde sait qu’ils ne nous imposent pas leur volonté. C’est l’opposition nationale libanaise qui est sur le terrain. Et lors des négociations de Doha, c’est nous qui avons pris les décisions.

Panser les blessures :

Chers frères et s ?urs, au regard des derniers événements, je me trouve aujourd’hui devant deux options. La première est celle de ré-expliquer et clarifier ce qui a amené le gouvernement à prendre les deux décisions, leur but et les dangers qu’elles entraînaient, et d’ailleurs lors de ma dernière conférence de presse j’ai donné quelques explications sur les enjeux et le but recherché, mais réouvrir ce sujet aujourd’hui risque de nous replonger dans des tensions sur la scène libanaise et moi je n’ai pas l’intention de gâcher la joie collective des Libanais en ce jour de célébration, en ce jour d’accord et d’unité qui a permis l’élection d’un nouveau président de la république du Liban.

La deuxième option est celle tout simplement de reporter cette discussion et supporter toutes les fausses accusations proférées à l’encontre de la Résistance afin de ne pas créer de division. Cependant, et au regard des derniers événements et de la situation qui prévaut aujourd’hui au Liban, je ne peux que dire qu’il y a réellement eu des blessures, de grandes blessures même, des blessures aussi bien de notre côté que du leur. Et là aussi encore une fois nous sommes face à deux choix : soit on remue le couteau dans la plaie, soit on panse les blessures, nous sommes pour le second choix, c’est-à-dire panser les blessures et ce choix doit être accompagné de paroles et d’actes et nous sommes prêt à ça.

Même s’il est important de tirer des leçons de cette expérience, je ne le ferais pas aujourd’hui au risque qu’elles ne soient comprises comme des paroles de victoire, ce n’est pas le cas ! Nous savons également que tirer les leçons peut à nouveau mener à certaines tensions, alors repoussons pour l’instant cette discussion, pansons cette blessure pour le moment. Nous la rouvrirons plus tard, lorsque les tensions et les esprits se seront apaisés. Concentrons nous maintenant à nous rassembler et pour entrer dans une nouvelle étape d’après mai 2008, d’après la grande fête nationale, arabe et internationale à laquelle nous avons assistés hier au parlement libanais.

Autour des changements :

Chers frères et s ?urs, face à ces changements nous devons préciser les points suivants :

Premièrement : je remercie en votre nom à tous ici présents nos frères arabes, ainsi que le comité ministériel arabe, la Ligue des Etats Arabes et son secrétaire général, comme je remercie tout particulièrement le Qatar, ses dirigeants et son peuple, et tous les états frères et amis et à leurs tête la Syrie et la République Islamique d’Iran et tous les amis du Liban qui nous ont aidé à arriver à cet accord.

Deuxièmement : en ce qui concerne la question des armes, j’insiste encore une fois ici et j’appuie la clause de l’accord de Doha qui stipule qu’il ne faut pas recourir aux armes de la Résistance pour réaliser des gains politiques. Le Hezbollah appuie cette clause et lorsque nous entamerons le dialogue nous en discuterons. Mais écoutez moi : d’un côté, les armes de la Résistance servent à combattre l’ennemi, libérer les terres et les prisonniers, et défendre le Liban et rien d’autre, elles ne servent pas à réaliser des gains politiques.

Mais à qui étaient les autres armes ? Pourquoi cet arsenal était-il ainsi rassemblé ? Quel était son objectif ? D’un autre côté, l’armement de l’Etat, à savoir l’armement des troupes régulières et des forces de sécurités, servent à défendre le pays, à protéger les citoyens, à défendre leurs droits et à protéger l’Etat. Il ne faut pas utiliser les armes de la Résistance pour obtenir des acquis politiques, mais dans le même temps, il ne faut pas utiliser les armes de l’Etat pour régler des comptes avec un groupe politique opposant ou pour le profit de parties étrangères, ce qui affaibli le Liban dans sa confrontation avec Israël. Il ne faut pas non plus utiliser les armes de l’Etat pour s’en prendre à la Résistance ou à son armement. Il faut que chaque arsenal, que se soit celui de l’Etat ou de la Résistance, demeure au service de l’objectif qui lui a été assigné et pour lequel cet armement existe.

Troisièmement :En ce qui concerne la loi électorale, l’accord auquel nous sommes parvenus permet sans aucun doute d’assurer une meilleure représentativité comparée aux précédentes lois. Même si elle est aux dépends de certains partis de l’opposition en particulier le Mouvement Amal et le Hezbollah, nous avons accepté cette loi car elle assure tout de même une meilleure représentativité tout en sachant que ce n’est pas la meilleure qui puisse exister. Cette loi est une loi consensuelle qui permet au Liban de sortir de sa crise. Nous espérons voir venir le jour où les Libanais se mettront autour d’une table et discuteront calmement d’une loi électorale moderne et civilisée qui permettra vraiment l’édification d’un Etat.

Tous ceux qui disent vouloir construire l’Etat changent d’intention lorsqu’il s’agit de la loi électorale, alors qu’au Liban, seule la loi électorale permettra la vraie construction d’un Etat et la restructuration du pouvoir et des institutions gouvernementales. Et celui qui voudrait façonner une loi électorale sur mesure de son parti, de sa personne, de sa confession, ne veut donc pas construire un Etat. Il ne suffit pas uniquement de dire que ce sont les autres qui ne veulent pas d’un Etat. Celui qui refuse de donner aux Libanais une loi électorale qui leur assure une juste représentativité dans les institutions gouvernementales n’aspire pas à l’édification d’un Etat mais à l’instauration de la pagaille. Pour l’instant c’est le consensus auquel nous sommes parvenus et nous espérons que dans le futur, les Libanais seront en mesure d’avoir une meilleure loi électorale.

Quatrièmement : l’élection à la présidence de la République du général Michel Sleiman a renouvelé l’espoir des libanais en une nouvelle ère et un nouveau départ. Son discours d’investiture prononcé la veille reflète bien un esprit consensuel, esprit avec lequel le nouveau président a promis d’agir dans les étapes à venir. C’est de cet esprit que le Liban a besoin, un esprit de consensus et de coopération, loin de tout monopole.

Cinquièmement : le gouvernement d’union nationale avec la participation de l’opposition, des loyalistes ne représente pas une victoire pour l’opposition sur les loyalistes, mais plutôt une victoire de tout le Liban, et du peuple libanais. C’est la victoire du vivre ensemble et du projet d’Etat car ce pays ne peut ni vivre, ni se développer, ni perdurer sans la coopération, le consensus et la diversité. Lorsque je me suis adressé à vous à l’époque où nous occupions les places des Martyrs et de Riad el Solh, je vous ai dit que nous étions là pour demander un gouvernement d’union nationale.

Je savais que cette question avait besoin de temps, et je vous avais promis une victoire et comme j’ai toujours tenu mes promesses, je vous promets encore une fois une victoire. Je ne parle pas de la victoire d’un groupe sur un autre, d’une fraction sur une autre ou de l’opposition sur le gouvernement, mais je croyais vraiment que la victoire du Liban passerait par la constitution d’un gouvernement d’union nationale. Et lorsque à Doha l’accord pour la formation d’un gouvernement d’union nationale a été conclu, il a représenté alors une victoire pour le Liban, tout comme ça a été le cas le 25 mai 2000. Ce n’était pas la victoire d’un groupe sur un autre, d’une confession sur une autre, ni d’un courant politique sur un autre, mais la victoire de tout le Liban comme en 2006, et maintenant avec l’accord de Doha.

En ce qui concerne le gouvernement, nous allons contribuer en toute sincérité à sa formation dans les plus brefs délais. Et comme je l’ai déjà dit, je souhaiterais que d’autres formations de l’opposition soient représentées pour que la représentativité ne se limite pas uniquement au Parti Amal, au Hezbollah et au bloc du « changement et de la réforme ». On peut donner la possibilité à d’autres forces de l’opposition d’être représentées en prenant sur la part du Hezbollah. Malheureusement la constitution du Liban est ainsi faite qu’on discute des parts de chacun. Nous allons faire de notre mieux pour que l’opposition soit représentée de la meilleure façon au sein du prochain gouvernement d’union nationale et nous espérons que ce gouvernement sera un gouvernement sérieux, capable de traiter les importants problèmes auxquels font face les Libanais et non pas par un gouvernement « pour faire passer le temps », ni un gouvernement dans l’attente des prochaines élections, mais un vrai gouvernement capable d’assumer pleinement ses responsabilités.

Sixièmement : puisque nous parlons du prochain gouvernement et de la prochaine étape, je lance un appel sincère au courant et aux partisans du martyr Rafic Hariri afin de profiter de l’importante expérience de ce grand homme et de profiter de sa pensée stratégique concernant le Liban. Il avait réussi à concilier le projet de reconstruction et d’édification de l’Etat, d’une part, et le projet de la Résistance, d’autre part. D’aucuns ont voulu placer le gouvernement et la Résistance devant l’alternative suivante : le Liban à l’image de Hong Kong ou le Liban de Hanoï. En clair, il fallait choisir entre un Liban détruit ou un Liban perle de l’Orient mais dont la terre est occupée, la souveraineté aliénée et la dignité bafouée par les Israéliens.

La Résistance a pu, avec la pensée de Rafic Hariri, ne pas avoir à choisir entre Hong Kong et Hanoï. C’est à nous Libanais de fournir un modèle au monde et non pas a en suivre un. Nous pouvons présenter au monde un modèle de pays basé sur la construction, l’essor économique, l’Etat, les entreprises, les secteurs productifs, aux côtés d’une Résistance qui ne remplit pas le rôle de l’Etat, qui ne soit pas en concurrence avec le pouvoir en place, mais qui, aux côtés de l’Etat, assume la responsabilité de la libération de la terre et de la défense du pays. Telle est la formule que nous avons vécue en tant que Résistance avec le président martyr Rafic Hariri. Celui qui est fidèle à l’héritage de ce grand martyr doit ?uvrer à relancer cette formule. Il ne s’agit pas là d’un appel en faveur d’une alliance bilatérale, trilatérale ou quadripartite, cela relève du passé. Nous appelons à une coopération entre tous, à la plus large participation possible de manière à éviter tout monopole d’une communauté ou d’un pouvoir ou d’une institution.

Un été prometteur :

Chers frères et s ?urs, en ce qui concerne l’avant dernier point, j’espère et je demande à Dieu que les Libanais passent un été calme et prometteur. Coopérons ensemble. Nous sommes face à deux rêves : le rêve libanais et le rêve américain. Le rêve libanais espère un été calme et paisible alors que le rêve américain parle d’un été bien chaud ! Unissons-nous afin de réaliser nos rêves et non pas les rêves de nos ennemis. Je vous promets et promets à tous les Libanais et à nos amis dans les mondes arabes et musulmans de déployer tous les efforts nécessaires pour dépasser les haines et les blessures, pour s’unir dans le but de construire et de préserver le Liban.

Remerciement :

Je remercie - sans citer de nom car il y en beaucoup à citer qui au Liban et à l’extérieur doivent être remerciés et comme la liste est longue je me contenterais de dire : je remercie- les dirigeants sunnites au Liban et dans le monde arabo-musulman, ainsi que les directions religieuses et politiques qui par leurs positions courageuses ont arrêté le projet américain qui tente en permanence de transformer n’importe quel conflit politique dans la région en conflit sectaire.

Je remercie également les dirigeants nationaux druzes pour leurs positions patriotiques et courageuses, qu’ils soient des hommes de religion, ou dirigeants politiques, ou militants de partis politiques, d’avoir empêché et montré que ce qui s’est passé n’était pas un conflit sectaire entre chiites et druzes. Comme je remercie également les dirigeants chrétiens au Liban pour leurs positions claires qui ont prouvé que le conflit est un conflit politique loin de tout confessionnalisme.

Lors de ces derniers événements nous avons perdu 14 martyrs. Nous sommes fiers de nos martyrs. D’autres martyrs aussi sont tombés, du mouvement Amal, du PSNS, du parti démocrate et les martyrs de l’opposition étaient aussi bien musulmans que chrétien, chiites, sunnites ou druzes. Et je tiens à dire à ceux qui ont perdu des êtres chers lors de ces derniers événements, que le sang de leurs bien-aimés a sorti le Liban d’un long tunnel obscur. Et ce sont les sacrifices et le sang qui a coulé qui nous ont permis aujourd’hui d’affronter une nouvelle étape et une nouvelle vie au Liban.

Chers frères et s ?urs, au nom de Beyrouth notre chère capitale, au nom de nos montagnes dans le nord, la Bekaa et le sud de la Résistance, au nom de toutes les villes et villages du Liban, au nom de tous les partis, groupes et confessions au Liban, je vous adresse à l’occasion de la fête de la Résistance et de la libération tout notre respect et notre amitié, et vous tends la main pour construire ensemble un Liban fort, fier et juste, capable de résister. Que la Paix et les Bénédictions de Dieu soient sur vous.

26 mai 2008 - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.protection-palestine.org...
Traduction : R. pour CCIPPP


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