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La coexistence, pas l’Apartheid !

jeudi 29 mai 2008 - 05h:22

Ramzy Baroud

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Pendant les 60 dernières années, tous ceux qui ont recherché une solution véritablement pacifique et équitable entre Israël et la Palestine ont fait face au même obstacle : le sentiment israélien de son invincibilité et son arrogance militaire, encouragés par les Etats-Unis et l’appui constant manifesté de la part des gouvernements occidentaux.

En dépit des revers récents sur le front militaire, le gouvernement israélien doit encore se faire à la réalité qu’Israël n’est tout simplement pas invincible. La roue de l’histoire qui a vu la montée et la chute de beaucoup de grandes puissances, ne s’arrêtera pas.

Les expériences passées ont aussi à plusieurs reprises prouvé que ni ses armes nucléaires ni les milliards de dollars de Washington versés chaque année ne pourront accorder la « sécurité » à Israël.

Israël peut célébrer la version falsifiée de l’histoire qu’il voudra, il n’a toujours pas réussi à défaire un peuple armé de sa seule volonté de survivre et de recouvrir ce qui légitimement lui appartient.

Le même problème s’est posé aux Etats-Unis au Vietnam, à la France en Algérie et à l’Italie en Libye.

Le peuple de Palestine ne s’évaporera pas. Les tentatives de saboter l’unité palestinienne, l’incitation à la violence civile et la volonté de présenter des personnes malintentionnées comme les « représentants » des Palestiniens ont échoué dans le passé et continueront à échouer à l’avenir.

La représentation, et le traitement de ce fait, du conflit comme s’il avait été inventé et maintenu par l’avarice des Arabes et le terrorisme des Palestiniens a aidé Israël à récolter de la sympathie, alors qu’il a développé simultanément ce qui devrait être vu comme un exemple extrême d’injustice dont la source est dans le colonialisme et le nettoyage ethnique.

Pire encore, dépeindre la seule existence des Palestiniens comme « une menace », « un problème » et « une bombe démographique » est inhumain et réellement une véritable forme de racisme. Tout au long de ces 60 dernières années, les gouvernements israéliens successifs ont traité les Palestiniens — c’est-à-dire les habitants d’origine de la Palestine historique — comme des habitants indésirables et donc négligeables d’une terre qui aurait été promise uniquement aux juifs par une quelconque puissance divine il y a des milliers d’années.

Un concept si archaïque est parvenu à définir la politique dominante en Israël et de plus en plus aux Etats-Unis, permettant à des doctrines religieuses de pratiquer la discrimination et de réprimer brutalement les Palestiniens, qu’ils soient citoyens israéliens ou résidents des Territoires Occupés.

Inutile de dire que ni un mur en fer, comme celui proposé par Vladimir Jabotinsky en 1923, ni une réelle structure massive et menaçante comme celle érigée en Cisjordanie ne peuvent vraiment séparer Israël de son « problème », les Palestiniens. Une zone ayant en gros la taille de l’état américain du Vermont ne peut pas vivre longtemps sur un modèle aussi complexe — un pays ouvert sans réserve aux juifs qui souhaitent immigrer, et une population opprimée qui est mise en cage entre des murs, des barrières, et des centaines de points de contrôle — sans générer un conflit perpétuel.

Ce que Israël a créé en Palestine détruit son affirmation que son souhait final est la paix tout en ayant la sécurité. Alors que Jérusalem est occupée et entièrement annexée par un diktat du gouvernement israélien, 40% de toute de la Cisjordanie est utilisée exclusivement pour le compte des colons juifs et des militaires israéliens. Comment oser prétendre qu’Israël veut vivre en paix et être pris au sérieux s’il continue à envahir les habitations, à confisquer les terres et à voler l’eau des Palestiniens ?

Après qu’Israël ait envahi Jérusalem-est, la Cisjordanie et Gaza en 1967, les citoyens juifs d’Israël ont célébré le « retour » de la Judée et de la Samaria bibliques et la réunification de Jérusalem. Presque 300 000 Palestiniens supplémentaires ont été éthniquement nettoyés, s’ajoutant à tous ceux qui avaient été expulsés de la Palestine historique en 1948.

Et pourtant la plupart des Palestiniens restent prisonniers des limbes inventés par les Israéliens où ils ne sont ni citoyens d’Israël, ni citoyens de leur propre Etat, et ne méritent pas d’être protégés, comme doit l’être une population civile vivant sous occupation, d’après la convention de Genève.

En dépit de tout cela, l’insistance israélienne à se servir de « solutions » militaires dans ses rapports avec les Palestiniens a à chaque fois fait long . Les Palestiniens se sont naturellement rebellés et ont été à plusieurs reprises massacrés, ce qui n’a fait qu’aggraver l’inimitié et augmenter le niveau de la violence.

L’acceptation par l’OLP [Organisation de Libération de la Palestine] de l’existence d’Israël et de la résolution 242 de l’ONU préconisant une solution à deux états a été ridiculisée et rejetée dans un premier temps par le gouvernement israélien qui a continué à appliquer ses propres solutions inefficaces et destructrices.

Tout au long des années, Israël a exploité sa force militaire pour construire plus de colonies et installer sa population dans les Territoires Palestiniens Occupés. Même après la signature des Accords d’Oslo en septembre 1993, la construction des colonies n’a pas ralenti mais s’est au contraire accélérée.

Après les derniers entretiens pour la paix à Annapolis en novembre 2007, Israël a continué à accorder des permis de construire afin d’ériger encore plus de maisons dans les colonies illégales sous prétexte « de croissance normale. »

Mais tout ceci est peut-être allé trop loin, ne laissant à présent aux Palestiniens que peu d’options.

Lors d’une entrevue datée du 29 novembre 2007 avec le quotidien israélien Ha’aretz, le premier ministre Ehud Olmert a averti que sans un accord sur deux Etats, Israël ferait face « à un conflit de type sud-africain pour l’obtention du droit de vote pour tous » et que dans ce cas « ce pourrait être la fin d’Israël ». Il est ironique de constater que les dirigeants israéliens préconisent maintenant la solution qu’ils avaient énergiquement rejetée dans le passé. Mais la version israélienne d’un accord pour deux Etats répond difficilement aux espérances mêmes minimalistes des Palestiniens.

Sans Jérusalem, sans le droit au retour pour les réfugiés comme cela est garanti dans la résolution 194 de l’ONU et avec la Cisjordanie morcellée par plus de 216 colonies et mutilée par un mur gigantesque, demander aux Palestiniens d’accepter la version israélienne de la solution à deux Etats équivaut à leur demander d’accepter un éternel emprisonnement, leur assujettissement et leur défaite, ce qu’ils ont rejeté génération après génération.

Si Israël est intéressé à trouver une solution pacifique à ce conflit sanglant, et une solution qui soit basée sur des droits identiques sur le plan humain et légal en étant s’appuyant sur la justice, la sécurité et une paix durable, alors il lui ajouter un nouveau mot à son lexique : la coexistence. Les Juifs et les Arabes ont su coexister paisiblement avant l’arrivée du sionisme, et ils sont capables de le refaire à l’avenir. N’importe quelle autre solution institutionaliserait tout simplement le racisme et la ségrégation, minerait la démocratie et les droits de l’homme et perpétuerait ainsi la violence.

Il est temps pour que la question d’un état laïc et démocratique ne soit plus une discussion académique suspendue en l’air, mais soit intégrée dans le débat de fond, si ce n’est dans les dialogues en Palestine et en Israël. C’est la juste, morale et pressante conduite à tenir aujourd’hui.

(*) Ramzy Baroud est l’auteur de « The Second palestinian Intifada : A Chronicle of a People’s Struggle » et rédacteur en chef de « PalestineChronicle.com »

Site Internet :
www.ramzybaroud.net

Du même auteur :

- Le paradis est sans checkpoints
- La chimère américaine ’Palestine-Israël’
- "Les combats dans Bassora : à peine la moitié de ce qui s’est passé"
- "Où sont les Irakiens dans la guerre en Irak ?"

24 mai 2008 - Communiqué par l’auteur - Vous pouvez consulter cet article à :
http://ramzybaroud.net/articles.php...
Traduction : Claude Zurbach


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