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Siège de Gaza : témoignage (8) - La compagnie de taxi Al Gherbawi

jeudi 15 mai 2008 - 06h:53

PCHR Gaza

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Lundi matin dans la ville de Gaza : les rues sont ensoleillées et tranquilles. Un petit nombre de voitures roulent à travers la ville mais la majorité des hommes et des femmes se rendent au travail à pieds.

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Abu Khalil (à gauche et Sa’ed Mohammed Al Gherbawi. Leur compagnie existe depuis 40 ans, mais ne peut plus fonctionner aujourd’hui qu’avec 3 taxis

Les piétons passent devant les voitures garées en double, voir triple file devant des trottoirs cassés et on n’aperçoit que très peu des fameux taxis jaunes de Gaza.

Sa’ed Mohammed Al Gherbawi dirige les taxis Al Gherbawi. Il est déjà derrière son bureau dans le bureau central du centre de la ville. « Ma famille dirige depuis 40 ans les taxis de gaza et je travaille ici depuis 1983 » raconte-t-il. « Notre affaire se portait bien avec 15 voitures et 20 chauffeurs. Mais nous ne pouvons pas travailler sans ssence. Quand les livraisons d’essence ont été coupées en février, nous avons commencé à dépendre du diesel. Mais les livraisons de diesel ont également été coupées mi-avril et maintenant nous ne pouvons plus nous permettre que de garder suffisamment de diesel que pour faire rouler une seule voiture à plein temps. Nous réussissons a faire rouler deux autres voitures avec du gaz domestique. C’est tout ce que nous avons aujourd’hui : trois voitures sur 15 qui roulent encore.

Le déficit en combustibles n’est pas nouveau à Gaza. Israël restreint délibérément depuis octobre 2007 les livraisons de combustibles à toute la Bande de Gaza. Mais ces dernières restrictions sont sans précédent. Cette année, pendant le mois d’avril, Israel a arrêté toutes les livraisons à Gaza pendant 25 jours et n’a permis que de petites livraisons dérisoires pendant les 5 jours restants. En tout, 152.000 litres de benzine sont entrés dans Gaza en avril soit moins de 5% des besoins journaliers et 33.280 litres d’essence ce qui représente 9.5% des besoins journaliers.

Les prix par la suite sont montés en flèche. Le diesel est passé de 100 shekels ($25) pour 20 litres à 350 shekels (près de $100) ces huit dernières semaines tandis que le fuel qu’utilisent la majorité des voitures, est maintenant introuvable. Les prix des combustibles au marché noir sont encore plus élevés. Les stations d’essence ont fermé dans toute la bande de Gaza et près de 90% des voitures ne roulent plus ce qui accable les squelettiques services de transport publiques et oblige les écoles et les universités à suspendre les cours car les élèves et les professeurs n’arrivent plus à rejoindre leurs classes. Dans toute la Bande de Gaza les ordures puantes en putréfaction s’amoncèlent dans les rues car toutes les municipalités de Gaza ont dû suspendre les services de ramassage d’ordures par manque de fuel.

Les Droits Humains et la loi humanitaire internationaux interdisent la punition collective d’une population civile mais les habitants de Gaza sont obligés de se rendre à leur travail, écoles, hôpitaux et tout autre endroit en marchant. Les malades et les blessés y compris ceux qui nécessitent un traitement qui pourrait leur sauver la vie, risquent de se trouver abandonnés sans ambulances car celles-ci ont été obligées de restreindre leurs services. En cas d’urgence, certains malades sont parfois obligés d’utiliser des charrettes trainées par des ânes ou des mulets afin d’atteindre l’hôpital.

Il y a deux semaines, l’UNRWA qui distribue une aide alimentaire et médicale dans toute la Bande de Gaza, a été obligée de suspendre temporairement les distributions de nourriture suite au manque de fuel. L’UNRWA dit « avoir été à deux doigts du précipice » suite aux coupures délibérées de fuel et qu’elle n’a maintenant juste assez de combustible pour opérer pendant les 20 jours suivants.

Après près avoir vécu près de deux années sous le siège, les habitants de Gaza sont devenus créatifs avec les ressources en leur possession. Les chauffeurs qui ont besoin de fuel ont converti leurs voitures et roulent avec du gaz domestique et les chauffeurs de diesel ont même recouru à convertir leurs véhicules pour qu’ils puissent rouler sur de l’huile de cuisson. Mais ces conversions sont souvent primitives et dangereuses étant donné que les véhicules n’ont pas été fabriqués à l’origine pour rouler au gaz ou à l’huile de cuisson. Le gaz domestique est très volatile et les vapeurs provenant de l’huile de cuisson sont rances et peuvent provoquer des nausées sévères et, selon certains médecins, peuvent également être potentiellement cancérigènes.

Dans les bureaux des taxis Gherbawi, Sa’ed est au téléphone et s’excuse auprès d’un client pour le manque de taxis. Un des chauffeurs, Abu Khalil (50 ans) a travaillé avec Gherbawi pendant près de 25 ans. « Quand les affaires vont bien, je gagne environ 1.100 shekels ($275) par mois » dit Abu Khalil. « Mais cela fait 5 jours que je n’ai pas du tout travaillé. Je suis resté à la maison et dormi car il n’y a rien d’autre à faire. Maintenant je marche jusqu’au bureau en espérant du travail puis je retourne à nouveau chez moi à pieds ».

Sa’ed Al Gherbawi dit qu’il est obligé aujourd’hui de refuser 90% des demandes de taxis. « Nous devons demander aux gens où ils veulent aller avant d’accepter de les prendre. Et maintenant nous recevons encore plus de demandes que jamais car beaucoup de propriétaires de voitures n’ont plus de combustible et qu’ils ont eux aussi besoin de taxis ! » Mais il continue à espérer avec défi que son affaire survivra jusqu’au moment où le fuel arrivera à nouveau.

« Ma famille a dirigé cette firme pendant 40 ans et ce qui est important c’est que nous avons beaucoup de clients de longue date qui veulent que nous restions ouverts et aussi de bons chauffeurs » raconte-t-il. « Nous nous débrouillons pour le moment avec le diesel et le gaz domestique et ce, malgré le fait que je suis obligé d’utiliser le gaz domestique de ma propre maison ».

Lisez les autres témoignages :

- Informations PCHR Gaza
- Rapports PCHR Gaza

6 mai 2008 - Palestinian Centre for Human Rights [PCHR] - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.pchrgaza.org/files/campa...
Traduction de l’anglais : Ana Cléja


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